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12/01/2021 | FRANCE | N°19DA00205

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 12 janvier 2021, 19DA00205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le titre de perception d'un montant de 2 434 euros émis le 3 mars 2016 par la direction régionale des finances publiques de Normandie et du département de la Seine-Maritime, ensemble la décision implicite qui a rejeté son opposition formée par courrier du 21 mars 2016.

Par un jugement n°1603682 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requê

te, enregistré le 23 janvier 2019, Mme F..., représentée par Me E... D..., demande à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... F... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le titre de perception d'un montant de 2 434 euros émis le 3 mars 2016 par la direction régionale des finances publiques de Normandie et du département de la Seine-Maritime, ensemble la décision implicite qui a rejeté son opposition formée par courrier du 21 mars 2016.

Par un jugement n°1603682 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistré le 23 janvier 2019, Mme F..., représentée par Me E... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ce titre de perception et cette décision implicite ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son bénéfice d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la consommation ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code général des impôts ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C...,

- et les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'objet du litige :

1. Mme F... relève appel du jugement du 18 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, du titre de perception d'un montant de 2 434 euros émis à son encontre le 3 mars 2016, d'autre part, de la décision implicite qui a rejeté la contestation qu'elle avait formée contre ce titre.

En ce qui concerne la motivation :

2. Un titre de perception pris pour le remboursement de l'avantage associé au bénéfice d'un prêt à taux zéro n'entre dans aucune des catégories de décisions devant être obligatoirement motivées en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

3. En revanche, un titre de perception entre dans le champ d'application des dispositions spéciales de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012, qui prévoit que " toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ".

4. D'une part, comme l'ont déjà relevé les premiers juges, le titre de perception en litige a indiqué que Mme F... avait bénéficié d'un éco-prêt à 0 % en 2012, que les documents justifiant que ses travaux avaient été réalisés conformément à la réglementation n'avaient pas été transmis et que par suite elle devait reverser l'avantage dont elle avait indûment bénéficié majoré de 25 %, soit la somme de 2 434,00 euros.

5. D'autre part, avant même le titre en litige, Mme F... avait reçu de la sous-directrice du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement du ministère du logement et de l'égalité des territoires et de la ruralité, une mise en demeure de produire les éléments justificatifs de son éco-prêt datée du 8 janvier 2015, qui visait l'article R. 319-14 du code de la construction et de l'habitation et qui indiquait précisément à l'intéressée les sommes qu'elle serait tenue de rembourser si elle ne déférait pas à cette mise en demeure.

6. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du titre de perception en litige doit être écarté.

7. Le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision implicite par laquelle la contestation par Mme F... du titre de recette a été rejetée doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit au point 2 du jugement attaqué, sur le fondement de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, qu'il convient d'adopter.

En ce qui concerne l'erreur de droit et l'erreur manifeste d'appréciation :

8. Aux termes de l'article R. 319-16 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable à la date à laquelle Mme F... a reçu son offre de prêt : " L'avance peut être accordée pour financer les travaux d'économie d'énergie, réalisés par des professionnels sur un logement situé sur le territoire national et n'ayant pas été commencés avant l'émission de l'avance (...) ".

9. Aux termes de l'article 199 ter S du code général des impôts, dans sa version applicable à la même date : " (...) II. - 1. Si, pendant la durée de remboursement de l'avance, et tant que celle-ci n'est pas intégralement remboursée, il apparaît que les conditions mentionnées au I de l'article 244 quater U fixées pour l'octroi de l'avance remboursable n'ont pas été respectées, le crédit d'impôt est reversé par l'établissement de crédit. Par exception, lorsque la justification de la réalisation ou de l'éligibilité des travaux n'est pas apportée par le bénéficiaire dans le délai prévu au 5 du même I, l'Etat exige de ce dernier le remboursement de l'avantage indûment perçu. Celui-ci ne peut excéder le montant du crédit d'impôt majoré de 25 % (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que, le 23 janvier 2012, Mme F... a accepté une offre faite par sa banque, la BNP Paribas, valable du 16 au 31 janvier 2012, portant sur un prêt à taux zéro ou éco-prêt d'un montant de 16 000 euros, destiné à financer des travaux d'isolation de sa maison située à Yvetot.

