Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... E... et M. D... C... ont demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles leur foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1902221 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 juin 2021 et le 18 février 2022, Mme E... et M. C..., représentés par Me Horrie, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer, à titre principal, la décharge, à titre subsidiaire, la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles leur foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la SARL CPX s'étant engagée à régler, selon un échéancier convenu conjointement avec l'administration, le prélèvement non-libératoire d'un montant de 67 890 euros correspondant à 21 % des dividendes distribués à M. C... par inscription au crédit de son compte courant d'associé, cette somme doit être imputée sur le rehaussement qui leur a été notifié en ce qui concerne cette distribution, sauf à soumettre celle-ci à une double imposition ;
- la situation de trésorerie qui était celle de la SARL CPX à la date à laquelle cette distribution a été opérée, ainsi qu'au cours de l'exercice suivant, ne permettait pas à M. C... de disposer effectivement de la totalité de la somme correspondante ; ainsi, il n'a perçu, au titre de l'année 2015, de cette société qu'une somme de 51 390,27 euros sur le montant qui faisait l'objet de cette distribution, de sorte que le rehaussement mis à leur charge à ce titre ne peut, en toute hypothèse, excéder la prise en compte de cette somme de 51 390,27 euros ;
- l'administration a réintégré à tort dans leurs revenus imposables des sommes prétendument mises à leur disposition par la SARL Catema, par l'intermédiaire des SCI 31 et Oxford, dont ils sont les associés, alors que ces sommes ont été versées en exécution d'un prêt consenti par la SARL Catema à ces deux SCI, la SCI Oxford ayant d'ailleurs totalement remboursé ses échéances, conformément aux stipulations du contrat de prêt, depuis le 19 janvier 2017 et la SCI 31 ayant partiellement remboursé les siennes, peu important les modalités de versement des intérêts ; la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RPPM-10-20-20-20 et qui est issue de la documentation administrative de base 4 J-1212, conforte, en ses paragraphes n°130 et n°140, leur position quant aux éléments susceptibles d'être valablement avancés pour démontrer l'existence d'un prêt ;
- les suppléments de prélèvements sociaux et les intérêts de retard correspondants devront être déchargés par voie de conséquence ;
- la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont ont été assortis les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige n'est pas fondée, alors que les omissions déclaratives qui leur sont imputées ne peuvent être regardées comme répétées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2021, et par un mémoire enregistré le 4 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à ce que la cour constate qu'il n'y a pas lieu de statuer, à concurrence du dégrèvement de 28 830 euros prononcé en cours d'instance en matière de prélèvements sociaux, sur la requête de Mme E... et M. C... et au rejet du surplus des conclusions de cette requête.
Il soutient que :
- les appelants, qui n'ont présenté aucun moyen contestant les rehaussements notifiés au titre des déficits fonciers, ne sont pas recevables à contester les rehaussements y afférents ;
- la SARL CPX ayant réglé le montant de 28 830 euros correspondant aux prélèvements sociaux appliqués à la distribution de dividendes dont a bénéficié M. C..., cette somme a été déduite des prélèvements sociaux mis à la charge du foyer fiscal de ce dernier au titre de l'année 2015 et le dégrèvement correspondant a été prononcé ;
- en revanche, l'imputation, prévue au a. du I de l'article 199 ter du code général des impôts, du prélèvement forfaitaire ne peut être effectuée, dès lors que la SARL CPX ne s'est pas acquittée de l'intégralité du prélèvement forfaitaire appliqué sur les dividendes versés à ses associés au titre de l'année 2015 ;
