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09/02/2023 | FRANCE | N°22DA00675

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 09 février 2023, 22DA00675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2020 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoi

re de séjour, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, enfin, de mettre à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2020 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 941-647 du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2106005 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, annulé cet arrêté, d'autre part, enjoint au préfet du Nord de délivrer à Mme B... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la date de notification dudit jugement, enfin, mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme B... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2022, le préfet du Nord demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Lille.

Il soutient que :

- Mme B... ne démontre pas qu'elle n'aurait pas bénéficié en Guinée, avant son arrivée sur le territoire français, d'un traitement approprié à sa pathologie;

- Mme B... peut bénéficier en Guinée d'une prise en charge médicale appropriée à son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2022, Mme D... B..., représentée par Me Périnaud, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le préfet du Nord n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 18 mars 2022 qui a retenu, à bon droit, que la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- il n'est pas établi que les fac-similés de signature manuscrite auraient été apposés sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration par leurs auteurs dans des conditions d'authenticité répondant aux exigences prévues à l'article 1367 du code civil, à l'article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 et à l'article 26 du règlement (UE) n° 910/2014 du 23 juillet 2014 ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- cette décision est entachée d'illégalité, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision est entachée d'illégalité, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Mme B... a été maintenue de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;

- le décret n° 2010-112 du 2 février 2010 pris pour l'application des articles 9, 10 et 12 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., ressortissante guinéenne née le 15 juin 1964 à Télimélé (République de Guinée), est entrée en France en juillet 2018 sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa court séjour. Mme B... a sollicité, le 15 novembre 2019, la délivrance d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé. Par un arrêté du 9 novembre 2020, le préfet du Nord a refusé de faire droit à cette demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 18 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé cet arrêté, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme B... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention ' vie privée et familiale ' est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou en l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. Il ressort des pièces du dossier que le diabète dont est atteinte Mme B... était insulino-traité depuis 2017, et que l'intéressée bénéficiait ainsi d'une prise en charge médicale avant même son arrivée sur le territoire français. A la date de l'arrêté en litige, ce diabète insulino-dépendant n'était pas compliqué et légèrement déséquilibré, mais nécessitait un traitement médical et impliquait la prise quotidienne de différents médicaments, dont le Novorapid, traitement dont le défaut pourrait avoir pour Mme B... des conséquences d'une exceptionnelle gravité, avec en particulier un risque d'acidocétose pouvant engager son pronostic vital. Toutefois, par un avis du 11 mars 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a relevé que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, Mme B... pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. A ce titre, Mme B... a produit devant les premiers juges, d'une part, un courriel, daté du 1er décembre 2020, de la société pharmaceutique Novo Nordisk, qui indique que le Novorapid n'est pas disponible en Guinée, d'autre part, un courrier de la société Eg Labo mentionnant que le Metformine n'est pas commercialisé, enfin, un certificat, établi le 17 août 2021 par un praticien hospitalier auprès du centre hospitalier universitaire de Lille, qui affirme que, d'après les docteurs en pharmacie du centre hospitalier universitaire de Lille, le traitement actuellement prescrit à l'intéressée n'est pas disponible en Guinée. Toutefois, le préfet du Nord produit en cause d'appel un extrait de la base de données MedCOI datant d'août 2019 mentionnant que le Novorapid et le Metformine sont disponibles en pharmacie en Guinée. Par ailleurs, ce même document ainsi qu'une autre extraction de cette base de données et une fiche établie en 2016 par l'Organisation mondiale de la santé font état de la disponibilité de traitements du diabète ainsi que de structures permettant le suivi médical de ce type de pathologie en Guinée. Compte-tenu de ces éléments, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges, après avoir estimé qu'il n'était pas justifié d'un accès effectif de Mme B... à un traitement approprié à son état de santé en Guinée, ont relevé que la décision de refus de titre de séjour méconnaissait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme B... devant le tribunal administratif de Lille, ainsi que ceux qu'elle soulève en appel.

Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions contenues dans l'arrêté contesté :

6. En premier lieu, Mme C... A... de la Perrière, cheffe du bureau du contentieux et du droit des étrangers, signataire de l'arrêté contesté, bénéficiait, en vertu d'un arrêté du 2 janvier 2020 du préfet du Nord, régulièrement publié le même jour au recueil spécial n°1 des actes administratifs de la préfecture du Nord, d'une délégation de signature à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit, dès lors, être écarté.

