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22/02/2022 | FRANCE | N°21DA00824

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 22 février 2022, 21DA00824


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 du préfet du Nord en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100404 du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregis

trés le 14 avril et le 9 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Myriam Hentz, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 du préfet du Nord en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2100404 du 8 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 avril et le 9 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Myriam Hentz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 du préfet du Nord ;

3°) d'annuler la décision par laquelle le préfet du Nord l'a assigné à résidence pour une période de six mois ;

4°) d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler, sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Les parties ont été informées, par lettre du 10 janvier 2022, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de M. A... tendant à l'annulation des décisions contenues à l'arrêté du 18 janvier 2021 portant refus de lui octroyer un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet sont nouvelles en appel et, par suite irrecevables.

Par une ordonnance du 12 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 décembre 2021 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., ressortissant algérien, né le 23 février 1980, entré en France le 7 février 2013 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision du 28 août 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 16 juillet 2014 de la Cour nationale du droit d'asile. M. A... relève appel du jugement du 8 mars 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2021 du préfet du Nord en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Nord :

2. M. A..., qui se bornait à demander en première instance l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2021 du préfet du Nord en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, demande pour la première fois en appel, dans son mémoire enregistré au greffe le 9 juillet 2021, l'annulation d'un arrêté du préfet du Nord l'assignant à résidence pour une durée de six mois. Ces conclusions, nouvelles en appel, doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision de refus de délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination :

3. Comme cela a été dit au point 2, la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille était dirigée contre l'arrêté du 18 janvier 2021 en tant seulement qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans, décisions distinctes de celle de refus de délai de départ volontaire contenue dans le même arrêté et de celle fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet. Ainsi, les conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il lui refuse un délai de départ volontaire et fixe le pays de destination de l'obligation de quitter le territoire français, présentent le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables.

Sur les moyens communs aux autres décisions contestées :

4. Par un arrêté du 22 décembre 2020, publié le même jour au recueil n° 333 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à Mme C... B..., cheffe du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, signataire de l'arrêté en litige, à l'effet de signer, notamment, les décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 18 janvier 2021 manque en fait et doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, la décision du préfet du Nord portant obligation de quitter le territoire français vise notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle expose les circonstances de fait relatives à la situation de M. A... quant à son entrée sur le territoire français, aux conditions de son séjour en France et à sa vie privée et familiale. Ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, ladite décision est suffisamment motivée au regard des exigences du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision en litige que le préfet du Nord a procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle de M. A....

7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a été entendu préalablement à l'édiction de la mesure contestée, comme en témoigne le procès-verbal d'audition du 18 janvier 2020, lequel a été signé par l'intéressé. A cette occasion, le requérant a pu faire valoir ses observations concernant sa situation administrative et personnelle et sur l'éventualité d'une mesure d'éloignement à son encontre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu que l'intéressé tient du principe général du droit de l'Union européenne énoncé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.

8. En quatrième lieu, M. A... soutient que la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il n'assortit son moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il doit ainsi être écarté.

9. En cinquième lieu, M. A... fait valoir qu'il réside depuis le 7 février 2013 en France où il a bénéficié de plusieurs contrats à durée indéterminée en qualité de coiffeur, le premier conclu le 18 mars 2015 et le second le 21 mai 2019 et qu'il est bien intégré. Toutefois, il ne justifie pas de l'existence de liens intenses, stables et anciens sur le territoire français. Il est célibataire et sans charge de famille et n'est par ailleurs pas dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans. Si M. A... fait valoir qu'il entretient une relation avec une ressortissante de nationalité belge qui vit sur le territoire français depuis le mois d'août 2020, cette relation, à la supposer établie, est en tout état de cause, récente. Dans ces conditions, et alors que M. A... n'a déféré à aucune des trois précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet, la décision en litige n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

10. Enfin, il ressort des pièces du dossier que M. A... est sans charge de famille. Par suite, il ne saurait utilement invoquer la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le moyen qui n'est pas davantage précisé ne peut qu'être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans :

11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'illégalité de la décision en litige à raison de l'illégalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...). / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa (...) du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

13. Il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le préfet du Nord a fait interdiction à M. A... de revenir sur le territoire français pour une durée de trois ans vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique également la durée et les conditions de son séjour, la circonstance qu'il s'est soustrait à trois précédentes mesures d'éloignement, l'absence de liens familiaux et l'existence d'une menace pour l'ordre public que représente sa présence en France pour défaut de permis et conduite en état d'ivresse. Dès lors, la décision comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Elle est, ainsi, suffisamment motivée.

14. Enfin, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A... s'est soustrait à trois précédentes mesures d'éloignement, ne dispose pas d'attaches familiales en France et a été interpellé pour conduite sans permis et en état d'ivresse. Il s'ensuit que le préfet du Nord n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans contenues à l'arrêté du préfet du Nord du 18 janvier 2021. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

2

N°21DA00824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00824
Date de la décision : 22/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Chauvin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : HENTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-02-22;21da00824 ?
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