Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Eliez a demandé au tribunal administratif d'Amiens à titre principal de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser la somme totale de 296 418,56 euros hors taxes pour l'exécution de la première phase du lot n° 3 du marché de restructuration et extensions du centre hospitalier Laennec à Creil ainsi que la somme totale de 407 001,30 euros pour l'exécution de la première phase du lot n° 5 du même marché, la somme totale de 30 553 euros hors taxes pour les travaux supplémentaires de ces deux lots et la somme de 32 177 euros hors taxes pour les dépenses d'audit de ces deux lots. Elle a demandé également la condamnation de l'établissement hospitalier à lui verser la somme totale de 539 888 euros hors taxes en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la résiliation du lot n° 3 du marché, la somme de 451 416 euros hors taxes pour l'indemnisation de la résiliation du lot n° 5 et enfin la somme de 44 822,40 euros hors taxes en réparation des frais d'audit comptable communs aux lots n° 3 et n° 5 qu'elle a dû engager du fait de la résiliation de ces lots pour un motif d'intérêt général. A titre subsidiaire, elle demandait la désignation d'un expert afin qu'il examine tous les éléments techniques et financiers de nature à permettre au juge de déterminer les causes des faits allégués, de procéder au récolement et à l'analyse des éléments qu'elle a fournis, de se prononcer sur la réalité des surcoûts et préjudices liés au chantier, à la résiliation partielle du marché ainsi que sur le quantum de ses préjudices, de trancher le litige en cas d'action ultérieure au principal et de statuer sur ses responsabilités.
Par un jugement n° 1403796 du 3 novembre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a condamné le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à verser à la société Eliez la somme de 59 393,54 euros hors taxes au titre de l'exécution de la phase 1 du lot n° 5 du marché de restructuration et extension du centre hospitalier Laennec à Creil ainsi que les sommes de 43 451,37 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation des phases 2 et 3 du lot n° 3 du marché de restructuration et extension du centre hospitalier Laennec à Creil et de 32 000 euros pour le même préjudice afférent à la résiliation des phases 2 et 3 du lot n° 5. Le tribunal a également rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n°17DA02497 le 28 décembre 2017 et des mémoires, enregistrés le 24 juillet 2019, le 12 septembre 2019, le 10 octobre 2019 et le 13 novembre 2019, le groupe hospitalier public du sud de l'Oise, représentée par la société civile professionnelle Sur-Mauvenu, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la société Eliez la somme de 59 393,54 euros au titre de l'exécution de la phase 1 du lot n° 5 du marché de restructuration et extension du centre hospitalier Laennec à Creil et en tant qu'il a fixé le solde de la phase 1 du lot n°3 à la somme négative de 22 496,19 euros, ;
2°) de rejeter les demandes de la société Eliez tendant à l'annulation des pénalités tant de retard que d'absence à des réunions de maîtrise d'oeuvre ou d'ordonnancement pilotage et coordination ;
3°) de fixer le solde de la phase 1 du lot n°5 à la somme de 27 829,76 euros hors taxes ;
4°) de fixer le solde de la phase 1 du lot n° 3 à la somme négative de 48 250,72 euros hors taxes ;
5°) de mettre à la charge de la société Eliez la somme de 10 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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II. Par une requête enregistrée le 10 janvier 2018 sous le n° 18DA00075 et des mémoires enregistrés le 9 octobre 2018, le 18 juillet 2019, le 21 octobre 2019 et le 29 novembre 2019, la société Eliez, représentée par Me B... D..., demande à la cour :
A titre principal :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 3 novembre 2017 en ce qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses demandes ;
2°) de rejeter les demandes du groupe hospitalier public du sud de l'Oise ;
3°) de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser, les sommes à parfaire de 32 040 euros hors taxes pour le lot 3 et de 28 090 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant des pertes de rendement et de l'immobilisation de la main d'oeuvre, de 360 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 5 657 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant de l'immobilisation du matériel sur le chantier, de 4 688 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 6 126 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant de l'accroissement des dépenses communes, de 127 437 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 266 237 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant de la perte d'exploitation, de 10 463 euros hors taxes pour le lot 3 et de 14 926 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant de l'immobilisation du service travaux pour l'encadrement et l'administration du marché au-delà du délai prévu contractuellement, ainsi que de 32 177 euros hors taxes s'agissant des dépenses d'audit et de 30 553 euros hors taxes, s'agissant des frais de chantier supplémentaires, dépenses communes aux deux lots dans ces deux cas.
