Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 5 mars 2020 par lequel la maire de la commune de Lille a arrêté le tableau d'avancement pour l'accès au grade d'éducateur territorial des activités physiques et sportives principal de 2ème classe au titre de l'année 2019.
Par un jugement n° 2006076 du 3 juillet 2023, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 5 mars 2020 et a enjoint à la maire de la commune de Lille de réexaminer la demande de M. A... tendant à son inscription au tableau d'avancement au titre de l'année 2019 dans un délai de deux mois suivant la notification de son jugement.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 1er septembre 2023 sous le n° 23DA01736, et un mémoire, enregistré le 25 avril 2024, la commune de Lille, représentée par Me Fillieux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure suivie devant la commission administrative paritaire est régulière, dès lors qu'il a été tenu à sa disposition des éléments suffisants pour lui permettre de comparer les mérites respectifs des agents promouvables ;
- à titre subsidiaire, l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2020 établissant un tableau d'avancement pour l'année 2019 n'exige aucune mesure d'exécution dès lors que les nominations prononcées sur son fondement sont devenues définitives et que le nombre maximal de fonctionnaires pouvant bénéficier d'un avancement de grade a été atteint ;
- le tableau litigieux a été établi par ordre de mérite et non au vu de la seule ancienneté des agents promouvables ;
- M. A... n'a pas réussi l'examen professionnel permettant une inscription au tableau.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2024, M. A..., représenté par Me Olejniczak, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure d'établissement du tableau d'avancement au titre de l'année 2019 est irrégulière dès lors que la commission administrative paritaire n'a pas été mise à même de procéder à l'examen de sa valeur professionnelle ;
- le tableau d'avancement méconnaît l'article 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 dès lors qu'il a été établi au vu de la seule ancienneté des agents sans tenir compte de leur valeur professionnelle et des acquis de leur expérience professionnelle ;
- il aurait dû bénéficier d'un avancement de grade par la voie de l'examen professionnel ;
- l'annulation du tableau d'avancement au titre de l'année 2019 implique le réexamen de sa situation en vue d'une inscription à ce tableau dès lors que le nombre maximal d'agents pouvant être promus au grade d'éducateur territorial des activités physiques et sportives principal de 2ème classe n'a pas été atteint.
Par une ordonnance du 29 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu à la date du 29 mai 2024, à 12 heures.
II. Par une requête enregistrée le 1er septembre 2023 sous le n° 23DA01737, la commune de Lille, représentée par Me Fillieux, demande à la cour d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement n° 2006076 du 3 juillet 2023.
Elle soutient que les moyens soulevés dans sa requête n° 23DA01736 sont sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet de la demande d'annulation présentée par M. A..., conformément aux conditions posées par l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Par une ordonnance du 20 mars 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée à la date du 25 avril 2024, à 12 heures.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2010-329 du 22 mars 2010 ;
- le décret n° 2011-605 du 30 mai 2011 ;
- le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public ;
- les observations de Me Fillieux, représentant la commune de Lille, et de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est titulaire du grade d'éducateur territorial des activités physiques et sportives depuis le 12 novembre 2014 et exerce ses fonctions au sein de la commune de Lille. Par un arrêté du 5 mars 2020, la maire de la commune de Lille a arrêté le tableau d'avancement pour l'accès au grade d'éducateur des activités physiques et sportives principal de 2ème classe au titre de l'année 2019, sur lequel le nom de M. A... ne figure pas. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, la commune de Lille fait appel du jugement du 3 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté et a enjoint à l'administration de réexaminer la demande de M. A... et demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement dans l'attente que la juridiction statue sur le fond.
