Vu la procédure suivante :
I.- Sous le n° 22DA02108, par une requête et des mémoires, enregistrés les 10 octobre 2022, 17 mai 2023 et 25 juillet 2024, la commune de Carnières, représentée par Me Dutat, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 27 juin 2022 par lequel le préfet du Nord a autorisé la société Ferme éolienne Le Mûrier à exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Carnières ;
2°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt à agir contre l'arrêté attaqué compte tenu du rejet massif du projet par ses habitants, de l'opposition constante du conseil municipal et de l'atteinte directe à ses intérêts propres ;
- l'autorisation environnementale a été délivrée au vu d'un dossier irrégulier dès lors que la société pétitionnaire ne détient aucun droit sur la parcelle cadastrée ZB 176 sur laquelle elle projette l'installation de l'éolienne E1 ;
- elle a été délivrée sans qu'ait été préalablement sollicitée une dérogation aux interdictions de destruction des espèces protégées énoncées à l'article L. 411-1 du code de l'environnement, dans les conditions prévues au 4° du I de l'article L. 411-2 du même article ;
- elle a été délivrée au vu d'une étude d'impact insuffisante ; la hauteur et la puissance des éoliennes autorisées sont différentes de celles prises en compte dans l'étude d'impact ; l'impact visuel depuis le cœur du bourg de Carnières n'est pas pris en compte ; les développements sont stéréotypés, en particulier concernant l'analyse des effets cumulés ; l'étude, mise à jour en dernier lieu en avril 2019, est obsolète ;
- elle a été prise en méconnaissance des avis défavorables de la population, de l'unité départementale de l'architecture et du patrimoine, du commissaire enquêteur, de la direction départementale des territoires et de la mer, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et du préfet du Nord ;
- le projet autorisé, compte tenu en particulier de ses effets cumulés avec ceux des autres parcs éoliens situés à proximité, porte atteinte à la protection des paysages et à la commodité du voisinage compte tenu des effets de saturation visuelle qu'il génère pour la commune de Carnières ;
- compte tenu de la hauteur des éoliennes projetées, de leur proximité avec le bourg et de ce que leur terrain d'assiette est en surplomb du village, le projet, par son effet d'écrasement et de concurrence sur la tour gothique de l'église Saint-Germain, monument emblématique de la commune, doit être regardé comme portant atteinte à la conservation des sites ;
- le projet porte atteinte à l'environnement, en particulier à la conservation du busard des roseaux présent dans l'aire d'étude ; il n'est fourni aucune preuve réelle des capacités d'adaptation de cette espèce ; les mesures prescrites seront insuffisantes et inefficaces ; aucune procédure de contrôle efficace n'est prévue ;
- alors que plusieurs équipements publics sont situés à proximité immédiate, le projet expose les populations environnantes, particulièrement les jeunes, à des risques sanitaires importants, résultant des infrasons émis par les éoliennes, des bruits mécaniques, du risque de projection et de leurs effets stroboscopiques ou de crénelage ;
- le projet risque de porter une atteinte irrémédiable au patrimoine archéologique dès lors que son site d'implantation correspond à l'emplacement vraisemblable d'un cimetière mérovingien ;
- compte tenu de l'impact visuel négatif du projet et de ses nuisances acoustiques et sanitaires, il expose les riverains à un préjudice de dépréciation immobilière.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 avril 2023, 11 juillet 2024 et 22 août 2024, la société Ferme éolienne Le Mûrier, représentée par Me Cambus, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête de la commune de Carnières ;
2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue de procéder à la régularisation de l'autorisation attaquée en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;
3°) en tout état de cause, à ce qu'une somme 3 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le moyen tiré du préjudice de dépréciation immobilière est inopérant et que les autres moyens soulevés par la commune requérante ne sont pas fondés.
La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués au préfet du Nord qui n'a pas produit de mémoire.
Par ordonnance du 28 janvier 2025, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée, en application des articles R. 613-1 et R. 611-11-1 du code de justice administrative.
