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16/03/2023 | FRANCE | N°21DA02127

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 16 mars 2023, 21DA02127


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Asi Conseils a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, d'autre part, de prononcer le remboursement d'un crédit d'impôt recherche déc

laré au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 68 811 euros.

Par un ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Asi Conseils a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, d'autre part, de prononcer le remboursement d'un crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 68 811 euros.

Par un jugement no 1801568 du 2 juillet 2021, le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Asi Conseils tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 ainsi que des pénalités afférentes à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2014, à hauteur des dégrèvements accordés par une décision du 18 juin 2018, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er septembre 2021, la société par actions simplifiée (SAS) Asi Conseils, représentée par Me Morazin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant au remboursement d'un crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 68 811 euros ;

2°) d'ordonner la restitution du crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014, d'un montant de 68 811 euros ;

3°) de mettre une somme à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dépenses exposées dans le cadre du projet " REX " sont éligibles au crédit d'impôt recherche ;

- il appartient à l'administration de démontrer que les frais de personnels et de fonctionnement qu'elle a exposés à ce titre seraient excessifs ou ne seraient pas la contrepartie de prestations effectives fournies dans le cadre du projet de recherche ;

- les dépenses de personnels auraient dû être retenues en totalité pour la détermination de l'assiette du crédit d'impôt recherche ;

- les consultants doivent être assimilés à des ingénieur au sens du b) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête présentée par la société Asi Conseils est dépourvue de motivation et, par suite, irrecevable ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la société Asi Conseils ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Asi Conseils, qui est désormais une société par actions simplifiée (SAS), exerce une activité de conseil, de vente et de prestations informatiques. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au terme de laquelle, par une proposition de rectification du 20 mai 2016, l'administration fiscale lui a notifié un rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 ainsi qu'une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014, assortis de pénalités, et a remis en cause le crédit d'impôt recherche déclaré par cette société au titre de l'exercice clos en 2014. Après acceptation partielle de sa réclamation, la société Asi Conseils a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à la décharge des impositions ainsi mises à sa charge et au remboursement d'un crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 68 811 euros. Par un jugement du 2 juillet 2021, le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Asi Conseils tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 ainsi que des pénalités afférentes à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2014, à hauteur des dégrèvements accordés par une décision du 18 juin 2018, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La société Asi Conseils relève appel du jugement du 2 juillet 2021 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à la restitution du crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014, pour un montant de 68 811 euros.

2. D'une part, aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 quindecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) / II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) / ". D'autre part, aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / a) Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale qui, pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b) Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance./ Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c) Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ". Enfin, aux termes de l'article 49 septies G de la même annexe : " Le personnel de recherche comprend : / 1. Les chercheurs qui sont les scientifiques ou les ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs les salariés qui, sans posséder un diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise. / 2. Les techniciens, qui sont les personnels travaillant en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental. / (...) / Dans le cas des entreprises qui ne disposent pas d'un département de recherche, les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt sont exclusivement les rémunérations versées aux chercheurs et techniciens à l'occasion d'opérations de recherche ". Pour l'application de ces dispositions, ouvrent droit au crédit d'impôt recherche, les dépenses de personnel afférentes notamment aux salariés qui, sans posséder un diplôme d'ingénieur, se livrent à des opérations de recherche et ont acquis, au sein de leur entreprise, des compétences les assimilant, par le niveau et la nature de leurs activités, aux ingénieurs impliqués dans la recherche.

3. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.

4. Il résulte de l'instruction que la société Asi Conseils a sollicité le bénéfice du crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater B du code général des impôts, au titre de dépenses de recherche exposées au cours de l'exercice clos en 2014, à hauteur de la somme de 68 811 euros, en raison de sa participation à un projet d'analyse prévisionnelle de sûreté de fonctionnement par retour d'expérience (REX) applicable à des harnais avioniques équipés. A ce titre, la société requérante produit un rapport d'expertise, établi le 16 juin 2016 en application de l'article L. 103 A du livre des procédures fiscales, concluant à l'éligibilité de ce projet au crédit d'impôt prévu à l'article 244 quater B du code général des impôts. Toutefois, ce rapport d'expertise a été établi, non pas au bénéfice de la société Asi Conseils, mais au bénéfice d'une autre société appartenant au même groupe que la société requérante, et qui n'a pas la même activité que celle-ci. Par ailleurs, ce rapport ne mentionne pas la société Asi Conseils comme étant une des sociétés du groupe participant à ce projet. De plus, il n'est pas contesté que l'objet du projet porté par la société Asi Conseils, tel que mentionné dans la documentation jointe à sa demande de remboursement, documentation que la société Asi Conseils n'a pas estimé utile de produire tant en première instance qu'en appel, était différent de celui figurant dans le rapport d'expertise dont cette société se prévaut. En outre, la société Asi Conseils ne produit aucun élément quant au développement des travaux effectués par elle au cours de l'exercice clos en 2014 et aux travaux finaux qu'elle a pu réaliser sur ce projet. Enfin, l'administration fait valoir, sans d'ailleurs être contestée par la société requérante, qu'aucune des pièces justificatives produites dans le cadre de la procédure de vérification ne fait état de ce projet, certaines factures portant au contraire des mentions étrangères à celui-ci. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les dépenses dont la société Asi Conseils faisait état n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche prévu à l'article 244 quater B du code général des impôts.

5. Au surplus, il résulte de l'instruction que, pour justifier les dépenses de personnels, la société Asi Conseils n'a produit qu'un tableau récapitulatif des personnels qui seraient affectés à la recherche, selon elle, à raison de 90 % de leur temps de travail. Toutefois, outre le fait que l'administration affirme, sans être contredite, que ces salariés ne sont pas employés en qualité de chercheurs, aucune justification n'est apportée sur la quotité effective de travail réalisée dans le cadre du projet pour lequel le remboursement du crédit d'impôt a été sollicité par la société Asi Conseils. Aussi, quand bien même les salariés en cause seraient regardés comme ayant la qualité de chercheurs ou de techniciens de recherche au sens et pour l'application des articles 244 quater B du code général des impôts et 49 septies F et G de l'annexe III à ce code, ce qui ne résulte pas de l'instruction, la société Asi Conseils ne produit aucun élément permettant de justifier de la réalité et du lien des dépenses de personnel avec le projet en cause.

6. Enfin, à supposer que la société Asi Conseils ait entendu invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice des énonciations des paragraphes 70 et 80 de l'instruction BOI-BIC-RICI-10-10-10-30 ainsi que du paragraphe 230 de l'instruction BOI-BIC-RICI-10-10-20-30, ces énonciations relatives à l'affectation exclusive du personnel à des opérations de recherche ainsi qu'aux dépenses de recherche engagées par une entreprise non agréée comme organisme de recherche ne comportent pas une interprétation différente du texte fiscal de celle retenue par le présent arrêt.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre, que la société Asi Conseils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à la restitution du crédit impôt recherche déclaré au titre de l'exercice clos en 2014. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en tout état de cause, également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Asi Conseils est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Asi Conseils et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 2 mars 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : C. HeuLa greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°21DA02127

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02127
Date de la décision : 16/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : MBA - MOISAND BOUTIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-03-16;21da02127 ?
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