7. En second lieu, en vertu des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Or, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que cet arrêté, en ce qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à Mme B..., lui fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixe le pays de renvoi, mentionne avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de ces décisions. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté manque en fait et doit, dès lors, être écarté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

8. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur: " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, alors en vigueur : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

9. D'autre part, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 février 2010 pris pour l'application des articles 9, 10 et 12 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Le référentiel général de sécurité prévu par l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 susvisée fixe les règles auxquelles les systèmes d'information mis en place par les autorités administratives doivent se conformer pour assurer la sécurité des informations échangées, et notamment leur confidentialité et leur intégrité, ainsi que la disponibilité et l'intégrité de ces systèmes et l'identification de leurs utilisateurs. / Ces règles sont définies selon des niveaux de sécurité prévus par le référentiel pour des fonctions de sécurité, telles que l'identification, la signature électronique, la confidentialité ou l'horodatage, qui permettent de répondre aux objectifs de sécurité mentionnés à l'alinéa précédent. / La conformité d'un produit de sécurité et d'un service de confiance à un niveau de sécurité prévu par ce référentiel peut être attestée par une qualification, le cas échéant à un degré donné, régie par le présent décret ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le référentiel général de sécurité ainsi que ses mises à jour sont approuvés par arrêté du Premier ministre publié au Journal officiel de la République française. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information concourt à l'élaboration de ce référentiel et à sa mise à jour en liaison avec la direction interministérielle du numérique. Ce référentiel est mis à disposition du public par voie électronique ". L'arrêté du 13 juin 2014 portant approbation du référentiel général de sécurité et précisant les modalités de mise en œuvre de la procédure de validation des certificats électroniques approuve, en son article 1er, la version 2.0 du référentiel général de sécurité prévu à l'article 2 du décret du 2 février 2010 et, en son article 2, en assure la disponibilité par voie électronique sur le site internet de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information et sur le site internet du secrétariat général à la modernisation de l'action publique.

10. Il ressort des pièces du dossier que le préfet du Nord a produit, en première instance, l'avis émis le 11 mars 2020 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Cet avis, qui comporte toutes les mentions prévues à l'article 6 de l'arrêté du 27 septembre 2016, a été émis au vu du rapport du médecin instructeur, lequel n'a pas participé à la délibération collégiale sur la situation de Mme B.... Cet avis comporte les signatures électroniques des trois médecins, membres du collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont les noms sont mentionnés sur la liste annexée à la décision du 18 novembre 2019 modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par ailleurs, il est constant que l'accès à l'application " Thémis ", qui permet l'apposition des signatures électroniques, n'est accessible aux médecins signataires qu'au moyen de deux identifiants et de deux mots de passe qui leur sont propres, et qu'elle présente ainsi les garanties de sécurité de nature à assurer l'authenticité des signatures ainsi que le lien entre elles et leurs auteurs. De plus, compte tenu des garanties du dispositif de signature électronique des avis émis par les collèges de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ce procédé de signature doit être regardé comme bénéficiant de la présomption de fiabilité prévue par les dispositions combinées de l'article 1367 du code civil, du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 et du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de délivrance à Mme B... d'un titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

12. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui est entrée récemment en France, n'est pas isolée dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-quatre ans et où résident quatre de ses enfants. Si l'un de ses enfants réside en France et est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2029, elle ne démontre ni la réalité des relations qu'elle entretiendrait avec lui, ni l'effectivité de l'assistance qu'il lui apporterait au quotidien. Aussi, dans les circonstances de l'espèce, le préfet du Nord, en refusant de délivrer à Mme B... un titre de séjour, n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis par cette décision. En conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés, respectivement, au point 4 et au point 12, il y a lieu d'écarter les moyens tirés par Mme B..., à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur les décisions fixant le délai de départ volontaire ainsi que le pays de destination :

14. En premier lieu, la décision faisant obligation à Mme B... de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, la requérante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre des décisions lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination.

15. En second lieu, si Mme B... se prévaut de la méconnaissance des dispositions de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, lesquelles ont été transposées au II de l'article L. 511-1, alors applicable, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'apporte aucun élément précis permettant de considérer que le préfet du Nord aurait dû lui octroyer, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Par suite, le moyen doit être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 9 novembre 2020, lui a enjoint de délivrer à Mme B... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme B... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par voie de conséquence, la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen doit être rejetée. Il en va de même des conclusions présentées par Mme B... devant la cour au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2106005 du 18 mars 2022 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Lille ainsi que les conclusions présentées devant la cour tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au préfet du Nord, à Mme D... B... et à Me Périnaud.

Délibéré après l'audience publique du 26 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°22DA00675 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00675
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : PERINAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-02-09;22da00675 ?
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