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07/06/2022 | FRANCE | N°21DA02654

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 07 juin 2022, 21DA02654


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 juin 2021 par lequel le préfet du Nord rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2105592 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande et a enj

oint au préfet du Nord de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 juin 2021 par lequel le préfet du Nord rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2105592 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande et a enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2021, le préfet du Nord, représenté par Me Xavier Termeau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille.

Il soutient que :

- une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " valable du 11 août 2021 au 2 février 2022 a été délivrée à M. A... et, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur sa demande ;

- M. A... ne peut prétendre au renouvellement de son titre de séjour pour raisons médicales et il ne remplit pas les conditions pour obtenir un titre de séjour au titre de sa " vie privée et familiale " ;

- les moyens soulevés par M. A... devant les premiers juges ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2022, M. C... A..., représenté par Me Vincent Thalinger, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'exception de non-lieu à statuer soulevée par le préfet du Nord n'est pas fondée ;

- l'autre moyen soulevé par le préfet du Nord n'est pas fondé et, si la cour devait ne pas confirmer le moyen d'annulation retenu par les premiers juges, il reprend les moyens qu'il a soulevés en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., de nationalité guinéenne, né le 18 décembre 2000, entré en France le 10 avril 2017, s'est vu délivrer un titre de séjour pour raisons de santé valable du 18 décembre 2019 au 17 décembre 2020. Il a demandé le 21 octobre 2020 le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 11 juin 2021, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixé le pays de destination de cette mesure et prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 20 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.

Sur la régularité du jugement contesté :

2. Le préfet du Nord soutient à nouveau en appel qu'il a délivré un titre de séjour à M. A... et qu'ainsi, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par l'intéressé devant les premiers juges. Il justifie avoir délivré à M. A... un titre de séjour portant la mention " étudiant ", valable du 11 août 2021 au 10 août 2022. Si ce titre de séjour n'a été demandé qu'à titre subsidiaire par M. A..., sa délivrance faisait toutefois obstacle à son éloignement et à son interdiction de retour sur le territoire français. Dans ces conditions, faute pour les premiers juges de ne pas avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination de cette mesure et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité. Dès lors, il y a lieu de prononcer l'annulation du jugement du 20 octobre 2021 dans cette mesure, de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.

3. Il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... à l'encontre du refus de titre de séjour devant le tribunal administratif de Lille et la cour.

Sur les moyens soulevés contre le refus de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a demandé à titre principal un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, si un titre de séjour portant la mention " étudiant " lui a été délivré comme cela a été dit au point 2, il y a toujours lieu de statuer sur les conclusions de sa demande dirigées contre le refus de titre de séjour qui lui a été opposé au titre de la vie privée et familiale.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 10 avril 2017 à l'âge de seize ans et il s'est vu délivrer, compte-tenu de son état de santé, un titre de séjour valable jusqu'au 17 décembre 2020. Il a été pris en charge depuis le mois de juillet 2017 au sein de différents accueils de jour de la communauté protestante de Lille, puis dans des familles d'accueil. Il est constant que M. A... a été scolarisé depuis son entrée en France et réside sur le territoire français depuis 2017. En outre, il a obtenu en France, après le brevet des collèges en 2018, un baccalauréat professionnel " Métiers de l'électricité et de ses environnements " le 6 juillet 2021 et est inscrit en brevet de technicien supérieur électrotechnique, en alternance, au titre de l'année scolaire 2021-2022 au lycée Ozanam de Lille. Il justifie par les très nombreuses appréciations de ses professeurs et chefs d'établissements de sa scolarité exemplaire et du sérieux de ses études. Après avoir effectué différents stages en entreprise, il s'est vu proposer un contrat d'alternance pour l'année 2021-2022 par l'entreprise Rossini Energy, qui justifie de sa compétence dans la profession d'électricien et vouloir embaucher l'intéressé dès la régularisation de sa situation. M. A... fait ainsi preuve depuis son arrivée sur le territoire français d'une forte intégration scolaire et sociale sur le territoire français. Si l'intéressé est célibataire et sans charge de famille, il ne dispose cependant plus d'attaches familiales dans son pays d'origine dès lors que ses parents sont décédés. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard notamment à son intégration tant sociale que professionnelle et à la durée de son séjour régulier en France, le préfet du Nord, qui se borne à faire valoir que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille sans tenir compte de l'intensité des liens privés tissés en France par M. A..., a entaché la décisions en litige d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. A.... Par suite, il n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 11 juin 2021 rejetant la demande de M. A... de délivrance d'un titre de séjour.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

6. Le présent arrêt n'appelle pas d'autres mesures d'exécution que celles qui ont été prononcées en première instance.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me Thalinger en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Thalinger renonce à la part contributive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2105592 du 20 octobre 2021 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il n'a pas prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination de cette mesure et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination de cette mesure et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet du Nord est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5: Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord, à M. C... A... et à Me Vincent Thalinger.

Délibéré après l'audience publique du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure,

- Mme Muriel Milard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : M. B...La présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

N°21DA02654 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02654
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : ACTIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-06-07;21da02654 ?
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