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18/11/2021 | FRANCE | N°19DA01103

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 18 novembre 2021, 19DA01103


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2012.

Par un jugement n° 1601507 du 14 mars 2019, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur deman

de.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2019, et un mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2012.

Par un jugement n° 1601507 du 14 mars 2019, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2019, et un mémoire, enregistré le 31 juillet 2020, M. et Mme A..., représentés par Me Lamrani, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de leur accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 à 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Sauveplane, président-assesseur,

* et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2010 à 2012 à l'issue duquel l'administration a, notamment, imposé entre les mains des époux A... des revenus distribués par la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies, dont M. A... est associé et gérant. En conséquence, l'administration les a assujettis, en suivant la procédure de redressement contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2010 à 2012, assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 14 mars 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur les impositions en litige :

En ce qui concerne les revenus distribués procédant de frais de déplacement non admis en déduction du résultat imposable de SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies :

2. La SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le montant des frais de déplacement versés à M. et Mme A... au titre des exercices clos de 2010 à 2012 au motif que la société n'avait pas été en mesure de justifier la réalité et le caractère professionnel de ces dépenses portées en charges déductible du résultat de la société.

3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) " Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. / (...) ".

4. En premier lieu, l'administration n'était pas obligée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, de recourir aux dispositions du d. de l'article 111 du code général des impôts, relatif aux rémunérations excessives des dirigeants, pour fonder légalement le supplément d'imposition en litige. En effet, l'administration était fondée à leur notifier un redressement au titre des revenus distribués sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts dès lors que les frais de déplacement versés à M. et Mme A..., dont la déductibilité a été remise en cause, ont été réintégrés au résultat imposable de la société au titre des exercices clos de 2010 à 2012. Or, la déduction de frais de déplacement non justifiés a nécessairement entraîné pour la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies un désinvestissement des sommes correspondantes de son patrimoine.

5. En second lieu, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf dispositions contraires, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention. Toutefois, les éléments de preuve qu'une seule partie est en mesure de détenir, ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. En l'espèce, il appartient aux requérant d'établir le caractère professionnel des frais de déplacement non admis en déduction par l'administration. Or, en se bornant à fournir des tableaux mensuels récapitulant les lieux et motifs des déplacements sans autres justificatifs alors que l'administration fait valoir, d'une part, que les états de frais ont été modifiés au cours du contrôle sans qu'une justification soit apportée sur les raisons de ces modifications et, d'autre part, que les tableaux produits devant le tribunal administratif contenaient des informations qui divergeaient des informations relevées lors des opérations de vérification. De surcroit, ces tableaux mentionnent une distance aller et retour de 220 à 310 kilomètres entre Creil, siège de la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies, et Paris alors que la distance réelle n'est que de 140 kilomètres. Enfin si les requérants produisent des procès-verbaux de réunions d'instances professionnelles siégeant à Paris et dont M. A... est membre, il résulte de l'instruction qu'au cours des opérations de contrôle, l'administration a déjà admis le caractère justifié des déplacements vers Paris, à hauteur de 1180 kilomètres par mois. Dès lors, les requérants ne peuvent être regardés comme apportant la preuve, qui leur incombe, tant de la réalité que du caractère professionnel du surplus des déplacements dont la déductibilité a été remise en cause par l'administration. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a regardé ces remboursements de frais non justifiés comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. et Mme A... sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

En ce qui concerne les revenus distribués procédant de l'inscription de la somme de 39 117,21 euros au crédit du compte courant d'associé :

6. Au cours de la vérification de comptabilité de la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies, l'administration a relevé que M. A... avait transféré d'un compte séquestre détenu par la société une somme de 39 117,21 euros sur un compte bancaire ouvert au nom de la société. Du point de vue comptable, cette somme a été créditée sur le compte courant d'associé n° 455 000 " associés compte courant ". L'administration a estimé qu'il s'agissait d'une distribution irrégulière taxable entre les mains de M. et Mme A....

7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ".

8. Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

9. En premier lieu, l'imposition d'une somme inscrite au crédit d'un compte courant d'associé sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ne présuppose pas pour l'administration d'apporter la preuve d'un désinvestissement dès lors que l'imposition correspond à une somme mise à disposition des associés et non prélevée sur les bénéfices. Cette mise à disposition n'impliquant pas un prélèvement de l'associé, l'absence de prélèvement sur les bénéfices rend inutile la preuve par l'administration d'un quelconque désinvestissement. En l'espèce, il est constant que la somme litigieuse provient d'un compte séquestre et donc de sommes qui, de toute façon, n'étaient pas la propriété de la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies. De même, l'administration n'a pas à apporter la preuve que M. A... était maître de l'affaire dès lors que ce dernier est associé et que la somme a été créditée sur un compte courant d'associé et, dès lors, mise à disposition de celui-ci. Par suite, le moyen est inopérant.

10. En deuxième lieu, si la somme de 39 117,21 euros a bien été créditée le 25 août 2011 sur le compte bancaire de la société ouvert à la Caisse d'Epargne, toutefois, d'un point de vue comptable, la contrepartie de cette écriture de débit de compte banque a été une inscription au crédit du compte courant d'associé indivis n° 455 000. Cette inscription au crédit d'un compte courant d'associé est imposable, ainsi qu'il a été dit plus haut, sauf preuve contraire. En l'espèce, les requérants n'apportent pas cette preuve contraire. Dès lors, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'écriture ne traduit qu'un virement de compte à compte sans désinvestissement ni mise à disposition aux associés. Pour les mêmes motifs, la circonstance qu'entre le 24 août 2011 et le 30 janvier 2014, cette somme n'a jamais été désinvestie et n'a pas fait l'objet d'un prélèvement reste sans incidence.

11. En troisième lieu, il n'est pas contesté que M. A... est associé de la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies. Dès lors l'inscription d'une somme au crédit du compte courant d'associé vaut mise à disposition au sens et pour l'application du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. Ainsi, M. A... a bien été le bénéficiaire des revenus distribués du fait de l'inscription de la somme en cause sur son compte courant.

12. En quatrième lieu, si M. A... soutient que la situation de trésorerie de la société interdisait l'appréhension de la somme en cause, il se borne sur ce point à de simples affirmations alors que la charge de la preuve sur ce point lui incombe.

13. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que la somme litigieuse a été créditée sur un compte courant d'associé n° 455 000 qui correspond, dans la comptabilité de la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies, à un compte courant indivis des associés. La circonstance que M. A... n'est associé dans la SARL Immobilière Conseil des Hautes Haies qu'à hauteur de 34 % des parts sociales reste en l'espèce sans incidence dès lors que l'administration fait valoir, sans être contredite, qu'en pratique le fonctionnement de ce compte courant d'associé indivis révèle que seuls les dividendes revenant à M. A... y étaient crédités et que les dividendes revenant aux autre associés étaient crédités dans un autre compte courant d'associé distinct. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur la majoration de 25 % prévue par l'article 158 du code général des impôts :

14. Aux termes du 7. de l'article 158 du code général des impôts : " Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : / (...) / 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice ; / (...) ".

15. C'est à bon droit que l'administration a, compte tenu de la nature des revenus en cause, appliqué la majoration de 25 %, prévue par les dispositions précitées du 7. de l'article 158 du code général des impôts, aux revenus distribués imposés entre les mains de M. et Mme A... sur le fondement des articles 109 et 111 du code général des impôt,.

Sur les pénalités :

16. Aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits mis à la charge du contribuable ou de la créance indue. / (...) ".

17. L'administration a appliqué la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de M. et Mme A... au titre des années 2010 à 2012. Il est constant que les déclarations souscrites par M. et Mme A... au titre des années en cause étaient entachées d'inexactitudes et d'omissions qui ont eu pour effet de minorer l'impôt dû par les contribuables. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a assorti les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme A... au titre des années 2010 à 2012 de cette majoration.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions restant en litige.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de M. et Mme A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

N°19DA01103 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01103
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : LAMRANI AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-11-18;19da01103 ?
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