Par lettre du 14 février 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen tiré de l'irrecevabilité des moyens tirés, d'une part, de l'absence de demande de dérogation aux interdictions de destruction des espèces protégées prévues à l'article L. 411-1 du code de l'environnement et, d'autre part, de ce que le projet expose les riverains à un préjudice de dépréciation immobilière dès lors que ces moyens n'ont été soulevés que dans un mémoire produit le 25 juillet 2024, après l'expiration du délai de deux mois prévu par les dispositions de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative.
II.- Sous le n° 24DA00615, par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 mars 2024 et 25 juillet 2024, la commune de Carnières, représentée par Me Dutat, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord en date du 25 janvier 2024 portant modifications de l'autorisation environnementale délivrée à la société Ferme éolienne Le Mûrier et des prescriptions y afférentes ;
2°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt à agir contre l'arrêté attaqué compte tenu de l'atteinte directe à ses intérêts propres ;
- compte tenu de l'ampleur des modifications apportées, l'arrêté attaqué aurait dû être précédé d'études supplémentaires ;
- ces modifications aggravent les atteintes du projet aux paysages, à la conservation des sites, à la commodité du voisinage, à l'environnement, à la santé publique et à la valeur des propriétés immobilières.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2024, la société Ferme éolienne Le Mûrier, représentée par Me Cambus, conclut :
1°) au rejet de la requête de la commune de Carnières ;
2°) à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Carnières au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune requérante ne sont pas fondés.
La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués au préfet du Nord qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guillaume Toutias, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Cambus, représentant la société Ferme éolienne Le Mûrier.
Considérant ce qui suit :
1. La société Ferme éolienne Le Mûrier a sollicité, le 15 mai 2017, une autorisation environnementale pour la réalisation d'un parc éolien composé de quatre machines et d'un poste de livraison d'une puissance totale de 14,4 MW situé sur le territoire de la commune de Carnières (Nord). Par un arrêté du 30 décembre 2020, le préfet du Nord a refusé l'autorisation environnementale sollicitée. Par un arrêt n° 21DA00514 du 3 mai 2022, la cour, saisie par la société Ferme éolienne Le Mûrier, a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet du Nord de délivrer l'autorisation environnementale sollicitée en l'assortissant des prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Cet arrêté a été pris par le préfet du Nord le 27 juin 2022. Le 28 avril 2023, la société Ferme éolienne Le Mûrier a sollicité la modification de cette autorisation environnementale. Par un arrêté du 25janvier 2024, le préfet du Nord a fait droit à sa demande et a modifié les prescriptions. Par sa requête n° 22DA02108 susvisée, la commune de Carnières, en sa qualité de commune d'implantation du projet de la société Ferme éolienne Le Mûrier, demande à la cour d'annuler l'arrêté du 27 juin 2022 portant délivrance de l'autorisation environnementale et fixant les prescriptions. Par sa requête n° 24DA00615 susvisée, la même commune demande en outre à la cour d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2024 portant modification de l'autorisation environnementale et de ses prescriptions. Ces requêtes portent sur un même projet et présentent à juger des questions semblables, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'arrêté du préfet du Nord en date du 27 juin 2022 :
En ce qui concerne la maîtrise foncière du terrain d'assiette du projet :
2. Aux termes de l'article R. 181-13 du code de l'environnement : " La demande d'autorisation environnementale comprend les éléments communs suivants : / (...) / 3° Un document attestant que le pétitionnaire est le propriétaire du terrain ou qu'il dispose du droit d'y réaliser son projet ou qu'une procédure est en cours ayant pour effet de lui conférer ce droit ; / (...) ". Eu égard notamment aux obligations qui peuvent être imposées par le régime des installations classées au propriétaire du terrain en cas de dommages pour l'environnement, il incombe à l'autorité administrative, lorsque le demandeur n'est pas le propriétaire du terrain, de s'assurer de la production de l'autorisation donnée par le propriétaire exigée par le 3° de l'article R. 181-13 du code de l'environnement, sans laquelle la demande d'autorisation ne peut être regardée comme complète, mais également de vérifier qu'elle n'est pas manifestement entachée d'irrégularité.
