Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 2103260 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande et a enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. C... un titre de séjour dans un délai d'un mois.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2021, le préfet du Nord, représenté par Me Xavier Termeau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lille.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que M. C... ne remplissait pas les conditions prévues par l'article R. 5221-20 du code du travail pour l'obtention d'un titre de séjour " salarié ", ne justifie pas l'avoir avisé de sa relation avec une ressortissante française ni de l'intensité et de l'ancienneté de cette relation et ne démontre pas être isolé dans son pays d'origine ou qu'il ne pourrait s'y insérer socialement et professionnellement ;
- c'est à tort que le tribunal lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour sans au demeurant préciser la nature dudit titre, et alors que M. C... ne remplit pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour " salarié " ou " vie privée et familiale ".
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2022, M. A... C..., représenté par Me Anne Mannessier, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le moyen soulevé par le préfet du Nord n'est pas fondé et que, si la cour devait ne pas confirmer le moyen d'annulation retenu par les premiers juges, il reprend les moyens qu'il a soulevés en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère,
- et les observations de Me Anne Manessier, représentant M. C....
Une note en délibéré présentée pour M. C... a été enregistrée le 11 mai 2022.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., de nationalité péruvienne né le 31 janvier 1994, est entré en France le 21 août 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " valable du 9 décembre 2011 au 9 décembre 2016, et s'est vu délivrer un titre de séjour en cette qualité, régulièrement renouvelé. Il a ensuite bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " recherche d'emploi-création d'entreprise " valable du 4 novembre 2019 au 3 novembre 2020. Il a demandé, le 7 septembre 2020, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " travailleur temporaire ". Le préfet du Nord relève appel du jugement du 22 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. C..., annulé l'arrêté du 22 mars 2021 par lequel il a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure et prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré régulièrement en France le 21 août 2014 pour y poursuivre ses études après avoir effectué toute sa scolarité en français jusqu'au baccalauréat, au collège et lycée franco-péruvien de Lima. Il est constant que M. C... réside sur le territoire français en situation régulière depuis cette date, soit une période de sept ans. Il a obtenu en 2017 une licence en langues étrangères appliquées aux affaires à l'université de Lille, puis un master 2 en affaires et négociations internationales en 2019 avec la mention bien. Il a ensuite signé avec une société de grande distribution un contrat de professionnalisation, puis un contrat à durée déterminée du 1er décembre 2019 au 28 août 2020, prolongé jusqu'au 31 janvier 2021. L'intéressé, qui maîtrise la langue française, a fait preuve depuis son arrivée sur le territoire français d'une intégration professionnelle et sociale réussie. S'il n'est pas contesté qu'il est célibataire et sans charge de famille et dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Nord, qui se borne à faire valoir que l'emploi occupé par l'intéressé n'est pas en adéquation avec ses diplômes, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. C....
3. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 22 mars 2021 rejetant la demande de M. C... de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination de cette mesure et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
4. Le préfet du Nord n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, compte tenu du motif d'annulation retenu, confirmé au point 2, le tribunal administratif de Lille lui a enjoint de délivrer à M. C... un titre de séjour. L'annulation de l'arrêté du 22 mars 2021 n'impliquait pas d'autres mesures d'exécution que celles qui ont été prononcées en première instance.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Nord est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à M. A... C....
Délibéré après l'audience publique du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Muriel Milard, première conseillère,
- Mme Anne Khater, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.
La rapporteure,
Signé : M. B...La présidente de la formation de jugement,
Signé : A. Chauvin
La greffière,
Signé : A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Anne-Sophie Villette
N°21DA02678 2