Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme G... E... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.
Par un jugement n° 1602294 du 11 septembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 novembre et 6 décembre 2018 et les 24 janvier et 10 mars 2020, M. et Mme D... E..., représentés par la SELARL Cabinet Benayoun Associés, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... C..., première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. et Mme D... E....
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la vérification de la comptabilité de la SAS Immopro 60 dont Mme D... E... est la présidente et unique associée, l'administration a estimé qu'une somme de 159 906 euros, qu'elle a regardée comme distribuée par cette société à Mme D... E... en application des dispositions du a) de l'article 111 du code général des impôts, devait être réintégrée dans le revenu imposable de M. et Mme D... E... au titre de l'année 2013, dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers. Les rectifications envisagées, portées à la connaissance de M. et Mme D... E... par une proposition de rectification du 27 juin 2013, n'ont alors pas été contestées par les contribuables. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de prélèvements sociaux auxquelles M. et Mme D... E... ont, ainsi, été assujettis au titre de l'année 2013, assorties en particulier de la majoration de 80 % pour manoeuvre frauduleuse prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, ont été mises en recouvrement le 31 janvier 2016. M. et Mme D... E... relèvent appel du jugement du 11 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités correspondantes.
2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. (...) ".
3. D'une part, en application de ces dispositions, doit en principe être regardée comme un revenu distribué l'augmentation, constatée sur une année civile, des soldes débiteurs du compte courant ouvert, dans les écritures d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés, au nom de l'un de ses associés.
4. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ".
5. Il résulte de l'instruction que, par une écriture d'opérations diverses passée le 31 décembre 2013, la SAS Immopro 60 a porté au crédit du compte courant de Mme D... E... la somme de 160 000 euros, en contrepartie du débit du compte de groupe de la société FCE. L'administration a écarté, comme dépourvue de justifications, cette écriture, qui avait eu pour effet de rendre créditeur le compte courant d'associé de Mme D... E.... Estimant, en conséquence, que ce compte présentait en réalité, à la date du 31 décembre 2013, un solde débiteur de 159 906 euros, l'administration a considéré que cette dernière somme devait être regardée comme une avance consentie par la SAS Immopro 60 à Mme D... E..., constitutive de distributions au sens des dispositions du a) de l'article 111 du code général des impôts, et imposable entre ses mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
6. M. et Mme D... E..., qui se sont abstenus de répondre à la proposition de rectification du 29 juillet 2015, supportent, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge d'établir le caractère exagéré des impositions contestées. A cet effet, ils soutiennent que l'inscription de la somme de 160 000 euros au crédit du compte courant d'associé de Mme D... E... avait pour contrepartie le rachat, par cette dernière, d'une créance détenue par la SAS Immopro 60 sur la société FCE à la suite d'une avance de trésorerie qui, destinée à permettre le versement de la rémunération, d'un montant de 155 000 euros, due par la société FCE à l'époux de Mme D... E..., avait pris la forme de prélèvements opérés par l'intéressée sur son compte courant d'associé.
7. Toutefois, l'opération ainsi alléguée, génératrice d'une dette de M. D... E... envers la SAS Immopro 60 et de l'extinction d'une créance de la SAS Immopro 60 envers la société FCE, ne permet de justifier ni l'inscription de la somme de 160 000 euros au crédit du compte courant d'associé de M. D... E..., ni la constatation en comptabilité d'une dette de la société FCE envers la SAS Immopro 60. Si les requérants invoquent, sur ce dernier point, une erreur comptable, ils ne précisent pas en quoi celle-ci justifierait l'inscription de la somme de 160 000 euros au crédit du compte courant d'associé de Mme D... E.... Par ailleurs, d'une part, les requérants ne fournissent aucun justificatif du versement à M. D... E... de la somme de 155 000 euros à partir d'un compte bancaire de la SAS Immopro 60 et, d'autre part, l'intitulé comptable des prélèvements opérés sur le compte courant d'associé de Mme D... E... durant l'année 2013 ne permet pas d'identifier ceux qui auraient été utilisés pour le versement de la rémunération de son époux. En outre, à supposer même que M. et Mme D... E... aient, en réalité, entendu se prévaloir du rachat par la SAS Immopro 60 d'une créance détenue par Mme D... E... sur la société FCE, à la suite du paiement de la rémunération due par cette société à son époux, au moyen de prélèvements opérés sur son compte courant d'associé, ce qui serait cohérent tant avec l'inscription de la même somme au crédit de ce compte courant d'associé qu'avec l'enregistrement à l'actif de la SAS Immopro 60 d'une créance de même montant détenue sur la société FCE, ils ne contestent pas qu'aucune des formalités prévues par les dispositions de l'article 1690 du code civil, en cas de transfert de créance, n'a été accomplie, ni n'établissent la réalité d'un tel transfert par la simple référence aux écritures comptables de la SAS Immopro 60.
8. Dans les conditions analysées au point précédent, il n'est pas davantage établi que la somme de 159 906 euros réintégrée par l'administration dans le revenu imposable des requérants au titre de l'année 2013 correspondrait, à hauteur de 155 000 euros, au revenu déclaré au titre de la même année par M. D... E..., dans la catégorie des traitements et salaires, et, ainsi, aurait été soumise à une double imposition.
9. Enfin, en se bornant à faire valoir que la somme portée, le 31 décembre 2013, au crédit du compte courant d'associé de Mme D... E... dans les écritures de la SAS Immopro 60 était justifiée à hauteur de 155 000 euros, les requérants ne contestent pas utilement, à hauteur de 4 906 euros, la réintégration de la somme de 159 906 euros dans leur revenu imposable au titre de l'année 2013.
10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration en défense, que M. et Mme D... E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. et Mme D... E... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D... E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme G... E... et au ministre délégué chargé des comptes publics.
Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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No18DA02288