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02/04/2025 | FRANCE | N°24DA00295

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 02 avril 2025, 24DA00295


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 8 janvier 2021 par lequel le préfet de la région Hauts-de-France a tacitement autorisé l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Marc Vanhaecke à exploiter la parcelle cadastrée ZA 24 d'une surface de 2 hectares 37 ares située sur le territoire de la commune de Wylder.



Par un jugement n° 2107031 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille a fa

it droit à sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 8 janvier 2021 par lequel le préfet de la région Hauts-de-France a tacitement autorisé l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Marc Vanhaecke à exploiter la parcelle cadastrée ZA 24 d'une surface de 2 hectares 37 ares située sur le territoire de la commune de Wylder.

Par un jugement n° 2107031 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2024, l'EARL Marc Vanhaecke, représentée par la SELARL Meillier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la situation de Mme B... ressort du quatrième rang de priorité au regard des dispositions du schéma directeur des exploitations agricoles du Nord et du Pas-de-Calais et n'est pas prioritaire et qu'en en cas de rang de classement identique, l'administration n'était pas tenue de départager les exploitations concurrentes.

Par un mémoire, enregistré le 26 septembre 2024, Mme B..., représentée par la SELAS Bignon Lebray, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête d'appel ;

2°) de mettre à la charge de l'EARL Marc Vanhaecke une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable en raison de son défaut de motivation, celle-ci ne comportant aucune critique du jugement rendu le 22 décembre 2023 ;

- le moyen soulevé dans la requête d'appel est inopérant dès lors qu'il ne permet pas de remettre en cause les motifs de ce jugement et n'est pas fondé ;

- la décision tacite du 8 janvier 2021 du préfet de la région Hauts-de-France risque de porter atteinte à la viabilité de son exploitation ;

- les revenus extra-agricoles n'ont pas à être pris en compte lorsque le refus d'autorisation est fondé sur le 2° de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime ;

- la consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture a été irrégulière dès lors que sa composition n'est pas conforme aux dispositions de ce code ;

- le dossier de demande d'autorisation d'exploiter déposé par l'EARL Marc Vanhaecke est insincère ;

- le calcul de l'équivalent par surface des revenus extra-agricoles fait par l'administration est erroné ;

- les critères de départage des demandeurs relevant d'un même rang de priorité lui sont favorables ;

- le projet constitue un agrandissement excessif de l'exploitation de l'EARL Marc Vanhaecke.

Par un mémoire, enregistré le 14 février 2025, la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire s'en remet à la sagesse de la cour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du 29 juin 2016 du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie approuvant le schéma directeur régional des exploitations agricoles en Nord-Pas-de-Calais ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vandenberghe, rapporteur,

- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Douay, représentant l'EARL Marc Vanhaecke et de Me Bizet, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... est titulaire d'un bail rural depuis le 6 mars 2015 aux fins d'exploiter une parcelle cadastrée ZA 24 d'une surface de 2 hectares 37 ares située sur le territoire de la commune de Wylder. Le 7 juillet 2020 l'EARL Marc Vanhaecke a présenté une demande d'autorisation d'exploitation de cette même parcelle. L'administration ayant gardé le silence sur cette demande, une décision tacite d'autorisation d'exploiter est née le 8 janvier 2021. L'EARL Marc Vanhaecke relève appel du jugement n° 2107031 du 22 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision, à la demande de Mme B....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes du V de l'article L. 312-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " V. - Pour l'application du présent article, sont considérées comme concernées par la demande d'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 les exploitations agricoles du demandeur, des autres candidats à la reprise et celle du preneur en place. ". Aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative (...) vérifie, compte tenu des motifs de refus prévus à l'article L. 331-3-1, si les conditions de l'opération permettent de délivrer l'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 et se prononce sur la demande d'autorisation par une décision motivée ". Aux termes de l'article R. 331-6 du même code : " I. - Le préfet de région dispose d'un délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier complet mentionnée dans l'accusé de réception pour statuer sur la demande d'autorisation (...) / II.- La décision d'autorisation ou de refus d'autorisation d'exploiter prise par le préfet de région doit être motivée au regard du schéma directeur régional des exploitations agricoles et des motifs de refus énumérés à l'article L. 331-3-1 (...) (...) / A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée. En cas d'autorisation tacite, une copie de l'accusé de réception mentionné à l'article R. 331-4 est affichée et publiée dans les mêmes conditions que l'autorisation expresse ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version applicable au litige : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : / 1° Lorsqu'il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du schéma directeur régional des structures agricoles mentionné à l'article L. 312-1 ; / 2° Lorsque l'opération compromet la viabilité de l'exploitation du preneur en place ; / 3° Si l'opération conduit à un agrandissement ou à une concentration d'exploitations au bénéfice d'une même personne excessifs au regard des critères définis au 3° de l'article L. 331-1 et précisés par le schéma directeur régional des structures agricoles en application de l'article L. 312-1, sauf dans le cas où il n'y a pas d'autre candidat à la reprise de l'exploitation ou du bien considéré, ni de preneur en place ; / 4° Dans le cas d'une mise à disposition de terres à une société, lorsque celle-ci entraîne une réduction du nombre d'emplois salariés ou non salariés, permanents ou saisonniers, sur les exploitations concernées (...) ".

4. En l'espèce, pour annuler la décision tacite du préfet de la région Hauts-de-France, le tribunal administratif de Lille a considéré que le préfet a fait une inexacte application des dispositions du 2° de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime dès lors que l'autorisation délivrée compromet la viabilité de l'exploitation de Mme B... qui exploite 48,8889 hectares de terres, soit une surface inférieure au seuil de viabilité fixé à 60 hectares par l'article 1er du schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) du Nord Pas-de-Calais. L'EARL Marc Vanhaecke, qui n'établit pas ni même n'allègue que la décision en litige n'a pas pour effet de compromettre la viabilité de l'exploitation du preneur en place qu'est Mme B..., ne peut utilement faire valoir au soutien de sa requête d'appel que la situation de cette dernière n'est pas prioritaire par rapport à la sienne et que l'autorisation qui lui a été accordée ne méconnaît donc pas les dispositions du 1° de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime.

5. Il résulte de tout ce qui précède que l'EARL Marc Vanhaecke n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision tacite du 8 janvier 2021, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de sa requête d'appel.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'EARL Marc Vanhaecke une somme de 2 000 euros à verser à Mme B... au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EARL Marc Vanhaecke est rejetée.

Article 2 : L'EARL Marc Vanhaecke versera à Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL Marc Vanhaecke, à Mme A... B... et à la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera adressée au préfet de région Hauts-de-France.

Délibéré après l'audience publique du 11 mars 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de la chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne à la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière

2

N°24DA00295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00295
Date de la décision : 02/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SCP BIGNON LEBRAY & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-02;24da00295 ?
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