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19/06/2003 | FRANCE | N°97LY00779

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4eme chambre, 19 juin 2003, 97LY00779


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er avril 1997, présentée pour M. René X, demeurant ..., par Me Bern, avocat au barreau de Chambéry ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 931415 en date du 29 janvier 1997 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui payer une indemnité de 376 000 francs ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer, outre intérêts au taux légal capitalisés, une indemnité de 312 600 francs ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une so

mme de 6 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs e...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er avril 1997, présentée pour M. René X, demeurant ..., par Me Bern, avocat au barreau de Chambéry ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 931415 en date du 29 janvier 1997 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui payer une indemnité de 376 000 francs ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer, outre intérêts au taux légal capitalisés, une indemnité de 312 600 francs ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 6 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appels ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

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Classement CNIJ : 60-02

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Vu le décret n° 65-1177 du 31 décembre 1965 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2003 :

- le rapport de M. FONTBONNE, président ;

- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 7 novembre 1990 le directeur des services vétérinaires de la Savoie a décidé que la totalité du troupeau de bovins de M. X devait être abattu en raison d'une infection brucellique latente ; que M. X demande que l'Etat soit condamné à lui payer une indemnité de 312 600 francs en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi ;

Considérant que M. X ne conteste pas la légalité de la décision du directeur des services vétérinaires qui, à raison du degré d'infection de l'exploitation, a prescrit l'abattage total du cheptel mais le refus d'accès au régime légal d'indemnisation qui lui a été opposé au motif qu'il n'aurait pas observé toutes les mesures de prophylaxie ;

Considérant qu'aux termes de l'article 214 du code rural : Suivant les modalités prévues par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances, le ministre chargé de l'agriculture peut prendre toutes mesures destinées à prévenir l'apparition, à enrayer le développement et à poursuivre l'extinction des maladies des animaux réputées contagieuses, en vertu du présent titre. Des décrets en Conseil d'Etat définiront les modalités selon lesquelles pourront être prises les mesures de lutte contre les maladies des animaux non ainsi réputées contagieuses. (...) Le ministre chargé de l'agriculture peut accorder aux exploitants qui en font la demande, en vue (...) de l'élimination des animaux malades, (...) des subventions dont le montant est déterminé par des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances. Ces arrêtés fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'Administration ainsi que les conditions de la participation financière éventuelle de l'Etat aux autres frais obligatoirement entraînés par l'élimination des animaux. ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 31 décembre 1965 : Les opérations de prophylaxie de la brucellose bovine, ovine et caprine comportent tout ou partie des mesures suivantes, dont les conditions d'exécution sont déterminées par arrêté du ministre de l'agriculture : (...) Recherche des animaux atteints de brucellose. Isolement et, le cas échéant, marquage des animaux atteints de brucellose, (...) Elimination et abattage des animaux marqués... ; qu'aux termes de l'article 12 du même décret : Art. 12 - Un arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre des finances et des affaires économiques détermine : Les conditions d'attribution d'indemnités pour abattage des animaux atteints de brucellose en application de l'article 7 ci-dessus. ;

Considérant que les conditions d'attribution d'indemnités pour l'abattage des animaux reconnus atteints de brucellose ont d'abord été fixées par les articles 12 et 13 de l'arrêté interministériel du 13 janvier 1967 puis à compter du 1er juillet 1990 par les articles 12 et 14 de l'arrêté du 6 juillet 1990 pris par le ministre de l'agriculture et de la forêt et le ministre délégué chargé du budget ; que ces arrêtés renvoient respectivement aux arrêtés ministériels des 3 juillet 1966 et 20 mars 1990 ayant successivement défini les mesures techniques et administratives relatives à la police sanitaire et à la prophylaxie collective de la brucellose bovine ;