3. Il résulte de l'instruction que le projet en litige prévoit d'implanter une éolienne E1 et le poste de livraison sur la parcelle cadastrée ZB 176 à Carnières. Cette parcelle n'appartient pas à la société pétitionnaire. En revanche, il est constant que celle-ci a joint à son dossier de demande d'autorisation environnementale la promesse de bail emphytéotique consentie par le propriétaire de la parcelle le 20 juin 2013 à la société Energieteam, dont elle est une filiale. Il ne résulte pas de l'instruction que cette promesse aurait été irrégulièrement consentie ni qu'elle n'était plus valide à la date de délivrance de l'autorisation environnementale attaquée. En particulier, si les contours du projet présenté alors au propriétaire ont évolué, il n'est pas établi que cette circonstance permettait à ce dernier de se rétracter ni que son décès en décembre 2020 aurait eu pour effet de délier ses ayants-droits des obligations ainsi consenties. Au surplus, la société pétitionnaire a produit devant la cour une nouvelle promesse de bail conclue avec les nouveaux propriétaires et usufruitiers de la parcelle le 28 juillet 2023, justifiant ainsi de la maitrise foncière de la parcelle litigieuse. Le moyen tiré de ce que le dossier de demande d'autorisation environnementale présenté par la société Ferme éolienne Le Mûrier aurait été incomplet faute pour cette dernière de justifier de la maîtrise foncière de la parcelle ZB 176 sur laquelle elle projetait d'implanter en partie son projet doit, dès lors, être écarté.
En ce qui concerne l'étude d'impact :
4. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa version applicable en l'espèce : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) / II.- En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) / 2° Une description du projet (...) / 3° Une description des aspects pertinents de l'état initial de l'environnement, et de leur évolution en cas de mise en œuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en œuvre du projet, (...) ; / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; / (...) / c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ; / d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. / Les projets existants sont ceux qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact, ont été réalisés. / Les projets approuvés sont ceux qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact, ont fait l'objet d'une décision leur permettant d'être réalisés. / Sont compris, en outre, les projets qui, lors du dépôt du dossier de demande comprenant l'étude d'impact : / - ont fait l'objet d'une étude d'incidence environnementale au titre de l'article R. 181-14 et d'une consultation du public ; / - ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. / Sont exclus les projets ayant fait l'objet d'un arrêté mentionnant un délai et devenu caduc, ceux dont la décision d'autorisation est devenue caduque, dont l'enquête publique n'est plus valable ainsi que ceux qui ont été officiellement abandonnés par le maître d'ouvrage ; / 6° Une description des incidences négatives notables attendues du projet sur l'environnement (...) / (...) / 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / (...) ". Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
5. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de l'étude d'impact jointe au dossier de demande d'autorisation environnementale que celle-ci porte sur un projet de parc éolien d'une puissance maximale totale de 14,4 MW, comportant quatre éoliennes ayant chacune une puissance nominale de 3,6 MW, une hauteur au moyeu de 97 mètres, une hauteur totale en bout de pale de 165 mètres et un rotor de 136 mètres de diamètre. Il résulte des termes de l'arrêté attaqué que le projet qu'il autorise répond aux mêmes caractéristiques techniques. Si par arrêté du 25 janvier 2024 le préfet du Nord a modifié l'autorisation environnementale ainsi délivrée pour tenir compte du changement de modèle d'éolienne, la commune n'apporte aucun élément de nature à établir que ces modifications seraient, par elles-mêmes, de nature à modifier substantiellement les analyses et conclusions de l'étude d'impact initiale. Il s'ensuit que la commune de Carnières n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris au vu d'une étude d'impact portant sur un projet différent.
6. En deuxième lieu, l'étude d'impact jointe au dossier de demande d'autorisation environnementale comporte une description du contexte paysager et patrimonial dans lequel le projet prévoit de s'insérer ainsi qu'une analyse des impacts de celui-ci sur les paysages et les éléments du patrimoine local. Elle comporte notamment une cinquantaine de photomontages qui rendent compte de l'insertion du projet dans les paysages rapprochés ou lointains. S'agissant en particulier de l'incidence visuelle du projet sur la commune de Carnières, l'étude d'impact classe cette commune en zone de perception forte. Elle comporte en outre trois photomontages rendant compte de la perception du projet depuis les trois entrées de ville les plus impactées. Trois photomontages complémentaires rendant compte de la perception du projet depuis l'intérieur même du bourg ont également été produits par la société pétitionnaire dans le cadre de l'enquête publique à la demande de la commissaire enquêtrice. Il s'ensuit que la commune n'est pas fondée à soutenir que l'incidence visuelle du projet sur son territoire n'aurait pas été étudiée et prise en compte.
7. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient la commune de Carnières, l'analyse des effets cumulés du projet et des parcs existants, autorisés ou en instruction situés aux alentours ne présente pas de caractère stéréotypé mais est particulièrement précise s'agissant des effets cumulés de ces parcs sur les paysages. L'étude d'impact comporte notamment, pour chacune des communes les plus impactées par le projet, une présentation des angles d'occupation de l'horizon par l'activité éolienne et des angles de respiration dans la situation antérieure au projet résultant des parcs existants et autorisés, dans celle résultant du projet et dans celle résultant du projet et du cumul avec les autres parcs faisant l'objet d'une instruction en parallèle. Par ailleurs, à la suite de l'avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale, la société pétitionnaire a complété son dossier par une analyse détaillée de la problématique d'encerclement et de saturation paysagère sur les communes d'Avesnes-les-Aubert, Beauvois-en-Cambrésis et Boussières-en-Cambrésis. Il s'ensuit que la commune n'est pas fondée à soutenir que l'analyse des effets cumulés par l'étude d'impact est insuffisante.
8. En quatrième lieu, il résulte des dispositions précitées du e) du 5° du II. de l'article R. 122-5 du code de l'environnement que l'étude d'impact doit inclure une analyse des effets cumulés du projet et des autres projets existants ou approuvés mais que seuls doivent être pris en compte les projets réalisés, autorisés ou ayant fait l'objet d'une évaluation environnementale et d'un avis de l'autorité environnementale à la date du dépôt de la demande. La commune de Carnières ne précise pas quel parc aurait dû être pris en compte en application de ces dispositions et ne l'aurait pas été. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la demande de la société Ferme éolienne Le Mûrier a été présentée le 15 mai 2017 et que l'étude d'impact a été actualisée en dernier lieu en avril 2019. Il s'ensuit que la commune de Carnières n'est pas fondée à soutenir que cette étude d'impact serait obsolète.
9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact jointe au dossier de demande d'autorisation environnementale doit être écarté en toutes ses branches.
En ce qui concerne les avis défavorables au projet :
10. Si le préfet du Nord a refusé les précédentes demandes d'autorisation environnementale sollicitées par la société Ferme éolienne Le Mûrier, ses arrêtés des 11 décembre 2015, 5 décembre 2016 et 30 décembre 2020 ont été successivement annulés par un jugement du 31 octobre 2019 du tribunal administratif de Lille et un arrêt du 3 mai 2022 de la cour, de sorte que la commune de Carnières n'est pas fondée à se prévaloir de ces précédents refus. En outre, ni le résultat de la consultation locale des électeurs organisée à l'initiative de la commune de Carnières le 28 juin 2015, ni les avis défavorables de l'unité départementale de l'architecture et du patrimoine, de la direction départementale des territoires et de la mer, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et de la commissaire enquêtrice, lesquels ont en tout état de cause été pris en compte par le préfet, ne plaçaient celui-ci en situation de compétence liée pour refuser à nouveau le projet. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces avis et de " l'absence anormale de continuum décisionnel " doit, dès lors, être écarté.
En ce qui concerne les dangers et inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
11. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I.- L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. / (...) ". Figurent, parmi les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, la commodité du voisinage, la santé, la sécurité et la salubrité publiques, la protection de la nature, de l'environnement et des paysages ainsi que la conservation des sites, des monuments et des éléments du patrimoine archéologique.
S'agissant de la commodité du voisinage et de la protection des paysages :
12. Le phénomène de saturation visuelle qu'est susceptible de générer un projet peut être pris en compte pour apprécier ses inconvénients pour la commodité du voisinage au sens de l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Il appartient à l'autorité administrative et au juge de plein contentieux, pour apprécier les inconvénients pour la commodité du voisinage liés à l'effet de saturation visuelle causé par un projet de parc éolien, de tenir compte de l'effet d'encerclement résultant du projet en évaluant, au regard de l'ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en termes de reliefs et d'écrans visuels, l'incidence du projet sur les angles d'occupation et de respiration, ce dernier s'entendant du plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents. S'ils peuvent, le cas échéant, également tenir compte, pour porter cette appréciation, d'autres projets de parcs éoliens, faisant l'objet d'une instruction concomitante, qu'ils s'apprêtent à autoriser, ils ne sauraient prendre en compte des projets qu'ils ont refusés, quand bien même les décisions de refus ne seraient pas devenues définitives.
