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21/06/2022 | FRANCE | N°20DA00225

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 21 juin 2022, 20DA00225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier du Belvédère à lui verser une somme totale de 200 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge médicale dans cet établissement, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à garantir ce centre hospitalier des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontr

e et d'ordonner une nouvelle expertise en l'absence de consolidation de son ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier du Belvédère à lui verser une somme totale de 200 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge médicale dans cet établissement, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à garantir ce centre hospitalier des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et d'ordonner une nouvelle expertise en l'absence de consolidation de son état de santé.

Par un jugement n° 1702979 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Rouen, après avoir mis hors de cause l'ONIAM et estimé que le centre hospitalier du Belvédère n'avait commis aucune faute dans l'accomplissement des soins de nature à engager sa responsabilité, a cependant retenu au titre de l'obligation d'information de Mme A... des suites opératoires prévisibles de l'intervention qu'elle allait subir, un préjudice moral causé par l'apparition d'un syndrome régional complexe de type 1 ayant entraîné un déficit fonctionnel permanent prévisible de 20 %. Il a ainsi mis à la charge du centre hospitalier du Belvédère le versement à Mme A... d'une somme de 3 000 euros au titre de ce préjudice. Il a également mis à la charge de ce centre hospitalier les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 1 070,54 euros et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 5 février 2020, 29 mai 2020, 26 mars 2021, 25 mai 2021 et 2 juin 2021, Mme A..., représentée par Me Stéphane Barbier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires, limité à 3 000 euros l'indemnisation de son préjudice moral résultant du défaut d'information du centre hospitalier du Belvédère et mis hors de cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;

2°) de condamner le centre hospitalier du Belvédère à lui verser une somme provisionnelle de 180 000 euros en indemnisation des préjudices résultant de la perte de chance d'échapper à l'intervention et de porter à 30 000 euros la somme mise à la charge de cet établissement au titre de son préjudice moral résultant du défaut d'information ;

3°) de rendre opposable à l'ONIAM la décision à intervenir et de condamner celui-ci à lui verser une somme de 200 000 euros en réparation de ses préjudices au titre de la solidarité nationale ;

4°) d'ordonner, avant dire droit, une nouvelle expertise pour déterminer la date de consolidation de son état de santé et les différents préjudices subis ;

5°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Belvédère une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- il y a eu manquement du centre hospitalier du Belvédère à l'obligation d'information dès lors qu'elle avait une possibilité raisonnable de refuser l'intervention et qu'elle a ainsi perdu une chance qui s'élève à 90 % d'échapper au risque qui s'est réalisé ;

- elle a subi du fait de ce défaut d'information un préjudice moral important qui s'élève à 30 000 euros ;

- elle a été victime d'un aléa thérapeutique, les conséquences de cet aléa sont anormales et d'une certaine gravité et remplissent les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale ;

- son état de santé n'est pas consolidé et il y a lieu d'ordonner une expertise pour déterminer ses préjudices permanents ;

- elle est fondée à demander les sommes suivantes avant la consolidation de son état de santé :

- 2 130 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

- 36 000 euros au titre de l'assistance par une tierce personne ;

- 56 000 euros au titre de la perte de gains actuelle ;

- 10 000 euros au titre de son préjudice moral et financier ;

- 6 500 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire ;

- 32 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- 5 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

- elle est fondée à demander les sommes suivantes au titre de ses préjudices permanents :

- 2 000 euros au titre des dépenses de santé futures ;

- 30 000 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ;

- 20 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

- 5 000 euros au titre des frais d'aménagement de son logement ;

- 60 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;

- 6 000 euros au titre du préjudice d'agrément.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2020, le centre hospitalier du Belvédère, représenté par Me Marie-Noëlle Campergue, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a commis aucune faute médicale de nature à engager sa responsabilité ainsi que cela ressort du rapport d'expertise ;

- en ce qui concerne l'information de Mme A..., elle n'a subi aucune perte de chance de se soustraire à l'intervention qui était le seul traitement possible et la demande de majoration de l'intéressée de son préjudice moral n'est pas fondée ;

- la demande d'expertise de Mme A... ne présente pas un caractère utile.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 février 2021 et 10 mai 2021, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me Sylvie Welsch, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet des demandes provisionnelles de Mme A... au titre de ses préjudices permanents en l'absence de consolidation de son état de santé et à la réduction à de plus justes proportions de la somme provisionnelle réclamée.

