Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Etude Réalisation Désenfumage a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de taxe additionnelle à la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1802393 du 1er avril 2021, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, déclaré ne pas avoir lieu de statuer sur les conclusions de la SAS Etude Réalisation Désenfumage à fin de décharge des impositions en litige à concurrence de la somme de 1 332 euros dégrevée en cours d'instance, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 juin 2021, 4 août 2021 et 31 décembre 2021, la SAS Etude Réalisation Désenfumage, représentée par Me Calderini, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 60 816 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés pour un montant total de 227 595 euros et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de taxe additionnelle à la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises pour un montant total de 1 652 euros, demeurant en litige, auxquels elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ; cette insuffisance de motivation présente le caractère d'une erreur substantielle au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne pouvait pas retenir une irrégularité de sa comptabilité ;
- aucun caractère fictif ne peut être prêté à ses achats auprès des sociétés Youcom International et EJM et aux factures ainsi délivrées par ces fournisseurs ;
- les pertes inscrites en comptabilité l'ont été à bon droit au motif que les créances en cause étaient irrécouvrables car prescrites ;
- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et les taxes additionnelles à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises sont contestées par voie de conséquence ;
- la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses appliquée sur les rappels procédant du rejet de ces factures est dépourvue de fondement, compte tenu de l'absence de caractère fictif de ces factures.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Etude Réalisation Désenfumage ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 6 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 4 février 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me Pelletier, représentant la SAS Etude Réalisation Désenfumage.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Etude Réalisation Désenfumage, qui exerce une activité relative à la sécurité des immeubles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2012 et 2013 et a rappelé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée pour la période de janvier 2012 à décembre 2013 ainsi que des rehaussements en matière de contribution sur la valeur ajoutée des entreprises et de taxe additionnelle sur la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. La SAS Etude Réalisation Désenfumage relève appel du jugement du 1er avril 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, après avoir déclaré ne pas avoir lieu de statuer sur ses conclusions tendant à la décharge de ces impositions à concurrence de la somme de 1 332 euros dégrevée en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une proposition de rectification est suffisamment motivée dès lors qu'elle indique la nature des redressements envisagés, le montant de ces redressements distinctement par catégorie de revenu et par chef de redressement, l'impôt et l'année d'imposition et que ses motifs sont suffisamment explicites pour permettre au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations. La motivation de la proposition de rectification s'apprécie ainsi, notamment, chef de redressement par chef de redressement.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée sur les missions et réceptions :
3. Après avoir rappelé au visa de l'article 271 du code général des impôts que les dépenses de restaurant, de réception et de spectacle n'ouvrent droit à déduction que pour autant que de telles dépenses soient utilisées pour les besoins d'opérations ouvrant droit à déduction, l'administration a mentionné, dans la proposition de rectification, une liste de dépenses comptabilisées dans le compte 445660 " missions et réceptions " dont elle a estimé la taxe sur la valeur ajoutée non déductible en indiquant, pour chaque dépense, la date, le libellé et le montant de la facture. Par suite, ces motifs étaient suffisamment explicites pour permettre au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toute indication utile sur le lien entre ces dépenses et les opérations ouvrant droit à déduction. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée sur les dépenses à des fins étrangères à l'entreprise compte 606300 " achats non stockés de fournitures " :
4. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé que les dépenses comptabilisées au compte 606300 " achats non stockés de fournitures " étaient manifestement des dépenses personnelles, dont l'intérêt pour l'exploitation n'avait pas été démontré au cours des opérations de contrôle. L'administration a établi une liste de ces dépenses comprenant la date de la facture, le montant et le libellé tel que " Fnac ", " Auchan ", " Darty ", " Ikea " ou encore " Artisans parfumeur ". Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses et le lien avec des opérations imposables. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des dépenses de cadeaux :
5. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que la SAS Etude Réalisation Désenfumage n'avait pas établi l'existence d'un lien entre ces dépenses comptabilisées au compte 62340 " cadeaux clientèle " et la contribution qu'elles apportent à l'exploitation. L'administration a établi une liste de ces dépenses comprenant la date de la facture, le montant et le libellé tel que " Champage ", " Sephora ", " Paris Saint-Germain ", " Parc Astérix " ou encore " Artisans parfumeur ". Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des dépenses de vêtement :
6. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que les frais d'achat de vêtements présentent le caractère d'une charge déductible que pour autant qu'il s'agit de vêtements de travail. L'administration a établi une liste de ces dépenses de vêtement ne correspondant pas à cette exigence, comprenant la date de la facture, le montant et le libellé tel que " Cerruti ", " Jack ", " MSC " en précisant, notamment, que le sigle MSC correspond à un commerce d'habillement et que " Jack " est une marque de vêtements pour homme. Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toute indication utile sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses en apportant la preuve qu'il s'agissait de vêtements adaptés pour le travail et non de dépenses personnelles. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des achats non stockés de marchandises :
7. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que les dépenses comptabilisées au compte 60630 " achats non stockés de marchandises " n'étaient pas des dépenses professionnelles effectuées dans l'intérêt de l'exploitation. L'administration a établi une liste de ces dépenses comprenant la date de la facture, le montant et le libellé tel que " Auchan ", " Carrefour ", " Leclerc ", " Ikea " ou encore " Maisons du Monde " ou " Apple I Tunes ". L'administration a également donné des précisions sur les raisons pour lesquelles de telles enseignes n'ont pas de caractère professionnel avéré. Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des dépenses de voyages et déplacements :
8. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que les frais de voyages et de déplacements réalisés par les salariés et dirigeants, s'ils sont en lien avec l'exploitation, présentent le caractère de dépenses déductibles. L'administration a estimé que les dépenses comptabilisées au compte 625100 " voyages - déplacements " n'étaient pas des dépenses professionnelles effectuées dans l'intérêt de l'exploitation, faute pour la société d'avoir établi au cours du contrôle l'intérêt professionnel de ces déplacements. L'administration a établi une liste de ces dépenses comprenant la date de la facture, le montant et le libellé. Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des dépenses de missions et réceptions :
9. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que les dépenses comptabilisées au compte 625700 " missions - réceptions " n'étaient pas appuyées de justificatifs ou n'étaient pas corroborées par des justificatifs suffisants, s'agissant de tickets de carte bleue ou de factures sans indication du nom des bénéficiaires et de la nature professionnelle des dépenses. L'administration a établi une liste de ces dépenses comprenant la date de la facture, le montant et le libellé. Dès lors, cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur l'intérêt pour la société de comptabiliser ces dépenses. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
En ce qui concerne le chef de rectification relatif à la déductibilité des charges exceptionnelles :
10. Il ressort des mentions de la proposition de rectification que l'administration a estimé, au visa de l'article 39 du code général des impôts, que la société avait soldé des comptes clients par deux écritures d'opérations diverses, le 31 décembre 2012, en charges exceptionnelles, pour un montant de 222 962 euros. L'administration a estimé, au vu des justificatifs fournis par la société, que les pertes sur créances irrécouvrables étaient justifiées à hauteur de 33 169 euros seulement. En revanche, l'administration a considéré que le caractère irrécouvrable du solde, d'un montant de 189 793 euros, n'était pas justifié et a, en conséquence, refusé d'admettre ce montant en déduction du résultat imposable de l'exercice 2012. Cette motivation permettait au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations sur ce chef de rectification, notamment en fournissant toutes indications utiles sur le caractère irrécouvrable des créances. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification du 31 juillet 2015 est insuffisamment motivée s'agissant de ce chef de rectification.
Sur le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
11. En premier lieu, l'administration n'ayant ni écarté ni reconstitué le chiffre d'affaires de la société, cette dernière ne peut utilement contester l'irrégularité de sa comptabilité opposée par l'administration fiscale qui n'a tiré aucune conséquence de cette irrégularité.