13. D'une part, il résulte de l'instruction que le projet présenté par la société Ferme éolienne Le Mûrier, consistant, dans son dernier état, en l'édification d'un parc éolien composé d'un poste de livraison et de quatre machines dont la hauteur en bout de pale culminera à 180 mètres, sera implanté sur le territoire de la commune de Carnières (Nord). Le site, situé à l'ouest de celle-ci, s'implante au sein de l'entité paysagère des plateaux cambrésiens. Ce territoire, principalement plat, est occupé par de vastes parcelles agricoles ouvertes, de type openfields, ponctuées par de rares boisements et haies végétales. En outre, le site s'insère dans un contexte éolien déjà fortement marqué, les parcs existants, autorisés ou en projet situés dans un rayon de dix kilomètres étant tous concentrés sur son flanc est. Il en résulte que les paysages préexistants, largement anthropisés, ne présentent pas par eux-mêmes de caractère particulièrement remarquable. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des nombreux photomontages joints au dossier de demande d'autorisation, que le projet, qui prévoit en particulier une implantation en ligne ménageant de larges trouées et qui est distant d'au moins 2,5 kilomètres du parc le plus proche, soit, par lui-même ou en raison de ses effets cumulés aux parcs existants, autorisés ou en projet, de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des paysages.
14. D'autre part, il résulte de l'instruction que le projet s'implante sur la plaine agricole s'étendant à l'ouest du bourg de la commune de Carnières. La vue sur le projet depuis ce bourg occupera un angle d'horizon de 88°. Si cette localisation est de nature à créer des vues directes sur le projet depuis les propriétés qui sont situées en bordure du village et qui s'ouvrent sur le secteur agricole d'implantation, d'une part, les éoliennes seront implantées à distance des habitations, la plus proche étant située à environ 700 mètres et le cœur du bourg étant situé à environ un kilomètre, et, d'autre part, l'arrêté attaqué prescrit à la société pétitionnaire de mettre en place, sur sollicitation des riverains, des plantations écrans permettant de réduire la perception du projet. En outre, si les éoliennes du projet seront visibles depuis le cœur même du village, les vues au cours de la déambulation dans le bourg, compte tenu du caractère principalement plat du secteur et du caractère resserré du bâti, resteront néanmoins intermittentes et elles ne créeront aucun effet de surplomb ou d'écrasement tel qu'il les rendrait omniprésentes. Enfin, si, depuis le village de Carnières, le projet et les autres parcs existants, autorisés ou en projet situés dans un rayon de 10 kilomètres porteront le cumul des angles d'occupation de l'horizon par l'activité éolienne à 147° et maintiendront un angle maximal de respiration de seulement 68°, il résulte toutefois de l'instruction qu'en dehors des éoliennes du projet contesté, aucune des 56 autres éoliennes implantées dans un rayon de 10 kilomètres n'est située à moins de 2,5 kilomètre du bourg, deux tiers d'entre elles étant situées à plus de 5 kilomètres. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que le projet, même combiné avec les autres parcs éoliens déjà existants, autorisés ou en projet, soit de nature à occasionner une saturation visuelle et à rendre l'activité éolienne omniprésente depuis le bourg de la commune de Carnières et, par suite, à représenter un inconvénient excessif pour la commodité du voisinage.