4°) de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser au titre des indemnités de résiliation, les sommes de 169 263 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 128 025 euros hors taxes, s'agissant du manque à gagner, de 301 289 euros hors taxes pour le lot 3 et de 287 161 euros hors taxes pour le lot n° 5, s'agissant des investissements non amortis, de 11 706 euros hors taxes d'achat de fournitures supplémentaires uniquement pour le lot n° 3 ainsi que de 44 822,4 euros hors taxes de frais d'audit comptable pour les deux lots ;
5°) A titre subsidiaire, de désigner M. A... en qualité d'expert pour évaluer les préjudices et déterminer leurs causes ;
6°) En tout état de cause, de mettre à la charge du groupe hospitalier public du sud de l'Oise la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n°76-87 du 21 janvier 1976 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me C... E... pour le groupe hospitalier public du sud de l'Oise et de Me B... D... pour la société Eliez.
Considérant ce qui suit :
1. La requête n° 17DA02497 présentée pour le groupe hospitalier public du sud de l'Oise et la requête n°18DA00075 présentée pour la société Eliez sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. Le centre hospitalier Laennec de Creil, aujourd'hui partie du groupe hospitalier public du sud de l'Oise, a décidé la restructuration et l'extension de ses locaux. Dans ce cadre, la société Eliez a été retenue pour les lots n° 3 " sols souples et coulés " et n° 5 " peintures et revêtements muraux " par actes d'engagement du 10 mars 2010. Les décomptes généraux de chacun des lots ont été notifiés à la société Eliez, le 16 décembre 2014. Le tribunal administratif d'Amiens, saisi par la société Eliez, a condamné le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser la somme de 59 393,54 euros hors taxes au titre de l'exécution de la phase 1 du lot n° 5 du marché de restructuration et extension du centre hospitalier Laennec à Creil ainsi que les sommes de 43 451,37 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation des phases 2 et 3 du lot n° 3 de ce marché et de 32 000 euros pour le même préjudice relatif au lot n° 5. Le groupe hospitalier public du sud de l'Oise relève appel de ce jugement du 3 novembre 2017. Par une requête distincte, la société Eliez relève également appel de ce jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses demandes.
Sur la fin de non-recevoir opposée à l'appel de la société Eliez enregistré sous le n° 18DA00075 :
3. Il résulte de l'instruction que le jugement du tribunal administratif dont la société Eliez fait appel était joint à sa requête comme l'atteste son enregistrement dans l'application " Télérecours " à la date du 10 janvier 2018. La fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel de la société Eliez par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise ne peut donc qu'être écartée.
Sur la régularité du jugement :
4. La société Eliez soutient dans sa requête d'appel que le principe du contradictoire a été méconnu par le tribunal administratif d'Amiens car un mémoire enregistré le 10 octobre 2017, produit pour le groupe hospitalier public du sud de l'Oise ne lui a pas été communiqué. Toutefois, il n'est pas établi que ce mémoire produit après clôture de l'instruction, expose une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont le groupe hospitalier n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui était susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire. Il n'est pas non plus établi que le jugement contesté se soit fondé sur des faits ou des moyens qui n'auraient été contenus que dans ce mémoire. Par suite, la société Eliez n'est pas fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif d'Amiens est irrégulier.
Sur les pénalités dues par la société Eliez :
5. Les pénalités de retard prévues par les clauses d'un marché public ont pour objet de réparer forfaitairement le préjudice qu'est susceptible de causer au pouvoir adjudicateur le non-respect, par le titulaire du marché, des délais d'exécution contractuellement prévus. Elles sont applicables au seul motif qu'un retard dans l'exécution du marché est constaté et alors même que le pouvoir adjudicateur n'aurait subi aucun préjudice ou que le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché qui résulte de leur application serait supérieur au préjudice subi.
