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31/10/2023 | FRANCE | N°23DA00681

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 31 octobre 2023, 23DA00681


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 16 mai 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2202686 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le

14 avril 2023, Mme A... représentée par Me Marie Lepeuc, demande à la cour :

1°) d'annuler ce ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 16 mai 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2202686 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 avril 2023, Mme A... représentée par Me Marie Lepeuc, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire, valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou à défaut, d'enjoindre à l'administration de l'admettre provisoirement au séjour et de réexaminer sa situation dans le même délai, et dans l'attente de lui délivrer un récépissé de sa demande dans un délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas été précédée de la saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 20 juin 2023, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante camerounaise née le 11 octobre 1987, est entrée en France à une date inconnue après avoir transité par l'Espagne munie d'un visa court séjour délivré par les autorités espagnoles. Le 11 mars 2022, elle a sollicité son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 16 mai 2022, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 15 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et, notamment pas des termes de l'arrêté attaqué, que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de Mme A.... Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que si Mme A... se prévaut de son concubinage avec un ressortissant ivoirien en situation régulière et de la naissance de leur fils D... B..., le 18 octobre 2021, leur communauté de vie, qui a commencé au cours de l'année 2021, présente un caractère particulièrement récent à la date de l'arrêté. En outre, si l'intéressée se prévaut d'être engagée en tant que bénévole auprès de l'association Visages d'Espoir et auprès du Secours Catholique, elle n'établit ni la durée ni l'intensité de cet engagement associatif. Ainsi, elle ne justifie pas d'une insertion socioprofessionnelle particulière sur le territoire français, ni d'aucune attache familiale en France en dehors de celle de son compagnon et de leur enfant qui a vocation à les suivre. A cet égard, enfin, aucun obstacle sérieux ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Côte d'Ivoire, pays dont son compagnon a la nationalité, ou au Cameroun, pays où l'appelante a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans et où résident ses deux autres enfants nés d'une précédente union. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté contesté a été pris et n'a, par suite, méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales , ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que les mesures en litige ne portent pas atteinte à son intérêt supérieur. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le préfet de la Seine Maritime n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de Mme A....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

6. Mme A... n'établit ni même ne soutient avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au surplus, compte tenu de ce qui vient d'être dit au point 4, son admission au séjour ne peut être regardée comme répondant à des considérations humanitaires ou se justifiant par des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Maritime aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté, en toute hypothèse.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ;2° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer la carte de résident prévue aux articles L. 423-11, L. 423-12, L. 424-1, L. 424-3, L. 424-13, L. 424-21, L. 425-3, L. 426-1, L. 426-2, L. 426-3, L. 426-6, L. 426-7 ou L. 426-10 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / (...) / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles cités par le 1° et le 2° de cet article L. 423-13 et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

8. Pour les motifs précédemment indiqués, Mme A... ne remplissait pas les conditions prévues par l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 6, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, le préfet de la Seine-Maritime n'était pas tenu de soumettre sa demande de titre de séjour à la commission du titre de séjour avant de la rejeter. Le moyen tiré du vice de procédure ne peut, dès lors, qu'être écarté.

9. En dernier lieu, les moyens dirigés contre le refus de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination n'étant pas fondés, l'appelante ne saurait soutenir que ces deux dernières décisions seraient privées de base légale.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mai 2022. Il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et, par voie de conséquence, celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Lepeuc.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 10 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Thierry Sorin, président de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2023.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de chambre

Signé : T. Sorin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

2

N°23DA00681


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00681
Date de la décision : 31/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : LEPEUC

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-10-31;23da00681 ?
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