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26/04/2022 | FRANCE | N°21DA01008

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 26 avril 2022, 21DA01008


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2004403 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande et a enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme B... un ti

tre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2004403 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Rouen a fait droit à sa demande et a enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2021, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen.

Il soutient que :

- l'acte de naissance de Mme B..., qui comporte une faute d'orthographe, a été établi sur la base d'un jugement supplétif rédigé plus de trente jours après la naissance de l'intéressée, qui n'est pas produit, et que Mme B... ne justifie pas de sa véritable identité ;

- les moyens soulevés par Mme B... devant les premiers juges ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Magali Leroy, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat le versement, à son avocate, d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par celle-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

A... soutient que le moyen soulevé par le préfet de la Seine-Maritime n'est pas fondé et que, si la cour devait ne pas confirmer le moyen d'annulation retenu par les premiers juges, A... reprend les moyens qu'elle a soulevés en première instance.

Mme B... a obtenu le maintien du bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... B..., ressortissante de la République démocratique du Congo née le 2 septembre 2001, est entrée en France en janvier 2017 et a été confiée à l'aide sociale à l'enfance à titre définitif, par un jugement du 28 mars 2018 du juge des tutelles des mineurs. A... a demandé, le 24 juin 2019, son admission au séjour sur le fondement du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 26 août 2020 par lequel il a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination de cette mesure.

Sur les moyens d'annulation retenus par le jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". En vertu de l'article 1er du décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état-civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

4. Pour annuler l'arrêté du 26 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé la délivrance d'un titre de séjour à Mme B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination de cette mesure, le tribunal administratif de Rouen a estimé qu'en se bornant à objecter l'absence de jugement supplétif à l'acte de naissance de Mme B..., le préfet de la Seine-Maritime ne remettait pas en cause l'authenticité des documents produits par l'intéressée relatifs à sa demande de passeport. Les premiers juges ont ainsi estimé que la présomption d'authenticité de l'état civil de Mme B... n'avait pu être, par cette seule objection, renversée par le préfet.

5. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme B..., a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour, un acte de naissance et un passeport qui lui a été délivré par les autorités congolaises le 18 novembre 2019 précisant son identité, sa filiation et les éléments relatifs à son identité. Pour lui refuser la délivrance du titre de séjour demandé, le préfet de la Seine-Maritime s'est fondé sur ce que l'acte de naissance dont se prévaut Mme B... a été établi plus de trente jours après la naissance de l'intéressée, qu'il comporte une faute d'orthographe et fait référence à un jugement supplétif n° RC 972 daté du 14 octobre 2014 du tribunal pour enfants F... D... qui n'est pas joint. Pour remettre en cause l'appréciation ainsi portée par le préfet au regard de ces éléments, Mme B... soutient tout d'abord que le préfet de la Seine-Maritime n'a pas procédé à des vérifications auprès des autorités congolaises avant de se prononcer sur l'authenticité d'un acte d'état civil délivré par ces autorités. Or, si les dispositions de l'article 47 du code civil imposent à l'autorité administrative, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil, de procéder à toutes vérifications utiles, elles ne lui imposent pas, en revanche, de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre Etat afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet Etat est dépourvu d'authenticité. Ensuite, si l'intéressée produit un passeport portant la date de naissance du 2 septembre 2001, valable du 18 novembre 2019 au 17 novembre 2024, délivré par les autorités congolaises en France, dont l'authenticité n'a pas été remise en cause, A... n'établit ni même n'allègue que ce passeport aurait été délivré sur la base d'autres documents que ceux qui ont été présentés au préfet de la Seine-Maritime. Dans ces conditions, c'est sans méconnaître les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 47 du code civil et de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 que le préfet de la Seine-Maritime a pu se fonder sur le caractère apocryphe des documents produits par Mme B... pour refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Le préfet qui, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ne s'est pas fondé exclusivement sur l'existence de liens familiaux dans le pays d'origine pour prendre l'arrêté en litige, n'a pas méconnu les dispositions du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que Mme B... n'établit pas qu'elle remplissait la condition de minorité requise. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, les premiers juges ont annulé, pour ces motifs, l'arrêté contesté.