En ce qui concerne le retard dans l'exécution des travaux :
6. Aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret du 21 janvier 1976 et applicable au marché : " Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre. " et aux termes de l'article 4. 3 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Les dispositions suivantes sont appliquées pour chaque phase, à l'Entrepreneur titulaire ou à l'Entrepreneur mandataire du groupement, en cas de retard, dans l'exécution des travaux, comparativement au calendrier détaillé d'exécution élaboré et éventuellement modifié comme il a été indiqué au 4.1.2 a) ci-avant. /.../ 4.3.1 - Retard sur le délai contractuel d'exécution / Il est fait application de la pénalité journalière indiquée au 4.3.4 ci-après. /.../ 4.3.2 - Retard sur les délais particuliers correspondant aux interventions successives autres que la dernière de l'Entrepreneur sur le chantier et de remise des plans d'exécution. / Du simple fait de la constatation d'un retard par le Maître d'oeuvre, l'Entrepreneur encourt la retenue journalière provisoire indiquée au 4.3.4 ci-après. / Cette retenue est transformée en pénalité définitive si l'une des deux conditions suivante est remplie : / Ou l'Entrepreneur n'a pas achevé les travaux qui lui incombent dans le délai d'exécution propre à son lot, par phase. / Ou l'Entrepreneur, bien qu'ayant terminé ses travaux dans ce délai, a perturbé la marche du chantier ou provoqué des retards dans le déroulement des travaux relatifs aux autres lots, par phase. ".
7. Le groupe hospitalier public du sud de l'Oise a retenu des pénalités de retard de 4,7 jours pour le lot n° 3 et de 11,94 jours pour le lot n° 5 dans les décomptes généraux notifiés à la société Eliez le 16 décembre 2014. Il s'est fondé sur le rapport final du titulaire de la mission ordonnancement-pilotage-coordination qui a recensé l'ensemble des retards de chacune des entreprises au cours de l'exécution du chantier. Ce rapport fait état d'un retard de la société Eliez dans l'exécution des travaux de deux cent dix jours pour le lot n° 3 et de cinq cent trente-trois jours pour le lot n° 5. Il en déduit le nombre de jours de pénalités en effectuant un prorata entre ces retards cumulés et le retard réel de fin des travaux pour toutes les entreprises qu'il chiffre à soixante-douze jours en prenant en compte les intempéries, l'arrêt de chantier et les fiches de travaux modificatifs ayant retardé la date de livraison initiale. Mais ce calcul théorique ne correspond nullement aux modalités d'application des pénalités rappelées au point 3 qui exigent que soient individualisés des retards comparativement au calendrier détaillé d'exécution sur la base de retards précisément datés et constatés par le maître d'oeuvre. Pour la première fois en cause d'appel, le groupe hospitalier produit, comme il lui était loisible de le faire contrairement à ce que soutient la société Eliez, les comptes rendus des réunions de coordination qui constatent des retards dans l'exécution de ses travaux par la société Eliez. Par ailleurs, le tableau d'avancement des travaux au 5 décembre 2012, produit également pour la première fois en appel, relève que certains travaux ou livraisons des lots 4, 10 et 11 dans la zone de la rotonde sont en attente de la livraison des travaux du lot n°5. Mais alors que le maître d'oeuvre avait proposé au maître d'ouvrage la réception de la phase 1 à la date du 19 février 2013, ces éléments ne suffisent pas à démontrer que la société Eliez n'ait pas achevé ses travaux à la date de livraison de la phase 1, fixée la dernière fois au 15 février 2013, même si la réception des travaux " tous corps d'état " de la première phase a été prononcée par le maître d'ouvrage le 27 juin 2013, avec effet au 7 juin 2013. Le groupe hospitalier n'est donc pas fondé à soutenir que des pénalités de retard soient justifiées ni au regard du point 4.3.1 - " Retard sur le délai contractuel d'exécution " du cahier des clauses administratives particulières, ni au regard de son point 4.3.2 - " Retard sur les délais particuliers " qui exige un retard dans le calendrier global d'exécution pour la fixation d'une pénalité définitive. Il ne résulte pas plus de l'instruction que la société Eliez aurait perturbé la marche du chantier ou provoqué des retards dans le déroulement des travaux des autres lots qui est la seconde des deux conditions alternatives posées par l'article 4. 3 .2 du cahier des clauses administratives particulières du marché pour fixer une pénalité définitive. Ainsi, il n'est pas établi que cette société soit à l'origine de retards devant donner lieu à la perception de pénalités et sur ce point les conclusions du groupe hospitalier doivent donc être rejetées.
En ce qui concerne l'absence aux réunions de maîtrise d'oeuvre et de coordination :
8. Aux termes de l'article 4.3.6 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " En cas d'absence à un rendez-vous de chantier ou d'un retard supérieur à 30 minutes à une réunion de chantier, d'études, de coordination, une visite de chantier ou une convocation du Maitre d'oeuvre ou de l'ordonnancement-pilotage-coordination, l'entrepreneur subira une pénalité égale à 400 euros hors taxes. (...) ".
