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06/05/2022 | FRANCE | N°21DA00808

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 mai 2022, 21DA00808


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 20 avril 2018 par lequel le maire de la commune d' a mis fin, à compter du 19 mai 2018, à ses fonctions en qualité de directrice de la communication, emploi contractuel de catégorie A à temps complet, d'enjoindre à la commune d'Onnaing de la réintégrer dans ses effectifs et de procéder à la reconstitution de sa carrière, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros

par jour de retard et de mettre à la charge de la commune d'Onnaing la somme d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 20 avril 2018 par lequel le maire de la commune d' a mis fin, à compter du 19 mai 2018, à ses fonctions en qualité de directrice de la communication, emploi contractuel de catégorie A à temps complet, d'enjoindre à la commune d'Onnaing de la réintégrer dans ses effectifs et de procéder à la reconstitution de sa carrière, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune d'Onnaing la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1806381 du 9 février 2021 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes et rejeté les conclusions présentées par la commune d'Onnaing au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 avril 2021 et 10 février 2022, Mme B... A..., représentée par Me Bighinatti, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 avril 2018 par lequel le maire de la commune d'Onnaing a mis fin, à compter du 19 mai 2018, à ses fonctions en qualité de directrice de la communication, emploi contractuel de catégorie A à temps complet ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Onnaing de la réintégrer dans ses effectifs et de procéder à la reconstitution de sa carrière, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Onnaing la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure compte tenu de l'irrégularité de la consultation du comité technique paritaire sur la suppression de son poste ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure par méconnaissance des droits de la défense car l'entretien préalable au licenciement a eu lieu avant l'avis du comité technique et avant la délibération portant suppression de son poste ; elle n'a ainsi pu consulter ces documents avant son entretien préalable au licenciement et elle a été privée d'une garantie substantielle ;

- la suppression de poste repose sur des éléments de fait non établis car il n'est pas démontré que les fonctions de directrice de la communication ont été réparties entre le directeur général des services et le directeur de cabinet ;

- la commune d'Onnaing ne justifie pas de ce qu'elle l'a interrogée sur sa volonté d'être reclassée, en méconnaissance de l'article 39-5 du décret du 15 février 1988 et sa demande de reclassement n'a pas été prise en compte par la commune ; il y a eu défaillance de l'employeur à éclairer l'exposante sur les possibilités de reclassement ;

- il s'est uniquement agi de l'évincer, en escamotant une suppression de poste qui n'a en réalité jamais eu lieu, ce qui constitue un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 juillet 2021 et 25 février 2022, la commune d'Onnaing, représentée par Me Vallez, demande au tribunal de rejeter la requête de Mme A... et de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les frais et dépens.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 février 2022, la date de clôture de l'instruction a été fixée au 28 février 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n° 2016-1858 du 23 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Fréger, représentant Mme B... A....

Une note en délibéré, présentée pour Mme A..., représentée par Me Bighinatti, a été enregistrée le 12 avril 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... a été recrutée, en 2001 par la commune d'Onnaing, en tant que directrice de la communication à temps complet, tout d'abord dans le cadre de contrats à durée déterminée puis, à compter du 1er octobre 2007, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. Le conseil municipal d'Onnaing, par une délibération du 15 février 2018, a décidé la suppression du poste occupé par Mme A.... Le maire de la commune d'Onnaing, par un arrêté du 20 avril 2018, a décidé de mettre fin à ses fonctions de directrice de la communication à compter du 19 mai 2018. Par un jugement n° 1806381 du 9 février 2021 le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions tendant notamment à l'annulation de l'arrêté du 20 avril 2018 précité du maire de la commune d'Onnaing. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale: " I. - Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique sur la base d'un rapport présenté par la collectivité territoriale ou l'établissement public. (...) ". En l'espèce, le compte-rendu du comité technique paritaire précise que la consultation est intervenue sur la base d'un tableau des effectifs. Ce compte-rendu rapporte qu'un syndicat s'est explicitement interrogé sur la suppression de ce poste qui a ainsi été mise en lumière. Les membres du comité ont pu, lors de cette réunion, poser les questions qu'ils souhaitaient et un vote a eu lieu sur la suppression des postes. S'il n'est pas établi que les membres auraient disposé d'un rapport écrit portant sur la suppression du poste, cette circonstance n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur la délibération contestée, et n'a pas privé Mme A... d'une garantie. Par suite, le moyen tiré du défaut d'information des élus doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 42 du décret du 15 février 1988 : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. La convocation à l'entretien préalable est effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. / L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. / L'agent peut se faire accompagner par la personne de son choix. / Au cours de l'entretien préalable, l'autorité territoriale indique à l'agent le ou les motifs du licenciement. En cas de licenciement pour l'un des motifs prévus à l'article 13 ou aux 1° à 4° de l'article 39-3 l'employeur territorial informe l'agent du délai pendant lequel il doit présenter sa demande écrite de reclassement ainsi que les conditions dans lesquelles les offres de reclassement sont présentées ".

