Vu, enregistrée au greffe de la cour le 5 février 1993, la requête présentée pour Mme Liliane X... demeurant ..., par Me ITEY, avocat au barreau de Marseille ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 5 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à obtenir la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1981 à 1984 ;
2°) de prononcer la réduction des impositions litigieuses ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 1994 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ;
- les observations de Me ITEY, avocat de Mme X... ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requérante demande la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1981 à 1984 par voie de taxation d'office à la suite de la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales applicable à la présente espèce : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration ... peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ... Les demandes adressées aux contribuables doivent indiquer explicitement les points sur lesquelles elles portent et fixer à l'intéressé, pour fournir sa réponse, un délai qui ne peut être inférieur au délai de trente jours prévu à l'article L.113 ; qu'aux termes de l'article L.69 du même livre : "Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu des contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L.16." ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige l'administration à poursuivre un débat oral avec le contribuable faisant l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ; que, par suite, à le supposer établi, la requérante ne peut utilement faire valoir le fait qu'elle n'aurait pas été mise à même d'avoir des entretiens avec le vérificateur ; qu'en l'absence également de dispositions législative ou réglementaire en ce sens, elle ne peut davantage faire valoir que l'envoi des demandes d'éclaircissements et de justifications n'a pas été précédé de l'envoi de simples demandes d'information ;
En ce qui concerne les années 1981, 1983 et 1984 :
Considérant qu'à la suite de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble à laquelle il avait procédé le vérificateur a constaté que les sommes portées au crédit des comptes bancaires de la requérante et de ses enfants fiscalement à charge, étaient pour chacune des années vérifiées au moins quatre fois supérieures aux revenus qu'elle avait déclarés ; que le vérificateur était donc en droit de présumer l'existence de revenus autres que ceux déclarés et d'adresser à la requérante une demande d'éclaircissements et de justifications ;
Considérant que si le vérificateur a établi pour chacune des années vérifiées des balances de trésorerie retraçant les mouvements d'espèces, les redressements ont été établis, non sur les soldes créditeurs desdites balances mais sur les crédits bancaires dont l'administration a estimé que la requérante n'avait pas justifié l'origine ; que la requérante ne peut en conséquence utilement faire valoir que l'administration ne lui a pas fait connaître la méthode de détermination du poste de la balance de trésorerie correspondant aux dépenses de train de vie payées en espèces évaluées à 140 000 francs ;
Considérant que si la requérante a indiqué que les sommes portées au crédit de ses comptes bancaires et de ceux de ses enfants fiscalement à charge avaient pour origine des versements effectués tant par le père de ses enfants que par son concubin, elle n'a apporté à l'appui de ses allégations aucune justification ni commencement de preuve ; que le vérificateur était en conséquence fondé à regarder cette réponse comme équivalent à un défaut de réponse ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que les impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie pour les années 1981, 1983 et 1984 ont été établies au terme d'une procédure irrégulière par voie de taxation d'office ;
En ce qui concerne l'année 1982 :
Considérant qu'à la suite de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble le vérificateur a constaté que les sommes portées au crédit des comptes bancaires de la requérante, étaient plus de deux fois supérieures aux revenus qu'elle avait déclarés ; que par ailleurs le vérificateur disposait d'un rapport de la brigade de contrôle et de recherche des Hautes Alpes mentionnant que la fille de la requérante avait réglé en espèces à l'Union des diamantaires une somme de 240 000 francs ; que cette information a amené le vérificateur à établir une balance de trésorerie faisant apparaître, en l'absence de retraits en espèces sur les comptes bancaires, un solde inexpliqué de 434 468 francs entre les ressources et les emplois ; que le vérificateur avait ainsi réuni des indices suffisamment sérieux pour pouvoir adresser à la requérante une demande de justifications en application des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ;
