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27/09/2022 | FRANCE | N°22DA00191

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 27 septembre 2022, 22DA00191


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance de la carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2109210 du 21 janvier 2022, le magistrat désigné par le président tribunal a

dministratif de Lille a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel le préfet du Nord lui a refusé la délivrance de la carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2109210 du 21 janvier 2022, le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Lille a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2022 sous le n° 22DA00191, le préfet du Nord demande à la cour d'annuler l'article 2 de ce jugement prononçant l'annulation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation dès lors qu'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'imposait à l'autorité préfectorale, avant d'édicter une interdiction de retour à l'encontre de Mme A..., de prendre en compte des circonstances humanitaires ;

- les circonstances que l'intéressée ne faisait pas l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et que sa présence en France ne représente pas une menace à l'ordre public ne faisaient pas obstacle au prononcé d'une interdiction de retour ;

- le jugement comporte une motivation incohérente quant au droit au séjour de Mme A... sur le sol français compte tenu de l'état de santé de son fils ;

- l'interdiction de retour pourra être abrogée si l'intéressée remplit les conditions posées par l'article L. 613-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2022, M. B... A..., représentée par Me Héloïse Marseille, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Nord de réexaminer sa situation à la lumière de la décision à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au profit Me Marseille au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle fait valoir que la requête d'appel n'est pas fondée et que la décision d'interdiction de retour est entachée d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation.

Mme A... a été maintenue au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Par ordonnance du 13 juillet 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 1er septembre 2022.

II. Par une requête, enregistrée le 25 avril 2022, sous le n° 22DA00887, Mme B... A..., représentée par Me Héloïse Marseille, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2022 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 2 novembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation à la lumière de la décision à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit Me Marseille au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas sérieusement examiné sa demande de régularisation ;

- la décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de refus de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît le droit à une bonne administration et le principe général du droit communautaire du respect des droits de la défense et a été prise en méconnaissance de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux, d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une erreur de droit et a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2022, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2022.

Par ordonnance du 13 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er septembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante guinéenne née le 14 mai 1995 à Conakry, est entrée en France le 23 mars 2018. Le 4 novembre 2018, elle a donné naissance à un fils et, le 11 janvier 2019, elle a sollicité une carte de résident au titre de l'asile. Ses demandes d'asile ont été rejetées par une décision du 20 février 2020 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) par une décision du 28 mai 2021. Le 23 juin 2021, Mme A... a déposé une demande de titre de séjour en sollicitant la régularisation de sa situation pour des motifs exceptionnels. Par arrêté du 2 novembre 2021, le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par le jugement précité du 21 janvier 2022, le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Lille a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et a rejeté le surplus des conclusions de la requête présentée le 25 novembre 2021. Le préfet du Nord relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an pour erreur d'appréciation. Mme A... relève appel du même jugement en tant qu'il n'a pas fait droit au surplus de ses conclusions.

2. Les requêtes n° 22DA00191 et n° 22DA00887 présentées par le préfet du Nord et Mme A... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n° 22DA00191 :

3. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".

4. Il résulte de ces dispositions que lorsque la décision d'éloignement a été assortie, comme en l'espèce, d'un délai de départ volontaire, l'autorité préfectorale a la faculté de prendre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Pour fixer la durée de cette interdiction, le préfet tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... vivait en France depuis plus de trois années à la date de l'arrêté litigieux et a mis à profit son séjour pour permettre à son fils C... de bénéficier d'une prise en charge médicale en France en raison d'une malformation congénitale. Néanmoins, Mme A... s'est maintenue irrégulièrement en France après le rejet de sa demande d'asile et, à l'exception de son fils, ne compte aucune attache privée ou familiale en France. Ainsi, alors même qu'elle n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et que sa présence en France ne représente pas une menace pour l'ordre public, le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur d'appréciation en édictant une interdiction de retour d'une durée d'un an.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a annulé la décision d'interdiction de retour contenue dans l'arrêté du 2 novembre 2021. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement n° 2109210 sur ce point, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête.

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A... :

7. Le présent arrêt, qui fait droit à la requête présentée par le préfet du Nord, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions présentées par Mme A... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Nord de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte, doivent être rejetées.

Sur la requête n° 22DA00887 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

8. En premier lieu, Mme A... réitère le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions contestées. Cependant, elle n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le premier juge sur ce moyen au point 2 du jugement contesté. Par suite, il y a lieu, par adoption de motifs, de l'écarter.

