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29/09/2022 | FRANCE | N°21DA00151

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 29 septembre 2022, 21DA00151


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1708297 du 26 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 janvier 2021 et le 23 février 202

2, M. et Mme C..., représentés E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013.

Par un jugement n° 1708297 du 26 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 janvier 2021 et le 23 février 2022, M. et Mme C..., représentés E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration n'a pas apporté la preuve du désinvestissement ni de l'appréhension des revenus distribués ;

- si les commissions sont non déductibles faute de déclaration, elles ne constituent cependant pas des revenus distribués ;

- les charges fictives de location de matériel correspondent à des rémunérations versées en espèces aux salariés en paiement d'heures supplémentaires qui ne constituent pas des revenus distribués ;

- l'application aux droits en litige des pénalités pour manquement délibéré ou pour manœuvres frauduleuses n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2021, et un mémoire, enregistré le 4 mars 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,

- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Roumazeille, représentant M. et Mme C....

Une note en délibéré, présentée pour M. et Mme C..., E..., a été enregistrée le 15 septembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. La société F..., dont M. C... était le gérant et l'actionnaire principal, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a réintégré à ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés diverses charges considérées comme non déductibles. A la suite d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a regardé ces suppléments de bénéfices comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. C... sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. En conséquence, l'administration a assujetti M. et Mme C..., en suivant la proposition de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties des majorations de 40 % et de 80 % sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 26 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur les impositions en litige :

2. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. / (...) " Aux termes de l'article 47 de l'annexe II au même code : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées ".

3. La procédure suivie à l'égard des contribuables étant la procédure de rectification contradictoire et ceux-ci ayant refusé les rectifications proposées par l'administration, celle-ci supporte la charge de la preuve de l'existence et de l'appréhension des revenus distribués par la société F....

En ce qui concerne les commissions :

4. Il résulte des mentions de la proposition de rectification adressée à M. et Mme C... que le compte 622 " intermédiaires et honoraires " dans la comptabilité de la société F... a enregistré des commissions pendant l'exercice clos en 2011 d'un montant de 18 200 euros sans justification et sans indentification des bénéficiaires de ces commissions. De surcroit, la contrepartie comptable était directement une écriture de crédit de compte banque, corroborée par l'examen des relevés de comptes bancaires de la société qui portaient la trace de retraits en espèces aux mêmes dates. La déclaration des données sociales (DADS 2) présentée par la société en cours de contrôle, n'ayant pas été déposée en réalité auprès des organismes sociaux, l'administration a réintégré ces commissions, d'un montant de 18 200 euros, dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et a regardé cette somme de 18 200 euros comme un revenu distribué imposable entre les mains de M. et Mme C....

5. D'une part, si M. et Mme C... soutiennent qu'une déclaration DADS 2 a été envoyée en son temps au service des impôts, l'administration fait valoir que seule une copie de cette déclaration a été remise au vérificateur en cours de contrôle et que la société F... avait également admis que la déclaration n'avait pas été déposée en temps utile au cours de l'année 2011. Les requérants, à qui incombe la charge de la preuve sur ce point, n'apportent pas d'élément contraire. Ils n'apportent pas davantage la preuve que le versement de ces commissions était nécessaire pour obtenir des marchés en Belgique. Il n'est pas non plus établi par eux que l'augmentation du chiffre d'affaires réalisé avec certains clients belges serait due au versement de ces commissions. De surcroit, il est constant que la contrepartie comptable de l'enregistrement de ces commissions était directement une écriture de crédit de compte banque, corroborée par l'examen des relevés de comptes bancaires de la société qui portaient la trace de retraits en espèces aux mêmes dates. Dès lors, le moyen doit être écarté et l'administration doit être regardée comme apportant la preuve tant de l'existence du supplément de chiffre d'affaires en conséquence de la réintégration de la somme de 18 200 euros dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011, que du désinvestissement de cette somme.