Considérant que la requérante qui était absente de son domicile le 2 juillet 1985 lors de la présentation de la lettre recommandée contenant la demande d'éclaircissements et de justifications en date du 28 juin 1985 relative entre autres points à l'achat dudit diamant, ne l'a pas retirée au bureau de poste ; que cette demande doit en conséquence être regardée comme lui ayant été notifiée le jour de la première présentation du pli soit le 2 juillet 1985 ; qu'elle n'a fait parvenir aucune réponse dans le délai de 30 jours qui lui était imparti ; que l'imposition litigieuse a pu en conséquence être établie à bon droit suivant la procédure de taxation d'office qui était ainsi acquise à l'expiration dudit délai de 30 jours ; que, par suite, la requérante ne peut utilement faire valoir que la demande était insuffisamment précise en tant qu'elle portait sur l'achat dudit diamant ;
Considérant que lorsque le vérificateur utilise pour la détermination des bases d'imposition des renseignements provenant d'autres sources que les résultats de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ayant précédé l'envoi de la demande d'éclaircissements et de justifications, il appartient à l'administration même dans le cas où le contribuable est en situation de taxation d'office, de l'informer avant la mise en recouvrement des impositions de la teneur desdits renseignements afin de le mettre à même de les contester ; qu'elle n'est en revanche pas tenue, de lui donner d'elle-même cette information au cours des étapes antérieures de la procédure et dès l'engagement de la vérification ; que l'administration n'est pas davantage, à aucun moment de la procédure d'imposition, tenue de communiquer d'elle-même au contribuable, les pièces et documents se rapportant aux renseignements provenant d'autres sources que la vérification et notamment aux informations recueillies dans l'exercice du droit de communication ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la notification adressée à la requérante le 8 novembre 1985 lui indiquant les redressements apportés suivant la procédure de taxation d'office à ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu à raison du solde inexpliqué d'une balance de trésorerie comportant dans les emplois l'achat d'un diamant, précisait la date et les modalités d'acquisition et de règlement auprès de l'Union des diamantaires ; que la requérante a ainsi été informée avant la mise en recouvrement des impositions de la teneur des renseignements que l'administration avait recueillis auprès des services de police dans l'exercice de son droit de communication et partant mise à même de les contester après avoir, si elle l'estimait utile, demandé la communication des pièces correspondantes détenues par l'administration ; que contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'était pas, au cours des étapes antérieures de la procédure et dès l'engagement de la vérification, tenue, de l'informer de la teneur desdits renseignements ; que l'administration n'était pas davantage tenue de lui communiquer d'elle-même les pièces se rapportant auxdits renseignements avant la mise en recouvrement des impositions ; que la requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que l'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie pour l'année 1982 a été établie au terme d'une procédure irrégulière à défaut pour l'administration d'avoir respecté les droits de la défense ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que les impositions litigieuses ont été établies au terme d'une procédure irrégulière ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que la requérante qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, a été régulièrement taxée d'office, a la charge d'apporter la preuve de l'exagération des impositions ;
Considérant que la requérante qui n'a versé au dossier aucune pièce de nature à justifier l'origine et la cause du versement des sommes portées au crédit de ses comptes bancaires, n'apporte pas par de simples allégations faisant état de versements effectués tant par le père de ses enfants que par son concubin, la preuve dont elle a la charge ;
Considérant que le rapport de la brigade de contrôle et de recherches sur le fondement duquel le vérificateur a adressé une demande de justifications, mentionne que la fille de la requérante a expédié en janvier 1982 à l'Union des diamantaires un mandat-lettre de 240 000 francs ; que l'administration a ensuite versé au dossier un rapport de la direction nationale d'enquêtes fiscales auquel sont annexées diverses pièces extraites des documents saisis par les services de police dans les locaux de l'Union des diamantaires faisant apparaître par recoupement, d'une part, des codes utilisés pour désigner des ventes et des clients anonymes de passage et, d'autre part, d'une fiche établie au nom de la fille de la requérante que cette dernière avait acquis un diamant d'une valeur de 243 470 francs ;
Considérant que si la requérante soutient que le nom et l'adresse de sa fille ont pu être relevés dans un quelconque fichier et utilisés comme support de transactions occultes, elle n'apporte aucun élément tendant au moins à présumer qu'une telle pratique aurait été le fait de l'Union des diamantaires et qu'elle aurait pu en être victime ; qu'elle n'indique pas avoir effectué une quelconque démarche aux fins d'élucider cette situation ; que son allégation n'est ainsi assortie d'aucun commencement de preuve ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à obtenir la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1981 à 1984 ; que sa requête doit être rejetée ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.