6. Toutefois, il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen et la cour.

Sur les moyens communs aux décisions contestées :

7. En premier lieu, les décisions du 26 août 2020 contestées comportent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent. Par suite, elles sont suffisamment motivées.

8. En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard, une mesure d'éloignement. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause et ne fait pas valoir d'éléments nouveaux. Enfin, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.

9. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a pu, à l'occasion de cette demande, préciser à l'administration les motifs pour lesquels A... demandait son admission au séjour et produire tous les éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartenait, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'elle jugeait utiles. Il lui était également loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté méconnaît le respect des droits de la défense, et le principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu avant l'adoption d'une mesure défavorable.

10. Enfin, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation de Mme B... avant de prendre la décision contestée. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de Mme B... doit être écarté.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

11. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que Mme B... ne peut justifier de son état civil ni avoir été confiée à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans. Par suite, les moyens tirés d'erreur de fait quant à son état civil dont serait entachée la décision en litige et de l'erreur d'appréciation quant à son âge et son identité doivent être écartés.

12. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

13. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a été confiée au service de l'aide sociale à l'enfance par une décision du 17 juillet 2017 et a été scolarisée au sein de l'école de production " éducation et formation " du Petit-Quevilly au cours de l'année scolaire 2017-2018, puis à l'institut de formation d'apprentis (IFA) Marcel Sauvage de Mont-Saint-Aignan pour les années 2018-2019 et 2019-2020 pour y suivre un cursus en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) " cuisine " qu'elle a obtenu en 2020. Si le caractère réel et sérieux de sa formation a été reconnu par le préfet, la circonstance que Mme B... vit avec un ressortissant camerounais en situation régulière et avec lequel A... a eu un enfant né le 20 décembre 2020 est postérieure à la décision contestée. En outre, Mme B... n'établit pas l'ancienneté de cette vie commune et ne justifie pas être dépourvue d'attaches familiales en République démocratique du Congo. Dans ces conditions, en dépit des efforts fournis par Mme B..., le préfet de la Seine-Maritime, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doit être écarté.

14. Le préfet n'est tenu de saisir la commission départementale du titre de séjour prévue par l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que du seul cas de ceux qui remplissent effectivement les conditions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme B... ne pouvant bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 2 bis et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ne peut qu'être écarté.

15. Enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

16. Mme B... fait valoir résider en France depuis 2017 et suivre une formation qualifiante dans la restauration. Toutefois, ces éléments ne constituent pas des circonstances humanitaires ou, à eux-seuls, des motifs exceptionnels. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

17. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen excipant de l'illégalité de cette décision doit être écarté.

18. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché la décision en litige d'une erreur manifeste d'appréciation.

19. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ".

20. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'absence de tout élément médical produit, que Mme B..., qui souffre de l'hépatite B, ne pourrait, en cas de retour dans son pays, bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

21. Il résulte de ce qui précède que la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen excipant de l'illégalité de cette décision doit être écarté.

22. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché la décision en litige d'une erreur manifeste d'appréciation.

23. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 26 août 2020 rejetant la demande de Mme B... de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.

Sur les frais liés à l'instance :

24. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par Mme B... doivent, dès lors, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2004403 du 15 avril 2021 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de première instance et les conclusions d'appel de Mme B... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme E... B... et à Me Magali Leroy.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 5 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Muriel Milard, première conseillère,

- Mme Anne Khater, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 avril 2022.

La rapporteure,

Signé : M. C...La présidente de la formation de jugement,

Signé : A. Chauvin

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Nathalie Roméro

N°21DA01008 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01008
Date de la décision : 26/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Chauvin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : LEROY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-04-26;21da01008 ?
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