11. Cependant, il est constant que Mme F... a commencé les travaux avant même d'obtenir cette offre de prêt et que, dès lors, elle ne remplissait pas l'une des conditions nécessaires à l'obtention d'un prêt à taux zéro, dispositif régi par les articles R. 319-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation et par les articles 199 ter S et 244 quater U du code général des impôts.

12. Estimant, au vu des factures produites par Mme F... pour bénéficier du prêt, que celle-ci ne pouvait pas prétendre à un tel contrat, la BNP Paribas a refusé de décaisser les fonds. Cependant, saisi par l'intéressée, le tribunal d'instance de Paris IXème, par ordonnance de référé du 15 octobre 2012, a condamné la banque à mettre ces fonds à la disposition de Mme F.... La banque l'a fait le 9 novembre 2012 mais a obtenu en appel l'infirmation de cette ordonnance par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 15 janvier 2013 devenu définitif.

En ce qui concerne l'existence d'un contrat d'éco-prêt :

13. D'une part, aux termes de l'article L. 311-13 du code de la consommation, cité par l'offre d'éco-prêt faite à Mme F... : " Le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de sept jours. (...) ".

14. Il résulte des termes mêmes de l'offre d'éco-prêt faite par la BNP Paribas que celle-ci s'engageait à accorder un éco-prêt à Mme F... et que le contrat deviendrait " parfait dès l'acceptation de l'offre ". Or ainsi qu'il a été exposé précédemment cette offre a été acceptée le 23 janvier 2012 par l'intéressée. Celle-ci n'a par ailleurs pas fait usage de sa faculté de rétractation. Dans ces conditions, il résulte de l'article L. 311-13 du code de la consommation que le contrat d'éco-prêt est devenu parfait.

15. D'autre part, la somme de 16 000 euros a été versée ainsi qu'il a été dit et il résulte de l'instruction que les échéances de remboursement ont été ultérieurement prélevées sur le compte bancaire de Mme F... sans comprendre d'intérêts.

En ce qui concerne la résolution du contrat d'éco-prêt :

16. D'une part, n'ont été de nature à entraîner la résolution de ce contrat ni la circonstance que la BNP Paribas a dans un premier temps refusé de verser les fonds puis ne les a débloqués que sur injonction judiciaire, ni l'arrêt de la cour d'appel de Paris qui s'est borné à constater l'existence d'une " contestation sérieuse relative au déblocage des fonds " que " seuls les juges du fond peuvent apprécier si le contrat est susceptible d'avoir produit des effets ".

17. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce qu'affirme Mme F..., qu'un contrat de prêt classique ait remplacé l'éco-prêt, dès lors que si un processus transactionnel s'est engagé entre la BNP et l'intéressée, après l'arrêt de la cour d'appel, en vue de la régularisation de la situation par un prêt usuel à la consommation, il ne résulte pas des pièces du dossier que Mme F... ait signé une nouvelle offre de prêt dans le délai, expirant le 10 avril 2013, imparti par la nouvelle offre faite à l'intéressée.

18. Il résulte de ce qui précède, alors même que ses avis d'imposition n'ont mentionné aucun crédit d'impôt, que Mme F... doit être regardée comme ayant bénéficié d'un éco-prêt et qu'elle entrait donc dans le champ d'application des dispositions citées au point 9.

19. Puisque, comme il a été dit au point 11, Mme F... avait commencé les travaux avant même d'obtenir l'offre de prêt et ne peut donc pas justifier de l'éligibilité de ces travaux au prêt à taux zéro, l'Etat était fondé à lui réclamer, en vertu des dispositions citées au point 9, le remboursement de cet avantage indûment perçu, majoré de 25 %, et les moyens tirés d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ne peuvent donc qu'être rejetés.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

21. Les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par Mme F..., partie perdante, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me E... D... pour Mme A... F... et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée, pour information, au directeur régional des finances publiques de Normandie et du département de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00205
Date de la décision : 12/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

38-03-015 Logement. Aides financières au logement.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Hélène Busidan
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : KERSUAL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-01-12;19da00205 ?
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