Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 décembre 2019 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 2000164 du 13 mars 2020, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 mars 2020, le 18 juin 2020, le 21 août 2020, le 29 septembre 2020 et le 29 octobre 2020, ce mémoire n'ayant pas été communiqué à l'administration, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 décembre 2019 de la préfète de la Somme ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille, ainsi que le protocole qui y est annexé ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les observations de Me C..., représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 6 février 1976 à Sidi Ali (Algérie), est entré en France, en dernier lieu, le 10 octobre 2018, sous couvert d'un passeport national revêtu d'un visa de court séjour. Il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence valable un an, au titre de la vie privée et familiale, en faisant état de sa qualité de conjoint d'une ressortissante étrangère en situation régulière. Par un arrêté du 23 décembre 2019, la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 13 mars 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; / (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, soit le 23 décembre 2019, M. B..., qui, comme il a été dit au point 1, est entré sur le territoire français le 10 octobre 2018, n'était, comme le relèvent les motifs de cet arrêté, présent sur ce territoire que depuis quatorze mois. En outre, son mariage en France avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2025, présentait, à la date de cet arrêté, un caractère particulièrement récent, puisqu'il n'avait été célébré, ainsi que le relève l'arrêté contesté, que le 23 juin 2018, soit à peine plus d'un an auparavant. En outre, M. B... ne produit aucun élément de nature à établir l'existence de leur relation antérieurement à ce mariage, quand bien même celui-ci a été célébré à l'occasion de l'une de ses précédents courts séjours en France. Si M. B... est père de trois enfants, dont un est d'ailleurs né à une date postérieure à celle de l'arrêté attaqué, les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, contenues dans cet arrêté, ne font pas obstacle à ce qu'il revienne en France en situation régulière, pays où son épouse, titulaire d'un certificat de résidence et d'un contrat de travail à durée indéterminée, a vocation à demeurer. M. B... n'établit pas, ni même n'allègue, qu'il serait dépourvu d'attaches familiales en Algérie, où il a vécu de manière habituelle, alors même qu'il a effectué de nombreux courts séjours en France, et n'avance aucune circonstance particulière permettant de douter qu'il puisse obtenir, le cas échéant, un visa lui permettant de rejoindre régulièrement sa famille sur le territoire français, de sorte que la séparation de la cellule familiale serait provisoire. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment aux conditions et à la durée de son séjour en France, la préfète de la Somme, pour refuser, en fondant notamment son appréciation sur ces circonstances de fait, de délivrer un titre de séjour à M. B... et pour assortir ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Elle n'a, par suite, pas méconnu, en édictant ces décisions, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, celles précitées du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
4. Si la préfète de la Somme a relevé, dans les motifs de son arrêté, que M. B... et son épouse ne bénéficiaient pas de ressources personnelles suffisantes, hors prestations et allocations, pour subvenir aux besoins de la famille, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la préfète ne s'est pas fondée sur ce seul motif pour prononcer, par l'arrêté contesté, la décision de refus de séjour. A supposer ce motif entaché d'erreur d'appréciation, il ne ressort pas des pièces du dossier que celui-ci aurait constitué un élément déterminant dans l'appréciation, à laquelle s'est livré cette autorité, qui ne fait référence, à tort, aux dispositions de l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que dans ses écritures contentieuses, de la situation qui lui était soumise. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la préfète de la Somme aurait pris une décision différente en ce qui concerne la demande de titre de séjour formée par M. B... en ne retenant pas ce motif surabondant. Dans ces conditions, les moyens tirés par l'intéressé de ce que l'arrêté attaqué serait entaché sur ce point d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation doivent être écartés.
5. Aux termes des stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
6. M. B... soutient qu'en prononçant une mesure d'éloignement à son encontre, la préfète de la Somme aurait méconnu l'intérêt supérieur de ses trois enfants. Toutefois, compte tenu du très jeune âge, à la date de l'arrêté contesté, des deux aînés de ces enfants, le plus jeune étant alors à naître, de la possibilité pour M. B... de revenir, le cas échéant, sur le territoire français sous couvert d'un visa de long séjour, dans le cadre de la procédure de regroupement familial à laquelle son épouse est, sauf circonstance contraire non alléguée, éligible, enfin, du fait que l'épouse du requérant est susceptible de bénéficier, avec ses enfants, du soutien de plusieurs membres de sa famille proche établis en France, la préfète de la Somme, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B... et en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté une attention insuffisante à l'intérêt supérieur de ces enfants. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'il présente au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera adressée à la préfète de la Somme.
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N°20DA00525