4. Par une lettre de convocation du 2 janvier 2018 à un entretien préalable du 12 janvier suivant, le maire de la commune d'Onnaing a indiqué à Mme A... qu'il était envisagé de supprimer son poste de directrice de la communication et de mettre fin à ses fonctions. Il l'a informée qu'elle pouvait prendre connaissance de son dossier individuel au service des ressources humaines. Elle a ainsi été mise en mesure d'indiquer à l'autorité territoriale les motifs justifiant, selon elle, que, le cas échéant, son poste ne soit pas supprimé et de consulter son dossier individuel. Si l'avis du comité technique paritaire n'avait pas été rendu et la délibération supprimant son poste n'avait pas été prise à cette date, cette circonstance n'est pas susceptible de vicier la procédure. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure tiré de ce que les droits de la défense ont été méconnus doit être écarté.

5. En troisième lieu, au cours de l'année 2016, la commune d'Onnaing a fait l'objet d'un contrôle de la part de la chambre régionale des comptes, qui a pointé des difficultés liées à un niveau de charges de personnel plus élevé que celui des communes de taille comparable, ce qui a amené la commune à supprimer des postes dont celui de l'appelante. Alors qu'il n'est aucunement allégué qu'un agent aurait été recruté pour la remplacer, la circonstance que les missions qui lui étaient dévolues auraient été réparties entre des agents titulaires déjà présents au sein de la collectivité, ne permet pas de remettre en cause la réalité de la suppression de son poste. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait quant à la réalité de la suppression du poste doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 39-5 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale : " I.- Le licenciement (...) ne peut être prononcé que lorsque le reclassement de l'agent n'est pas possible dans un autre emploi que la loi du 26 janvier 1984 susvisée autorise à pourvoir par un agent contractuel et dans le respect des dispositions légales régissant le recrutement des agents contractuels. (...) Il s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie hiérarchique ou à défaut, et sous réserve de l'accord exprès de l'agent, d'un emploi relevant d'une catégorie inférieure. / L'offre de reclassement concerne les emplois des services relevant de l'autorité territoriale ayant recruté l'agent. L'offre de reclassement proposée à l'agent est écrite et précise. L'emploi proposé est compatible avec ses compétences professionnelles. II.- Lorsque l'autorité territoriale envisage de licencier un agent (...) elle convoque l'intéressé à un entretien préalable (...) A l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire, prévue à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée (...) Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir (...) Cette lettre invite également l'intéressé à présenter une demande écrite de reclassement, dans un délai correspondant à la moitié de la durée du préavis prévu à l'article 40, et indique les conditions dans lesquelles les offres de reclassement sont susceptibles de lui être adressées. (...) IV.- Lorsque l'agent refuse le bénéfice de la procédure de reclassement ou en cas d'absence de demande formulée dans le délai indiqué au troisième alinéa du II du présent article, l'agent est licencié au terme du préavis prévu à l'article 40 (...) V. - Dans l'hypothèse où l'agent a formulé une demande de reclassement et lorsque celui-ci ne peut être proposé avant l'issue du préavis prévu à l'article 40, l'agent est placé en congé sans traitement, à l'issue de ce délai, pour une durée maximale de trois mois, dans l'attente d'un reclassement dans les conditions prévues au I du présent article. / Le placement de l'agent en congé sans traitement suspend la date d'effet du licenciement. Une attestation de suspension du contrat du fait de l'autorité territoriale est délivrée à l'agent. / (...) ".

