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22/03/2022 | FRANCE | N°21DA01166

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 22 mars 2022, 21DA01166


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 22 juin 2020 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n°2003549 du 11 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mai et

1er juin 2021, M. A..., représenté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 22 juin 2020 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n°2003549 du 11 février 2021, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mai et 1er juin 2021, M. A..., représenté par Me Cécile Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 juin 2020 du préfet de l'Eure ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous la même condition de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocate d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant nigérian, entré sur le territoire français le 9 mai 2012 à l'âge de quarante-deux ans, a demandé son admission au séjour au titre de son état de santé. Il s'est vu délivrer en 2013 un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui lui a été renouvelé à deux reprises. Après s'être vu refuser le renouvellement de ce titre de séjour par un arrêté du 21 juillet 2017, il a sollicité, le 20 juin 2018, la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 18 octobre 2018 du préfet de l'Eure qui a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai. Il a le 21 février 2020 renouvelé sa demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de son mariage avec une ressortissante togolaise, ainsi que son admission exceptionnelle au séjour. Il relève appel du jugement du 11 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2020 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7°) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui réside sur le territoire français depuis le mois de mai 2012 et a bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade renouvelé deux fois, s'est marié le 28 juillet 2018 avec une ressortissante togolaise après la conclusion d'un pacte civil de solidarité le 6 avril 2018. Son épouse, avec laquelle il entretient une relation amoureuse depuis l'année 2014, est titulaire d'une carte de résident et est mère d'un enfant français à l'entretien et à l'éducation duquel M. A... participe. M. A... justifie ainsi d'une vie commune avec son épouse depuis plus de deux ans à la date de l'arrêté en litige. Par ailleurs, l'intéressé justifie de sa bonne insertion sociale et professionnelle en France par des stages de formation et de perfectionnement de son français et de sa culture générale entre 2014 à 2016, des périodes d'intérim et une promesse d'embauche du 15 octobre 2020 en contrat à durée indéterminée comme ouvrier d'exécution au sein de la société France Décor à Aubervilliers. Si M. A... a vécu jusqu'à l'âge de quarante-deux ans dans son pays d'origine où résident sa mère, sa sœur et son frère, le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe dorénavant en France. Dans ces conditions et compte tenu du fait que l'intéressé a vécu de manière régulière en France pendant une période de cinq années sous couvert ou bien de titres de séjour, ou bien de récépissés de demandes de titre de séjour, le préfet de l'Eure doit être regardé comme ayant porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise et a ainsi méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La décision de refus de titre de séjour doit, par suite, être annulée et, par voie de conséquence, celles faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure.

4. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par M. A..., que celui-ci est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Eure de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit et de fait, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir. Il n'y a cependant pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

6. M. A... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2003549 du 11 février 2021 du tribunal administratif de Rouen et l'arrêté du 22 juin 2020 du préfet de l'Eure sont annulés.

Article 2 : Il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Eure de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur, au préfet de l'Eure et à Me Cécile Madeline.

2

N°21DA01166


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01166
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-03-22;21da01166 ?
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