Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) France Métal Structure a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2010.
Par un jugement n° 1605860 du 26 octobre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2018 et rectifiée le 27 décembre 2018, et par un mémoire, enregistré le 19 août 2019, la SAS France Métal Structure, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS France Métal Structure, dont le siège est situé à Blendecques (Pas-de-Calais), a été assujettie, au titre de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2010, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration estimant que cette société, qui exerce une activité de fabrication d'éléments métalliques destinés à être utilisés en industrie, avait omis de déclarer une partie du chiffre d'affaires réalisé par elle au cours de la période rectifiée et qu'elle avait déduit par anticipation la taxe sur la valeur ajoutée portée sur des factures de prestations de services non payées par elle au 31 juillet 2010. Ces rappels, d'un montant de 802 090 euros, ont été assortis de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, pour un montant de 320 836 euros. La SAS France Métal Structure ayant contesté vainement le bien-fondé de cette majoration, elle a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille. Elle relève appel du jugement du 26 octobre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En vertu de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la proposition de rectification que l'administration adresse au contribuable doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. En outre, l'article L. 80 D du même livre impose à l'administration d'énoncer, dans les motifs des décisions infligeant une sanction à un contribuable, les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette sanction et de mettre le contribuable à même de présenter d'utiles observations avant la mise en recouvrement de celle-ci.
3. Il ressort des termes mêmes de la proposition de rectification adressée le 26 juillet 2011 à la SAS France Métal Structure, à l'issue de la proposition de rectification dont elle a fait l'objet, que ce document mentionne les impositions, ainsi que les années et périodes concernées, et énonce, après avoir exposé la nature des rectifications que l'administration se proposait d'apporter aux bases déclarées par la SAS France Métal Structure, les motifs de droit et de fait sur lesquels l'administration a fondé ces rectifications. Cette proposition de rectification expose notamment les raisons pour lesquelles le service a estimé que la SAS France Métal Structure avait minoré les chiffres d'affaires portés sur ses déclarations périodiques de taxe sur la valeur ajoutée au regard de ceux effectivement réalisés par elle au cours de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2010, et celles sur lesquelles le service a fondé son analyse selon laquelle la SAS France Métal Structure avait procédé à des déductions prématurées de taxe sur la valeur ajoutée au cours de la même période. Enfin, ce document comporte également la mention des motifs, de droit et de fait, sur lesquels l'administration s'est fondée pour assortir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de ces chefs de rectification de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a la nature d'une sanction fiscale au sens de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales. Cette proposition de rectification, qui a imparti à la SAS France Métal Structure un délai de trente jours pour présenter des observations, tant sur ces rappels que sur cette sanction, a ainsi mis à même cette société de contester ces éléments. Par suite, le moyen tiré par la SAS France Métal Structure de ce que la majoration pour manquement délibéré lui aurait été infligée à l'issue d'une procédure d'imposition irrégulière, en raison d'une insuffisante motivation de la proposition de rectification mettant à sa charge ces rappels et cette sanction, doit être écarté.
Sur le bien-fondé de la majoration pour manquement délibéré :
4. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée collectée :
5. Pour assortir les rappels de taxe sur la valeur ajoutée de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré par les dispositions, citées au point 4, du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a estimé que la SAS France Métal Structure avait minoré le chiffre d'affaires qu'elle avait porté sur les déclarations périodiques de taxe sur la valeur ajoutée souscrites par elle au titre de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2010, par rapport à celui qu'elle avait effectivement réalisé. Il résulte de l'instruction et, notamment, de la proposition de rectification adressée à cette société le 26 juillet 2011, que, pour parvenir à cette conclusion, l'administration a retenu que la SAS France Métal Structure exerçait, en réalité, deux activités distinctes, l'une consistant à produire des pièces métalliques destinées à être utilisées, dans le cadre de leur activité industrielle, par trois des sociétés du groupe auquel la SAS France Métal Structure appartient, l'autre consistant à fabriquer des éléments de structures métalliques destinées à être livrées et assemblées par elle chez d'autres clients extérieurs au groupe. L'administration en a déduit que, d'une part, la vente, aux autres entités du groupe, de pièces métalliques destinées à être utilisées pour les besoins de leur activité industrielle devait, en ce qui concerne l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée, suivre le régime des ventes de biens, prévu au a. du 2. de l'article 269 du code général des impôts, la taxe étant exigible à la livraison de ces biens, tandis que la vente, à d'autres clients, d'éléments de structures ayant vocation à être montées, notamment avec le concours de personnels de la SAS France Métal Structure, dans les locaux de ces clients, devait suivre le régime applicable aux prestations de services ou encore aux travaux immobiliers, prévu au c. du 2. de l'article 269 du code général des impôts, dans le cadre duquel la taxe sur la valeur ajoutée est exigible lors de l'encaissement des acomptes ou autres éléments de prix ou de rémunération. Le vérificateur a cependant constaté que la SAS France Métal Structure, qui n'avait pas opté pour le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur les débits, n'avait, au cours de la période vérifiée, porté sur ses déclarations la taxe collectée à l'occasion de la vente, à d'autres sociétés du groupe auquel elle appartient, de pièces métalliques destinées à être utilisées dans le cadre de leur activité industrielle, qu'au moment de l'encaissement des acomptes ou du paiements des factures correspondantes.