7. Par une lettre du 17 janvier 2018, faisant suite à l'entretien préalable mentionné au point 4, le maire de la commune d'Onnaing a confirmé à Mme A... la possibilité évoquée lors de l'entretien de lui adresser, dans un délai d'un mois, un courrier de demande de reclassement. Mme A... a répondu par lettre du 7 février 2018 en demandant à la commune de rechercher un reclassement mais " dans un emploi du même grade ". Le 20 février 2018, le maire lui a indiqué que son poste avait été effectivement supprimé par une délibération du conseil municipal du 15 février 2018, qu'au vu du tableau des effectifs, il n'était pas en mesure de la reclasser dans un emploi de la commune du même grade et que son licenciement interviendrait à l'issue d'une période de deux mois augmentée de ses droits à congés. Un arrêté de licenciement a été pris le 20 avril 2018.

8. Il ressort ainsi des pièces du dossier que Mme A... a été informée de la possibilité de solliciter son reclassement. La circonstance que cette information ait été délivrée avant la consultation du comité technique et du courrier du 20 février 2018 n'a pas été de nature à priver Mme A... d'une garantie et n'a pas eu d'influence sur l'arrêté du 20 avril 2018. Contrairement à ce qu'allègue l'appelante la décision de licencient est intervenue le 20 avril 2018, et non le 20 février 2018. Le délai prévu par l'article 39-5 entre l'information sur le licenciement et le licenciement lui-même a été respecté et aucun élément du dossier ne permet de considérer que le reclassement de l'intéressée n'aurait pas été recherché durant cette période. Par son courrier du 7 février 2018, Mme A... a refusé par avance un reclassement sur un emploi relevant d'une catégorie inférieure. Alors que la commune indique sans être sérieusement contredite que deux postes d'attaché en filière administrative non pourvus mentionnés par l'appelante avaient vocation à être occupés par un fonctionnaire, il ressort des pièces du dossier qu'il n'existait aucun poste de même grade susceptible de lui être proposé. La commune d'Onnaing a même étendu ses recherches de reclassement aux communes extérieures et limitrophes et fait connaître à Mme A... l'existence d'un poste disponible au sein du service communication de la Communauté d'Agglomération de Valenciennes Métropole. Aucun reclassement ne pouvant être proposé à Mme A..., l'intéressée ne pouvait être placée en position d'attente en vue de la mise en œuvre d'un quelconque reclassement déjà identifié mais ne pouvant être immédiatement réalisé. Par suite, les moyens tirés d'un vice de procédure, d'une erreur de droit et de l'insuffisance des recherches de reclassement doivent être écartés.

9. En cinquième lieu, comme il a été dit au point 5, l'emploi de directrice de la communication a été supprimé et cette suppression était justifiée par l'intérêt du service. Dès lors, les moyens tirés d'un détournement de procédure ou de pouvoir doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 9 février 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence. Il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme que la commune d'Onnaing demande à son encontre sur le fondement des mêmes dispositions.

Sur les dépens :

11. En l'absence de dépens, les conclusions de la commune d'Onnaing, tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Onnaing au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune d'Onnaing.

Délibéré après l'audience publique du 7 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 mai 2022.

Le président-rapporteur,

Signé : M. C...La présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Huls-Carlier

2

N° 21DA00808


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-02 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Licenciement. - Auxiliaires, agents contractuels et temporaires.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS ACTION CONSEILS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 06/05/2022
Date de l'import : 17/05/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21DA00808
Numéro NOR : CETATEXT000045784496 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-05-06;21da00808 ?
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