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15/11/2022 | FRANCE | N°22DA01388

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 15 novembre 2022, 22DA01388


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 6 avril 2022 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'une carte de résident en qualité de réfugié, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie

privée et familiale " dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 6 avril 2022 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'une carte de résident en qualité de réfugié, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Par un jugement n° 2203286 du 27 juin 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a admis M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, a annulé l'arrêté du 6 avril 2022 et a enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 30 juin 2022, sous le n° 22DA01388, le préfet du Nord demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lille.

Il soutient que :

- le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a commis une erreur de droit en retenant la méconnaissance de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est renvoyé au mémoire en défense de première instance quant aux autres moyens soulevés par M. C....

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2022, M. C..., représenté par Me Norbert Clément, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 septembre 2022.

II. Par une requête, enregistrée le 30 juin 2022, sous le n°22DA01389, le préfet du Nord demande qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n°2203286 du tribunal administratif de Lille du 27 juin 2022 par les mêmes moyens que ceux soulevés dans la requête n° 22DA01388.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2022, M. C..., représenté par Me Norbert Clément, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 septembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91 647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Anne Seulin, présidente de chambre.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 22DA01388 et n° 22DA01389 sont dirigées contre le même jugement et concernent la situation d'une même personne. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. B... C..., ressortissant guinéen, né le 7 juillet 1987, est entré sur le territoire français le 22 février 2019 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 23 septembre 2021, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 23 février 2022. Par un arrêté du 6 avril 2022, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de résident en qualité de réfugié, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination où il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 27 juin 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 6 avril 2022 et l'a enjoint de réexaminer la situation de M. C....

Sur la requête n° 22DA01388 :

Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge :

3. Aux termes des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) " Aux termes de l'article L. 542-1 du même code : " (...) / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de notification de celle-ci ". Enfin, aux termes de l'article R. 532-57 du même code : " La date de notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et qui est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques, fait foi jusqu'à preuve du contraire ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire français à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande, pour le cas où une telle décision est prise, lui soit notifiée régulièrement par l'OFPRA ou, si un recours a été formé contre cette décision, jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la CNDA. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement lue en audience publique.

5. Le premier juge a annulé l'arrêté du 6 avril 2022 au motif que le préfet du Nord ne produisait aucun élément de nature à établir que la décision de la CNDA avait été régulièrement notifiée à M. C..., antérieurement à la date d'édiction de son arrêté. Toutefois, il ressort de la fiche " Telemofpra " produite par le préfet du Nord que la décision de la CNDA rejetant la demande d'asile de M. C... a été lue en audience publique le 23 février 2022, antérieurement à l'arrêté préfectoral du 6 avril 2022. En vertu des dispositions citées au point 2, c'est à partir de cette date que le droit pour l'intéressé de se maintenir sur le territoire français a cessé. Il suit de là qu'en décidant que ce droit cessait à partir de la notification de la décision de la CNDA, qui au demeurant a eu lieu le 4 mars 2022 antérieurement à l'arrêté préfectoral attaqué, le premier juge a commis une erreur de droit. Dans ces conditions, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 6 avril 2022, en toutes ses dispositions.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Lille à l'encontre de l'arrêté du 6 avril 2022.

Sur l'obligation de quitter le territoire français consécutive au rejet de la demande d'asile :

7. En premier lieu, par un arrêté du 30 septembre 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord le même jour, le préfet du Nord a donné à M. A... E..., adjoint à la cheffe du bureau du contentieux et du droit des étrangers, délégation à l'effet de signer, notamment, toutes décisions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris par une autorité incompétente doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 542-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 423-23 du même code : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Enfin, aux termes de l'article L. 425-9 du même code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".

9. Il ressort des pièces des dossiers que M. C... n'a pas formé de demande de titre de séjour sur les fondements des articles L. 423-23 et L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office sa demande sur ces fondements. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est donc inopérant. Il ressort par ailleurs des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet a procédé à un examen sérieux de la situation de M. C....

10. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union (...) ".

11. Lorsqu'il sollicite la délivrance du statut de réfugié, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il pourra faire l'objet, le cas échéant, d'une mesure d'éloignement du territoire français avec ou sans délai de départ volontaire et d'une interdiction de retour. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne la décision prise sur sa demande, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ou de compléter ses observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français, sur l'octroi ou non d'un délai de départ volontaire, sur la fixation du pays de destination et sur l'interdiction de retour, lesquels sont pris concomitamment et en conséquence du refus de la qualité de réfugié. Dès lors, le moyen tiré de la violation du principe général du droit communautaire du respect des droits de la défense doit être écarté.

12. En quatrième lieu, l'obligation de quitter le territoire français étant directement fondée sur le rejet de la demande d'asile de M. C... en vertu des dispositions précitées de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ne peut être accueillie.

13. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. "

14. Comme il a été dit précédemment, M. C... a seulement saisi le 1er juillet 2020 le préfet du Nord d'une demande tendant à obtenir le statut de réfugié, sans déposer parallèlement une demande de titre de séjour en raison de son état de santé sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, il ne justifie pas avoir produit auprès de l'autorité préfectorale des éléments médicaux relatifs à son état de santé avant que la mesure d'éloignement ne soit prise le 6 avril 2022, notamment les certificats médicaux des 18, 28 et 29 mai 2020 puis des 9 et 10 mars 2022 qu'il produit seulement à l'instance, ni ne justifie de l'impossibilité dans laquelle il se trouvait de produire ces certificats médicaux. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision fixant le pays de destination :

15. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / (...) 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. "

16. La décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours n'étant pas illégale, le moyen excipant de son illégalité à l'encontre de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

17. Si M. C... soutient ensuite qu'il craint pour son intégrité physique en cas de retour en Guinée, il n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations, alors, en outre, que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de la CNDA du 23 février 2022. Dans ces conditions, les moyens tirés du défaut d'examen sérieux, de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an :

18. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

19. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Enfin, aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".

20. Pour faire interdiction à M. C... de revenir sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet du Nord a pris en compte les conditions de l'entrée et du séjour en France de l'intéressé, son absence de liens familiaux en France, le fait qu'il ne se soit pas soustrait à des mesures d'éloignement et qu'il ne présente pas de menace pour l'ordre public et qu'il n'établit pas justifier de circonstances humanitaires particulière. Il a visé les articles L. 612-8 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a bien pris en compte les critères énumérés par l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'il n'a ainsi pas méconnu. Dès lors, les moyens tirés du défaut de motivation, du défaut d'examen sérieux et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2022 du préfet du Nord. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur la requête n° 22DA01389 :

22. Le présent arrêt statuant au fond sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 2203286 du tribunal administratif de Lille du 27 juin 2022, la requête n° 22DA01389 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement est devenue sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 22DA01389.

Article 2 : Le jugement n° 2203286 du 27 juin 2022 du magistrat désigné par le Président du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. B... C... et à Me Norbert Clément.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 2 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2022.

Le président-assesseur,

Signé : M. D...La présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

N°22DA01388,22DA01389 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01388
Date de la décision : 15/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Seulin
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : CLEMENT;CLEMENT;CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-11-15;22da01388 ?
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