S'agissant de la conservation des sites, des monuments et des éléments du patrimoine archéologique :
15. D'une part, il résulte de l'instruction que l'église Saint-Germain située dans le bourg de Carnières et sa tour gothique du XVIème siècle, inscrits comme monuments historiques, sont distantes du lieu d'implantation du projet de 1,1 kilomètre. Il ne résulte pas de l'instruction qu'une covisibilité entre le monument et le parc éolien depuis la place centrale du village existerait, ni qu'une telle covisibilité, à la supposer existante, serait, du fait d'un effet de surplomb ou de concurrence marqué du parc éolien, nuisible à la conservation et à la mise en valeur du monument. En outre, alors que l'église et sa tour ne constituent pas des émergences significatives et structurantes des paysages depuis les plaines agricoles entourant le village, où elles sont déjà concurrencées par un important couvert végétal, il ne résulte pas de l'instruction que la covisibilité avec les éoliennes du projet sera de nature à les banaliser davantage. Dans ces conditions, la commune de Carnières n'est pas fondée à soutenir que le projet porterait atteinte à la conservation de son église et de sa tour.
16. D'autre part, si la commune de Carnières fait mention de l'emplacement d'un cimetière datant de l'époque mérovingienne sur le site du projet contesté, elle n'apporte pas d'éléments suffisants permettant de confirmer l'existence de cet élément du patrimoine archéologique ou seulement de la présumer. En tout état de cause, la société pétitionnaire sera tenue, en cas de découverte fortuite de vestiges lors de la réalisation des travaux, de respecter les dispositions des articles L. 531-14 et suivants du code du patrimoine relatives à l'archéologie préventive. Dans ces conditions, le projet autorisé par l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme emportant un risque pour la conservation d'un élément du patrimoine archéologique.
S'agissant de la protection de la nature et de l'environnement :
17. En premier lieu, l'étude écologique réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact a mis en évidence, sur le site d'implantation du projet, une zone de chasse et de nidification fréquentée par le busard des roseaux, espèce protégée par l'annexe I de la directive " Oiseaux ", considéré comme nicheur quasi-menacé au niveau national et comme vulnérable dans le Nord-Pas-de-Calais. Cette étude mentionne qu'il existe un risque de collision, de dérangement pendant la période de nidification du fait de la réalisation des travaux et de destruction des habitats du fait de l'implantation des éoliennes E1 et E2 à proximité immédiate de la zone de chasse et de nidification.
18. Toutefois, l'arrêté attaqué prescrit à la société pétitionnaire de s'abstenir de tous travaux sur le site d'implantation pendant la période de nidification de l'espèce, soit du 1er avril au 31 juillet. Il prescrit en outre, de manière générale, d'adapter le calendrier des travaux aux cycles biologiques des espèces présentes sur le site, de procéder à une recherche de nids avant le début des travaux et de différer les travaux dans le temps et dans l'espace en cas de découverte, de préserver les boisements, haies, talus, accotements enherbés et prairies ainsi que de restaurer le terrain dans le même état après les travaux. Enfin, il prescrit également un suivi des nichées de busards des roseaux dans les trois premières années de mise en activité du parc et de conduire des actions de sensibilisation auprès des agriculteurs en cas de découverte de nids.
19. Ces prescriptions sont de nature à prévenir le risque de dérangement pendant la période de nidification identifiée par l'étude écologique. Le risque de destruction des habitats a également été pris en compte dès lors que les éoliennes E1 et E2 ont été implantées en dehors de la zone de chasse et de nidification identifiée lors de l'étude, celle-ci retenant par ailleurs que les abords immédiats offrent un milieu similaire de substitution. Enfin, l'étude retient que, malgré la sensibilité théorique de l'espèce à l'activité éolienne, le risque de collision demeure en l'espèce peu caractérisé compte tenu de la garde au sol de près de 30 mètres ménagée par le projet et de la nature des vols observés localement. La commune n'apporte aucun élément de nature à infirmer les conclusions de l'étude et, en particulier, à démontrer que le projet ainsi conçu, associé aux prescriptions imposées par l'arrêté attaqué, serait par lui-même de nature à compromettre la conservation du busard des roseaux.
20. En deuxième lieu, si l'étude écologique réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact a mis en évidence que le bruant jaune, espèce considérée comme vulnérable en tant que nicheur en France, est nicheur sur le terrain d'assiette du projet, elle a relevé qu'il n'existe aucun risque de dérangement de l'espèce si les travaux sont réalisés en dehors de la période de nidification. Or, l'arrêté attaqué interdit à la société pétitionnaire, ainsi qu'il a été dit au point 18, de réaliser tous travaux sur la période du 1er avril au 31 juillet, ce qui couvre également la période de nidification de cette espèce. La commune n'apporte pas davantage d'éléments de nature à mettre en évidence un risque caractérisé pour la conservation de cette autre espèce sur le site.
