Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... et Mme B... A..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1811012 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement accordé par l'administration en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Van den Schrieck, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il ne lui donne pas entière satisfaction ;
2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige et de condamner l'Etat à lui restituer les sommes de 37 083 euros et 39 657 euros, avec intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est fondé à demander la prise en compte d'une charge exceptionnelle correspondant aux détournements dont son entreprise a été victime ;
- le résultat de l'exercice 2012 était un bénéfice de 48 059 euros alors que le résultat qui aurait dû être déclaré en tenant compte des écritures fictives relevées lors de la vérification de comptabilité est un déficit de 66 090 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 3 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 4 mars 2022.
Par une communication en date du 24 novembre 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité de la demande de M. C... tendant à la décharge de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu, d'un montant de 37 083 euros, mise en recouvrement le 31 juillet 2013, au regard des dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.
Le 24 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Van den Schrieck, a produit des observations en réponse à cette communication.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me Van den Schrieck, avocat de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... exerce à titre individuel une activité de négoce de pièces automobiles pour véhicules de particuliers. Il a régulièrement déclaré le résultat de cette activité pour l'exercice 2012 et a été assujetti, conformément à ses écritures, à une cotisation primitive d'impôt sur le revenu, d'un montant de 37 083 euros, mise en recouvrement le 31 juillet 2013. Par ailleurs, l'activité exercée par M. C... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2012 à 2014 au cours de laquelle le vérificateur a constaté que les écritures comptables d'achat de biens et de services ne correspondaient à aucune opération réelle mais avaient permis au comptable de l'entreprise de masquer les détournements de fonds opérés par lui au détriment de l'entreprise. Le vérificateur, après avoir rejeté la comptabilité comme non probante, a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée déductible correspondant aux enregistrements comptables de charges sans contrepartie réelle et réintégré ces mêmes charges dans les bénéfices imposables de l'entreprise exploitée par M. C.... En conséquence, l'administration a rehaussé le bénéfice imposable de l'exercice 2012 et a assujetti M. et Mme C... à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2012 en suivant la procédure de redressement contradictoire. Cette cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu a été mise en recouvrement le 31 mars 2018, pour un montant de 27 102 euros en droits. Par une réclamation du 5 avril 2018, M. et Mme C... ont sollicité le dégrèvement de la cotisation primitive et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes. M. C... relève appel du jugement du 11 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement accordé par l'administration en cours d'instance, a rejeté les conclusions de cette demande tendant à la décharge des impositions maintenues à leur charge.
2. M. C..., qui ne conteste pas les motifs de droit et de fait ayant donné lieu au rehaussement des résultats de l'entreprise au titre de l'exercice clos en 2012 et à l'établissement d'une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2012, fait valoir que le résultat déclaré avant correction pour l'exercice 2012, d'un montant de 48 059 euros, aurait dû être un déficit de 66 090 euros, compte tenu des écritures fictives relevées par l'administration lors de la vérification de comptabilité. Il demande la prise en compte d'une charge exceptionnelle correspondant aux détournements dont l'entreprise qu'il exploite a été victime. Il doit ainsi être regardé comme demandant une compensation entre, d'une part, la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012 et, d'autre part, la surtaxe commise à son détriment en raison de l'absence de prise en compte, pour la liquidation de cette imposition, du résultat déficitaire procédant des détournements de fonds commis par le comptable de l'entreprise.
3. Toutefois, aux termes du I de l'article 38 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Les pertes subies par une entreprise se livrant à une activité commerciale du fait de détournements de fonds commis par un préposé ne peuvent être regardées comme correspondant à un risque lié à l'exercice normal de la profession si les irrégularités répétées commises par ce préposé pouvaient être décelées par des contrôles, portant notamment sur la comptabilité, qu'il appartenait au dirigeant d'exercer normalement en temps utile. Dans ce cas, ces agissements délictueux ne peuvent être regardés comme ayant été commis à l'insu du dirigeant de l'entreprise et les pertes subies ne sont pas déductibles des résultats de l'entreprise.
4. Il résulte de l'instruction que M. C... n'a exercé aucun contrôle sur les agissements de son salarié auquel il faisait, selon ses propres termes, " une confiance aveugle " et auquel il avait confié l'accès aux comptes bancaires de l'entreprise. En outre, M. C..., alors même qu'il avait été informé par sa banque des nombreuses anomalies relevées sur le compte bancaire, a refusé de mettre en cause son salarié et n'a pris aucune mesure de contrôle ni vérifié les craintes exprimées par la banque. Les agissements de ce salarié n'ont d'ailleurs été révélés au contribuable qu'à la suite du signalement au service Tracfin effectué par l'établissement bancaire, teneur du compte de ce salarié. Dès lors, les agissements délictueux du comptable de l'entreprise exploitée par M. C... ne peuvent être regardés comme ayant été commis à l'insu de ce dernier. Par suite, les pertes subies par l'activité individuelle de M. C... ne sont pas déductibles des résultats de l'année 2012.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des impositions demeurant en litige. Le requérant n'est pas davantage fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui restituer les sommes de 37 083 euros et 39 657 euros, avec intérêts moratoires.
6. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de M. C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président de chambre,
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022.
Le président, rapporteur,
Signé : M. SauveplaneLe président de chambre,
Signé : C. Heu
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°21DA01765 2