La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2024 | FRANCE | N°23DA02176

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 07 mai 2024, 23DA02176


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 24 avril 2023 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2304343 du 24 juillet 2023, le magistrat désigné par le p

résident du tribunal administratif de Lille a renvoyé à une formation collégiale du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 24 avril 2023 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2304343 du 24 juillet 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a renvoyé à une formation collégiale du tribunal administratif les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 avril 2023 en tant qu'il refuse la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., et a rejeté le surplus de ses conclusions d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Gommeaux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 juillet 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 avril 2023 en toutes ses dispositions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours sous une astreinte de même montant ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le premier juge ne pouvait renvoyer ses conclusions d'annulation de la décision de refus de séjour en formation collégiale dès lors que cette décision est assortie d'une mesure d'éloignement prise sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- c'est à tort que le premier juge a écarté le moyen soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de séjour ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'article L. 412-3 du même code dès lors que la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant n'est pas subordonnée à une entrée régulière sous couvert d'un visa de long séjour ;

- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée au regard de son entrée irrégulière ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 422-1 et L. 435-1 du code précité ;

- cette décision est également entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité dont est entachée la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet du Pas-de-Calais qui n'a pas présenté d'observations.

Par une ordonnance du 6 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 26 mars 2024, à 12 heures.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant angolais né le 7 mai 1996, déclare être entré irrégulièrement en France le 20 mai 2019, accompagné de son épouse, afin de déposer une demande d'asile. Cette demande a toutefois été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 31 janvier 2022, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 30 décembre suivant. Par un arrêté du 23 mars 2023, le préfet du Pas-de-Calais a refusé d'accorder à M. B... un titre de séjour en qualité de réfugié ou de bénéficiaire d'une protection subsidiaire et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de l'Angola. Saisi par M. B... d'une demande tendant à obtenir la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, le préfet a pris à son encontre un second arrêté le 24 avril 2023 rejetant cette demande et l'obligeant à quitter le territoire français. Par un jugement du 24 juillet 2023, dont M. B... demande l'annulation, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille, d'une part, a renvoyé à une formation collégiale les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 avril 2023 en tant qu'il refuse la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, et, d'autre part, a rejeté le surplus de ses conclusions d'annulation.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ". Aux termes de l'article L. 614-5 du même code, applicable à la date de l'arrêté contesté : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision. / (...) / Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. / L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. / L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. Lorsque l'étranger conteste une décision portant obligation de quitter le territoire fondée sur le 4° de l'article L. 611-1 et une décision relative au séjour intervenue concomitamment, le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin statue par une seule décision sur les deux contestations ".

3. Les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obstacle, dans l'hypothèse où un étranger, à qui a été refusée la reconnaissance de la qualité de réfugié ou la protection subsidiaire et qui a fait l'objet d'une ou, le cas échéant, de plusieurs obligations de quitter le territoire français fondées sur le 4° de cet article, a présenté une demande tendant à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour, à ce que l'autorité administrative assortisse le refus qu'elle est susceptible d'opposer à cette demande d'une obligation de quitter le territoire français fondée sur le 4° de cet article.

4. Dans une telle hypothèse, la décision relative au séjour et l'obligation de quitter le territoire français dont elle est assortie doivent être regardées comme intervenues concomitamment au sens du dernier alinéa de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, la contestation de la décision relative au séjour à l'occasion d'un recours contre l'obligation de quitter le territoire français suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire prévu par cet article.

5. Si, par son arrêté du 24 avril 2023, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant à M. B..., il ressort des termes mêmes de cet arrêté qu'il a obligé l'intéressé à quitter le territoire français sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille était compétent pour statuer, par un seul jugement, sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour prise concomitamment à la mesure d'éloignement fondée sur le 4° de l'article L. 611-1 précité, présentées par M. B... à l'occasion du recours formé contre l'arrêté du 24 avril 2023, et n'avait pas à renvoyer ces conclusions à une formation collégiale. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité et doit être annulé sur ce point.

6. Il y a lieu d'évoquer dans la mesure de cette annulation, de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... contre le refus de séjour et de statuer, dans le cadre de l'effet dévolutif, sur le surplus de ses conclusions d'appel.

Sur la légalité du refus de séjour :

7. En premier lieu, par un arrêté du 26 décembre 2022, régulièrement publié au recueil spécial n°173 des actes administratifs de l'Etat dans le département du Pas-de-Calais du 27 décembre 2022, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation au directeur des migrations et de l'intégration et, en cas d'absence ou d'empêchement, à M. C... A..., chef du bureau du contentieux du droit des étrangers et signataire de l'arrêté en litige, aux fins de signer, notamment, la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de refus de séjour doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Aux termes de l'article L. 412-3 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 412-1 l'autorité administrative peut, sans que soit exigée la production du visa de long séjour mentionné au même article, accorder les cartes de séjour suivantes : / 1° La carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " prévue à l'article L. 422-1 (...) ".

9. Si les dispositions précitées de l'article L. 412-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent à l'autorité compétente, sans l'y obliger, de délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " sans exiger la production d'un visa de long séjour, l'article L. 422-1 du même code subordonne à une entrée régulière la possibilité d'accorder un tel titre en cas de nécessité liée au déroulement des études. Dès lors, le préfet du Pas-de-Calais a pu, sans commettre d'erreur de droit, refuser un titre de séjour en qualité d'étudiant à M. B... en relevant que l'intéressé ne justifiait pas d'un visa de long séjour et que, s'il faisait état de la nécessité liée au déroulement de ses études, il ne démontrait pas plus être entré régulièrement sur le territoire français.

