Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier de Beauvais à lui verser, en sa qualité d'ayant droit de Mme E... D..., sa mère, la somme de 12 040 euros en réparation des préjudices subis par elle à raison des fautes commises dans la prise en charge de l'accident ischémique transitoire survenu le 3 janvier 2013 et une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice moral que lui a causé le décès de celle-ci.
Par un jugement n° 1701168 du 19 avril 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande, mis à la charge de M. D... et du centre hospitalier de Beauvais chacun la somme de 1 979,40 euros au titre des dépens de l'instance et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 juin 2019, M. D..., représenté par Me C... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier de Beauvais à lui verser, en sa qualité d'ayant-droit de Mme E... D..., sa mère, la somme de 12 040 euros au titre de son préjudice corporel et la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral subi du fait du décès prématuré de celle-ci ;
3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert aux fins de déterminer le pourcentage de la perte de chance de survie subi par sa mère ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Beauvais une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,
- et les observations de Me C... B..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme E... D..., alors âgée de soixante-dix-neuf ans, souffrant de la maladie d'Alzheimer, a présenté un tremblement des deux membres supérieurs avec angoisse et dysarthrie pour lesquels elle a été admise au service des urgences du centre hospitalier de Beauvais le 3 janvier 2013. Après la réalisation d'un scanner cérébral montrant une lésion lacunaire sylvienne gauche mais ne révélant aucune sténose hémodynamique et d'un échodoppler des troncs supérieurs aortiques, l'intéressée a été placée sous aspirine par intraveineuse. Au vu du tableau clinique constaté sans signe neurologique, Mme D... a été renvoyée à son domicile après indication de la poursuite de sa prise en charge médicale en externe avec son médecin traitant. Après avoir été victime d'un malaise le 27 avril 2013 avec installation d'une hémiplégie droite, Mme D... a de nouveau été admise au service des urgences du centre hospitalier de Beauvais. L'intéressée est décédée le 21 novembre 2013. M. A... D..., son fils, a recherché la responsabilité du centre hospitalier de Beauvais à raison des fautes commises par cet établissement le 3 janvier 2013 dans la prise en charge médicale de sa mère. Il relève appel du jugement du 19 avril 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Beauvais à lui verser une somme de 12 040 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis par sa mère et une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral.
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. "
3. Il ressort du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif d'Amiens par une ordonnance du 24 septembre 2014 que Mme D..., qui présentait le 3 janvier 2013 des symptômes d'allure neurologique avec engourdissement d'un membre et des difficultés d'élocution, a fait l'objet lors de son admission au service des urgences d'une vérification de ses constantes hémodynamiques et respiratoires qui étaient correctes. Elle a également subi, malgré l'absence de déficit neurologique focal et la disparition de ses symptômes lors de son arrivée aux urgences, un scanner cérébral et un échodoppler des troncs supérieurs aortiques. Ces examens n'ont pas retrouvé de sténose hémodynamique mais le scanner cérébral a montré une lésion lacunaire sylvienne gauche qui a été interprétée, selon les dires de l'expert, " comme séquellaire en raison de l'antécédent d'accident vasculaire cérébral ischémique en 2005 " de l'intéressée. Il relève, en outre, que Mme D... a reçu un traitement par aspirine par voie intraveineuse et précise que l'intéressée présentait une hypertension artérielle, une obésité et des antécédents vasculaires en 2005. Si l'expert conclut à une prise en charge qui n'a pas été conforme aux recommandations de bonne pratique en l'absence de bilan étiologique extensif qui aurait permis de rechercher une cardiopathie emboligène, il résulte cependant des constatations qui précèdent qu'au vu de la symptomatologie constatée chez Mme D... lors de son admission au service des urgences qui n'a révélé, après les actes diagnostiques et thérapeutiques dispensés dont un scanner cérébral, aucun déficit neurologique, qu'aucun examen complémentaire n'apparaissait nécessaire. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, un traitement antiagrégant plaquettaire par aspirine a été administré par voie intraveineuse à sa mère après avis du neurologue.
4. Si l'expert conclut aussi à un manquement du centre hospitalier tenant à l'absence de transmission directe au médecin traitant de Mme D... du courrier de sortie du 3 janvier 2013 et de ce que ce courrier ne comprenait aucune prescription thérapeutique pour un traitement antiagrégant ni n'organisait la poursuite du bilan en ville, il résulte de l'instruction que ce courrier a été remis en main propre à Mme D..., accompagnée de son fils, à sa sortie du service des urgences, qu'il lui a été demandé de consulter son médecin traitant et que ce courrier a été remis à son médecin traitant dès le 8 janvier 2013 lors d'une consultation. Ce courrier précisait le motif de l'admission de Mme D... au service des urgences, les examens médicaux effectués, le traitement antiagrégant plaquettaire mis en oeuvre et évoquait le diagnostic d'un accident vasculaire cérébral ischémique transitoire du territoire sylvien. Ce courrier, suffisamment circonstancié, invitait ce praticien à poursuivre son suivi thérapeutique avec orientation ou non vers un confrère spécialisé de son choix et évoquait la réalisation d'un électroencéphalogramme en externe, qui a eu lieu le 8 janvier 2013 au centre hospitalier et qui s'est révélé normal.
5. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M. D... n'est pas fondé à soutenir que le centre hospitalier de Beauvais aurait commis une faute dans la prise en charge médicale de sa mère en ne pratiquant pas d'autres examens et en ne lui prescrivant pas un traitement adapté, qui serait à l'origine d'une perte de chance d'éviter le dommage qu'elle a subi quatre mois plus tard en raison de l'accident vasculaire cérébral survenu le 27 avril 2013. De même, aucun lien de causalité ne peut être établi entre l'absence de transmission directe au médecin traitant du courrier de sortie du 3 janvier 2013 et la survenue du dommage.
6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier de Beauvais, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à verser à M. D... la somme qu'il réclame à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement au centre hospitalier de Beauvais d'une somme au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Beauvais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au centre hospitalier de Beauvais et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise.
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N°19DA01455