Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1607321 du 9 novembre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 janvier 2019, le 5 juin 2019, le 6 juin 2019 et le 3 décembre 2019, M. et Mme C..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige ;
3°) de mettre une somme, dont le montant sera précisé en fin d'instance, à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., qui exerçait, à titre libéral, une activité de conseil dans le secteur industriel, a notamment accompli, à compter du 21 novembre 2011, en sous-traitance d'une société de droit britannique, une mission de conseil et d'assistance technique dans le cadre de l'opération de construction du terminal méthanier de Loon-Plage, près de Dunkerque (Nord). Cette activité libérale a fait l'objet, au cours de l'année 2015, d'une vérification de comptabilité portant sur la période couvrant les exercices clos en 2012 et en 2013. A l'issue de ce contrôle, l'administration a remis en cause le bénéfice par M. C..., au titre de cette activité, de l'exonération prévue à l'article 44 octies A du code général des impôts en faveur d'entreprises implantées en zone franche urbaine, ce dont elle a informé l'intéressé par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 26 mars 2015. Par une proposition de rectification adressée le même jour à M. et Mme C..., l'administration a fait connaître à ceux-ci l'incidence de ces rectifications sur leur revenu imposable des années 2012 et 2013. Les rehaussements correspondants ont été maintenus malgré les observations présentées par les contribuables sur ces deux propositions de rectification. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire, saisie à la demande de l'administration, a émis, à l'issue de sa séance du 1er février 2016, un avis favorable au maintien des rehaussements notifiés. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en résultant pour M. et Mme C..., au titre des années 2012 et 2013, ont été mises en recouvrement le 30 avril 2016, à hauteur des sommes respectives de 31 692 euros et de 31 854 euros, en droits et pénalités. Après le rejet de leur réclamation, M. et Mme C... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 9 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le moyen tiré de la vérification de comptabilité anticipée :
2. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. ".
3. Une vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude. Un contrôle inopiné effectué conformément aux dispositions précitées du quatrième alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ne constitue pas le commencement d'une vérification de comptabilité. Par suite, la date à laquelle la vérification sur place des livres et documents mentionnée à l'article L. 52 du même livre doit être regardée comme ayant débuté n'est pas celle du contrôle inopiné mais celle à laquelle le vérificateur commence à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales.
4. Il est constant qu'avant même d'avoir envoyé à M. C..., le 5 janvier 2015, un avis de vérification afin de l'informer de l'engagement prochain d'une vérification de comptabilité concernant son activité libérale, le vérificateur s'est rendu, à deux reprises le 15 décembre 2014, puis une nouvelle fois le 17 décembre 2014, à l'adresse du local professionnel que M. C... avait pris en location à Saint-Pol-sur-Mer, en zone franche urbaine, afin d'examiner sur place la réalité et les conditions matérielles d'exercice de son activité. N'ayant pu, lors de ces visites, rencontrer M. C..., le vérificateur, qui n'avait pas connaissance de la cessation, par l'intéressé, de ses activités à compter du 31 octobre 2014 et de la résiliation, à la même date, de son bail, a rencontré une salariée d'une entreprise voisine à laquelle il a posé quelques questions. Toutefois, il résulte des principes rappelés au point précédent que ces visites inopinées sur place, effectuées conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, et dont le vérificateur n'avait pas à aviser préalablement M. C..., ne caractérisent pas, par elles-mêmes, l'engagement d'une vérification de comptabilité, ce contrôle ne commençant qu'au moment où le vérificateur confronte sur place les documents comptables se rapportant à l'activité vérifiée avec les déclarations souscrites par le contribuable et les autres éléments d'information portés à sa connaissance. Dès lors, le moyen tiré par M. C... de ce que son activité libérale aurait fait l'objet d'une vérification de comptabilité anticipée, le privant ainsi des garanties attachées à un tel contrôle, en particulier de celle tenant à la possibilité de se faire assister par un conseil de son choix, doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'exercice irrégulier par le vérificateur de son droit de communication auprès d'un tiers :
5. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ".
