La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2021 | FRANCE | N°18DA02541

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 06 mai 2021, 18DA02541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... et Mme C... F... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012 et, d'autre part, de leur accorder la restitution des sommes versées à ce titre, assorties des intérêts moratoires prévus par les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un juge

ment n° 1603402 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... et Mme C... F... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012 et, d'autre part, de leur accorder la restitution des sommes versées à ce titre, assorties des intérêts moratoires prévus par les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1603402 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 décembre 2018 et le 11 septembre 2019, M. B... et Mme F..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, restant en litige, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012 et de leur accorder la restitution des sommes versées à ce titre, assorties des intérêts moratoires prévus par les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G... D..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause le caractère déductible du revenu global perçu par le foyer fiscal constitué par M. B... et Mme F..., d'une part, des sommes déclarées par les intéressés au titre de pensions alimentaires versées au fils de M. B... en 2012, ainsi que d'une partie des sommes déclarées au titre de pensions alimentaires versées à la mère de ce dernier en 2011 et en 2012, et, d'autre part, des déficits fonciers résultant des charges relatives à un logement, destiné à la location, situé 9 allée des Tilleuls à Fayet (Aisne). Les rectifications ainsi envisagées ont été portées à la connaissance des contribuables par une proposition de rectification en date du 28 mai 2014. M. B... et Mme F... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements accordés en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont, en conséquence, été assujettis au titre des années 2011 et 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur les sommes déduites par M. B... et Mme F... à titre de pensions alimentaires :

2. Aux termes du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts, sont déductibles, pour la détermination du revenu net imposable à l'impôt sur le revenu, les " pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 (...) du code civil (...) / La déduction est limitée, par enfant majeur, au montant fixé pour l'abattement prévu par l'article 196 B (...) ". Aux termes de l'article 208 du code civil : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit. / (...) ".

En ce qui concerne le caractère déductible des sommes déclarées au titre de pensions alimentaires versées au fils de M. B... au titre de l'année 2012 :

3. En premier lieu, les conditions de déductibilité des pensions versées par un contribuable à un enfant majeur, non rattaché à son foyer fiscal, sont définies par les dispositions du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts. Il résulte, en particulier, de ces dispositions, combinées avec celles de l'article 208 du code civil, que le caractère de pension alimentaire déductible des sommes versées à un enfant majeur est subordonné à l'état de besoin de ce dernier. Les dispositions de l'article 196 B du code général des impôts sont, quant à elles, relatives à l'abattement dont bénéficie le contribuable qui accepte le rattachement à son foyer fiscal d'un enfant majeur marié, ou ayant des enfants à charge. Le renvoi à ces dernières dispositions par le 2° du II de l'article 156 du code général des impôts a pour seul objet de limiter la possibilité de déduire une telle pension alimentaire au montant fixé pour l'abattement qu'elles prévoient, et est sans effet sur le principe même de sa déductibilité. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions de l'article 196 B du code général des impôts ne permettaient pas à l'administration de leur opposer l'absence d'état de besoin du fils de M. B... pour remettre en cause le caractère déductible des sommes versées à celui-ci en 2012.

4. Les requérants ne sont pas davantage fondés à invoquer, sur ce point, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la doctrine de l'administration fiscale énoncée au bulletin officiel des impôts et des finances publiques (BOFiP) sous la référence BOI-IR-BASE-20-30-20-20, dès lors que celle-ci est seulement relative aux conditions d'application du plafond de déduction constitué par le montant de l'abattement prévu par les dispositions de l'article 196 B du code général des impôts. En outre, contrairement à ce qu'ils soutiennent, les paragraphes 50 et 200 de ce même bulletin officiel mentionnent que la déduction d'une pension versée à un enfant majeur est subordonnée à l'état de besoin de ce dernier.

5. En second lieu, il est constant que le fils majeur de M. B... a disposé, au cours de l'année 2012, de revenus d'un montant total de 12 910 euros, soit une moyenne mensuelle de 1 075,83 euros. Si les requérants soutiennent que cette somme est significativement inférieure au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur en 2012, ils se réfèrent, à l'appui de ce moyen, au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance brut et ne contestent pas que celui-ci correspondait à un montant net mensuel moyen de 1 107 euros, que le service a, à bon droit, pris en compte à titre indicatif pour apprécier l'état de besoin du fils de M. B.... Par ailleurs, pour justifier des charges supportées par ce dernier, les requérants se bornent à produire une attestation, qu'il a lui-même rédigée, selon laquelle ses besoins s'élevaient, en 2012, à 600 euros par mois pour les frais de nourriture, 500 euros par mois pour les frais de logement, 400 euros par mois pour les frais de déplacement, et 100 euros par mois pour les frais d'habillement et autres dépenses incompressibles, alors qu'il est constant que M. B... a procédé, le 21 avril 2012, à une donation au bénéfice de son fils d'un local à usage d'habitation, où celui-ci a établi son domicile, et qu'il ne résulte pas de l'instruction, ni n'est d'ailleurs allégué, que celui-ci aurait supporté les frais de copropriété. Dans ces conditions, en l'absence de précisions et de justifications complémentaires apportées par les requérants, et alors même que la moyenne mensuelle des revenus perçus par le fils de M. B... au cours de l'année 2012 était légèrement inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance net, celui-ci, qui a disposé gratuitement de son logement à partir de la fin du mois d'avril 2012, ne peut être considéré comme s'étant trouvé dans le besoin au cours de cette année, au sens de l'article 208 du code civil. Il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la somme de 5 698 euros versée par M. B... à l'intéressé au cours de l'année 2012 doit être déduite, à ce titre, de leur revenu global de cette année.