6. D'autre part, s'agissant de la preuve de l'appréhension, l'administration fait valoir, sans être contredite par les requérants, que le vérificateur a pu établir que M. C... était la seule personne à avoir effectué des retraits en espèces sur le compte bancaire de la société F... après de la Banque populaire du Nord et qu'il était le seul maître de l'affaire, en sa qualité d'associé majoritaire à 70 % en 2011, de gérant de droit et ayant seul accès aux comptes bancaires de la société, et qu'il détenait la carte bancaire au nom de la société pour effectuer les retraits en espèces aux distributeurs automatiques de billets. La circonstance que l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C... n'a démontré aucun enrichissement reste sans incidence sur la preuve de l'appréhension. Dès lors, l'administration doit également être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension de cette somme par M. C... en sa qualité de seul maître de l'affaire. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a imposé la somme de 18 200 euros entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

En ce qui concerne les charges fictives comptabilisées par la société :

7. Il résulte des mentions de la proposition de rectification que le compte 613511 " location matériel en Belgique " dans la comptabilité de la société F... présentait un solde débiteur de 83 300 euros en 2011, de 44 850 euros en 2012 et de 120 320 euros en 2013, ce solde débiteur correspondant à des factures de la société belge ADF TIB d'un montant supérieur à 1 000 euros qui étaient systématiquement payées en espèces en fin d'année. Ces factures n'étaient accompagnées d'aucun bon de commande ni d'indication précise sur le matériel loué. M. C... a admis, au cours de la vérification de comptabilité, que ces factures de plus de 1 000 euros étaient des factures fictives établies en fin d'année pour justifier des sorties d'espèces des comptes bancaires de la société. En conséquence, l'administration a réintégré ces dépenses dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés pour les exercices 2011 à 2013 et les a regardées comme un revenu distribué imposable entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

8. S'agissant de la preuve de l'existence des revenus distribués, M. et Mme C... ne contestent pas le caractère fictif des factures de la société belge ADF TIB qui donnaient lieu à des retraits en espèce des comptes bancaires de la société mais ils soutiennent à présent que ces sommes, soustraites des caisses sociales par le biais de factures fictives, permettaient de rémunérer en espèces des salariés de la société F.... Toutefois, il est constant que les sommes prétendument versées à certains salariés de la société ne figuraient pas sur les bulletins de paye et n'ont été ni déclarées ni comptabilisées en tant que rémunération d'un contrat de travail. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve tant de l'existence du supplément de chiffre d'affaires en conséquence de la réintégration des sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 dans la base imposable de la société F... à l'impôt sur les sociétés, que du désinvestissement de ces sommes. Ainsi qu'il a été déjà dit au point 6, l'administration doit également être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension de ces sommes par M. C... en sa qualité de seul maître de l'affaire. Par suite, le moyen doit être écarté et c'est à bon droit que l'administration a imposé les sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...) ". L'administration a appliqué la majoration de 40 % aux rehaussements afférents aux revenus distribués en conséquence de la rectification relative aux commissions comptabilisées et la majoration de 80 % aux rehaussements afférents aux revenus distribués en conséquence de la rectification relative aux factures fictives.

10. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % procédant des distributions au titre des commissions non justifiées, l'administration fait valoir que M. C... a appréhendé une somme de 18 200 euros par des retraits en espèces sous couvert de commissions comptabilisées, sans aucune pièce justificative, par la société dont il était le gérant. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée, qui a été celle de M. C..., d'éluder le paiement de l'impôt dû, justifiant l'application de cette majoration.

11. Pour justifier l'application de la majoration de 80 % procédant des distributions au titre des factures fictives, l'administration fait valoir que M. C... a appréhendé les sommes de 83 300 euros en 2011, 44 850 euros en 2012 et 120 320 euros en 2013 par des retraits en espèces sous couvert de factures fictives de location d'une société qui était un fournisseur régulier de la société F... et facturait régulièrement, par ailleurs, certaines prestations de manière à donner une vraisemblance aux factures fictives. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'agissements délibérés, commis par M. C... en vue d'égarer le pouvoir de contrôle de l'administration, justifiant l'application de cette majoration.

12. Il résulte de toute de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. L'Etat n'étant pas partie perdante, les conclusions de M. et Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 15 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. D... A..., premier-conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022.

Le président, rapporteur,

M. SauveplaneLe président de chambre,

C. Heu

La greffière,

N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°21DA00151 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00151
Date de la décision : 29/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : ROUMAZEILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-09-29;21da00151 ?
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