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06/01/2022 | FRANCE | N°20DA01702

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 janvier 2022, 20DA01702


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire rendue après saisine de la commission de recours des militaires et de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 62 634,73 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts légaux à compter de la date d'introduction de la requête et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.>
Par un jugement n° 1801780 du 29 septembre 2020 le tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire rendue après saisine de la commission de recours des militaires et de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 62 634,73 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts légaux à compter de la date d'introduction de la requête et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801780 du 29 septembre 2020 le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 novembre 2020 et le 27 octobre 2021, M. B... A..., représenté par Me Maumont, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 62 634,73 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts légaux à compter de la date d'introduction de sa demande indemnitaire, soit le 26 octobre 2017;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 2008-943 du 12 septembre 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Julien Di Stephano, représentant M. B... A....

Une note en délibéré, présentée pour M. A... par Me Maumont, a été enregistrée le 9 décembre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Le lieutenant-colonel Alexandre A... est officier au sein de l'Armée de l'Air. Dans le cadre d'un projet de reconversion dans le secteur privé, il a informé sa hiérarchie de son intention de quitter ses fonctions et a formé le 19 août 2016 une demande de mise en retraite à jouissance différée à compter du 1er décembre 2016. Par une décision du 1er décembre 2016, cette demande n'a pas été agréée par le ministre de la défense. M. A... a saisi la commission de recours des militaires, et en l'absence de réponse, une décision tacite de rejet de ce recours est née, que M. A... a contestée devant le tribunal administratif d'Amiens. Par une décision du 8 août 2017, postérieure à l'introduction de la requête, la ministre des armées a agréé le recours administratif préalable de M. A... et l'a admis à la retraite avec le bénéfice d'une pension à jouissance différée et l'a radié des cadres de l'armée de l'Air à compter du 1er septembre 2017. Le tribunal administratif a alors constaté que la demande de M. A... était devenue sans objet. Par une nouvelle requête M. A... a demandé la condamnation de l'Etat à l'indemniser des différents préjudices qu'il impute au refus initial de le radier des cadres à compter du 1er décembre 2016. Par un jugement du 29 septembre 2020 le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes. Il relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Pour rejeter la demande indemnitaire de M. A..., le tribunal administratif d'Amiens a constaté que le nombre minimal de démissions agréées avait été atteint et qu'il était possible à la ministre des armées, d'opposer l'intérêt du service pour refuser d'agréer la demande de démission. Le juge administratif ne soulève pas d'office un moyen d'ordre public lorsqu'il constate au vu des pièces du dossier, qu'une des conditions fixées par un texte n'est pas remplie et ce, même s'il fonde ce constat sur des dispositions législatives ou réglementaires et constatations de fait invoquées en défense. En conséquence, le tribunal n'a pas soulevé d'office un moyen d'ordre public dont les parties auraient dû être informées préalablement en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative. Ce moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes des dispositions de l'article L. 4139-13 du code de la défense : " La démission du militaire de carrière ou la résiliation du contrat du militaire servant en vertu d'un contrat, régulièrement acceptée par l'autorité compétente, entraîne la cessation de l'état militaire. / La démission ou la résiliation du contrat, que le militaire puisse bénéficier ou non d'une pension de retraite dans les conditions fixées au II de l'article L. 24 et à l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ne peut être acceptée que pour des motifs exceptionnels, lorsque, ayant reçu une formation spécialisée ou perçu une prime liée au recrutement ou à la fidélisation, le militaire n'a pas atteint le terme du délai pendant lequel il s'est engagé à rester en activité. (...) ". Aux termes des dispositions de l'article 37 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier des corps des officiers de l'air, des officiers mécaniciens de l'air et des officiers des bases de l'air dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Les officiers ne pouvant pas bénéficier d'une pension de retraite dans les conditions fixées par les dispositions du II de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent déposer une demande de démission en application de l'article L. 4139-13 du code de la défense. / Sous réserve des dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 4139-13, le nombre de démissions agréées chaque année par le ministre de la défense en application du premier alinéa du présent article ne peut être inférieur à 5 pour 100, arrondis à l'unité supérieure, du nombre des nominations effectuées chaque année au grade de lieutenant dans l'un des trois corps. ".

4. M. A... fait valoir qu'il a signé un contrat à durée indéterminée avec l'entreprise Airbus le 10 octobre 2016 et que sa demande de démission, soumise à un agrément préalable, avait été adressée dès le 1er août 2016. Il soutient que l'Etat a commis une faute en refusant son admission à la retraite à compter du 1er décembre 2016 alors que le nombre minimum d'agréments prévu à l'article 37 du décret du 12 septembre 2008 n'était pas atteint pour l'année 2016 et que le retard lié à sa radiation des cadres, qui n'a pu finalement intervenir qu'au 1er septembre 2017, lui a causé des préjudices.

5. En premier lieu, si la décision de la ministre du 8 août 2017, qui n'est pas en débat, a fait application du ratio de 5 % mentionné par l'article 37 du décret du 12 septembre 2008 au nombre total des lieutenants nommés, en concluant que le seuil minimal de démissions n'était pas atteint, le ratio de 5 % doit s'appliquer au seul corps auquel appartenait l'intéressé, soit les officiers de l'air. Il ressort des pièces du dossier et des chiffres mentionnés par la ministre des armées, dont la véracité n'est pas sérieusement contestée par M. A..., qu'en 2016, cent trente-quatre lieutenants ont été nommés, dont quarante-sept officiers de l'air. Le nombre total de démissions accordées pour toute l'année 2016 s' est élevé à douze, ce qui représente 25 % du nombre des nominations effectuées cette année-là au premier grade du corps des officiers. En conséquence, eu égard aux ordres de grandeur en cause, il résulte de l'instruction que le seuil de 5 % avait été atteint au 1er décembre 2016 date du refus en cause. Aussi, la ministre des armées, pouvait par sa décision initiale du 1er décembre 2016, estimer qu'il n'y avait pas, compte-tenu de l'intérêt du service, de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 4139-13 du code de la défense, justifiant d'accepter la démission de M. A.... Par suite, l'Etat n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité.

6. En deuxième lieu, si M. A... soutient que ce refus porte directement atteinte à sa liberté d'entreprendre qu'il tient de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il n'a pas entendu contester la légalité de l'article 37 du décret du 12 septembre 2008 précité et il ne saurait en tout état de cause pas se prévaloir devant le juge administratif d'un tel moyen à l'encontre de l'article L. 4139-13 du code de la défense.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.

2

N°20DA01702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01702
Date de la décision : 06/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. - Fondement de la responsabilité. - Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-01-06;20da01702 ?
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