Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux requêtes distinctes, Mme E... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler la décision du 8 janvier 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne l'a licenciée de ses fonctions d'assistante familiale, d'enjoindre au département de l'Aisne de lui verser un salaire de 2 000 euros par mois à compter du mois de janvier 2018, de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 4 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'intervention de son licenciement, au titre du respect d'un préavis de deux mois, de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 35 000 euros en réparation des préjudices résultant de son licenciement et de la faute commise par le département en ne la soumettant pas à un contrôle de la médecine préventive, de mettre à la charge du département une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, d'autre part, d'annuler la décision du 8 janvier 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne l'a licenciée de ses fonctions d'assistante familiale et la décision du 28 février 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne a prononcé le retrait de son agrément d'assistante familiale, d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Aisne d'informer le maire de la commune de son lieu de résidence de l'annulation de la décision prononçant le retrait de son agrément, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la date du jugement à intervenir, de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 180 000 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de son licenciement et du retrait de son agrément et de mettre à la charge du département de l'Aisne une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Par un jugement n°1800776, 1800938 du 29 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, annulé la décision du 8 janvier 2018 du président du conseil départemental de l'Aisne prononçant le licenciement de Mme C..., d'autre part, condamné le département de l'Aisne à verser une somme de 1 500 euros à Mme C... en réparation des préjudices subis, enfin, rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 avril, 6 octobre et 10 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me Ibikounlé, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation du retrait de son agrément ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction et limité son indemnisation à la somme de 1 500 euros ;
2°) d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne a prononcé le retrait de son agrément d'assistante familiale ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Aisne d'informer le maire de la commune de son lieu de résidence de l'annulation de la décision prononçant le retrait de son agrément, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner le département de l'Aisne à lui verser la somme de 186 314,33 euros, avec intérêts capitalisés à compter du 8 janvier 2018, en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de son licenciement et du retrait de son agrément ;
5°) de mettre à la charge du département de l'Aisne une somme de 5 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a été recrutée en qualité d'assistante familiale par le département de l'Aisne par un contrat à durée indéterminée conclu le 7 février 2012, avec une capacité d'accueil passée à deux enfants de 0 à 21 ans en longue durée, par un avenant du 27 février 2014. Par une décision du 27 septembre 2017, le département de l'Aisne a prononcé la rupture du contrat d'accueil des deux enfants alors confiés à Mme C..., au motif d'un comportement inadapté de cette dernière ayant entraîné des troubles du comportement des enfants. D... le fondement d'un certificat médical du médecin traitant de l'intéressée, en date du 13 novembre 2017, le département de l'Aisne a, par lettre du 19 décembre 2017, convoqué Mme C... à un entretien en vue de son licenciement, qui a été prononcé par décision du 8 janvier 2018. Par lettre du 29 janvier 2018, le département de l'Aisne a ensuite convoqué Mme C... devant la commission consultative paritaire départementale qui s'est prononcée, le 22 février 2018, en faveur du retrait de son agrément d'assistante familiale. Ce retrait d'agrément a été prononcé par une décision du 28 février 2018. Mme C... a saisi le tribunal administratif d'Amiens aux fins de voir annuler ces deux décisions et d'être indemnisée des préjudices subis. Par un jugement du 29 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 8 janvier 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne a prononcé le licenciement de Mme C..., a condamné le département de l'Aisne à verser une somme de 1 500 euros à Mme C... en réparation des préjudices subis et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Mme C... relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision prononçant le retrait de son agrément ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction et a limité l'indemnité qui lui a été allouée à la somme de 1 500 euros. Le département de l'Aisne, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation de ce même jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme C... la somme de 1 500 euros en indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité de son licenciement.
D... la régularité du jugement attaqué :
2. Il ne ressort d'aucun motif du jugement attaqué que les premiers juges, qui ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, auraient écarté le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de retrait d'agrément qui n'était pas soulevé devant eux. Ce moyen, qui a trait à la régularité du jugement attaqué, doit donc, en tout état de cause, être écarté.
D... le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de retrait d'agrément :
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément (...), il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. La liste des représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission lui est communiquée dans les mêmes délais. L'intéressé peut se faire assister ou représenter par une personne de son choix. / (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le président du conseil départemental de l'Aisne a, par lettre du 29 janvier 2018, reçue le 30 janvier suivant, invité Mme C... à se présenter devant la commission consultative paritaire départementale au cours de sa séance du 22 février 2018, en lui indiquant le motif du retrait d'agrément envisagé, la possibilité qui lui était offerte de consulter son dossier administratif, de présenter des observations orales ou écrites et de se faire assister d'une personne de son choix. Dans ces conditions, nonobstant la circonstance que l'intéressée était en congé de maladie depuis le 27 septembre 2017 et alors qu'elle ne s'est pas présentée devant la commission, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure de retrait de son agrément d'assistante maternelle doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 421-27 du code de l'action sociale et des familles : " La commission consultative paritaire départementale, prévue par l'article L. 421-6, comprend, en nombre égal, des membres représentant le département et des membres représentant les assistants maternels et les assistants familiaux agréés résidant dans le département. / (...) ".