6. Dans ces conditions, pour justifier que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de cette analyse soient assortis de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré par les dispositions, citées au point 4, du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu que la SAS France Métal Structure avait, de façon répétée, minoré, au cours de la période vérifiée, le chiffre d'affaires taxable porté sur ses déclarations périodiques, la part omise s'avérant importante, tant en valeur absolue qu'en valeur relative, ce qui lui avait permis aussi de minorer la taxe sur la valeur ajoutée déclarée sur ses ventes. L'administration a ajouté à ce constat que, si, comme l'avait soutenu la SAS France Métal Structure, cette minoration résultait d'une erreur, le rapprochement usuel des sommes ainsi déclarées avec les montants figurant sur les bilans de clôture, de même que l'importance du montant de dette de taxe sur la valeur ajoutée figurant au passif de ces bilans, étaient de nature à lui permettre d'identifier cette erreur et de la corriger, ce qui n'a pas été le cas.
7. La SAS France Métal Structure, qui ne conteste pas le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge, conteste avoir eu l'intention d'éluder l'impôt et soutient avoir estimé de bonne foi que les ventes de pièces métalliques qu'elle a effectuées, durant la période vérifiée, à des sociétés membres du groupe auquel elle appartient, devaient, pour la mise en oeuvre des règles en matière de taxe sur la valeur ajoutée, être prises en compte selon les mêmes modalités que les prestations qu'elle a facturées à des entreprises extérieures au groupe, lesquelles prestations ne constituent d'ailleurs pas, à ses yeux, des travaux immobiliers, mais ont une nature qui n'est pas fondamentalement différente. Elle ajoute qu'elle a ainsi pu, de bonne foi, ne pas tenir compte de la facturation de ses prestations, mais des encaissements, pour déterminer la date à laquelle la taxe qu'elle a mentionnée sur l'ensemble de ses factures était exigible.
8. Toutefois, ainsi que l'a fait valoir l'administration, sans être sérieusement contredite, dans la réponse qu'elle a apportée aux observations formulées par la SAS France Métal Structure, les structures métalliques livrées et assemblées dans les locaux de celles de ses clientes qui ne sont pas membres du groupe auquel elle appartient, forment un ensemble de taille importante et fixé à perpétuelle demeure ou qui, à tout le moins, ne peut être démonté sans porter atteinte à la structure ou aux fondations de ces locaux, ce qui caractérise la réalisation de travaux immobiliers. En revanche, l'administration a estimé que les pièces métalliques livrées à d'autres entités du groupe auquel elle appartient avaient vocation à être utilisées par celles-ci dès leur livraison dans le cadre de leur activité industrielle et revêtaient, dès lors, une nature différente, ce que la SAS France Métal Structure ne conteste pas sérieusement, de sorte que la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures correspondantes était exigible dès leur livraison. En outre, l'administration a fait valoir, sans être davantage contredite, que la SAS France Métal Structure avait systématiquement mentionné, sur ses factures, que la taxe sur la valeur ajoutée était acquittée par elle sur les encaissements, ce qui révèle qu'elle avait délibérément adopté ce mode de comptabilisation pour l'ensemble de ses opérations. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée, par les justifications qu'elle avance, comme établissant l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a été celle de la SAS France Métal Structure en pratiquant, dans le contexte dans lequel l'ensemble des factures concernées ont été émises à l'égard de sociétés membres du même groupe, des minorations récurrentes de chiffre d'affaires dans ses déclarations.