9. Le groupe hospitalier produit pour la première fois en cause d'appel, les comptes rendus des réunions de maîtrise d'oeuvre et d'ordonnancement-pilotage-coordination. Si la société Eliez fait valoir que les colonnes présentes dans ces comptes rendus retraçant la présence à ces réunions, ne sont pas claires et comportent des indications contradictoires, ces mentions permettent d'attester de la présence à chaque réunion des intervenants sur le chantier. Par ailleurs, la société Eliez ne vient pas démontrer sa participation à une réunion où sa présence n'aurait pas été notée. Par ailleurs, s'agissant des réunions de coordination, les comptes rendus comportent une rubrique spécifique sur l'absence des entreprises à la réunion. Le groupe hospitalier établit donc, par chacun des comptes rendus produits, l'absence de la société Eliez, tant au titre du lot n° 3 qu'au titre du lot n° 5 à trente réunions d'ordonnancement-pilotage-coordination et à vingt-neuf réunions de maîtrise d'oeuvre. La société Eliez soutient que sa présence n'était pas indispensable notamment en début de chantier, mais les dispositions contractuelles lui imposaient d'être présente et au demeurant, il résulte des comptes rendus que la société Eliez a été absente lors de réunions qui concernaient directement les lots dont elle avait la charge, comme par exemple le 17 décembre 2012 ou encore le 7 janvier 2013 pour les réunions de coordination ou le 15 février 2012 et le 29 août 2012, par exemple pour les réunions de maîtrise d'oeuvre. Même si, comme le fait valoir la société Eliez, un représentant de l'entreprise, quel qu'il soit, était en capacité d'engager la société pour le lot n° 3 comme pour le lot n° 5, la pénalité est encourue dès la constatation de l'absence et se calcule par lot en application des dispositions rappelées au point 8 Il y a donc lieu de faire droit sur ce point à la demande du groupe hospitalier et d'inclure dans le solde des chacun des deux lots de la société Eliez, à son débit, la somme de 12 000 euros hors taxes au titre des pénalités pour absence aux réunions d'ordonnancement-pilotage-coordination et la somme de 11 600 euros hors taxes au titre des pénalités pour absence aux réunions de maitrise d'oeuvre. Le jugement du tribunal administratif d'Amiens doit donc être réformé sur ce point.
En ce qui concerne les pénalités pour dégradations :
10. Le groupe hospitalier se borne à indiquer qu'une pénalité pour dégradations de 3 518,55 euros est appliquée au lot n° 5. Toutefois, il ne précise pas le fondement contractuel d'une telle pénalité qui n'apparaît pas prévue par les documents du marché. Le groupe hospitalier n'établit pas que ces dégradations lui aient causé un préjudice propre, ni qu'elles ont engendré des coûts restant à sa charge. La société Eliez est donc fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a confirmé la pénalité pour dégradation de 3 518,55 euros pour le lot n° 5. Il y a lieu de réformer le jugement du tribunal administratif d'Amiens sur ce point.
En ce qui concerne la pénalité pour retard dans la remise du dossier des ouvrages exécutés :
11. Aux termes de l'article 4.5 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché : " Les plans, notices de fonctionnement et d'entretien seront fournis /.../ obligatoirement le jour de la réception (par dérogation à l'article 40 du cahier des clauses administratives générales /.../ Le non-respect de cette date sera sanctionné par une pénalité de 300 euros H.T. par jour calendaire de retard en dérogation à l'article 20.6 du cahier des clauses administratives générales /.../ ". Il ressort de ces dispositions que le dossier des ouvrages exécutés devait être remis à la réception de l'ouvrage.
12. La réception a été prononcée avec réserves le 27 juin 2013. La société Eliez se contente d'indiquer qu'aucune clause contractuelle n'imposait la remise du dossier des ouvrages exécutés le 30 juin 2013, sans véritablement contester qu'elle ait remis ce dossier avec trente jours de retard par rapport à la date de réception. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a confirmé la pénalité de 9 000 euros prise en compte dans le solde du lot n° 3 et la pénalité du même montant prise en compte dans le solde du lot n° 5.
En ce qui concerne les pénalités pour retard dans la remise des devis en cours d'exécution des travaux. :
13. Aux termes de l'article 4.3.6 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " (...) Pénalités pour retard dans la fourniture de devis de travaux modificatifs par rapport à la date fixée par le maître d'oeuvre au compte-rendu de chantier : par jour calendaire 150 euros hors taxes. ".
