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30/12/2020 | FRANCE | N°19DA01592

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 30 décembre 2020, 19DA01592


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 relatif au tableau d'avancement au grade de brigadier de police au titre de l'année 2016, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 63 000 euros en réparation des préjudices subis pour n'avoir pas été nommé brigadier de police en 2016 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des frais de procédure.

Par un jugement n° 1608440 du 9 mai 2019 le tribunal administratif de Lil

le a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2016 relatif au tableau d'avancement au grade de brigadier de police au titre de l'année 2016, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 63 000 euros en réparation des préjudices subis pour n'avoir pas été nommé brigadier de police en 2016 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des frais de procédure.

Par un jugement n° 1608440 du 9 mai 2019 le tribunal administratif de Lille a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 12 janvier 2016 relatif au tableau d'avancement au grade de brigadier de police au titre de 1'année 2016, a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 800 euros en réparation des préjudices subis et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juillet 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en ce qu'il a limité son préjudice à 600 euros s'agissant du préjudice matériel de carrière et 200 euros s'agissant du préjudice moral ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 8 969,40 euros en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des frais de procédure.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., gardien de la paix titulaire depuis le 1er octobre 2004, est affecté à la compagnie républicaine de sécurité de Béthune depuis le 1er septembre 2007. En 2008, il a réussi l'examen professionnel pour présenter sa candidature au grade de brigadier de police. Le tableau d'avancement au grade de brigadier de police au titre de l'année 2016, sur lequel il ne figurait pas, a été arrêté par le ministre de l'intérieur le 12 janvier 2016. Par lettre du 16 novembre 2016, reçue le 18 novembre 2016, le requérant a demandé au ministre de l'intérieur l'indemnisation des préjudices subis du fait de l'illégalité de l'arrêté du 12 janvier 2016. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le ministre sur cette demande. Il a notamment demandé au tribunal administratif de Lille la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 63 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de cet arrêté. Il relève appel du jugement du 9 mai 2019 du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a limité à la somme de 600 euros la réparation de son préjudice matériel de carrière et à la somme 200 euros la réparation de son préjudice moral.

Sur la responsabilité de l'Etat et l'évaluation des préjudices indemnisables :

En ce qui concerne l'acquiescement aux faits :

2. Aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". En application de ces dispositions, le défendeur à l'instance qui, en dépit d'une mise en demeure, n'a pas produit, est réputé avoir acquiescé aux faits exposés par le requérant dans ses écritures. Il appartient néanmoins au juge de vérifier que la situation de fait invoquée par le demandeur n'est pas contredite par les pièces du dossier.

3. Le ministre de l'intérieur n'a produit, en appel, aucun mémoire en défense avant la clôture de l'instruction, en dépit de la mise en demeure qui lui a été adressée à cette fin par la cour administrative d'appel de Douai le 2 mars 2020. Il s'ensuit que les affirmations de M. A... qui ne sont contredites par aucune pièce du dossier, et notamment par les éléments figurant dans le dossier de première instance, doivent être regardées comme établies.

En ce qui concerne l'indemnisation :

4. Le tribunal administratif de Paris a, par un jugement du 5 juillet 2018 n° 1609838, 1609839 et 1609840, devenu définitif, annulé pour erreur manifeste d'appréciation l'arrêté du ministre de l'intérieur du 12 janvier 2016 approuvant le tableau d'avancement au grade de brigadier de la police nationale au titre de l'année 2016, sur lequel le nom de M. A..., gardien de la paix, ne figurait pas.

5. Ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Lille, M. A... justifiait d'une valeur professionnelle supérieure à au moins un agent inscrit sur ce tableau d'avancement et il aurait dû, en conséquence, y être inscrit. M. A... est donc fondé à soutenir que l'illégalité du tableau d'avancement lui a fait perdre une chance sérieuse de promotion.

6. M. A..., qui était gardien de la paix au 7ème échelon de son grade, a été promu par arrêté du 6 juin 2017 au 1er échelon du grade de brigadier de police au titre de l'année 2017. D'une part, ainsi que cela a été dit au point 5, il a été privé d'une chance sérieuse d'être promu au grade de brigadier de la police nationale dès 2016, et d'atteindre ainsi un indice majoré supérieur à celui qu'il détenait dans le grade de gardien de la paix. Il justifie de ce fait d'un préjudice matériel dont il sera fait une exacte appréciation en fixant la réparation à la somme de 500 euros. D'autre part, il est également fondé à soutenir que, pour l'avenir, il subit un préjudice matériel résultant d'un retard d'avancement d'une année pour chacun des échelons de son grade, qui eut égard au caractère automatique de l'avancement d'échelon, présente un caractère suffisamment certain. Il résulte de la grille indiciaire du grade de brigadier de police que ce préjudice peut être évalué à la somme de 5 469 euros. En revanche, il n'est pas fondé à se prévaloir d'un préjudice matériel résultant d'un retard d'avancement de grade qui ne présente pas de caractère certain eu égard à l'appréciation sur les mérites respectifs des différents candidats qui le caractérise. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme totale de 5 969 euros en réparation de son préjudice matériel.

7. M. A... fait également état d'un préjudice moral résultant de l'absence de reconnaissance de sa valeur professionnelle. Toutefois c'est par une exacte appréciation des faits de l'espèce que les juges de première instance en ont fixé la réparation à la somme de 200 euros.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à demander que la somme de 800 euros mise à la charge de l'Etat par le jugement du tribunal administratif de Lille du 9 mai 2019 soit portée à la somme de 6 169 euros et à obtenir la réformation de ce jugement conformément aux motifs énoncés par le présent arrêt.

Sur les frais de justice :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais de justice exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 800 euros que l'Etat été condamné à verser à M. A... par le jugement du 9 mai 2019 est portée à 6 169 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille n° 1608440 du 9 mai 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

2

N° 19DA01592


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01592
Date de la décision : 30/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Avancement - Avancement de grade - Tableaux d'avancement.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère certain du préjudice - Absence.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP ROSSEEL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-30;19da01592 ?
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