- il résulte des mentions du procès-verbal de l'assemblée générale des associés de la SARL CPX, qui s'est tenue le 28 décembre 2015, qu'il devait être procédé le jour même au paiement des dividendes dont les associés ont décidé la distribution, de sorte que les sommes correspondantes doivent être réputées à la disposition des associés en 2015 et imposables entre leurs mains au titre de la même année, et que les difficultés de trésorerie alléguées ne sont pas établies ;
- les conventions de prêt produites pour justifier de la cause des avances consenties par la SARL Catema aux SCI 31 et Oxford n'ont pas date certaine et ne comportent aucun échéancier de remboursement et de mise à disposition des fonds, de sorte que les appelants ne démontrent pas l'existence alléguée de ces prêts, qui n'ont d'ailleurs pas donné lieu au versement d'intérêts, les remboursements intervenus postérieurement aux années d'imposition en litige et dont le rattachement aux conventions produites ne peut être opéré, étant sans incidence à cet égard ; dans ces conditions, Mme E... et M. C... ne sont pas fondés à invoquer des extraits de doctrine dans les prévisions desquelles ils n'établissent pas entrer ;
- les appelants ne peuvent pas prétendre que le fait de ne pas déclarer, au titre des revenus de l'année 2015, un montant représentant 50 % des revenus bruts de leur foyer fiscal relèverait d'une simple omission ; M. C... ne pouvait, en outre, pas ignorer la mise à disposition sur son compte courant d'associé de la somme de 186 000 euros, dès lors qu'il était présent lors de l'assemblée générale de la SARL CPX au cours de laquelle est intervenue la décision de verser les dividendes en litige et, en sa qualité d'avocat, il ne pouvait, au surplus, en ignorer le caractère imposable.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Les sociétés à responsabilité limitée (SARL) CPX et Catema, au capital desquelles M. D... C... est associé, ont toutes deux fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. Ces contrôles ont amené le service vérificateur à estimer que M. C... avait bénéficié, de la part de ces deux sociétés, de revenus regardés comme distribués et imposables au sein du foyer fiscal qu'il forme avec Mme A... E.... Des contrôles sur pièces portant, d'une part, sur les déclarations de revenus souscrites par M. C... et Mme E... et, d'autre part, sur les déclarations souscrites par la société civile immobilière (SCI) B..., dont M. C... détient la moitié des parts, ont conduit par ailleurs le service à constater que M. C... n'avait pas déclaré les revenus réputés distribués par les SARL CPX et Catema au titre des années 2014 et 2015, et à rectifier les déficits fonciers déclarés par la SCI B... au titre de l'année 2013. L'administration a fait connaître à Mme E... et M. C... les conséquences emportées par ces contrôles sur les revenus imposables de leur foyer fiscal par une proposition de rectification qu'elle leur a adressée le 15 décembre 2016 en ce qui concerne leur déficit foncier de l'année 2013 et par une proposition de rectification qu'elle leur a adressée le 2 août 2017, en ce qui concerne les rehaussements envisagés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2014 et 2015. Les observations formulées par Mme E... et M. C... n'ayant pas convaincu l'administration, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, au titre des années 2014 et 2015, des rehaussements ainsi notifiés ont été mis en recouvrement le 30 septembre 2018, à hauteur d'un montant total de 160 855 euros, en droits et pénalités. Leur réclamation ayant été rejetée, Mme E... et Mme C... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles leur foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2014 et 2015. Mme E... et M. C... relèvent appel du jugement du 13 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 7 décembre 2021, intervenue en cours d'instance d'appel, l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord a prononcé un dégrèvement, à concurrence de la somme de 28 830 euros, en droits, des suppléments de prélèvements sociaux auxquels Mme E... et M. C... ont été assujettis au titre de l'année 2015. Le litige d'appel a, dans cette mesure, perdu son objet. Dès lors, il n'y a pas lieu, dans la même mesure, de statuer sur les conclusions de Mme E... et M. C... à fin de décharge des contributions dont l'administration leur a ainsi accordé le dégrèvement.
Sur le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu :
En ce qui concerne la distribution de dividendes :