6. S'agissant de l'appréciation de l'état de besoin du fils de M. B..., les requérants ne sont, en outre, pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine de l'administration fiscale énoncée au paragraphe 20 du bulletin officiel des impôts et des finances publiques, sous la référence BOI-IR-BASE-20-30-20-10, dès lors que celle-ci ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

En ce qui concerne le caractère déductible de la totalité des sommes déclarées au titre de pensions alimentaires versées à la mère de M. B... au titre des années 2011 et 2012 :

7. Il est constant que la mère de M. B... a disposé, au cours des années 2011 et 2012, de revenus annuels d'un montant respectif de 9 302 euros et de 9 489 euros. Les requérants ont déduit de leur revenu imposable les sommes de 8 661 euros, au titre de l'année 2011, et de 8 026 euros, au titre de l'année 2012, lesquelles, comprenaient, selon eux, des dons manuels de 3 600 euros pour chacune de ces deux années, et, pour le surplus, le montant des charges de copropriété supportées par M. B... au titre du logement, mentionné au point 5, qu'il indique avoir mis gratuitement à la disposition de sa mère avant d'en faire donation à son fils le 21 avril 2012.

8. D'une part, le service n'a pas remis en cause le caractère de pensions alimentaires déductibles des dons manuels de 3 600 euros versés par M. B... à sa mère durant chacune des années 2011 et 2012.

9. D'autre part, l'administration a accepté, au cours de l'instance qui s'est déroulée devant le tribunal administratif, de faire bénéficier les requérants de la déduction du montant des charges de copropriété que M. B... a réglées pour le logement, mentionné au point 5, gratuitement mis à la disposition de sa mère, jusqu'à ce qu'il en fasse donation à son fils en avril 2012. Le montant des sommes admises en déduction du revenu imposable des requérants au titre des pensions alimentaires versées à la mère de M. B... a ainsi été porté, respectivement, à 7 503 euros et à 4 453 euros au titre, respectivement, des années 2011 et 2012.

10. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, c'est à bon droit que l'administration fiscale a procédé, pour l'année 2012, à une proratisation du montant des charges de copropriété afférentes, pour la même année, au logement mis par M. B... à disposition de sa mère, en fonction de la durée effective de cette mise à disposition. Par ailleurs, en admettant même que cette dernière se trouvait en état de besoin durant les années 2011 et 2012, les requérants, en se bornant à soutenir, sans autre précision, que l'intégralité des sommes revêtant le caractère d'une pension alimentaire versée à un ascendant présente un caractère déductible, ne contestent pas sérieusement la réintégration dans leur revenu imposable des sommes dont l'administration, ainsi qu'il vient d'être dit, n'a pas admis la déduction.

11. Les requérants invoquent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la doctrine de l'administration fiscale énoncée au bulletin officiel des impôts et des finances publiques, sous la référence du BOI-IR-BASE-20-30-20-10, selon laquelle, lorsque l'ascendant est sans ressources ou âgé de plus de soixante-quinze ans et titulaire d'un revenu imposable n'excédant pas le plafond de ressources fixé pour l'octroi du minimum vieillesse, le contribuable peut déduire, d'une part, sans avoir à fournir de justifications, les dépenses de nourriture et d'hébergement pour un montant forfaitaire et les autres dépenses pour leur montant réel et justifié. Toutefois, ils ne sont pas fondés à se prévaloir de cette doctrine, dans les prévisions desquelles ne rentrent pas les pensions versées à un ascendant dont les ressources excèdent, comme c'est le cas en l'espèce, le plafond fixé pour l'octroi du minimum vieillesse.

Sur l'imputation des déficits fonciers résultant des charges relatives au logement destiné à la location :

12. Les requérants font valoir, en appel, que l'administration fiscale ne saurait imposer au contribuable de mettre en location un logement en contrepartie d'un loyer inférieur à sa valeur locative, alors qu'il est constant que le logement situé 9 allée des Tilleuls à Fayet, appartenant à M. B..., a été laissé vacant depuis le départ d'un précédent locataire, en juillet 2010, et qu'il n'a pas trouvé preneur, par la suite, en dépit du fait qu'il avait été mis en location au cours des années 2010 et 2011. Ils n'apportent ainsi aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal sur le caractère déductible ou non des charges relatives à ce logement, au regard des dispositions du II de l'article 15 du code général des impôts, aux termes desquelles " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. / (...) ". Il y a lieu, par suite, par adoption des motifs retenus à bon droit, par les premiers juges, au point 8 du jugement attaqué, d'écarter le moyen tiré de ce que les déficits fonciers résultant de ces charges devaient être imputés sur leur revenu global des années 2011 et 2012.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à leur charge au titre des années 2011 et 2012. Par voie de conséquence, les conclusions tendant à la restitution de ces sommes, assorties des intérêts moratoires prévus par les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Mme C... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

No18DA02541


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02541
Date de la décision : 06/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Montant global du revenu brut.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Charges déductibles du revenu global.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP BEJIN CAMUS BELOT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-05-06;18da02541 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award