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14/05/2024 | FRANCE | N°23DA01836

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 14 mai 2024, 23DA01836


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Somme a implicitement rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 22 juin 2017.



Par un jugement n° 2200387 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2023, M. A..., représen

té par Me Emmanuelle Pereira, demande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugement ;



2°) d'annuler la décisio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Somme a implicitement rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 22 juin 2017.

Par un jugement n° 2200387 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2023, M. A..., représenté par Me Emmanuelle Pereira, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite du préfet de la Somme ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de procéder à l'abrogation de l'arrêté du 22 juin 2017, dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir ;

Il soutient que la décision attaquée est contraire aux dispositions de l'article L. 632-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2023, le préfet de la Somme conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2023.

Par une ordonnance du 19 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique ;

- le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Caroline Regnier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant guinéen né le 2 mai 1988, entré sur le territoire français le 6 août 2003, à l'âge de 15 ans, a bénéficié de plusieurs titres de séjour valables du 9 octobre 2007 au 8 octobre 2015. Par un arrêté du 22 juin 2017, pris sur avis favorable de la commission d'expulsion du 18 avril 2017, le préfet de la Somme a prononcé l'expulsion du territoire français de M. A.... Par un courrier du 12 mai 2021, reçu le 19 mai suivant, l'intéressé a demandé à la préfète de la Somme d'abroger cet arrêté. Il relève appel du jugement du 6 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 632-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Il ne peut être fait droit à une demande d'abrogation d'une décision d'expulsion présentée plus de deux mois après la notification de cette décision que si le ressortissant étranger réside hors de France. Cette condition ne s'applique pas : / 1° Pour la mise en œuvre de l'article L. 632-6 ; / 2° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d'emprisonnement ferme ; / 3° Lorsque l'étranger fait l'objet d'une décision d'assignation à résidence prise en application des articles L. 731-3, L. 731-4 ou L. 731-5. ". Aux termes de l'article L. 632-6 du même code : " Sans préjudice des dispositions des articles L. 632-3 et L. 632-4, les motifs de la décision d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de sa date d'édiction. L'autorité compétente tient compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de cette décision. L'étranger peut présenter des observations écrites. / A défaut de notification à l'intéressé d'une décision explicite d'abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite de ne pas abroger. Cette décision est susceptible de recours. Le réexamen ne donne pas lieu à consultation de la commission mentionnée à l'article L. 632-1. "

3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. Pour décider, par arrêté du 22 juin 2017, d'expulser M. A..., qui était alors célibataire sans enfant, le préfet de la Somme a précisé que l'intéressé avait fait l'objet de quinze condamnations prononcées par plusieurs tribunaux correctionnels, entre les 11 juin 2008 et 14 avril 2015, portant principalement sur des faits constitutifs de vols avec violences, de ports d'armes et d'infractions à la législation sur les stupéfiants. L'arrêté d'expulsion n'a pas été exécuté en raison, notamment, des convocations de l'intéressé dans le cadre d'instructions judiciaires ayant justifié l'assignation à résidence de M. A... à compter du 22 juin 2017 jusqu'à son incarcération, l'intéressé ayant commis de nouvelles infraction pénales postérieurement à l'arrêté du 22 juin 2017 et a été condamné les 13 juillet 2017, 11 décembre 2017, 29 mars 2019, 12 février 2020 et 14 juin 2021 pour avoir commis des faits de port d'arme sans motif légitime, usage de stupéfiants, vol en réunion en récidive, agression sexuelle en réunion et vol avec violence. A sa libération, le requérant a été éloigné du territoire français le 13 mai 2023 à destination de la Guinée.

5. Pour solliciter l'abrogation de l'arrêté du 22 juin 2017, M. A... soutient que l'administration doit tenir compte, en application des dispositions précitées de l'article L. 632-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale dès lors qu'il vit en couple avec une ressortissante française avec laquelle il a eu deux enfants de nationalité française. Toutefois, en se bornant à verser une attestation de sa compagne qui précise qu'il accompagne son enfant à l'école, le requérant n'établit pas contribuer, à la hauteur de ses moyens, à l'entretien et à l'éducation de ses enfants. En outre, il résulte du jugement du juge de l'application des peines du 4 mai 2021, statuant sur une demande d'aménagement de peine présentée par M. A..., qu'il résidait chez sa mère et non avec sa compagne. En outre ledit jugement a relevé l'inefficacité des nombreux placements de l'intéressé sous surveillance électronique en raison de sa persistance à commettre des infractions, ainsi qu'il a été dit au point 4. Dès lors, M. A... n'établit pas que le préfet de la Somme aurait dû abroger son expulsion compte tenu de l'absence d'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France. Il n'établit pas d'avantage que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale eu égard aux motifs de la décision d'expulsion, ni que l'administration n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de ses enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations citées aux points 2 et 3 doit être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de la cour

- M. Marc Baronnet, premier conseiller

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLa présidente de la chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°23DA01836


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01836
Date de la décision : 14/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-14;23da01836 ?
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