10. En troisième lieu, si le préfet du Pas-de-Calais a refusé de délivrer le titre de séjour demandé en qualité d'étudiant au motif que M. B... ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français, il n'a pas pour autant déduit de cette circonstance qu'il se trouvait en situation de compétence liée pour refuser le droit au séjour. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur de droit sur ce point.

11. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que le requérant est inscrit depuis 2021 à l'institut universitaire de Lens, en gestion des entreprises et des administrations, en vue d'obtenir le diplôme de bachelor universitaire de technologie (BUT). M. B..., qui ne conteste pas l'absence d'entrée régulière sur le territoire français, soutient que le préfet du Pas-de-Calais devait exercer son pouvoir de régularisation pour lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant et produit à l'instance des attestations de responsables de la formation mentionnant qu'il donne satisfaction en matière d'assiduité, de travail et de comportement, qu'il a obtenu sa première année sans aucune unité d'enseignement défaillante et qu'il semble parfaitement en capacité de poursuivre son cursus avec succès, en vue d'une insertion professionnelle réussie. Toutefois, eu égard aux circonstances de son arrivée en France, aux conditions dans lesquelles il y est demeuré jusqu'à la date de la décision attaquée et aux résultats obtenus dans le déroulement de ses études, le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant sans envisager de le dispenser de la production d'un visa de long séjour ou de la justification d'une entrée régulière.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de justice administrative : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

13. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré sur le territoire français le 20 mai 2019, moins de quatre ans avant l'édiction de la décision attaquée. Il a fait l'objet d'un arrêté de transfert au Portugal le 19 août 2019 en vue de l'examen de sa demande d'asile. Cet arrêté n'ayant pas été exécuté, sa demande d'asile a été examinée par l'OFPRA qui l'a rejetée par une décision du 31 janvier 2022, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 30 décembre suivant. S'il fait état de la présence en France de ses deux enfants, nés les 4 janvier 2020 et 4 mars 2023 de son union avec une compatriote en situation irrégulière, il n'est pas établi, eu égard notamment au jeune âge des enfants, que l'ensemble de la cellule familiale ne pourrait se reformer dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et en dépit des études universitaires qu'il a engagées en France pendant l'examen de sa demande d'asile, il ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels permettant la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale ". Si une promesse d'embauche lui a été faite le 1er mars 2023 pour un poste d'assistant comptable, cette circonstance ne constitue pas non plus un motif exceptionnel au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de justice administrative. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Pas-de-Calais a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1.

14. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 13 que le préfet du Pas-de-Calais n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur la situation du requérant.

15. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions d'annulation de l'arrêté du 24 avril 2023 en tant que, par cet arrêté, le préfet a refusé un titre de séjour à M. B..., ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :

16. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet du Pas-de-Calais a obligé M. B... à quitter le territoire français sur le seul fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que sa demande d'asile avait été définitivement rejetée. Dans ces conditions, il ne saurait utilement se prévaloir, à l'appui de sa contestation de la mesure d'éloignement, d'une illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant, qui n'en constitue pas le fondement. En tout état de cause, l'ensemble des moyens soulevés par M. B... à l'encontre de cette décision de refus de séjour ayant été écartés, il n'est pas fondé à soutenir qu'elle serait entachée d'une illégalité susceptible de priver de base légale la mesure d'éloignement dont il fait l'objet.

17. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

18. Eu égard aux conditions et à la durée du séjour en France de M. B..., et compte tenu de ce qui a été dit au point 13 ci-dessus, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas, en obligeant M. B... à quitter le territoire français, porté d'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par une telle mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

19. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".

20. Ainsi qu'il a été dit plus haut, si M. B... a deux enfants nés en France les 4 janvier 2020 et 4 mars 2023 de son union avec une compatriote en situation irrégulière, rien ne fait obstacle, eu égard notamment au jeune âge des enfants, à la reconstitution de la cellule familiale dans le pays d'origine de la famille. Il n'est pas établi que l'aîné des enfants ne pourrait poursuivre sa scolarité dans ce même pays. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

21. En quatrième lieu, l'ensemble des moyens soulevés par M. B... à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ayant été écartés, il n'est pas fondé à soutenir qu'elle serait entachée d'illégalité. Il n'est donc pas plus fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité de cette mesure d'éloignement.

22. En dernier lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

23. M. B... soutient qu'il s'est trouvé dans l'obligation de quitter l'Angola en raison des persécutions que son épouse et lui y ont subies de la part du précédent conjoint de Mme B.... Toutefois, le requérant, dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA puis par la Cour nationale du droit d'asile, n'apporte aucun élément de nature à justifier la réalité et l'actualité des risques de traitements inhumains et dégradants qu'il allègue. Le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doit être écarté.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 avril 2023 en tant que, par cet arrêté, le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français à destination de l'Angola.

25. Il résulte des points 15 et 24 que les conclusions présentées par M. B... à fin d'injonction, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille n° 2304343 du 24 juillet 2023 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 avril 2023 en tant que, par cet arrêté, le préfet du Pas-de-Calais lui a refusé un titre de séjour, sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Gommeaux.

Copie en sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 16 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,

Signé : M.-P. Viard

Le greffier,

Signé : F. Cheppe

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

Le greffier

F. Cheppe

2

N° 23DA02176


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA02176
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : GOMMEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;23da02176 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award