6. Mme C... soutient, pour la première fois devant la cour, en invoquant la présence, parmi les représentants des assistants maternels et familiaux, d'un membre qui ne disposait pas de mandat électif et qui présidait une association financée par des fonds départementaux, que la commission consultative paritaire départementale était irrégulièrement composée et s'est prononcée en méconnaissance du principe d'impartialité. Toutefois, ces moyens, qui ne sont assortis d'aucune justification suffisante permettant d'en apprécier le bien-fondé, doivent être écartés.
7. En troisième lieu, Mme C... n'est pas fondée à soutenir, en invoquant la rupture de son contrat d'accueil dès le 27 septembre 2017, que la décision de retrait d'agrément a été prise avant la réunion de la commission consultative paritaire départementale alors que ces deux procédures, qui n'ont pas le même objet, ont été distinctement engagées. Ce moyen doit donc également être écarté.
8. En quatrième lieu, il résulte des articles L. 421-3, L. 421-6, R. 421-26 et R. 421-38 du code de l'action sociale et des familles qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil chez l'assistant maternel garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément de l'assistant maternel si ces conditions ne sont plus remplies. A cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, A... la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est exposé à de tels comportements ou risque de l'être.
9. Il ressort des pièces du dossier qu'à compter du 27 septembre 2017, le département a prononcé la rupture du contrat d'accueil des deux enfants alors confiés à Mme C..., au motif d'un comportement inadapté de cette dernière ayant entraîné des troubles du comportement des enfants. B... certificat médical du 13 novembre 2017 a ensuite été adressé au département de l'Aisne, indiquant que Mme C... ne pouvait plus exercer ses fonctions d'assistante maternelle, en raison notamment d'un syndrome dépressif, pour lequel elle était au demeurant placée en congé de maladie depuis le 27 septembre précédent. Dans ces conditions, et alors que Mme C... n'établit pas qu'elle était apte à reprendre ses fonctions, à la date du 28 février 2018, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que le président du conseil départemental de l'Aisne a prononcé le retrait de son agrément d'assistante maternelle.
10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer D... la fin de non-recevoir opposée par le département de l'Aisne, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 février 2018 par laquelle le président du conseil départemental de l'Aisne a prononcé le retrait de son agrément d'assistante maternelle ainsi que, par voie de conséquence, sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au président du conseil départemental de l'Aisne d'informer le maire de la commune de son lieu de résidence du retrait de son agrément.
En ce qui concerne les demandes indemnitaires :
11. D'une part, il résulte de ce qui précède que Mme C... n'établit pas que la décision de retrait de son agrément d'assistante maternelle serait entachée d'une illégalité fautive susceptible d'engager la responsabilité du département. Mme C... n'établit pas davantage le caractère abusif de la rupture, depuis le 27 septembre 2017, du contrat d'accueil des deux enfants qui lui étaient confiés. Il s'ensuit que les conclusions indemnitaires présentées par Mme C... au titre de l'illégalité de ces deux décisions doivent être rejetées.
12. D'autre part, la responsabilité du département de l'Aisne est, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif d'Amiens dans son jugement du 29 novembre 2019 qui n'est pas contesté D... ce point, engagée pour avoir prononcé le licenciement de Mme C... en méconnaissance des dispositions de l'article R. 422-11 du code de l'action sociale et des familles. Toutefois, Mme C... n'est fondée à se prévaloir d'aucun préjudice financier imputable à son licenciement dès lors qu'indépendamment de cette décision, l'intéressée, qui était déjà placée en congé de maladie depuis le 27 septembre 2017, n'avait droit à aucune rémunération en l'absence de service fait et qu'à compter du 28 février 2018, le département de l'Aisne était tenu de la licencier en raison du retrait de son agrément. En revanche, Mme C... est fondée à se prévaloir du préjudice moral subi par elle à raison de l'illégalité du licenciement dont elle a fait l'objet. Or, il a été fait une juste appréciation par les premiers juges de ce chef de préjudice en lui allouant à ce titre la somme de 1 500 euros.
13. Il résulte de ce qui a été énoncé aux points 11 et 12, sans qu'il soit besoin de statuer D... la fin de non-recevoir opposée par le département de l'Aisne, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a limité à la somme de de 1 500 euros l'indemnité qui lui est due par le département de l'Aisne.
14. Il résulte ce qui a été énoncé au point 12 que les conclusions d'appel incident formées par le département de l'Aisne doivent être rejetées.
D... les frais liés à l'instance :
15. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département de l'Aisne, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par Mme C.... Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que le département de l'Aisne demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident du département de l'Aisne ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C..., au département de l'Aisne et à Me Ibikounlé.
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N°20DA00635