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06/04/2021 | FRANCE | N°17DA01541

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 06 avril 2021, 17DA01541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier de Laon à lui verser la somme de 360 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite de son intervention chirurgicale réalisée le 18 mars 1999 et d'ordonner une expertise médicale.

Par un jugement avant dire droit n° 1400253 du 15 septembre 2016, le tribunal a ordonné une expertise médicale dont le rapport a été remis par le docteur Rheims le 6 avril 2017.

Par un jugement n° 1400253 du

15 juin 2017, le tribunal administratif d'Amiens a condamné le centre hospitalier de Lao...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier de Laon à lui verser la somme de 360 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite de son intervention chirurgicale réalisée le 18 mars 1999 et d'ordonner une expertise médicale.

Par un jugement avant dire droit n° 1400253 du 15 septembre 2016, le tribunal a ordonné une expertise médicale dont le rapport a été remis par le docteur Rheims le 6 avril 2017.

Par un jugement n° 1400253 du 15 juin 2017, le tribunal administratif d'Amiens a condamné le centre hospitalier de Laon à verser à M. B... la somme de 3 000 euros en réparation des préjudices subis à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée le 18 mars 1999 et a mis à la charge du centre hospitalier de Laon la somme de 1 831,59 euros pour les frais et honoraires de l'expertise.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2017 et 21 août 2020, M. B..., représenté par Me C... F..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement ;

2°) d'ordonner une nouvelle expertise ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Laon à lui verser la somme totale de 360 000 euros en réparation des préjudices subis ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Laon la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les frais d'expertise qui s'élèvent à la somme de 1 831, 59 euros.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,

- et les observations de Me D... E..., représentant le centre hospitalier de Laon.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., alors âgé de quarante-six ans, était incarcéré à la maison d'arrêt de Laon et présentait un état dentaire très dégradé. Le 18 mars 1999, il a subi une intervention chirurgicale au sein du service de stomatologie du centre hospitalier de Laon. Alors que cette intervention avait initialement pour objectif l'extraction de la totalité de ses dents en vue de la pose d'un appareil dentaire, le chirurgien-dentiste n'a décidé de n'en extraire qu'une partie et de laisser sept dents en place. Des douleurs maxillaires et mandibulaires chroniques ont persisté suite à cette intervention et, le 11 décembre 2001, M. B... a subi une seconde intervention afin de procéder à l'extraction des sept dents restantes. L'état de santé de M. B... a été regardé comme consolidé le 25 décembre 2001. M. B... a recherché la responsabilité du centre hospitalier de Laon en raison des manquements qu'il estime avoir subis lors de l'intervention chirurgicale du 18 mars 1999. Il interjette appel du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 15 juin 2017 condamnant le centre hospitalier de Laon à lui verser la somme de 3 000 euros en indemnisation des préjudices subis suite à son intervention chirurgicale.

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Laon :

2. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise que le plan de traitement proposé par le médecin dentiste de la maison d'arrêt de Laon, selon lequel une édentation totale était adaptée aux problèmes bucco-dentaires de M. B..., était conforme aux données acquises de la science. Il suit de là qu'en ne procédant qu'à l'extraction partielle des dents de l'intéressé sans motif légitime, le stomatologiste qui a pratiqué l'intervention a commis une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Laon.

Sur la réparation des préjudices subis :

3. En ce qui concerne le préjudice professionnel, il résulte de l'instruction que M. B... n'exerçait aucune activité professionnelle au moment de l'intervention chirurgicale. La circonstance qu'il se soit vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé par la maison départementale des personnes handicapées ne suffit pas à établir l'existence d'un préjudice professionnel. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à solliciter une indemnisation à ce titre.

4. Il ressort du rapport d'expertise que les souffrances endurées avant la consolidation, comprenant à la fois les souffrances physiques et psychiques, ont été estimées par l'expert à 2 sur une échelle de 7, ces souffrances résultant de l'aggravation d'une carie devenue douloureuse sur la dent n° 47, des blessures de la muqueuse maxillaire antagoniste provoquée par les dents restantes et de l'inconfort lié à l'impossibilité de pouvoir procéder à toute réhabilitation prothétique. Ce poste de préjudice doit ainsi être évalué à la somme de 1 850 euros.

5. Le préjudice moral dont se prévaut M. B... doit être rattaché aux troubles dans les conditions d'existence consécutifs aux conditions de sa prise en charge initiale dont il est résulté un inconfort de sa situation et un déficit fonctionnel temporaire évalué par l'expert à 10 % pendant deux ans et neuf mois, entre la date du 18 mars 1999 et la date du 25 décembre 2001 de consolidation des blessures. Il y a lieu d'indemniser ce chef de préjudice en lui allouant la somme de 3 000 euros.

6. Si M. B... invoque un préjudice esthétique lié à l'impossibilité de porter un appareil dentaire, il n'en tire aucune conséquence indemnitaire.

7. Enfin, si M. B... invoque la persistance de douleurs névralgiques après la date de consolidation de ses blessures, il ne résulte pas de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise qu'existe un lien de causalité direct et certain avec l'intervention initiale du 18 mars 1999 dès lors que les multiples investigations médicales réalisées après la date de consolidation des blessures n'ont pas permis de mettre en évidence une cause objective pathologique ou anatomique.

8. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de porter la somme de 3 000 euros allouée par les premiers juges à la somme de 4 850 euros au titre des préjudices extra-patrimoniaux subis par M. B... et de condamner le centre hospitalier de Laon au paiement de cette somme, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise.

Sur les frais d'expertise :

9. Il y a lieu de confirmer le jugement des premiers juges mettant les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 831, 29 euros par une ordonnance du tribunal administratif d'Amiens du 13 mars 2017, à la charge définitive du centre hospitalier de Laon.

Sur les frais liés au litige :

10. M. B... ayant été admis à l'aide juridictionnelle totale, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 3 000 euros allouée par le tribunal administratif d'Amiens à M. B... est portée à la somme de 4 850 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1400253 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre hospitalier de Laon et à Me C... F....

Copie sera adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne.

N°17DA01541 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17DA01541
Date de la décision : 06/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux. Existence d'une faute médicale de nature à engager la responsabilité du service public.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Seulin
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : CABINET LE PRADO-GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-04-06;17da01541 ?
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