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible :
9. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SAS France Métal Structure a fait l'objet, le vérificateur a constaté que cette société avait porté en déduction, au cours de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2010, la taxe sur la valeur ajoutée grevant des factures portant sur des prestations de services, alors même qu'elle n'avait pas encore payé ces factures, de sorte que la taxe n'était, au regard de la règle, rappelée au point 5, prévue au c. du 2. de l'article 269 du code général des impôts, pas exigible chez le fournisseur, ce qui, en vertu du 2. du I. de l'article 271 de ce code, faisait obstacle à cette déduction. Au vu de ce constat, l'administration a rappelé la taxe indûment déduite et, estimant que cette déduction anticipée procédait d'un manquement délibéré, a assorti ce rappel de la majoration de 40 % prévue par les dispositions, citées au point 4, du a. de l'article 1729 du code général des impôts.
10. Pour justifier l'application de cette majoration au rappel portant sur la taxe sur la valeur ajoutée prématurément déduite, l'administration a fait valoir, dans la proposition de rectification adressée le 26 juillet 2011 à la SAS France Métal Structure, que la plupart des factures de prestations de services sur la base desquelles cette société avait effectué ces déductions anticipées avait été émise par une société membre du groupe auquel appartient la SAS France Métal Structure. L'administration a fait valoir, en outre, que les liens existant entre ces deux sociétés sont renforcés par l'identité du dirigeant, de même que par le fait que celui-ci est également l'associé majoritaire de ces deux sociétés. L'administration a, dans ce contexte, relevé, à la faveur d'une vérification de comptabilité de cette société soeur, que les factures délivrées par cette dernière n'avaient donné lieu, de la part de celle-ci, à aucune déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée, tandis que la taxe qui y était mentionnée était déduite, au moins pour partie, dès la réception de ces factures, par la SAS France Métal Structure, en faisant observer que la tenue de la comptabilité de ces deux sociétés avait été confiée au même cabinet d'expertise comptable, qui était réputé, de même, de par son expérience, que le dirigeant des deux sociétés, ne pas ignorer les règles d'exigibilité et de déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée applicables aux opérations portant sur des prestations de services. Enfin, l'administration a retenu que la SAS France Métal Structure avait déjà été informée de l'illicéité de cette pratique de déduction anticipée à l'occasion d'un précédent contrôle, portant sur la période allant du 1er janvier 2005 au 29 février 2008, à l'issue duquel elle avait d'ailleurs régularisé sa situation en matière de taxe sur la valeur ajoutée le 13 janvier 2009.
11. Les éléments ainsi avancés par le ministre, et qui ne font pas l'objet d'une contestation sérieuse de la part de la SAS France Métal Structure, sont de nature à établir l'intention délibérée d'éluder l'impôt qui a animé cette société et à justifier l'application à ce rappel de taxe sur la valeur ajoutée de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Cette majoration ne constitue pas une sanction disproportionnée au regard de la gravité de la méconnaissance réitérée de règles, en matière de déduction de taxe sur la valeur ajoutée, commise, en tout connaissance de cause, par cette société, alors même que la dette fiscale de la SAS France Métal Structure a vocation à être prise en compte dans le cadre de la procédure collective dont elle fait l'objet, ainsi que dans le plan arrêté par le comité consultatif du secteur financier. La SAS France Métal Structure ne peut, à cet égard, utilement soutenir qu'elle a payé la majoration en litige et qu'elle est parvenue jusqu'alors à honorer les échéances qui lui ont été fixées dans le cadre de cette procédure collective et de ce plan, dès lors que l'intention délibérée d'éluder l'impôt s'apprécie aux dates auxquelles les déductions ont été opérées. Elle ne peut davantage tirer argument du fait qu'elle ne s'est pas vu proposer une transaction par l'administration, quand bien même une telle issue de règlement amiable serait préconisée par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, opposable à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, alors même qu'une société soeur aurait bénéficié d'une telle proposition dans le cadre d'un différend qui aurait porté sur une question similaire. La SAS France Métal Structure n'est pas fondée à invoquer, sur ce point, le principe de sécurité juridique, qui ne fait pas obstacle à ce que deux sociétés, fussent-elles membres d'un même groupe, se voient assigner, à l'issue d'un contrôle portant sur des opérations qui leur sont propres, un sort fiscal différent.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS France Métal Structure n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS France Métal Structure est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS France Métal Structure et au ministre délégué chargé des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°18DA02631