14. Il résulte des pièces produites pour la première fois en appel que des fiches de travaux modificatifs ont été émises le 14 décembre et le 20 décembre 2010. La société Eliez ne conteste pas qu'elle devait produire les devis correspondants à ces fiches dans les quinze jours suivant leur émission. Il résulte du constat opéré par le maître d'oeuvre et non sérieusement remis en cause par la société Eliez que ces devis ont été produits dans les deux cas, le 14 janvier 2011. La société Eliez ne saurait s'exonérer de son retard comme elle tente de le faire, au motif que les fiches ont été émises dans la période des fêtes de fin d'année ou que le maître d'ouvrage n'a décidé de ces travaux que le 15 avril 2011, alors qu'aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché, cité au point 5, les pénalités sont exigibles dès leur constat. Par suite, la société Eliez ne saurait soutenir que c'est à tort qu'une pénalité de 26 jours de retard lui a été appliquée pour la production des devis dans le lot n° 5. Toutefois, ainsi qu'elle le soutient, le taux journalier de calcul de cette pénalité, à savoir 200 euros hors taxes retenu dans le décompte général comme dans le jugement est erroné par rapport au cahier des clauses administratives particulières qui, ainsi qu'il a été dit au point 13, fixe ce taux à 150 euros hors taxes par jour calendaire. Par suite, la pénalité retenue au titre du retard dans la production des devis doit être fixée à 3 900 euros hors taxes au lieu de 5 200 euros. La condamnation du groupe hospitalier public du Sud de l'Oise doit ainsi être augmentée de la somme de 1 300 euros hors taxes au titre du lot n° 5. Il y a lieu de réformer le jugement du tribunal administratif d'Amiens sur ce point.
15. Il est constant qu'aucun des lots n'a fait l'objet de pénalités de retard dans la remise des plans et documents d'exécution, qui sont prévues distinctement des pénalités de retard dans la remise des devis et de celles relatives à la remise du dossier des ouvrages exécutés. Les demandes de la société Eliez à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées.
16. Si, lorsqu'il est saisi d'un litige entre les parties à un marché public, le juge du contrat doit, en principe, appliquer les clauses relatives aux pénalités dont sont convenues les parties en signant le contrat, il peut, à titre exceptionnel, saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations. En l'espèce, le montant des pénalités n'apparaît ni manifestement excessif, ni manifestement dérisoire eu égard au montant des marchés en cause. Par suite, la demande de la société Eliez de diminution des pénalités compte tenu de leur caractère excessif, ne peut qu'être rejetée.
Sur le préjudice résultant de l'allongement de la durée du chantier :
17. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics. En revanche, elles ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché lorsqu'elles résultent du seul fait de fautes commises par d'autres intervenants.
18. Il résulte de ce qui précède que la société Eliez ne peut rechercher la responsabilité du groupe hospitalier en arguant de fautes de la maîtrise d'oeuvre. Par ailleurs, la société Eliez demande l'indemnisation des frais de chantier supplémentaires communs aux deux lots résultant de l'allongement de la durée du chantier en soutenant que le maître d'ouvrage a commis une faute. Mais pour démontrer la faute propre du maître d'ouvrage, elle s'appuie exclusivement sur une note aux parties adressée par l'expert désigné par le tribunal administratif d'Amiens dans un autre litige. Cette note fait état des difficultés du chantier du fait des reports successifs du délai d'exécution des travaux, du grand nombre de fiches de travaux modificatifs et de la résiliation des phases 2 et 3 qui a contraint à revoir le projet en cours d'exécution. Toutefois, cette note, rendue dans le cadre d'un autre litige, et qui ne constitue qu'un élément provisoire de l'expertise, ne suffit pas à établir une faute du groupe hospitalier dans l'estimation des besoins ou dans la conception des lots n° 3 et 5, ni dans l'exercice des pouvoirs de contrôle et de direction des chantiers pour ces lots, alors qu'il n'est pas sérieusement contesté que la résiliation des phases 2 et 3 qui a contribué à l'allongement du chantier résulte d'une remise en cause du projet en cours d'exécution par l'agence régionale de santé. Par suite, la société Eliez n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens par le jugement contesté a rejeté sa demande d'indemnisation sur le fondement de la responsabilité pour faute du maître d'ouvrage.