Sur la requête n° 23DA01736 :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 5 mars 2020 :
2. Aux termes de l'article 79 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, applicable au litige : " L'avancement de grade a lieu de façon continue d'un grade au grade immédiatement supérieur. Il peut être dérogé à cette règle dans les cas où l'avancement est subordonné à une sélection professionnelle. / Il a lieu suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : / 1° Soit au choix par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents. Sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, l'autorité territoriale tient compte des lignes directrices de gestion prévues à l'article 33-5 ; / (...) / 2° Soit par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après une sélection par voie d'examen professionnel ; / (...) " et aux termes de l'article 49 de la même loi : " (...) / Le nombre maximum de fonctionnaires appartenant à l'un des cadres d'emplois ou corps régis par la présente loi, à l'exception du cadre d'emplois des agents de police municipale, pouvant être promus à l'un des grades d'avancement de ce cadre d'emplois ou de ce corps est déterminé par application d'un taux de promotion à l'effectif des fonctionnaires remplissant les conditions pour cet avancement de grade. Ce taux de promotion est fixé par l'assemblée délibérante après avis du comité social territorial. / (...) ".
3. L'article 25 du décret du 22 mars 2010 portant dispositions statutaires communes à divers cadres d'emplois de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-594 du 12 mai 2016 portant dispositions statutaires communes à divers cadres d'emplois de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique territoriale, dispose que : " I. - Peuvent être promus au deuxième grade de l'un des cadres d'emplois régis par le présent décret : / 1° Par la voie d'un examen professionnel, les fonctionnaires ayant au moins atteint le 4e échelon du premier grade et justifiant d'au moins trois années de services effectifs dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau ; / 2° Par la voie du choix, après inscription sur un tableau d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire, les fonctionnaires justifiant d'au moins un an dans le 6e échelon du premier grade et d'au moins cinq années de services effectifs dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau. / Le nombre de promotions susceptibles d'être prononcées au titre du 1° ou du 2° ne peut être inférieur au quart du nombre total des promotions. / Toutefois, lorsqu'une seule promotion est prononcée au titre d'une année par l'autorité territoriale en vertu du 1° ou du 2°, les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables. Lorsqu'elle intervient dans les trois ans suivant cette promotion, la promotion suivante ne peut être effectuée qu'en application de l'autre voie d'avancement. Dans cette hypothèse, la règle qui précède est à nouveau applicable ". En outre, aux termes de l'article 8 du décret du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires territoriaux : " Pour l'établissement du tableau d'avancement prévu à l'article 80 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et de la liste d'aptitude prévue à l'article 39 de cette même loi, il est procédé à une appréciation de la valeur professionnelle du fonctionnaire, compte tenu notamment : / 1° Des comptes rendus d'entretiens professionnels ; / 2° Des propositions motivées formulées par le chef de service ; / 3° Et, pour la période antérieure à la mise en place de l'entretien professionnel, des notations. / Les fonctionnaires sont inscrits au tableau d'avancement par ordre de mérite ou sur la liste d'aptitude. Les candidats dont le mérite est jugé égal sont départagés par l'ancienneté dans le grade ".
S'agissant du moyen retenu par le tribunal administratif :
4. D'une part, pour élaborer les propositions qu'elle soumet à l'appréciation de la commission administrative paritaire, l'autorité compétente doit avoir procédé à un examen approfondi de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle de chacun des agents remplissant les conditions pour être promus et tenir à la disposition de cette commission les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour établir son projet de tableau après avoir comparé les mérites respectifs des agents.