21. En troisième lieu, les prescriptions imposées par l'arrêté attaqué ont force obligatoire pour la société pétitionnaire et sont, au même titre que toutes les autres conditions d'exploitation prévues dans le dossier de demande, susceptibles d'être contrôlées dans le cadre de la mise en œuvre de l'autorisation environnementale. Dans ces conditions, la commune n'est pas fondée à invoquer l'absence de toute procédure de contrôle.
22. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions de l'arrêté attaqué pour prévenir les atteintes à la nature et à l'environnement, particulièrement aux busards des roseaux et aux bruants jaunes, doit être écarté en toutes ses branches.
S'agissant des risques pour la santé et la sécurité des riverains :
23. Il résulte de l'instruction que l'étude acoustique réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact n'a mis en évidence aucun risque d'émergences sonores excédant les seuils réglementaires, les connaissances scientifiques actuelles ne mettant pas en outre en évidence d'effets sanitaires liés à l'exposition aux infrasons émis par des éoliennes. L'étude d'impact mentionne que les projections d'ombres pour les riverains n'excèderont pas une dizaine d'heures par an. L'impact visuel résultant du balisage réglementaire mis en place au sommet de chaque éolienne ne peut, quant à lui, être regardé comme exposant les riverains à des risques pour leur santé ou comme entraînant des inconvénients excessifs pour leur tranquillité. Enfin, l'étude de dangers réalisée dans le cadre de la préparation de l'étude d'impact, dont la mission régionale d'autorité environnementale a souligné la qualité, évalue le risque de projection depuis les éoliennes du projet à un niveau faible et acceptable. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que le projet, implanté en tout état de cause à plus de 700 mètres des habitations les plus proches et à un kilomètre du cœur du bourg de la commune de Carnières et de ses équipements publics, expose les riverains à un risque pour leur santé et leur sécurité.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et le préjudice de dépréciation immobilière :
24. Aux termes de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1, lorsque la juridiction est saisie d'une décision mentionnée à l'article R. 311-5, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. / Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie ".
25. Il résulte de l'instruction, notamment des notifications de l'application Télérecours, que le premier mémoire en défense, produit par la société Ferme éolienne Le Mûrier le 27 avril 2023, a été adressé à la commune de Carnières le 2 mai 2023, dont elle a accusé réception le jour même. Les moyens de la commune de Carnières, tirés, d'une part, du vice de procédure dont est entachée l'autorisation environnementale délivrée par le préfet du fait de l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées et, d'autre part, du préjudice de dépréciation immobilière auquel le projet exposerait les riverains, n'ont été soulevés que dans un mémoire en réplique produit le 25 juillet 2024, soit plus d'un an après l'expiration du délai de deux mois prévu par les dispositions précitées de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative. Ces moyens doivent, dès lors, être écartés comme irrecevables.
26. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Carnières n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 27 juin 2022 du préfet du Nord. Dès lors, ses conclusions en ce sens doivent être rejetées.
Sur l'arrêté du préfet du Nord en date du 25 janvier 2024 :
27. Aux termes de l'article L. 181-14 du code de l'environnement : " Toute modification substantielle des activités, installations, ouvrages ou travaux qui relèvent de l'autorisation environnementale est soumise à la délivrance d'une nouvelle autorisation, qu'elle intervienne avant la réalisation du projet ou lors de sa mise en œuvre ou de son exploitation. / En dehors des modifications substantielles, toute modification notable intervenant dans les mêmes circonstances est portée à la connaissance de l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation environnementale dans les conditions définies par le décret prévu à l'article L. 181-32. / L'autorité administrative compétente peut imposer toute prescription complémentaire nécessaire au respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4 à l'occasion de ces modifications, mais aussi à tout moment s'il apparaît que le respect de ces dispositions n'est pas assuré par l'exécution des prescriptions préalablement édictées ".