Il soutient que :

- il n'y a pas de lien direct et certain entre le syndrome algo-dystrophique et l'intervention subie par Mme A... ;

- les conditions d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas remplies dès lors que, d'une part, les conséquences de l'acte médical n'étant pas notablement plus graves que celles auxquelles était exposée Mme A... du fait de la tuméfaction douloureuse, la condition d'anormalité du dommage n'est pas remplie et, d'autre part, la survenance du dommage subi par l'intéressée à raison de la complication liée au lymphocèle et au syndrome douloureux de l'épaule ne présentait pas une probabilité faible.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime, qui n'a pas produit d'observations.

Par une ordonnance du 3 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 juillet 2021 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère,

- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,

- et les observations de Me Claire Vaills, représentant Mme A... et de Me Charles Carluis, représentant le centre hospitalier du Belvédère.

Considérant ce qui suit :

1. Présentant une tuméfaction graisseuse du creux axillaire gauche (lipome), Mme A..., alors âgée de quarante-huit ans, a consulté le 24 mai 2013 un praticien du centre hospitalier du Belvédère à la demande de son gynécologue. Après la réalisation d'une mammographie, d'une échographie et d'une imagerie par résonnance magnétique (IRM), une intervention chirurgicale a été pratiquée dans cet établissement le 16 juillet 2013 pour une exérèse de ce lipome. A la suite de l'apparition d'une masse lymphatique douloureuse au niveau de la cicatrice, plusieurs ponctions ont été réalisées ainsi que des examens bactériologiques qui n'ont révélé aucune infection. Toutefois, Mme A... a présenté des complications post-opératoire par l'apparition de douleurs persistantes au membre supérieur gauche et au niveau de l'épaule et un syndrome douloureux régional complexe a été diagnostiqué. Estimant que des fautes avaient été commises dans sa prise en charge médicale, Mme A... a recherché la responsabilité du centre hospitalier du Belvédère et a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Rouen d'une demande aux fins d'expertise et de versement d'une provision d'un montant de 10 000 euros. Cette dernière demande a été rejetée mais une expertise a été ordonnée le 22 janvier 2015 et le rapport a été établi le 13 mai 2015 et complété le 20 octobre 2015. A la suite de cette expertise, Mme A... a saisi de nouveau le 29 novembre 2016 le juge des référés du même tribunal d'une demande de versement d'une provision d'un montant de 80 000 euros, qui a été rejetée par une ordonnance du 8 février 2017. Mais par une ordonnance du 23 octobre 2017, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Douai a condamné le centre hospitalier du Belvédère à lui verser une provision de 2 000 euros au titre du préjudice moral présumé à raison de l'absence d'information sur les suites opératoires prévisibles de l'intervention qu'elle a subie et rejeté le surplus de ses conclusions. Mme A... a saisi, le 4 octobre 2017, le tribunal administratif de Rouen d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier du Belvédère à lui verser une somme totale de 200 000 euros en réparation de l'ensemble des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de sa prise en charge médicale, à la mise en cause de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et à la condamnation de l'ONIAM à garantir cet établissement des condamnations à son encontre. Mme A... relève appel du jugement du 5 décembre 2019 du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires, limité à 3 000 euros l'indemnisation de son préjudice moral lié au défaut d'information du centre hospitalier du Belvédère et a prononcé la mise hors de cause l'ONIAM.

Sur le défaut d'information :

2. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel ". Il résulte de ces dispositions que doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence.

3. En cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question.

4. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise que, si Mme A... a été suffisamment informée sur l'intervention chirurgicale envisagée lors de plusieurs consultations en pré-opératoire dont l'une pré-anesthésique le 27 juin 2013, aucune information préalable sur le risque de possibles complications post-opératoires, en particulier sur le risque d'écoulement lymphatique et sur le retentissement sur l'épaule, ne lui a été donnée. Si l'apparition de ces risques en post-opératoire n'est pas rare au regard de la littérature médicale et aurait dû être portée à la connaissance de l'intéressée conformément à l'article L. 1111-2 du code de la santé publique précité, l'expert précise que le seul traitement possible de la masse douloureuse du creux axillaire dont elle était atteinte, qui aurait continué à grossir et serait devenue ainsi de plus en plus invalidante et qui nécessitait un examen anatomo-pathologique pour en affirmer la bénignité, était la chirurgie, dont le retard n'était pas envisageable et que l'intéressée n'aurait ainsi pu se soustraire à cette intervention, même informée de ces risques. Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il apparaît suffisamment certain que, compte tenu de l'état de santé de Mme A..., de son évolution prévisible, du risque de développer une affection maligne et en l'absence d'alternative thérapeutique à l'intervention chirurgicale qui lui était proposée, elle aurait consenti à cette intervention. Dès lors, le manquement du centre hospitalier du Belvédère à son devoir d'information n'a privé Mme A... d'aucune chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé en renonçant à l'opération. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées au titre de la perte de chance doivent être rejetées.

5. Indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a subis du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité, notamment en prenant certaines dispositions personnelles. Il appartient au patient d'établir la réalité et l'ampleur des préjudices qui résultent du fait qu'il n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité d'un accident. En revanche, la souffrance morale que l'intéressé a endurée lorsqu'il a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention doit, quant à elle, être présumée.

6. Mme A..., qui n'établit pas n'avoir pu prendre certaines dispositions personnelles et ainsi la réalité et l'ampleur de son préjudice d'impréparation, a cependant subi un préjudice résultant de la souffrance morale endurée à la découverte des conséquences post-opératoires de l'intervention, qui doit être présumé. Même si le lymphocèle dont elle a été atteinte est guéri, compte tenu de la persistance des difficultés et des douleurs dont elle reste atteinte au niveau de l'épaule gauche consistant en un syndrome douloureux régional complexe, il a été fait une juste appréciation du préjudice moral résultant du manquement du centre hospitalier du Belvédère à son obligation de l'informer des conséquences possibles de l'intervention au regard de ces complications et de la survenue de cet aléa thérapeutique, en lui allouant une somme de 3 000 euros.

Sur la mise en œuvre de la solidarité nationale :

7. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire ". L'article D. 1142-1 du même code définit le seuil de gravité prévu par ces dispositions à 24 %.

8. Il résulte de ces dispositions que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la double condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état et que leur gravité excède le seuil défini à l'article D. 1142-1 du même code. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Ainsi, elles ne peuvent être regardées comme anormales au regard de l'état du patient lorsque la gravité de cet état a conduit à pratiquer un acte comportant des risques élevés dont la réalisation est à l'origine du dommage.

9. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise que l'apparition d'un lymphocèle et d'un syndrome douloureux régional complexe est en lien direct et certain avec l'intervention chirurgicale subie par Mme A... le 16 juillet 2013. Toutefois, il ressort des conclusions de l'expert que la complication liée au lymphocèle ne présentait pas un caractère rare et que ce lymphocèle, dont la prise en charge a été conforme aux bonnes pratiques, était guéri lors de l'examen clinique du 11 mars 2015 et que la cicatrice est de bonne qualité. Les conséquences de l'acte médical ne sont ainsi pas notablement plus graves que celles auxquelles la patiente était exposée par sa pathologie en l'absence de traitement et ne peuvent être regardées comme anormales. En ce qui concerne la complication liée au syndrome douloureux de l'épaule, l'expert précise que celle-ci n'est également pas rare après le type d'intervention subie par Mme A..., d'après la littérature médicale. Il précise également que les lésions de Mme A... sont encore évolutives mais sont susceptibles de s'améliorer même s'il existe une probabilité de séquelles dès lors que, selon des études scientifiques, s'il persiste une morbidité après deux ans, la récupération à long terme est mesurée à trois, quatre ans avec des troubles de la mobilité de l'épaule constatés seulement dans 31 % des cas. Les conséquences de l'acte médical concernant cette complication, dont la probabilité n'est pas faible, ne sont donc pas notablement plus graves que celles auxquelles Mme A... aurait été exposée de manière suffisamment probable en l'absence de traitement ainsi que cela a été dit au point 6. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la condition d'anormalité du dommage subi par Mme A... n'est pas remplie et, par suite, les conditions d'indemnisation de l'intéressée au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies.

10. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen lui a seulement alloué la somme de 3 000 euros en indemnisation de son préjudice moral. Sa requête doit donc être rejetée, ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement au centre hospitalier du Belvédère d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier du Belvédère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., au centre hospitalier du Belvédère et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe, Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 7 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- Mme Muriel Milard, première conseillère,

- Mme Anne Khater, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : M. B...La présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière

Anne-Sophie Villette

2

N°20DA00225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00225
Date de la décision : 21/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SCP EMO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-06-21;20da00225 ?
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