Considérant que l'article 14 de l'arrêté du 6 juillet 1990, reprend les conditions précédemment énoncées par l'article 13 de l'arrêté du 13 janvier 1967 ; qu'aux termes de cet article : Les indemnités prévues aux articles 12 et 13 ci-dessus ne sont pas attribuées dans les cas suivants : 1° Mort d'un animal, quelle qu'en soit la cause ; 2° Animal introduit dans un cheptel en infraction avec les conditions fixées par les arrêtés du 16 mars 1990 et du 20 mars 1990 précités ; 3° Animaux éliminés à la suite de l'introduction de bovins dans un cheptel en infraction avec les conditions fixées par les arrêtés du 16 mars 1990 et du 20 mars 1990 précités ; 4° Animal marqué du T ou du O et éliminé hors des délais fixés par les arrêtés des 16 mars 1990 et 20 mars 1990 précités ; 5° Animal vendu selon le mode dit sans garantie ou vendu à un prix jugé abusivement bas par le directeur des services vétérinaires ; 6° Toutes circonstances faisant apparaître une intention abusive de l'éleveur afin de détourner la réglementation de son objet. ; qu'il résulte de ces dispositions que l'irrégularité de la situation d'un animal ne retire le droit à indemnisation que pour cet animal et non pour le surplus du troupeau ;

Considérant qu'alors que la décision du directeur des services vétérinaires prévoyait que les animaux positifs devaient être éliminés au plus tard le 31 décembre 1990, M. X ne conteste pas que 12 bovins infectés ont été abattus après cette date ; qu'il ne conteste pas sérieusement que 47 bovins au moins ont été irrégulièrement introduits dans son cheptel après la constatation de l'existence du foyer d'infection ; que si ces manquements privaient M. X du droit à indemnisation pour ces animaux, ils ne faisaient pas obstacle à ce que l'intéressé soit indemnisé pour l'abattage du reste de son cheptel ; que M. X est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté l'intégralité de sa demande ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'en admettant même que la lettre adressée à M. X le 29 juin 1992 par le directeur des services vétérinaires puisse être regardée comme le rejet d'une demande préalable d'indemnité, cette décision ne comportant pas l'indication des voies et délais de recours n'a pu faire courir à son encontre le délai de recours contentieux ; que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande devant le tribunal administratif opposée par le préfet doit être écartée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le foyer d'infection préexistait aux introductions irrégulières effectuées par M. X ; que par suite, alors même que 24 des 47 bovins introduits irrégulièrement dans le cheptel ont été reconnus positifs, l'administration ne peut soutenir que les introductions seraient à l'origine du foyer d'infection ; qu'ainsi aucune faute de la victime n'est de nature à atténuer son droit à indemnisation pour l'abattage de son cheptel, à l'exclusion des animaux introduits irrégulièrement et ceux éliminés après les délais prescrits ;

Considérant que l'interdiction faite aux éleveurs de faire procéder à des analyses par des laboratoires non agréés a pour but d'éviter qu'ils dissimulent la maladie en faisant abattre des animaux infectés ; que par suite la circonstance que M. X ait, après que des prélèvements aient été effectués par les services vétérinaires, pris l'initiative à titre de contre-expertise de faire analyser par un laboratoire non agréé de nouveaux prélèvements sur les mêmes animaux, ne représente pas une circonstance faisant apparaître une intention abusive de l'éleveur afin de détourner la réglementation de son objet ;

Considérant que M. X indique qu'il accepte de se référer au mode de calcul développé dans un mémoire présenté devant le tribunal administratif par le préfet de la Savoie qui, en faisant application des données du barème forfaitaire fixé par l'article 12 de l'arrêté du 16 juillet 1990 détermine à raison de 175 animaux abattus, un droit à indemnisation de 312 600 francs ; qu'après déduction des animaux n'ouvrant pas droit à indemnisation, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par M. X en condamnant l'Etat à lui payer une indemnité de 35 000 euros outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 1993, lesdits intérêts étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à compter du 18 décembre 1996 et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 900 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE

ARTICLE 1er : Le jugement du Tribunal Administratif de Grenoble du 29 janvier 1997 est annulé.

ARTICLE 2 : L'Etat est condamné à payer à M. X une indemnisation de trente cinq mille euros (35 000), outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 1993, lesdits intérêts étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts le 18 décembre 1996 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

ARTICLE 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X une somme de 900 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

N° 97LY00779 - 2 -

N° 97LY00779 - 5 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 97LY00779
Date de la décision : 19/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOUGUELET
Rapporteur ?: M. FONTBONNE
Rapporteur public ?: M. BOURRACHOT
Avocat(s) : SCP DENARIE BUTTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2003-06-19;97ly00779 ?
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