5. D'autre part, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la note de service du 2 août 2018, que, pour l'établissement en 2019 du tableau d'avancement au grade d'éducateur des activités physiques et sportives principal de 2ème classe, l'administration a examiné la valeur professionnelle des agents promouvables en tenant compte des propositions motivées formulées par leurs chefs de service. Si M. A... soutient que son dernier compte-rendu d'entretien professionnel a été établi le 22 novembre 2017, au titre de l'année 2016, mettant la commission administrative paritaire dans l'impossibilité d'examiner sa valeur professionnelle, il n'est pas contesté que les propositions motivées présentées par les chefs de service, dont celle le concernant, et sur lesquelles l'administration s'est fondée pour procéder à un examen approfondi de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle de chacun des agents promouvables, ont été mises à la disposition de la commission administrative paritaire appelée à rendre un avis sur le projet de tableau. Au demeurant, il ressort du procès-verbal de la commission du 18 décembre 2019 qu'aucun membre de la commission n'a sollicité de la part de l'administration la mise à disposition de ces éléments d'appréciation, ou celle des comptes-rendus professionnels des candidats à la promotion. Dans ces conditions, la circonstance que l'administration n'a pas été en mesure de mettre à la disposition de la commission administrative paritaire les derniers comptes-rendus d'évaluation de M. A... n'a pas exercé, en l'espèce, d'influence sur le sens de la décision prise et n'a pas privé l'intéressé d'une garantie. Par ailleurs, l'administration n'était nullement tenue de communiquer à la commission administrative paritaire les observations de M. A... manifestant son désaccord quant aux appréciations figurant sur la proposition de son chef de service, au demeurant favorable à son avancement.
7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 5 mars 2020 au motif que la consultation de la commission administrative paritaire a été irrégulière, faute pour celle-ci d'avoir eu à sa disposition les éléments lui permettant d'émettre un avis éclairé sur la proposition de tableau d'avancement émise par l'administration. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif et devant la cour.
S'agissant des autres moyens soulevés par M. A... :
8. En premier lieu, si l'arrêté en litige, la proposition soumise à la commission administrative paritaire et le procès-verbal de cette dernière font mention d'un avancement " par ancienneté ", il ressort des pièces du dossier, notamment des propositions d'avancement établies par les chefs de service et soumises à la commission, qui comportent une appréciation de la valeur professionnelle des agents, que la mention précitée est seulement utilisée pour désigner l'avancement au choix mentionné au 2° de l'article 25 du décret du 22 mars 2010, qui réserve cette voie de promotion aux agents remplissant certaines conditions d'ancienneté. En outre, si la commune, ainsi qu'elle le soutient dans ses écritures de première instance, a pu faire application des dispositions de l'article 8 du décret du 16 décembre 2014 en tenant compte de l'ancienneté dans le grade pour départager les agents, à mérite égal, il ne ressort pas du tableau litigieux que le critère de l'ancienneté ait seul été pris en compte, dès lors que certains des agents promouvables n'ont pas été inscrits au tableau, en dépit d'une ancienneté dans le grade plus importante que celle des agents y figurant. Par suite, le moyen tiré de ce que le tableau d'avancement aurait été établi au vu du seul critère de l'ancienneté, sans tenir compte des mérites respectifs des agents, doit être écarté.
9. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que M. A... remplirait les conditions pour bénéficier d'un avancement de grade par la voie de l'examen professionnel est inopérant à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en litige, relatif à l'établissement d'un tableau d'avancement au choix, ainsi qu'il a été énoncé au point précédent. Au demeurant, M. A..., qui se prévaut seulement d'une attestation de réussite aux épreuves de l'examen professionnel permettant une nomination dans le cadre d'emploi des éducateurs des activités physiques et sportives, ne justifie pas avoir réussi l'examen professionnel pour une promotion au second grade de ce cadre d'emploi.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Lille est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté en litige et, par voie de conséquence, lui a enjoint de réexaminer la demande de M. A... tendant à son inscription au tableau d'avancement de l'année 2019.
En ce qui concerne les frais exposés et non compris dans les dépens :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lille, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que demande la commune de Lille sur le même fondement.
Sur la requête n° 23DA01737 :
12. Dès lors que le présent arrêt se prononce sur la requête de la commune de Lille tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lille du 3 juillet 2023, les conclusions de la requête n° 23DA01737 tendant au sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2006076 du 3 juillet 2023 du tribunal administratif de Lille est annulé. La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23DA01737 de la commune de Lille.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lille et à M. B... A....
Délibéré après l'audience publique du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre ;
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur :
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls Carlier
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière
C. Huls-Carlier
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Nos 23DA01736 et 23DA01737