28. Aux termes de l'article R. 181-46 du même code : " I.- Est regardée comme substantielle, au sens de l'article L. 181-14, la modification apportée à des activités, installations, ouvrages et travaux soumis à autorisation environnementale qui : / 1° En constitue une extension devant faire l'objet d'une nouvelle évaluation environnementale en application du II de l'article R. 122-2 ; / 2° Ou atteint des seuils quantitatifs et des critères fixés par arrêté du ministre chargé de l'environnement ; / 3° Ou est de nature à entraîner des dangers et inconvénients significatifs pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3. / La délivrance d'une nouvelle autorisation environnementale est soumise aux mêmes formalités que l'autorisation initiale. / II.- Toute autre modification notable apportée aux activités, installations, ouvrages et travaux autorisés, à leurs modalités d'exploitation ou de mise en œuvre ainsi qu'aux autres équipements, installations et activités mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 181-1 inclus dans l'autorisation doit être portée à la connaissance du préfet, avant sa réalisation, par le bénéficiaire de l'autorisation avec tous les éléments d'appréciation. / S'il y a lieu, le préfet, après avoir procédé à celles des consultations prévues par les articles R. 181-18, R. 181-19, R. 181-21 à R. 181-32 et R. 181-33-1 que la nature et l'ampleur de la modification rendent nécessaires et, le cas échéant, à une consultation du public dans les conditions de l'article L. 123-19-2 ou, lorsqu'il est fait application du III de l'article L. 122-1-1, de l'article L. 123-19, fixe des prescriptions complémentaires ou adapte l'autorisation environnementale dans les formes prévues à l'article R. 181-45. / (...) ".
29. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 28 avril 2023, la société Ferme éolienne Le Mûrier a informé le préfet du Nord du changement du modèle d'éolienne dont l'installation était prévue sur le projet. Ce changement emporte la modification de l'implantation des éoliennes E3 et E4 à l'intérieur des parcelles précédemment retenues, de l'implantation du poste de livraison et des caractéristiques techniques des machines. La hauteur maximale du moyeu est portée de 97 à 105 mètres. La hauteur totale maximale en bout de pale est portée de 165 à 180 mètres. Le diamètre maximal du rotor est porté de 136 à 150 mètres. La puissance nominale unitaire maximale est portée de 3,6 MW à 4,2 MW. Par son arrêté du 25 janvier 2024, le préfet du Nord a retenu que ces modifications ne présentaient pas de caractère substantiel et, par suite, a modifié l'autorisation environnementale délivrée le 27 juin 2022 et actualisé en conséquence la prescription relative aux garanties financières.
30. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 23 que le projet initial ne porte en lui-même pas d'atteinte excessive aux différents intérêts invoqués par la commune. En se bornant à réitérer les mêmes moyens et arguments que ceux soulevés contre le projet initial, la commune ne démontre pas que les modifications apportées sont par elles-mêmes de nature à caractériser de telles atteintes. En particulier, si l'arrêté attaqué autorise le changement du modèle d'éolienne et modifie en conséquence les caractéristiques techniques des machines, la commune n'apporte aucun élément de nature à établir une modification de la perception visuelle ou sonore des machines depuis son territoire. Il s'ensuit qu'il ne résulte pas de l'instruction que les modifications apportées au projet sont, en elles-mêmes, de nature à entraîner des dangers et inconvénients significatifs pour les intérêts mentionnés aux articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement. Dès lors, c'est sans entacher son arrêté d'un vice de procédure et d'erreur de droit que le préfet du Nord a pu procéder à la modification de l'autorisation environnementale délivrée le 27 juin 2022 à la société Ferme éolienne Le Mûrier.
31. Il résulte de ce qui précède que la commune de Carnières n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 25 janvier 2024 du préfet du Nord. Dès lors, ses conclusions en ce sens doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la commune de Carnières demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de celle-ci une somme globale de 3 000 euros au titre des frais exposés par la société Ferme éolienne Le Mûrier dans le cadre des présentes instances et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes nos 22DA02108 et 24DA00615 de la commune de Carnières sont rejetées.
Article 2 : La commune de Carnières versera à la société Ferme éolienne Le Mûrier une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Carnières, à la société Ferme éolienne Le Mûrier et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera adressée au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 25 février 2025 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025.
Le rapporteur,
Signé : G. ToutiasLe président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A.-S. Villette
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
2
N°22DA02108,24DA00615