3. En vertu du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital sont considérés comme revenus distribués.
4. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL CPX a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que cette société avait, conformément à la délibération prise le 28 décembre 2015 par l'assemblée générale de ses associés, procédé à une distribution de dividendes. Cette distribution s'est traduite, en ce qui concerne M. C..., par une inscription d'un montant de 186 000 euros, intervenue le 31 décembre 2015, au crédit du compte courant d'associé ouvert à son nom dans la comptabilité de cette société. Le contrôle sur pièces des déclarations de revenus souscrites par Mme E... et M. C... a, par ailleurs, permis à l'administration de constater que les intéressés n'avaient pas porté cette somme de 186 000 euros sur leur déclaration de revenus de l'année 2015. Le service a, en outre, estimé que la SARL CPX n'avait pas acquitté le prélèvement forfaitaire non libératoire, ni les prélèvements sociaux, applicables à cette distribution de dividendes. L'administration a, en conséquence, rehaussé le résultat imposable déclaré par la SARL CPX au titre de l'exercice clos en 2015 du montant des dividendes versés par elle et les sommes distribuées ont été soumises aux prélèvements sociaux. Parallèlement, la somme de 186 000 euros a été soumise à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au sein du foyer fiscal de Mme E... et M. C..., moyennant l'application de l'abattement de 40 % prévu en faveur des bénéficiaires de distributions de dividendes régulièrement décidées.
S'agissant des conclusions principales en décharge :
5. Mme E... et M. C... soutiennent que le prélèvement non libératoire et les prélèvements sociaux mis à la charge de la SARL CPX, qui représentent un montant total de 67 890 euros, doivent être imputés sur les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux qui ont été mis à leur charge propre, sauf à soumettre les sommes correspondantes à une double imposition.
6. Quant aux prélèvements sociaux, l'administration, après avoir constaté que la SARL CPX avait payé, à ce titre, la somme de 28 830 euros, a décidé de faire droit, par le dégrèvement mentionné au point 2, aux prétentions de Mme E... et M. C....
7. Quant au prélèvement non libératoire, Mme E... et M. C... sollicitent le bénéfice des dispositions du a. du I de l'article 199 ter du code général des impôts, en vertu desquelles, lorsque les bénéficiaires des revenus de capitaux mobiliers visés à l'article 109 de ce code sont tenus, en exécution de dispositions de la législation fiscale, de souscrire, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, une déclaration comprenant lesdits revenus, la somme à la retenue de laquelle ces revenus ont donné lieu, en vertu des articles 119 bis et 1678 bis du même code, est imputée sur le montant de l'impôt sur le revenu liquidé au vu de cette déclaration dans les conditions fixées par l'article 193 du même code.
8. Toutefois, dès lors qu'il n'est pas contesté que la SARL CPX n'a pas acquitté l'intégralité du prélèvement forfaitaire non libératoire appliqué aux dividendes qu'elle a versés à ses associés au cours de l'exercice clos en 2015, quand bien même elle s'y serait engagée, il ne peut être fait droit, sur ce point, à la demande d'imputation formulée par les appelants.
9. Eu égard à ce qui a été dit aux points 6 et 8, le moyen tiré de ce qu'une partie des sommes soumises à l'impôt et aux prélèvements sociaux entre les mains de Mme E... et M. C... en ce qui concerne la distribution de dividendes opérée par la SARL CPX a fait l'objet d'une double imposition doit être écarté.
S'agissant des conclusions subsidiaires en réduction :
10. Mme E... et M. C... soutiennent que l'état de la trésorerie de la SARL CPX à la fin de l'exercice clos en 2015 et au cours de l'exercice suivant, clos en 2016, ne leur a pas permis de disposer de l'intégralité de la somme inscrite, au titre de cette distribution, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. C... dans la comptabilité de cette société et qu'ils n'ont pu, en réalité, disposer que d'une somme de 51 390,27 euros à ce titre. Ils en tirent la conséquence que le rehaussement qui leur a été notifié dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en ce qui concerne cette distribution ne peut, en tout hypothèse, excéder la prise en compte de cette dernière somme.
11. En vertu de l'article 12 du code général des impôts, l'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. En vertu de l'article 156 de ce code, l'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Enfin, en vertu du 1° du 3. de l'article 158 du même code, lorsqu'ils sont payables en espèces, les revenus de capitaux mobiliers, au sens de ce 1°, sont soumis à l'impôt sur le revenu au titre de l'année soit de leur paiement en espèces ou par chèques, soit de leur inscription au crédit d'un compte.
12. Il résulte de la combinaison des dispositions mentionnées au point précédent que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, sont celles qui, au cours de cette année, ont été mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré, ou aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre.
