Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 par lequel la préfète de l'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 22000763 du 2 juin 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2022, M. B..., représenté par Me Emmanuelle Pereira, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrance d'une autorisation de travail est insuffisamment motivée ;
- le défaut d'examen sérieux de la demande d'autorisation de travail entache d'illégalité la décision de refus de délivrance de titre de séjour ;
- la décision préfectorale est entachée d'une erreur de droit ;
- la décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; il n'a d'attaches qu'en France où il est entré à un jeune âge en mai 2016, et où il est intégré socialement et professionnellement, ayant signé un contrat d'apprentissage rémunéré de trois ans de juin 2021 à juin 2024 ; cette décision a donc des conséquences excessives et disproportionnées sur sa situation personnelle ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2022, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 30 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2023.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant malien, né le 26 juillet 2000 à Bamako (Mali), est entré en France le 8 mai 2016 et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance le 27 juin 2016. Il relève appel du jugement du 2 juin 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2022 par lequel la préfète de l'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.
Sur les autres conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Aux termes de l'article L. 421-3 du même code : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou qui fait l'objet d'un détachement conformément aux articles L. 1262-1, L. 1262-2 et L. 1262-2-1 du code du travail se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " d'une durée maximale d'un an. La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente :/ 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".
3. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432- 14.Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ".
4. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que, pour prendre sa décision de refus de délivrance du titre de séjour, la préfète s'est fondée, non sur l'absence d'une autorisation de travail, mais, d'une part, sur l'absence de visa long séjour exigé par l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité pour la délivrance d'un titre de séjour au titre des articles L. 421-3 et L. 421-4 de ce code, et, d'autre part, sur l'absence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant l'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé sur le fondement de l'article L. 435-1 du même code. Par ailleurs, la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise sur le fondement de la décision portant refus du titre de séjour. L'intéressé n'est par suite pas fondé à exciper de l'illégalité d'une décision portant refus de délivrance de l'autorisation de travail, au motif de son insuffisance de motivation et du défaut d'examen sérieux d'une demande d'autorisation de travail qui n'a, au demeurant, pas été formulée, à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
5. Le moyen tiré concomitamment de l'erreur de droit qu'aurait commise la préfète de l'Oise n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant à la juridiction d'en apprécier le bien-fondé.
6. En deuxième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement d'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Si un étranger ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre d'une obligation de quitter le territoire français alors qu'il n'avait pas présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de cet article et que l'autorité compétente n'a pas procédé à un examen d'un éventuel droit au séjour à ce titre, en l'espèce, la préfète de l'Oise a procédé à cet examen, contrairement à ce que soutient M. B....
7. En l'espèce, M. B... fait valoir qu'il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de quinze ans et onze mois, et qu'il a signé un contrat d'apprentissage de trois ans, valable de juin 2021 à juin 2024, et qu'il est inséré professionnellement et socialement. Cependant, M. B... n'établit pas le décès allégué de ses parents ni l'absence d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine. Compte tenu du caractère récent de son contrat d'apprentissage, au demeurant signé sans l'autorisation de travail préalable requise par l'article L. 412-1 précité, et alors qu'il avait déjà fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français le 13 août 2018, confirmé par le tribunal administratif d'Amiens le 22 janvier 2019 et par la cour de céans le 14 novembre 2019, puis d'une nouvelle obligation de quitter le territoire français du 31 mai 2020, décisions qu'il n'a pas exécutées, il résulte de l'appréciation globale de la situation du requérant au regard tant de ses liens privés et familiaux en France et dans son pays d'origine que de sa situation en matière de formation, d'emploi, et d'insertion dans la société française, que la préfète de l'Oise n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant que l'admission au séjour de M. B... ne répondait pas à des considérations humanitaires ni ne se justifiait au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir.
8. Pour les mêmes motifs et à supposer le moyen soulevé, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Oise aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 12 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
- M. Thierry Sorin, président de chambre,
- M. Marc Baronnet, président-assesseur,
- M. Toutias, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2023.
Le président-rapporteur,
Signé : M. BaronnetLe président de chambre,
Signé : T. Sorin
La greffière,
Signé : A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Anne-Sophie Villette
N°22DA01900 2