Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 1993 au greffe de la cour, présentée pour la société "Pamobir", dont le siège est ...,par Me Y..., avocat ;
La société "Pamobir" demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 16 juillet 1993 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie en son nom personnel au titre des années 1979 et 1980 et pour le compte de la société civile immobilière Sounjarello au titre des années 1981 et 1982 ;
2°) de lui accorder la décharge de l'imposition contestée ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 1995 :
- le rapport de M. CHANEL, conseiller ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.200-4 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur, applicable à la notification des décisions prises par l'administration sur les réclamations des contribuables en vertu de l'article R.198-10 du même livre : "Les notifications sont valablement faites au domicile réel du contribuable alors même que celui-ci aurait constitué mandataire et élu domicile chez ce dernier. Si le contribuable est domicilié hors de Francs, la notification est faite au domicile élu en France par lui" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société "Pamobir", dont le siège social est situé en Suisse, a présenté une réclamation par l'intermédiaire d'un avocat du barreau de Paris ; qu'il résulte de l'article R.200-4 précité que la notification du rejet de sa réclamation devait être faite au mandataire chez lequel la société "Pamobir" avait implicitement mais nécessairement élu domicile ; que, par suite, la notification effectuée au siège social de la société "Pamobir" n'a pu faire courir le délai de recours contentieux ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté comme tardive la demande de la société "Pamobir" ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché de contradiction, la société requérante est fondée à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société "Pamobir" devant le tribunal administratif de Nice ;
Considérant que les redressements litigieux correspondent, pour les années 1979 et 1980, aux droits de la société requérante dans les résultats de la société civile immobilière Sounjarello, et pour les années 1981 et 1982 à l'impôt sur les sociétés dû par la société civile aux droits de laquelle se trouve la société "Pamobir" après la dissolution, prononcée le 25 mai 1982, de la société Sounjarello, à raison de redressements, à l'issue d'une vérification de comptabilité de cette dernière, résultant de la réintégration du revenu correspondant à la mise à la disposition d'un tiers, M. X..., gratuitement, de deux villas appartenant à la société civile ; que les rehaussements ont été effectués selon les modalités de détermination des revenus fonciers, pour l'année 1979, et selon les règles applicables en matière d'impôt sur les sociétés, pour l'année 1980, sur le fondement de l'article 238 bis K du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable, ainsi que pour les années 1981 et 1982, par application de l'article 206-3 du même code, à la suite de l'option de la société civile immobilière Sounjarello pour l'impôt sur les sociétés ;
En ce qui concerne l'année 1979 :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 II du code général des impôts : "Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu" ;
Considérant qu'en l'absence de bail, la mise à la disposition d'un tiers et à titre précaire et gratuit, de logements, à la supposer établie, ne permet pas d'admettre que le propriétaire a renoncé à se réserver la jouissance de l'immeuble ; qu'il s'ensuit que le revenu dont ce dernier s'est privé en n'exigeant pas de loyer pour cet avantage ne peut être soumis à l'impôt sur le revenu ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens de la requête de la société "Pamobir", cette dernière est fondée à demander la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, au titre de cette année, à raison de ses droits dans les résultats de la société civile immobilière Sounjarello ;
En ce qui concerne les années 1980, 1981 et 1982 :
Considérant que si la mise à la disposition d'un logement, sans exiger du bénéficiaire la rémunération d'un tel avantage, est susceptible de constituer un acte anormal de gestion à raison du loyer dont la société s'est privée, il appartient toutefois à l'administration d'établir les faits démontrant l'anormalité d'un tel acte et notamment que le contribuable a agi dans un intérêt commercial étranger à son entreprise ;
Considérant que le ministre du budget fait valoir que la peinture des pièces et des façades des deux villas était achevée, que les factures de fuel, de téléphone et d'électricité qui étaient d'un montant assez élevé étaient réglées par M. X... et que le personnel domestique mis à la disposition de la société civile immobilière Sounjarello avait été employé antérieurement par M. X... ; que, toutefois, la société requérante se prévaut de la qualité de maître d'oeuvre de ce dernier et produit une convention de maîtrise d'oeuvre des deux villas, enregistrée en 1977 et conclue avec la "Impresa Gaetano X..." ainsi qu'un constat d'huissier, en date du 28 octobre 1993, faisant apparaître que l'une des villas n'était pas habitable ; que, dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve que M. X... aurait eu au cours des années litigieuses la disposition des deux villas dont s'agit ; que, par suite, la société "Pamobir" est fondée à demander la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, en son nom au titre de l'année 1980, et pour le compte de la société civile immobilière Sounjarello au titre des années 1981 et 1982 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 16 juillet 1993 est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la société "Pamobir" décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie en son nom ou pour le compte de la société civile immobilière Sounjarello au titre des années 1979 à 1982.