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04/07/2023 | FRANCE | N°22DA01898

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 04 juillet 2023, 22DA01898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... a prononcé sa révocation.

Par un jugement n° 1910425 du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et a rejeté les conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 septembre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... a prononcé sa révocation.

Par un jugement n° 1910425 du 8 avril 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et a rejeté les conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 septembre et le 19 octobre 2022 et les 22 mars et 20 avril 2023, M. B..., représenté par Me Voisin demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... a prononcé sa révocation.

Il soutient que :

- la requête est recevable ;

- il y a eu méconnaissance de la protection prévue par les dispositions de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 ;

- la sanction est disproportionnée ;

- l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir.

Par des mémoires, enregistrés le 20 décembre 2022 et le 30 mars 2023 le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D..., représenté par Me Fillieux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête est tardive et n'a pas fait l'objet de régularisation dans les délais impartis, qu'ainsi elle est irrecevable ;

- les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 5 juillet 2022.

Par ordonnance du 30 mars 2023, la date de clôture de l'instruction a été fixée au 26 avril 2023 à 12 heures.

Le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... a produit un mémoire le 5 juin 2023 après clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Malfoy, rapporteur public,

- les observations de Me Fillieux, représentant le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D... et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., adjoint technique de 2ème classe, exerçait ses fonctions au centre de gestion de la fonction publique territoriale du D.... Par décision du 30 novembre 2017, le président de ce centre de gestion a prononcé son exclusion de fonctions pour une durée de deux années à compter du 1er décembre 2017. Par une décision du 7 octobre 2019, le président de ce centre de gestion a prononcé la sanction de révocation à l'encontre de M. B.... Par un jugement du 8 avril 2022 le tribunal administratif de Lille a notamment rejeté les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 octobre 2019 prononçant sa révocation à compter du 1er novembre 2019. M. B... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 applicable en l'espèce : " Aucune mesure concernant notamment (..) la discipline (...) ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, aux autorités judiciaires ou administratives de faits constitutifs d'un délit, d'un crime ou susceptibles d'être qualifiés de conflit d'intérêts au sens du I de l'article 25 bis dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions. / Aucun fonctionnaire ne peut être sanctionné ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de

la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. (...) En cas de litige relatif à l'application quatre premiers alinéas, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu'elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit, d'un crime, d'une situation de conflit d'intérêts ou d'un signalement constitutif d'une alerte au sens de l'article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. (...) ".

3. M. B... fait valoir qu'il a déposé une plainte adressée le 23 mars 2017 au procureur de la République près le tribunal judiciaire de C... dans laquelle il dénonce des agissements du président du centre de gestion et qui a entraîné la condamnation pénale de l'intéressé. Pour fonder la sanction de révocation, le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale reproche à M. B... d'avoir manqué à ses obligations de réserve et de discrétion et d'avoir manifesté son hostilité envers lui et sa directrice de cabinet, par des propos irrespectueux, inappropriés et déplacés, d'avoir manqué à son obligation de respect dû à ses collègues syndicalistes en remettant en cause, par des propos très virulents, leurs probité, légitimité et compétence. Il lui est également fait reproche d'avoir manqué à son obligation de respect dû à ses collègues qui gèrent l'association de l'amicale du personnel en tenant des propos désobligeants et agressifs et d'avoir manqué à ses obligations de réserve et de discrétion en faisant étalage, tant auprès de ses collègues qu'à des personnes extérieures, des différents courriels dans lesquels il tient des propos diffamatoires en des termes virulents et irrespectueux. Eu égard à la teneur des propos en cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que les griefs ainsi reprochés à M. B... seraient directement liés à la plainte qu'il a déposée ou constitueraient des mesures de rétorsion prises à son encontre. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de la protection prévue par les dispositions précitées de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...). Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Quatrième groupe : (...) la révocation. (...) ".

5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi des moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un fonctionnaire ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité des fautes.

6. Le centre de gestion a produit des courriers rédigés entre les mois de décembre 2017 et mai 2019 par M. B..., qui sont formulés en termes très agressifs, recourant à une ironie déplacée, pour remettre en cause l'organisation du centre de gestion, la compétence et la probité de certains de ses collègues et supérieurs, de certains syndicalistes accusés de trahir la vérité et la probité du président du centre de gestion. Le centre de gestion établit également l'existence de menaces proférées par M. B... à l'encontre de l'équipe dirigeante de l'amicale des personnels du centre de gestion notamment dans un courrier du 2 janvier 2017. M. B... a diffusé dans la presse locale ses critiques virulentes empreintes d'un ton déplacé envers son administration et médiatisé des différends d'ordre personnel avec le président du centre de gestion. M. B... souligne que par une ordonnance du 6 janvier 2016 du juge du référé du tribunal de judiciaire de C..., trois délibérations contestées du conseil d'administration de l'association amicale du personnel ont été suspendues car dénuées de valeur juridique privant ainsi toutes les décisions d'effet juridique. Il relève que par jugement du 27 janvier 2022 le tribunal correctionnel de C... a déclaré le président du centre de gestion, par ailleurs élu municipal, coupable de négligence ayant permis la soustraction et le détournement de biens publics. Toutefois même s'il existait une réelle animosité entre l'appelant et le président du centre de gestion et que l'action pénale de M. B... s'est avérée fondée, ces circonstances ne permettaient en aucun cas à l'intéressé de se départir de ses obligations quant au devoir de réserve et de discrétion. Si M. B... fait valoir que du fait de sa souffrance au travail il prenait des psychotropes, les pièces versées au dossier ne permettent pas d'établir une abolition ou une altération de ses facultés de discernement. Compte tenu de la gravité et de la réitération de ces faits, alors que M. B... s'était vu infliger, pour des faits similaires, une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux années le 30 novembre 2017, la sanction de la révocation ne revêt pas un caractère disproportionné. Par suite, le moyen doit être écarté.

7. Enfin, pour les motifs précédemment exposés, la sanction était fondée et le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale du D..., que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué du 8 avril 2022 le tribunal administratif de Lille a notamment rejeté sa demande d'annulation de la sanction de révocation.

Sur les dépens :

9. En l'absence de dépens, les conclusions de M. B..., tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par centre de gestion de la fonction publique territoriale

du D... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre de gestion de la fonction publique territoriale

du D... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au centre de gestion de la fonction publique territoriale du D....

Délibéré après l'audience publique du 20 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. E...

La présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Marécalle

La République mande et ordonne au préfet du D... en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Marécalle

2

N° 22DA01898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01898
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Malfoy
Avocat(s) : SELARL RESSOURCES PUBLIQUES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-07-04;22da01898 ?
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