6. Dès lors qu'aucun élément de l'instruction n'est de nature à corroborer les allégations de M. C... sur ce point, il ne peut être tenu pour établi que la conversation que le vérificateur a tenue, au cours de l'une de ses visites inopinées à l'adresse du local professionnel que M. C... avait pris en location à Saint-Pol-sur-Mer, en zone franche urbaine, avec une salariée d'une entreprise voisine, aurait été pour lui l'occasion d'exercer son droit de communication auprès de cette personne. La proposition de rectification adressée le 26 mars 2015 à M. C..., à l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet son activité libérale, ne fait d'ailleurs aucunement état de cette conversation, ni davantage de renseignements recueillis auprès d'une entreprise ou d'une personne étrangère à l'activité professionnelle de M. C..., mais fonde exclusivement les rectifications notifiées à ce dernier sur un faisceau d'indices recueillis sur la base des documents comptables et contractuels auxquels le vérificateur a eu accès, confortés par la réponse apportée à une demande de renseignements adressée auprès de l'une des entreprises ayant pris une part active au projet de construction du terminal méthanier de Loon-Plage auquel le contribuable a participé. Il suit de là que M. C... n'est pas fondé à soutenir que les impositions en litige auraient été établies à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscale, faute pour l'administration de l'avoir informé, avant la mise en recouvrement de ces impositions, de la teneur des renseignements recueillis par le vérificateur auprès d'un tiers.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
7. Aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts : " I. - Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, ainsi que ceux qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, exercent des activités dans les zones franches urbaines définies au deuxième alinéa du B du 3 de l'article 42 de la même loi sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir bénéficier du régime d'exonération qu'elles instituent, une entreprise doit exercer une activité dans une zone franche urbaine et doit y disposer des moyens d'exploitation nécessaires à cette activité.
9. Il résulte de l'instruction que M. C... ne disposait, dans les locaux qu'il avait pris en location en zone franche urbaine, à Saint-Pol-sur-Mer, situés à environ trois kilomètres de son domicile de Dunkerque, hors du périmètre de la zone franche urbaine, et à environ quatorze kilomètres du chantier du terminal méthanier de Loon-Plage, également situé hors de la zone franche urbaine, que de moyens matériels très limités, la seule immobilisation portée dans la comptabilité de son activité libérale consistant en un ordinateur portable. En outre, ce local, dans lequel M. C... ne disposait que de deux imprimantes et de deux téléphones portables lui donnant accès à internet, n'était équipé d'aucune ligne téléphonique fixe, ni d'aucun matériel professionnel spécifique. En admettant même que ces équipements étaient suffisants à permettre l'exercice, par M. C..., de son activité professionnelle, la faible importance des moyens matériels disponibles dans ce local constitue néanmoins un indice de nature à relativiser l'intérêt, pour celui-ci, de disposer de cette implantation si près de son domicile et si éloignée du chantier auquel sa mission l'appelait à contribuer.
10. En outre, les deux avenants au contrat de sous-traitance conclus par M. C... avec une société de droit anglais, versés à l'instruction, mentionnent, en faisant abstraction de la surcharge manuscrite dont ils sont affectés et sur laquelle M. C... n'apporte aucun commencement d'explication, que l'intéressé exercera sa mission dans les locaux mis à sa disposition par sa cocontractante ou par le client final de l'opération. Il est d'ailleurs attesté par d'anciens contacts professionnels de M. C... que celui-ci a effectivement occupé, au cours des années d'imposition en litige, un bureau mis à sa disposition sur le site du chantier du terminal méthanier dans le cadre de l'exercice de sa mission. De surcroît, il est constant que M. C..., ainsi qu'il l'a précisé au vérificateur, a travaillé exclusivement, durant la période allant du 1er janvier au 31 mars 2012, dans les locaux du client final de l'opération, situés à Paris.