19. La société Eliez n'établit pas plus avoir rencontré des difficultés exceptionnelles, imprévisibles et extérieures aux parties qui auraient eu pour effet de bouleverser l'économie du marché. Par suite, cette demande ne peut qu'être rejetée.
Sur l'indemnisation du préjudice résultant de la résiliation :
20 Aux termes de l'article 46. 1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret du 21 janvier 1976 et applicable au marché : " Il peut être mis fin à l'exécution des travaux faisant l'objet du marché avant l'achèvement de ceux-ci par une décision de résiliation du marché qui en fixe la date d'effet./ .../ Sauf dans les cas de résiliation prévus aux articles 47 et 49, l'entrepreneur a droit à être indemnisé, s'il y a lieu, du préjudice qu'il subit du fait de cette décision. / (...) " et aux termes de l'article 46. 2 du même document : " En cas de résiliation, il est procédé, l'entrepreneur ou ses ayants droit, tuteur, curateur ou syndic dûment convoqués aux constatations relatives aux parties d'ouvrage exécutés, .... Il est dressé procès-verbal de ces opérations. / L'établissement de ce procès-verbal emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés avec effet à la date d'effet de la résiliation. ". Le préjudice réparé en cas de résiliation comprend les pertes subies et les bénéfices nets, avant impôt sur les sociétés, dont le titulaire du marché a pu être privé pour la période du contrat restant à couvrir.
21. La société Eliez demande sur ce fondement à ce que le jugement du tribunal administratif d'Amiens soit réformé en ce qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses demandes d'indemnisation résultant de la résiliation des contrats pour les des phases 2 et 3 du marché.
22. En premier lieu, elle sollicite le versement des sommes de 169 263 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 128 025 euros hors taxes pour le lot n° 5 au titre de pertes d'amortissements de charges fixes et de pertes de marge. Elle demande que soit ajoutée à la marge nette, la quote-part des frais généraux correspondant à ce chantier. Toutefois, comme l'ont relevé les premiers juges, ni les documents relatifs à la formation des prix mais pas aux taux de marge effectivement constatés dans le secteur, ni le document rédigé par un cabinet d'expert-comptable, qui reprend ce taux sans en expliquer le calcul, ne suffisent à établir cette demande. La société Eliez soutient également que l'allongement de la durée du chantier est à l'origine de la perte de chiffre d'affaires en 2013 et 2014 du fait de délais d'obtention de nouveaux marchés, d'un délai de latence entre la première information et le démarrage de nouveaux travaux sur ces nouveaux marchés. Mais ses allégations ne suffisent pas à établir qu'une baisse de chiffre d'affaires serait en lien suffisamment direct avec la résiliation des lots en cause. Ainsi, ses contestations en appel ne suffisent pas à conduire à remettre en cause l'évaluation faite par les premiers juges du manque à gagner sur la base de la marge nette qu'ils ont fixé, par une juste appréciation, à la somme de 33 000 euros pour le lot n° 3 et à celle de 32 000 euros pour le lot n° 5.
23. En deuxième lieu, la société Eliez demande l'indemnisation de la perte d'industrie résultant de l'absence de l'amortissement des charges fixes à hauteur de 301 289 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 287 161 euros hors taxes pour le lot n° 5. Toutefois, la société ne précise pas la consistance des moyens effectivement immobilisés pour ces marchés de revêtements de sols et de peinture, en se bornant à renvoyer à un calcul comptable théorique du taux de charges fixes dans son chiffre d'affaires et à un budget prévisionnel. Elle ne justifie pas non plus que ces moyens n'auraient pas pu être redéployés sur d'autres chantiers du fait de la résiliation. Sa demande sur ce fondement ne peut donc qu'être rejetée comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif d'Amiens.
24. En troisième lieu, en plus des 10 451,37 euros que lui ont alloué les premiers juges à raison de frais supplémentaires d'achat de fournitures et de matériels pour le lot n° 3, la société Eliez réclame les sommes de 10 463 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 14 926 euros hors taxes pour le lot n° 5, à raison de frais d'immobilisation du service travaux et la somme de 30 553 euros hors taxes valant pour les deux lots au titre du maintien d'un responsable de chantier, et les sommes de 360 euros hors taxes pour le lot n° 3 et de 5 657 euros hors taxes pour le lot n° 5, au titre de frais d'immobilisation de matériels sur le chantier. Mais la réalité de ces préjudices n'est pas établie par les pièces du dossier.