12. En second lieu, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".
13. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
S'agissant de la déductibilité des factures de la société Youcom International :
14. Pour justifier de la réalité des prestations correspondant aux factures établies par la société Youcom International, la SAS Etude Réalisation Désenfumage se borne à présenter des considérations d'ordre général sur l'existence de la société Youcom International en raison de son inscription au registre du commerce et des sociétés, sur le changement d'objet social opéré par cette société, sur l'absence d'obligation de prouver la réception de la marchandise et sur le caractère probant des bons de livraison. Toutefois, la SAS Etude Réalisation Désenfumage n'apporte aucune explication sur les motifs pour lesquels elle a changé de fournisseur pour les barres de cuivres ou sur les raisons pour lesquelles elle a eu recours aux services de la société Youcom International, société sans salarié et ayant pour objet initial le conseil en communication internationale, alors que l'administration fait valoir que cette société était domiciliée à une adresse où étaient répertoriées 73 autres entreprises, qu'elle a modifié son objet social le 16 mai 2012, juste avant l'émission de la première facture litigieuse du 28 mai 2012, pour réaliser de l'import-export, du négoce en tout genre et textile. L'administration a relevé, en outre, que la société requérante avait un autre fournisseur habituel pour l'achat de barres de cuivre, que les bons de livraison, sans date ni signature ou cachet de l'entreprise, étaient des copies conformes des factures litigieuses sans indication du prix. Enfin, l'administration fait valoir que la société Youcom International n'a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que du 9 mars 2012 au 14 décembre 2013 et qu'elle a été radiée à compter de cette date. Dès lors, la SAS Etude Réalisation Désenfumage ne peut être regardée comme apportant la preuve de la déductibilité des charges en cause, faute d'apporter des éléments probants sur l'existence et la valeur de la contrepartie de ces factures. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les factures établies par la société Youcom International pour l'achat par la SAS Etude Réalisation Désenfumage de barres de cuivre étaient fictives et a refusé la déductibilité de ces charges de la base imposable de cette dernière à l'impôt sur les sociétés.
S'agissant de la déductibilité des factures de la société EJM :
15. Pour justifier de la réalité des prestations correspondant aux factures établies par la société EJM, la SAS Etude Réalisation Désenfumage se borne à présenter des considérations d'ordre général sur la nécessité, pour la réalisation de ses opérations, de disposer de bâches de protection, sur l'existence de la société EJM par son inscription au registre du commerce et des sociétés, sur l'adéquation entre son objet social d'import-export en gros de textiles et les factures de bâches de protection et sur la liberté pour une entreprise de changer de fournisseur. Toutefois, l'administration fait valoir que la société EJM, dont l'activité est l'import-export de produits textiles et de prêt-à-porter, était domiciliée à une adresse où étaient répertoriées 244 autres entreprises, qu'elle n'avait aucun salarié et qu'elle a été dissoute au 31 décembre 2013. L'administration a également relevé que la société requérante avait un autre fournisseur habituel pour l'achat de bâches de protection contre les intempéries au titre des années 2012 et 2013, qu'elle n'avait pu fournir aucun document de transport des marchandises et que les bons de livraison, sans date ni signature ou cachet de l'entreprise, étaient des copies conformes des factures litigieuses sans indication du prix. Dès lors, la SAS Etude Réalisation Désenfumage ne peut être regardée comme apportant la preuve de la déductibilité des charges en cause, faute d'apporter des éléments probants sur l'existence et la valeur de la contrepartie de ces factures. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les factures établies par la société EJM pour l'achat par la SAS Etude Réalisation Désenfumage de bâches de protection étaient fictives et a refusé la déductibilité de ces charges de la base imposable de cette dernière à l'impôt sur les sociétés.
S'agissant de la déductibilité de la perte sur créances irrécouvrables :
16. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée à la SAS Etude Réalisation Désenfumage que l'administration a relevé que cette société avait régularisé le solde des comptes clients en charges exceptionnelle par une écriture d'opérations diverses, en date du 31 décembre 2012, pour un montant de 222 962 euros. La société n'a pu justifier, au cours des opérations de contrôle, la réalité des pertes définitives qu'à hauteur de 33 169 euros, ce qui a conduit l'administration à refuser d'admettre en déduction la perte sur créances irrécouvrables à hauteur d'un montant de 189 793 euros.
