Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'avis rendu le 6 avril 2018 par lequel le conseil de discipline de recours a proposé la sanction de sa mise à la retraite d'office.
Par une ordonnance n° 1808477 du 14 décembre 2018 la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande en application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 août 2019 et le 10 décembre 2020, M. C..., représenté par Me B... demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'annuler l'avis du 6 avril 2018 du conseil de discipline de recours ;
3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37, alinéas 2 à 4, de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- loi n ° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n ° 89-677 du 18 septembre 1989 modifié ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur ;
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le conseil de discipline de recours de la région Hauts-de-France saisi par M. C..., adjoint administratif principal de 1ère classe, affecté au service prévention-groupement 2 du service départemental d'incendie et de secours du Nord, de sa contestation de l'arrêté en date du 22 novembre 2017, par lequel le président du conseil d'administration de cet établissement public avait prononcé sa mise à la retraite d'office à compter du 4 janvier 2018, a proposé, par avis du 6 avril 2018, de retenir cette sanction de mise à la retraite d'office. Par ordonnance du 14 décembre 2018 la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. C... d'annulation de cet avis du 6 avril 2018. M. C... relève appel de cette ordonnance.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel par le service départemental d'incendie et de secours du Nord :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a présenté une requête d'appel exposant une critique précise de l'ordonnance du 14 décembre 2018 de la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille. Une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le service départemental d'incendie et de secours du Nord doit être écartée.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
3. Aux termes de l'article 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " .... Les présidents de formation de jugement de tribunal administratif, peuvent, par ordonnance ...rejeter les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé... ".
4. La demande de M. C... faisait état de ce que la sanction était disproportionnée au regard de ses difficultés psychologiques et physiques, d'une faute de son administration et de harcèlement moral. Par une ordonnance du 14 décembre 2018, la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code précité, a rejeté cette requête au motif que " les moyens énoncés par M. C... n'étaient pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ". Toutefois la demande de première instance comportait des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. L'irrégularité ainsi commise au regard des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code précité, qu'il appartient à la cour de soulever d'office, entache la régularité de l'ordonnance attaquée qui doit être annulée.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Lille.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'avis du conseil de discipline de recours et de réintégration:
6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.
7. Le service départemental d'incendie et de secours du Nord, reproche à M.C..., sapeur-pompier professionnel de 2ème classe, d'avoir, depuis le mois de mai 2016, envoyé de nombreux messages électroniques contenant des propos diffamatoires, des allusions insultantes, voire obscènes à l'égard de sa supérieure hiérarchique directe ainsi que des propos menaçants et agressifs. Ces messages ont été adressés à des agents du service mais aussi à des personnes extérieures, et notamment à des membres du personnel médical du centre hospitalier de Lille.
8. M. C... évoque en premier lieu une situation de harcèlement dont il aurait fait l'objet qui l'aurait amené à adopter le comportement qui lui est reproché. Toutefois, il n'apporte aucune précision et le harcèlement ainsi évoqué ne résulte nullement des pièces du dossier. Par suite, ce moyen doit être rejeté.
9. M. C... ne conteste pas, ensuite, la matérialité des faits reprochés. Il se prévaut de l'état satisfaisant de ses services antérieurs, relève qu'il s'est excusé pour ses propos déplacés et que ces faits résultent de la dégradation de son état de santé et de sa détresse qui sont la conséquence d'un accident de la route du 17 février 2003, reconnu comme accident de service, l'ayant amené à changer de fonctions et à subir plusieurs arrêts de travail, avec plusieurs tentatives de suicide et une dépression évoluant depuis plusieurs années.
10. Mais il ressort des pièces du dossier que le comportement de M. C... est récurrent, puisqu'il a fait l'objet de dépôt de plaintes auprès du procureur de la République de Lille pour des propos injurieux ou des menaces commis en 2014 et 2015. Le service départemental d'incendie et de secours du Nord a sollicité un psychiatre agréé pour l'examiner. Ce psychiatre a estimé, le 6 juin 2017, que l'état de santé de M. C... n'altérerait pas son aptitude à exercer ses fonctions et il n'a pas considéré qu'il devait être placé d'office en congé de longue maladie. Ainsi, si les troubles psychologiques dont souffre M. C... sont établis par un rapport médical du centre hospitalier régional de Lille du 6 mars 2020, dont il produit la première page traitant de ses antécédents, cet état de santé n'est pas de nature à faire obstacle à ce qu'il soit regardé comme responsable de ses actes ni à ce que, par suite, une sanction disciplinaire puisse légalement être prise contre lui à raison des fautes qu'il a commises. Les faits qui lui sont reprochés, exposés au point 7, sont incompatibles avec l'exercice des missions de l'intéressé et portent atteinte au bon fonctionnement du service. Ils sont constitutifs d'une faute susceptible de donner lieu à une sanction disciplinaire.
11. Alors même que les états de service de M. C..., antérieurs à ces faits ne lui étaient pas défavorables et que l'intéressé s'est excusé, dans les circonstances de l'espèce, la sanction de mise à la retraite d'office proposée par le conseil de discipline de recours de la région Hauts-de-France n'est pas disproportionnée eu égard à la gravité des fautes commises.
12. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'avis rendu le 6 avril 2018 par le conseil de discipline de recours proposant la sanction de sa mise à la retraite d'office.
Sur les frais liés à l'instance :
13. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. C... doivent dès lors être rejetées.
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours du Nord et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 14 décembre 2018 de la présidente de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lille est annulée.
Article 2 : La demande de première instance de M. C..., et les conclusions de celui-ci et de son conseil devant la cour sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions du service départemental d'incendie et de secours du Nord tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour M. D... C... et à Me A... pour le service départemental d'incendie et de secours du Nord.
2
N° 19DA01953