25.Enfin la société demande l'indemnisation à hauteur de la somme de 44 822,40 euros toutes taxes comprises de l'audit comptable qu'elle a commandé pour procéder à l'évaluation du manque à gagner. Toutefois, il n'est pas démontré que cette étude ait été indispensable à la société pour fixer son préjudice et donc qu'elle soit en lien suffisamment direct avec la résiliation, ni que cette étude, d'un coût élevé, ait été utile à la fixation du préjudice indemnisé dans ce cadre.
Sur le solde des marchés :
26. Les parties à un marché public peuvent convenir que l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde, arrêté lors de l'établissement du décompte définitif, détermine leurs droits et obligations définitifs. En l'espèce, il résulte de l'instruction que le décompte général et définitif avait prévu d'inclure les indemnités de résiliation des phases 2 et 3 dans le solde des marchés, en prévoyant des lignes à cet effet, qui sont restées vierges, faute de justification apportée par l'entreprise. Il y a donc lieu d'inclure dans le solde du marché, les conséquences de la résiliation des phases 2 et 3 de chacun des lots.
27. Il résulte de tout ce qui précède que s'agissant du lot n° 3, le solde en a été fixé par le tribunal administratif d'Amiens, pour la seule phase 1, à la somme négative de 22 496,19 euros tenant compte de 27 941,72 euros hors taxes de travaux dus, de 527,76 euros et de 3 675,42 euros liés aux variations des prix, de 3 158,22 euros d'intérêts moratoires et de 1 000 euros d'indemnisation de dégradation non contestés, auxquels il convient d'ajouter au titre de la résiliation, le manque à gagner de 33 000 euros et l'indemnisation pour augmentation de prix de fournitures de 10 451,37 euros hors taxes. Le solde fixé par le tribunal tient compte de pénalités de 49 800 euros et de 9 000 euros pour retard dans la diffusion de documents auxquelles il convient d'ajouter celles de 12 000 euros hors taxes et de 11 600 euros hors taxes résultants du point 12 du présent arrêt. Le solde du lot n° 3 doit donc désormais être fixé à la somme négative de 2 645,51 euros hors taxes au débit de la société Eliez. Les conclusions indemnitaires de la société Eliez au titre du lot n° 3 ne peuvent donc qu'être rejetées.
28. S'agissant du lot n° 5, le tribunal administratif d'Amiens en a fixé le solde de la phase 1 à la somme de 59 393,54 euros hors taxes tenant compte de 69 373,22 euros hors taxes de travaux dus, de 1 463 euros et de 6 070,72 euros liés aux variations des prix et de 205,15 euros d'intérêts moratoires, sommes auxquelles il convient d'ajouter au titre de la résiliation, le manque à gagner de 32 000 euros. Il convient de réduire la pénalité de 5 200 euros ramenée au point 14 du présent arrêt à la somme de 3 900 euros, de prendre en compte celle de 9 000 euros pour retard dans la diffusion de documents confirmée par le tribunal, de supprimer conformément au point 10 du présent arrêt celle de 3 518, 55 euros retenue par le tribunal et de prendre en compte celles de 12 000 euros hors taxes et de 11 600 euros hors taxes résultants du point 9 du présent arrêt. Par suite, le solde du lot n° 5 est fixé à la somme de 72 612,09 euros hors taxes.
29. Le jugement du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Sur la demande d'expertise :
30. Compte tenu de ce qui précède, la demande d'expertise demandée par la société Eliez ne présente pas de caractère d'utilité. Ses conclusions à ce titre doivent donc être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
31. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du groupe hospitalier public du sud de l'Oise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Eliez demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions au même titre du groupe hospitalier public du sud de l'Oise.
DÉCIDE :
Article 1er : Le solde du lot n° 3 du marché de restructuration et d'extension du centre hospitalier Laennec est fixé à la somme négative de 2 645,51 euros hors taxes.
Article 2 : Le solde du lot n° 5 est fixé à la somme de 72 612,09 euros hors taxes.
Article 3 : La condamnation du groupe hospitalier public du sud de l'Oise au titre de l'exécution et de la résiliation du lot n° 5 est ramenée à la somme globale de 72 612,09 euros hors taxes.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 3 novembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile professionnelle Sur-Mauvenu pour le groupe public hospitalier du sud de l'Oise et à Me B... D... pour la société Eliez.
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N°17DA02497, 18DA00075
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