13. Il résulte de l'instruction que, comme il a été dit au point 4, la distribution, ayant justifié le rehaussement, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, du revenu imposable de Mme E... et de M. C..., a été décidée par une délibération du 28 décembre 2015 de l'assemblée générale des associés de la SARL CPX et qu'elle s'est notamment traduite par une inscription, le 31 décembre 2015, d'un montant de 186 000 euros au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. C... dans la comptabilité de cette société. Il n'est pas contesté que cette délibération précisait que cette distribution serait prélevée en totalité sur le compte " autres réserves " et que le paiement des dividendes serait effectué le 28 décembre 2015. Alors que les mentions ainsi contenues dans cette délibération tendent à établir que la situation de la trésorerie de la SARL CPX l'autorisait à procéder à cette distribution de dividendes dès la date à laquelle celle-ci a été décidée, Mme E... et M. C... n'apportent aucun élément au soutien de leurs allégations, qui sont expressément contredites par l'administration, selon lesquelles ils n'ont été à même, compte tenu des difficultés de trésorerie rencontrées par cette société au cours des exercices clos en 2015 et en 2016, de disposer que d'une somme de 51 390,27 euros. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé que Mme E... et M. C... étaient à même de prélever librement, au cours de l'année 2015, la totalité de la somme de 186 000 euros inscrite le 31 décembre 2015 au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. C... dans les comptes de la SARL CPX et qu'elle a soumis cette somme, au titre de cette année et moyennant l'application de l'abattement de 40 % prévu en faveur des bénéficiaires de distributions de dividendes régulièrement décidées, à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.
En ce qui concerne les autres revenus réputés distribués :
14. En vertu du a. de l'article 111 du code général des impôts, sont considérés comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes.
15. Au cours de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL Catema, dont la moitié du capital est détenue par M. C..., le service vérificateur a constaté que cette société avait, au cours des exercices clos en 2014 et en 2015, consenti des avances à la SCI 31, dont M. C... est l'un des associés, et à la SCI Oxford, dont M. C... est le gérant et dont l'intégralité des parts est détenue par Mme E.... Dans cette situation et alors que les justifications avancées par la SARL Catema ne l'ont pas convaincu, l'administration a estimé que les sommes correspondantes avaient constitué, pour Mme E... et M. C..., à due concurrence de leurs droits dans la SCI 31 et la SCI Oxford, des revenus distribués, imposables entre leurs mains, au titre des années 2014 et 2015, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions, rappelées au point précédent, du a. de l'article 111 du code général des impôts.
16. Mme E... et M. C... soutiennent que les sommes en cause ont été regardées à tort comme ayant la nature de revenus distribués, alors qu'elles ont, en réalité, été versées aux SCI 31 et Oxford, en exécution d'un prêt qui avait été consenti, à chacune de ces SCI, par la SARL Catema. Ils se réfèrent aux deux conventions produites à l'administration par cette dernière au cours de la vérification de comptabilité dont cette société a fait l'objet, à savoir une convention conclue le 6 mars 2012 entre la SCI 31 et la SARL Catema portant sur le prêt d'une somme de 200 000 euros et une convention établie le 17 octobre 2014 entre la SCI Oxford et la SARL Catema portant sur le prêt d'une somme de 70 000 euros. Ils ajoutent que la SCI Oxford a remboursé l'intégralité de ses échéances depuis le 19 janvier 2017 et que la SCI 31 a partiellement remboursé, à ce jour, les siennes.