9. En deuxième lieu, il ressort de l'arrêté du 2 novembre 2021 que le préfet du Nord a procédé à un examen sérieux de la demande de titre de séjour de Mme A... qui était fondée sur l'asile. Si l'autorité préfectorale n'a pas mentionné le courrier du 16 juin 2021, réceptionné le 23 juin 2021, cette circonstance ne saurait révéler un défaut d'examen sérieux dès lors que la requérante qui fait état, sans autre précision ni joindre de documents à l'appui de ses dires, de ses efforts d'intégration du fait d'actions de bénévolat et d'aide à la personne et du suivi médical de son fils en raison de complications liées à sa naissance prématurée, ne pouvait pas être regardée comme demandant un titre de séjour sur les fondement des dispositions des articles L. 435-1 et L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à l'admission exceptionnelle au séjour ou à la nécessité d'une prise en charge médicale. Par suite le moyen doit être écarté.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

11. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... peut se prévaloir d'une durée de présence continue en France de plus de trois années à la date de l'arrêté attaqué et de la naissance d'un fils né le 4 novembre 2018 sur le sol français. Les demandes d'asile que son fils et elle ont présentées ont été définitivement rejetées. Si la requérante indique être enceinte depuis le mois de février 2022, cette circonstance est postérieure à l'arrêté du 2 novembre 2021 et est donc sans incidence sur sa légalité. Si Mme A... indique que son fils, qui a fait l'objet d'une intervention chirurgicale le 19 juillet 2021, fait l'objet d'une prise en charge médicale en France en raison d'une malformation congénitale, à savoir une cryptorchidie testiculaire droite, toutefois, elle n'établit pas, par les pièces produites à l'appui de ses écritures, y compris le certificat médical établi le 26 novembre 2021 par un médecin généraliste, que l'état de santé de son fils nécessitait, à la date du 2 novembre 2021 de l'arrêté attaqué, une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, pas plus qu'il encourrait du fait de cette malformation des persécutions en cas de retour dans le même pays. Par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour litigieuse n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision ne peut être regardée comme violant les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ou entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen excipant de l'illégalité de cette décision doit être écarté.

13. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 11, l'arrêté attaqué est suffisamment motivé et il ressort de ses termes mêmes que le préfet a procédé à un examen sérieux de la situation de Mme A.... Par suite, ces moyens doivent être écartés.

14. En troisième lieu, Mme A..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, ne pouvait, du fait même de l'accomplissement de cette démarche tendant à son maintien en France, ignorer qu'en cas de refus, elle ne pourrait légalement se maintenir sur le territoire français et serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Elle a eu la possibilité, pendant la procédure d'instruction de sa demande de titre de séjour, de présenter tous les éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu des décisions administratives relatives à son droit au séjour en France, mais aussi à son possible éloignement du territoire français. Ainsi, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée du droit d'être entendue qu'elle tient du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Par suite, le moyen doit être écarté.

15. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 13, l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de Mme A... n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, ni n'est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

16 En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen excipant de l'illégalité de cette décision doit être écarté.

17. En deuxième lieu, Mme A... réitère les moyens tirés du défaut d'examen sérieux, de l'erreur manifeste d'appréciation, de l'erreur de droit et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Cependant, elle n'apporte pas en appel d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le premier juge sur ces moyens. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, de les écarter.

18. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

19. Mme A... expose que son fils serait exposé à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison de possibles accusations de sorcellerie du fait de sa malformation congénitale. A ce titre, elle produit un rapport de l'Unicef d'avril 2010 sur les enfants accusés de sorcellerie en Afrique ainsi que de deux articles provenant des sites internet Humanium.org et Afrik.com. Toutefois, ces documents n'évoquent pas la Guinée parmi les pays où ces accusations pourraient se pratiquer. En outre, la pathologie de l'enfant ayant été diagnostiquée au cours du mois de novembre 2010, Mme A... aurait eu la possibilité de mentionner ce risque devant la CNDA, ce qu'elle n'a pas fait. Dès lors, la requérante n'établit pas que son fils risquerait des traitements proscris par les stipulations et dispositions citées au point 21. Par suite, le moyen doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de sa requête. Par suite, ses conclusions tendant à l'annulation totale de l'arrêté du 2 novembre 2021, celles à fin d'injonction assorties d'astreintes et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2109210 du 21 janvier 2022 est annulé en tant qu'il a annulé la décision faisant interdiction de retour pour une durée d'un an à Mme A....

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par Mme A... dans la requête n° 22DA00191 sont rejetées.

Article 3 : La requête n° 22DA00887 de Mme A... est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Mme B... A... et à Me Héloïse Marseille.

Copie sera adressée au Préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 13 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLa présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé :A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

N°22DA00191, 22DA00887 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00191
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : MARSEILLE;MARSEILLE;MARSEILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-09-27;22da00191 ?
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