Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... et C... B... et la société civile immobilière (SCI) des Lauriers ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision par laquelle le président de la métropole européenne de Lille (MEL) a implicitement rejeté leur demande présentée le 31 mars 2022 tendant à l'abrogation partielle de la délibération du 12 décembre 2019 par laquelle le conseil de la MEL a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) en tant que ce document classe en zone AUDm leurs parcelles cadastrées section AX n° 353, 945, 947, 972, 977 et 978, situées sur le territoire de la commune de Wasquehal.
Par un jugement n° 2205454 du 15 mai 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2023, et un mémoire, enregistré le 9 avril 2024, M. et Mme B... et D..., représentés par Me Elsa Lehérissey, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions portant sur le classement en zone AUDm de leurs parcelles ;
2°) d'annuler la décision implicite du président de la MEL de refus d'abrogation partielle de la délibération du 12 décembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au président de la métropole européenne de Lille de mettre à l'ordre du jour du prochain conseil communautaire, l'abrogation du plan local d'urbanisme intercommunal en tant qu'il a maintenu les parcelles cadastrées Section AX 947, 972, 977, 978 en zone AUDM et prescrire la révision du PLUi afin de classer ces parcelles en zone urbaine mixte ou, à défaut en zone AUCM, et ce, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la métropole européenne de Lille la somme de 2 000 euros, à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que le classement en zone à urbaniser des parcelles leur appartenant est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les réseaux sont suffisants pour classer leurs terrains en zone urbaine et que l'appréciation de cette suffisance des réseaux devait se faire au regard de la situation des parcelles et non des projets prévus pour celles-ci.
Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 28 février 2024 et le 24 avril 2024, la métropole européenne de Lille, représentée par Me Guillaume Chaineau, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme B... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 23 mai 2024, la clôture d'instruction a été prononcée avec effet immédiat en application des article R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me Lehérissey, représentant M. et Mme B... et D..., et de E..., représentant la métropole européenne de Lille.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. M. et Mme B... sont propriétaires de parcelles situées 14 sentier du laurier sur le territoire de la commune de Wasquehal qui est couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal que le conseil de la métropole européenne de Lille a approuvé par une délibération du 12 décembre 2019. Par courrier du 28 mars 2022 reçu le 31 mars suivant, ils ont demandé l'abrogation de cette décision en tant qu'elle classe leurs propriétés en zone à urbaniser, AUDm. Faute de réponse, ils ont saisi le tribunal administratif de Lille. Ils relèvent appel du jugement du 15 mai 2023 qui a rejeté leur demande.
Sur la légalité du classement des parcelles :
2. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Il s'ensuit que, dans l'hypothèse où un changement de circonstances a fait cesser l'illégalité de l'acte réglementaire litigieux à la date à laquelle il statue, le juge de l'excès de pouvoir ne saurait annuler le refus de l'abroger. A l'inverse, si, à la date à laquelle il statue, l'acte réglementaire est devenu illégal en raison d'un changement de circonstances, il appartient au juge d'annuler ce refus d'abroger pour contraindre l'autorité compétente de procéder à son abrogation. Lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision.
3. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme relatif à l'affectation des sols dans les plans locaux d'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. (...) ". Aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ". Il résulte de ces dispositions que la suffisante capacité des réseaux et voiries doit s'apprécier au regard des constructions pouvant potentiellement s'implanter sur l'ensemble de la zone à urbaniser.
4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
5. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal de la métropole européenne de Lille reprend les dispositions citées au point 2 et définit les zones AUDm comme celles ne bénéficiant pas d'une capacité suffisante des réseaux pour desservir les constructions à implanter dans la zone. L'ouverture à l'urbanisation de ces zones est subordonnée à la modification ou à la révision du plan local d'urbanisme.
6. Les parcelles des appelants sont situées en arrière-plan de la rue de Marcq-en-Baroeul qui les dessert et dont elles sont séparées par plusieurs rangs de construction. Elles ne sont pas bâties et sont largement boisées. La zone AUDm délimitée par le plan local d'urbanisme intercommunal les comprenant est beaucoup plus vaste et est tracée selon un axe nord-sud à partir de la rue de Marcq-en-Barœul jusqu'à l'arrière du grand boulevard reliant Lille à Roubaix. Elle est bordée à l'ouest par l'autoroute Lille-Gand et ses voies de desserte et partiellement à l'est par une zone agricole.
7. Les appelants produisent un constat d'un commissaire de justice établi le 27 juin 2023. Celui-ci atteste d'une connexion au réseau d'assainissement, au droit des propriétés des appelants ainsi que, de la largeur de 8 mètres de la voie privée située entre deux propriétés bâties des appelants. Ces éléments limités au seul réseau d'assainissement et à la voirie au droit des propriétés des appelants ne suffisent pas à démontrer la suffisance de la capacité des voiries et des réseaux à desservir l'ensemble des constructions à implanter dans l'ensemble de la zone, qui est bien plus étendue que leurs seules propriétés. Il ressort des pièces du dossier, s'agissant des voiries que, le sentier du laurier qui dessert l'ensemble de la zone, est partiellement bordée par des constructions, a une largeur limitée comprise entre 3,5 m et 6 m et ne permet pas le croisement aisé de deux véhicules sur toute sa longueur. Si la voie privée qu'ils ont établi pour desservir leurs projets a une largeur de 8 mètres, elle ne comporte pas de trottoir. Or, le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal fixe la largeur des voies nouvelles à 4 mètres avec un trottoir d'1,5 mètre de chaque côté. Par ailleurs, cette voie privée ne dessert pas la totalité de la zone AUDm et les appelants reconnaissent qu'elle n'a été dimensionnée que pour desservir 12 constructions alors qu'ils envisagent la réalisation de 23 logements. Enfin, le compte-rendu de la réunion tenue le 21 juin 2021 avec les services de la métropole européenne de Lille, rédigé par le conseil des appelants indique que les représentants de la métropole européenne de Lille ont rappelé que " l'ouverture à l'urbanisation d'une zone AUD demeure conditionnée à la levée de diverses contraintes ". Il ne fait donc, en tout état de cause, pas état d'un engagement ferme et sans équivoque de cet établissement public intercommunal de classer le terrain en zone U. Dans ces conditions, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal n'ont pas commis une erreur manifeste d'appréciation, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges et à la date à laquelle la cour statue, aucun changement de circonstances de fait ou de droit n'a rendu ce classement manifestement illégal. La métropole européenne de Lille n'était donc pas tenue d'abroger le plan local d'urbanisme intercommunal en tant qu'il classe les parcelles des appelants en zone AUDm .
8. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal, par le jugement contesté, a rejeté leur demande d'annulation de la décision implicite refusant d'abroger le plan local d'urbanisme intercommunal de la métropole européenne de Lille en tant qu'il classe leurs parcelles en zone AUDm. Par suite, leurs conclusions à fins d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
9. La métropole européenne de Lille n'étant pas la partie perdante à la présente instance, la demande présentée par les appelants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... et D... une somme globale de 1 000 euros au titre des frais exposés par la métropole européenne de Lille et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... et de D... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme B... et D... verseront à la métropole européenne de Lille une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et C... B... et à D... ainsi qu'à la métropole européenne de Lille.
Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente assesseure,
- M. Denis Perrin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 août 2024.
Le rapporteur,
Signé : D. Perrin
La présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA01365 2