17. Toutefois, ces conventions, qui ont été conclues sous seing privé et qui n'ont donné lieu à aucune formalité destinée à les rendre opposables aux tiers, ne peuvent être regardées comme ayant date certaine. En outre, rédigées dans des termes similaires, elles ne comportent aucune précision quant aux modalités de mise à disposition des fonds prêtés et de remboursement des échéances. Par ailleurs, la vérification de comptabilité dont la SARL Catema a fait l'objet a permis de constater que, si cette société avait, au cours de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, porté en comptabilité des intérêts se rapportant à ces prêts, aucune des sommes correspondantes n'avait cependant été perçue par elle. Si Mme E... et M. C... soutiennent que la SARL Catema, d'une part, et les SCI 31 et Oxford, d'autre part, avaient convenu que les intérêts seraient versés à l'occasion des dernières échéances remboursées, les deux conventions produites, qui sont muettes sur la composition des échéances à rembourser et qui ne renvoient à aucun tableau d'amortissement, ne comportent aucune stipulation en ce sens, alors d'ailleurs que l'accord ainsi allégué ne serait pas cohérent avec la comptabilisation d'intérêts, en cours de période d'amortissement des prêts invoqués, par la SARL Catema. Dans ces conditions, les versements effectués par la SCI Oxford et par la SCI 31 après le 31 décembre 2015 sont insusceptibles d'être rattachés avec certitude aux conventions produites et ne peuvent suffire à Mme E... et M. C... à établir l'existence des prêts dont ils se prévalent pour expliquer les versements dont ont bénéficié la SCI 31 et la SCI Oxford. Dès lors que la preuve du contraire n'est pas rapportée, les sommes correspondantes sont réputées avoir bénéficié à Mme E... et M. C... à due concurrence de leurs droits dans le capital de ces sociétés. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a regardé ces sommes comme ayant la nature de revenus distribués, imposables au sein du foyer fiscal de Mme E... et M. C..., sur le fondement des dispositions susmentionnées du a. de l'article 111 du code général des impôts. Les appelants ne sont pas fondés à invoquer, à cet égard, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations des paragraphes n°130 et n°140 de la doctrine administrative, publiée le 12 septembre 2012 sous la référence BOI-RPPM-10-20-20-20, qui est issue de la documentation administrative de base 4 J-1212, lesquelles ne comportent pas, s'agissant des éléments regardés comme susceptibles d'établir l'existence d'un prêt, une interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application.
Sur les suppléments de prélèvements sociaux et les intérêts de retard demeurant en litige :
18. Ainsi qu'il a été dit aux points 3 à 17, les moyens énoncés par Mme E... et M. C... à l'appui des conclusions de la requête tendant à la décharge des suppléments d'impôt en litige ne sont pas fondés. Par suite, les conclusions de cette requête tendant, par voie de conséquence, à la décharge des suppléments de prélèvements sociaux et des intérêts de retard s'y rapportant ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les pénalités :
19. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
20. Pour justifier du bien-fondé de l'application de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des rehaussements notifiés à Mme E... et M. C... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et se rapportant à la distribution de dividendes par la SARL CPX, le ministre fait valoir, en se référant aux termes de la proposition de rectification adressée aux intéressés le 2 août 2017, que M. C..., qui était présent lors de l'assemblée générale des associés de la SARL CPX, qui s'est tenue le 28 décembre 2015, ne pouvait raisonnablement ignorer, eu égard, en outre, à sa qualité d'avocat, que la somme de 186 000 euros inscrite, deux jours plus tard, au crédit du compte courant d'associé ouvert à son nom dans la comptabilité de cette société correspondait à la distribution de revenus imposables au sein de son foyer fiscal, dont le montant représentait d'ailleurs 50 % des revenus bruts de ce foyer fiscal. Le ministre ajoute que, dans ces conditions, en ne reportant pas cette somme sur la déclaration de revenus qu'ils ont souscrite au titre de l'année 2015, Mme E... et M. C... ont délibérément cherché à minorer leur imposition. Par ces éléments, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a animé Mme E... et M. C..., alors même que le manquement qui leur est reproché ne présente pas un caractère répété, et comme justifiant, par suite, du bien-fondé de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts.
21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que Mme E... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge des impositions en litige. Par voie de conséquence et dès lors que l'Etat ne peut être regardé comme étant la partie perdante, pour l'essentiel, dans la présente instance, les conclusions qu'ils présentent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme E... et de M. C... tendant à la décharge, à concurrence de la somme de 28 830 euros, en droits, des suppléments de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme E... et M. C... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 12 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président de chambre,
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2023.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,
Signé : C. Heu
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Nathalie Roméro
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N°21DA01276
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N°"Numéro"