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07/07/2022 | FRANCE | N°22DA00758

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 07 juillet 2022, 22DA00758


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 25 octobre 2021 par lequel la préfète de la Somme lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination. Il a également demandé d'enjoindre sous astreinte à la préfète de la Somme de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois

à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2103779 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 25 octobre 2021 par lequel la préfète de la Somme lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination. Il a également demandé d'enjoindre sous astreinte à la préfète de la Somme de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2103779 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2022, M. B..., représenté par Me Pereira, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 7 b de l'accord franco-algérien, son employeur souhaitant seulement son maintien dans l'entreprise et n'ayant pas en conséquence à publier une offre d'emploi ;

- il disposait d'une habilitation électrique pour exercer cet emploi, contrairement à ce qu'indique le refus de titre contesté ;

- le refus de titre méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 mai 2022, la préfète de la Somme conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que M. B... représente une menace à l'ordre public, ne peut justifier de son insertion professionnelle et que les membres de sa famille ont également fait l'objet de refus de séjour.

La clôture de l'instruction a été fixée, la dernière fois au 7 juin 2022 à 12 heures par ordonnance du 18 mai 2022.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;;

- le code du travail

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., de nationalité algérienne, est entré en France le 10 avril 2015 alors qu'il était mineur. Il a sollicité, à sa majorité, un certificat de résidence portant la mention " salarié ". Par jugement du 21 septembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 22 avril 2021 rejetant cette demande et a enjoint à la préfète de la Somme de réexaminer sa situation. La préfète de la Somme a, à nouveau, rejeté cette demande par un arrêté du 25 octobre 2021, portant également obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 25 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes que cet arrêté soit annulé et qu'il soit enjoint sous astreinte à la préfète de la Somme de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ".

2. Aux termes du b de l'article 7 de l'accord franco-algérien : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention "salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) ". En prévoyant l'apposition de la mention " salarié " sur le certificat de résidence délivré aux ressortissants algériens et en précisant que cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française, les stipulations de l'article 7 de l'accord franco-algérien rendent ainsi applicables à l'exercice par ces ressortissants d'une activité salariée les dispositions des articles L. 5221-5 et suivants et R. 5221-17 et suivants du code du travail. Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail dans sa version applicable à la date de la décision contestée: " L'autorisation de travail est accordée lorsque la demande remplit les conditions suivantes : / 1° S'agissant de l'emploi proposé : / a) Soit cet emploi relève de la liste des métiers en tension prévue à l'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et établie par un arrêté conjoint du ministre chargé du travail et du ministre chargé de l'immigration ; / b) Soit l'offre pour cet emploi a été préalablement publiée pendant un délai de trois semaines auprès des organismes concourant au service public de l'emploi et n'a pu être satisfaite par aucune candidature répondant aux caractéristiques du poste de travail proposé ; (...) ".

3. En l'espèce, il ressort de l'avis de la directrice de l'unité départementale de la Somme de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France du 31 mars 2021 qu'aucune offre d'emploi n'a été publiée pour le poste. M. B... ne conteste pas que l'emploi sollicité ne relève pas de la liste des métiers sous tension. Par suite, la préfète de la Somme était fondée à lui refuser le certificat de résidence portant la mention " salarié ", en application du b) du 1°) de l'article R. 5221-20 du code du travail pour ce motif. La circonstance que M. B... ait bénéficié d'un contrat d'apprentissage dans l'entreprise qui proposait de l'embaucher ne dispensait pas celle-ci de déposer une offre d'emploi pour cet emploi en contrat à durée déterminée à temps complet compte tenu des caractéristiques différentes des deux engagements.

4. M. B... fait valoir que contrairement à ce qu'a indiqué la préfète de la Somme dans la décision contestée, il est bien titulaire d'une habilitation électrique délivrée le 23 juin 2021. Toutefois, cette mention erronée est sans incidence sur la légalité du refus de titre contesté dès lors que la préfète aurait pris la même décision en ne retenant que l'autre motif mentionné au point 3, également retenu par cette décision, et qui aurait suffi à lui seul, à justifier cette décision. Par suite, la préfète de la Somme n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point 2 en rejetant la demande de certificat de résidence de M. B..., qui avait pour seul fondement l'exercice d'une activité professionnelle.

5. L'autorité préfectorale peut délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou d'un accord bilatéral comme en l'espèce l'accord franco-algérien, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux. Lorsque le préfet recherche d'office si l'étranger peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut se prévaloir, à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour, de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen.

6. En l'espèce, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que la préfète de la Somme a examiné si la situation de M. B... justifiait son admission exceptionnelle au séjour au titre de son pouvoir gracieux. M. B..., qui ne demandait pas son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale mais pour exercer une activité professionnelle, ne justifie à ce titre que d'un contrat d'apprentissage à compter du 18 novembre 2019 jusqu'au 31 août 2020. Par ailleurs, M. B... est entré en France, à l'âge de douze ans et huit mois, le 10 avril 2015, muni d'un visa de court séjour pour rejoindre sa mère, qui bénéficie depuis le 28 janvier 2021 d'un certificat de résidence valable jusqu'au 27 janvier 2022. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il a fait l'objet d'une ordonnance pénale du 10 septembre 2021 pour la conduite d'un véhicule sans permis alors qu'il avait fait usage de stupéfiants. Il a également fait l'objet d'une comparution préalable de culpabilité, le 27 octobre 2021, certes postérieure à la décision en litige mais pour des faits antérieurs d'offre ou cession et de transports de produits stupéfiants. M. B... conteste les autres faits issus du fichier du traitement des antécédents judiciaires mentionnés par le préfet dans sa décision de refus de titre. Toutefois, compte tenu des faits ayant fait l'objet d'une condamnation, la préfète, qui ne s'est pas fondée que sur la menace à l'ordre public et qui a également pris en compte sa faible expérience professionnelle, sa situation de célibataire, sans enfant et le fait qu'il ait vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en refusant de lui délivrer un certificat de résidence.

7. M. B... fait également valoir qu'il vit avec sa mère, son frère cadet de nationalité française et sa sœur mineure. Par ailleurs, son père qui vit en Algérie a renoncé, le 30 mai 2018, à la garde de ses enfants. Il produit également les attestations de deux de ses professeurs et de son chef d'établissement au cours de l'année scolaire 2018-2019 qui attestent de son sérieux, de son investissement et de son soutien à ses camarades. Une éducatrice spécialisée atteste également, le 1er avril 2019, de son engagement notamment au sein du conseil de la vie sociale de l'association de prévention spécialisée intervenant dans son quartier. Toutefois, compte tenu des faits qu'il a reconnus lors de ses gardes à vue, de son expérience professionnelle limitée, et alors qu'il n'a pas demandé un certificat de résidence sur le fondement de la vie privée et familiale, la décision lui refusant ce titre ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et en conséquence ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B..., qui ne développe aucun moyen sur les décisions autres que le refus de titre, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes d'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2021 et d'injonction à ce que l'autorité préfectorale lui délivre un certificat de résidence. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Pereira.

Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.

Le rapporteur,

Signé : D. PerrinLa présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

2

N° 22DA00758


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00758
Date de la décision : 07/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-07-07;22da00758 ?
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