17. Pour justifier du caractère irrécouvrable des créances en cause, la SAS Etude Réalisation Désenfumage se borne à faire valoir l'ancienneté de certaines créances ou leur caractère prescrit sans établir qu'elle aurait accompli les diligences nécessaires en vue de leur recouvrement, y compris avant la survenance de la prescription extinctive prévue à l'article L. 110-4 du code de commerce qu'elle invoque. En outre, si elle soutient que certaines des sociétés en cause ont été radiées, placées en liquidation judiciaire ou sont en cessation de paiement, elle s'abstient de produire des éléments probants au soutien de ses allégations, tels qu'un certificat du liquidateur judiciaire ou des documents sur la situation financière précise de ces sociétés. Enfin, en se bornant à produire une facture pro forma à l'attention de la société Barral et à soutenir qu'elle n'aurait pas dû être comptabilisée la société requérante n'apporte pas la preuve de l'erreur comptable alléguée. Dès lors, la SAS Etude Réalisation Désenfumage n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère définitivement irrécouvrable de ces créances. C'est donc à bon droit que l'administration fiscale a refusé d'admettre ces charges et a réintégré les sommes correspondantes dans les bases de la SAS Etude Réalisation Désenfumage à l'impôt sur les sociétés.
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
18. En vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un assujetti n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe portée sur des factures correspondant à des biens ou à des prestations de services qui ne lui ont pas été effectivement fournis.
19. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures établies par la société Youcom International, l'administration fait valoir que cette société, dont l'activité initiale était le conseil en communication internationale et qui ne disposait d'aucun salarié, était domiciliée à une adresse où étaient répertoriées 73 autres entreprises, qu'elle a modifié son objet social le 16 mai 2012, alors que la première facture litigieuse date du 28 mai 2012, pour réaliser de l'import-export, du négoce en tout genre et textile. L'administration a relevé, en outre, que la société requérante avait, s'agissant de l'achat de barres de cuivre, un autre fournisseur habituel dénommé Madicob, que les bons de livraison, sans date, étaient des copies conformes des factures litigieuses sans indication du prix. Enfin, l'administration fait valoir que la société Youcom International n'a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que du 9 mars 2012 au 14 décembre 2013, et a été radiée à compter de cette date. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que les factures établies par la société Youcom International pour l'achat par la SAS Etude Réalisation Désenfumage de barres de cuivre étaient fictives. C'est donc à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces factures.
20. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures établies par la société EJM, l'administration a relevé que cette société, dont l'activité est l'import-export de produits textiles et de prêt-à-porter, était domiciliée à une adresse où étaient répertoriées 244 autres entreprises, qu'elle n'avait aucun salarié et qu'elle a été dissoute au 31 décembre 2013. L'administration a également relevé que la société requérante avait un autre fournisseur habituel pour l'achat de bâches de protection contre les intempéries au titre des années 2012 et 2013, qu'elle n'avait pu fournir aucun document de transport des marchandises et que les bons de livraison, sans date ni cachet ou signature, étaient des copies conformes des factures litigieuses sans indication du prix. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que les factures établies par la société EJM pour l'achat par la SAS Etude Réalisation Désenfumage de bâches de protection étaient fictives. C'est donc à bon droit que l'administration a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces factures.
Sur le bien-fondé de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et des taxes additionnelles à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises :
21. Si la SAS Etude Réalisation Désenfumage conteste, par voie de conséquence, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et les taxes additionnelles à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qui lui ont été assignées, il résulte de ce qui précède que ces conclusions doivent être également écartées.
Sur les pénalités :
22. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du même livre : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".
23. Pour justifier l'application de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses appliquées sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les rehaussements à l'impôt sur les sociétés, relatifs aux factures fictives des fournisseurs, l'administration fait valoir, par les mêmes motifs que ceux rappelés aux points 14 et 15, que la SAS Etude Réalisation Désenfumage a comptabilisé des factures fictives des sociétés Youcom International et EJM. Ce faisant, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de la SAS Etude Réalisation Désenfumage de restreindre ou d'égarer le pouvoir de contrôle de l'administration, justifiant l'application de la majoration prévue au c) de l'article 1729 du code général des impôts.
24. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Etude Réalisation Désenfumage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions demeurant en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Etude Réalisation Désenfumage est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Etude Réalisation Désenfumage et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 26 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président de chambre,
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
- M. Bertrand Baillard, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023.
Le président, rapporteur,
Signé : M. SauveplaneLe président de chambre,
Signé : C. Heu
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°21DA01230 2