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24/02/2022 | FRANCE | N°20DA01014

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 24 février 2022, 20DA01014


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 200 euros avec intérêts légaux à compter du 1er juillet 2017 et capitalisation, en réparation du préjudice résultant de la carence à transposer en droit interne la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et de la violation des dispositions de cette directive, par l'article L. 3141-5 du code du travail.

Par un jugement n° 1706314

du 17 juin 2020, le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à payer à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 200 euros avec intérêts légaux à compter du 1er juillet 2017 et capitalisation, en réparation du préjudice résultant de la carence à transposer en droit interne la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et de la violation des dispositions de cette directive, par l'article L. 3141-5 du code du travail.

Par un jugement n° 1706314 du 17 juin 2020, le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à payer à Mme A... la somme de 5 414,40 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me Stéphanie Tran, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur ses conclusions tendant au versement des intérêts de retard sur les sommes allouées et à la capitalisation de ces intérêts ;

2°) à titre subsidiaire, de rectifier les erreurs matérielles entachant ce jugement ;

3°) en tout état de cause, de condamner l'Etat au versement des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2017 ainsi qu'à leur capitalisation, à l'expiration d'une année complète d'intérêts dus ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a obtenu du tribunal administratif de Lille, par jugement du 17 juin 2020, la condamnation de l'Etat en raison du retard de transposition de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail. Faute de transposition de cette directive à la date de son départ à la retraite, elle n'avait pas pu, en effet, obtenir de son employeur une indemnisation pour les jours de congés annuels qu'elle n'avait pas pu prendre du fait de son placement en congé de maladie. Elle relève appel de ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur sa demande de condamnation de l'Etat à lui verser les intérêts et la capitalisation de ces intérêts sur les sommes dues au principal.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que dans sa demande de première instance, enregistrée au tribunal administratif de Lille, le 12 juillet 2017, Mme A... avait demandé que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 7 200 euros avec intérêts et capitalisation. Or le jugement contesté ne s'est pas prononcé sur cette demande d'intérêts moratoires et de capitalisation de ceux-ci. Dès lors, Mme A... est fondée à soutenir que le tribunal administratif de Lille a omis de statuer sur une partie de ces conclusions. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé dans cette mesure. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande d'intérêts de retard et de capitalisation de ceux-ci, présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Lille.

Sur les intérêts :

3. D'une part, aux termes de l'article 1231-6 du code civil : " Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. / Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte ". D'autre part, en cas d'évocation, le juge d'appel se substitue au juge de première instance et examine l'ensemble des conclusions et moyens opposés en première instance à la seule exception de ceux qui ont été abandonnés ou réduits en appel. Mme A... avait demandé le paiement de ces intérêts dans sa demande de première instance à compter du 1er juillet 2017. Elle a droit au paiement de cette somme calculée au taux légal sur le montant de la condamnation prononcée par le tribunal administratif de Lille à compter de la date de première demande du principal. Dans sa requête d'appel, elle demande le paiement de ces intérêts seulement à compter du 12 juillet 2017, date d'enregistrement de la demande de première instance. Tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts jusqu'à son exécution, c'est-à-dire, en principe, et sous réserve d'un délai anormalement long entre la liquidation et le paiement effectif, jusqu'à la date à laquelle l'indemnité est liquidée. Mme A... a donc droit au paiement des intérêts jusqu'au jour du mandatement du principal, en l'occurrence le 30 juin 2020, et non comme elle le réclame jusqu'au jour de la mise à disposition des fonds, le 6 juillet 2020. Il résulte par ailleurs des écritures non contestées de l'appelante que lors du versement du montant de la condamnation par l'Etat, les intérêts courus du jour de la lecture du jugement, le 17 juin 2020 au 2 juillet 2020 lui ont été versés. Par suite, il y a lieu de condamner l'Etat à lui verser les intérêts au taux légal sur la somme de 5 414,4 euros uniquement pour la période du 12 juillet 2017 au 16 juin 2020.

Sur la capitalisation :

4. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". La capitalisation des intérêts a été également demandée dans la demande de première instance, enregistrée le 12 juillet 2017. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. Il y a donc lieu de faire droit à la demande de capitalisation à compter du 13 juillet 2018, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 500 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 17 juin 2020 est annulé en tant qu'il a omis de se prononcer sur les conclusions tendant au versement des intérêts moratoires et de leur capitalisation.

Article 2 : L'Etat est condamné à payer les intérêts au taux légal sur la somme de 5 414,40 euros du 12 juillet 2017 au 16 juin 2020, avec capitalisation de ces intérêts la première fois le 13 juillet 2018, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

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N°20DA01014

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01014
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-04-04 Responsabilité de la puissance publique. - Réparation. - Modalités de la réparation. - Intérêts.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : TRAN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-02-24;20da01014 ?
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