11. Par ailleurs, la comptabilité de l'activité de M. C... ne comporte, au titre des dépenses d'énergie concernant le local de Saint-Pol-sur-Mer, qu'une somme de 23,27 euros hors taxes au titre de la consommation électrique pour l'année 2012, ainsi qu'une somme de 39,90 euros hors taxes en ce qui concerne le même chef de dépense pour l'année 2013, tandis qu'aucune consommation de gaz n'a été portée en charges au titre de la période du 3 janvier 2012 au 4 octobre 2012 et qu'une consommation de gaz de 143,56 euros seulement a été enregistrée en charge pour toute l'année 2013. M. C... conteste la pertinence de l'indice lié à la faiblesse de ces montants, en faisant observer que ceux-ci font abstraction de la facture d'électricité du mois de décembre 2012, qui ne lui est pas parvenue, en procédant à une évaluation du volume, en kwh, de ses consommations sur la base d'outils disponibles sur internet, en retenant les seuls usages de chauffage et d'éclairage, et en rapprochant cette évaluation des consommations moyennes relevées pour des locaux comparables. Toutefois, une telle évaluation, à supposer même qu'elle puisse aboutir à des niveaux de consommation représentatifs de ceux susceptibles d'être atteints par une personne occupant, les jours ouvrables, durant les heures de bureau, un local présentant les mêmes caractéristiques physiques, ne peut suffire à remettre en cause les écritures comptables de l'intéressé, qui n'ont pas été écartées comme non probantes par l'administration et qui sont réputées rendre compte de l'intégralité des charges exposées au cours des exercices en cause, alors, en outre, qu'il appartenait à M. C..., s'il estimait inexact le montant des charges alors porté en comptabilité au titre de l'année 2012, de constituer une provision pour charges à payer en ce qui concerne les dépenses d'électricité du mois de décembre 2012. Dès lors, il y a lieu de retenir les montants retenus par l'administration, lesquels s'avèrent particulièrement faibles, même en tenant compte d'un usage modéré du chauffage et des appareils électriques équipant le local, au regard d'une occupation quotidienne durant neuf et douze mois au cours, respectivement, des deux années d'imposition en litige.
12. Il résulte également de l'instruction que la majeure partie du courrier administratif et des factures se rapportant à l'activité libérale exercée par M. C... était adressée, au cours des années en litige, à son domicile de Dunkerque et non à son local de Saint-Pol-sur-Mer. En versant à l'instruction des pièces de nature à établir qu'une quinzaine de factures et de correspondances diverses se rapportant à son activité lui ont été envoyées, au cours des deux années d'imposition en litige, à l'adresse de ce local ou comportaient la mention de cette adresse, M. C... ne conteste pas sérieusement la réalité de cette situation, qu'il ne justifie pas non plus de façon convaincante en alléguant que son épouse assurait le suivi administratif de son activité libérale et que le siège déclaré de cette activité était situé à son domicile, alors que le courrier qui lui a été adressé au cours des deux années d'imposition en litige comportait nécessairement, eu égard à la nature de sa mission, des documents de nature technique.
13. Enfin, si plusieurs correspondants de M. C..., dans le cadre du projet de terminal méthanier, ont attesté s'être rendus, à plusieurs reprises, à son local de Saint-Pol-sur-Mer, soit pour lui apporter des dossiers, soit pour se rendre à une réunion ou à un rendez-vous ou même pour lui livrer des plats cuisinés, ces seules attestations, établies plusieurs années après la clôture du second exercice vérifié, à les tenir même pour probantes, ne permettent pas d'apprécier la fréquence de l'utilisation par M. C... de ce local pour les besoins de son activité professionnelle.
14. Ainsi, compte tenu des éléments énoncés aux points 9 à 13, pris dans leur ensemble, il ne résulte pas de l'instruction que M. C... aurait exercé, dans son local professionnel de Saint-Pol-sur-Mer, situé en zone franche urbaine, une part significative de son activité professionnelle dans le cadre de l'exécution du contrat de sous-traitance qui le liait à l'un des participants au projet de terminal méthanier de Loon-Plage. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le bénéfice, au titre des deux années d'imposition en litige, du régime d'exonération sous lequel M. C... avait cru pouvoir placer son activité.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande. Dès lors que l'Etat ne peut être regardé comme étant la partie perdante dans le présent litige, les conclusions, au demeurant non chiffrées, qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en tout état de cause, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... C... et au ministre délégué chargé des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°19DA00086