Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner solidairement le département du Nord et la société Eiffage Route Nord-Est à lui verser une somme de 446 013,65 euros en indemnisation des préjudices subis à la suite de l'accident dont il a été victime le 14 mars 2015 alors qu'il circulait à motocyclette sur la route départementale n° 135.
La caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai a demandé au tribunal administratif de Lille la condamnation de la société Eiffage Route Nord-Est et du département du Nord à lui verser une somme de 21 272,80 euros au titre des débours résultant de la prise en charge médicale de M. A..., et ce que soit mise à la charge de la société Eiffage Route Nord-Est et du département du Nord une somme de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Par un jugement n° 1604228 du 10 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a estimé que la responsabilité du département du Nord était engagée à hauteur de 80 % des préjudices subis par M. A... et a condamné le département du Nord à lui verser une somme de 54 877,12 euros en indemnisation des préjudices subis, à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai une somme de 17 018,24 euros au titre des débours engagés ainsi qu'une somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 juillet 2019, 14 avril et 20 novembre 2020, le département du Nord, représenté par Me H... E..., demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler ce jugement et de rejeter les conclusions de première instance de M. A... et celles de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai ;
2°) à titre subsidiaire, de condamner la société Eiffage Route Nord-Est à le garantir de toute condamnation mise à sa charge ;
3°) à titre très subsidiaire, de limiter le montant de l'indemnisation due à M. A... à la somme totale de 15 478,50 euros ;
4°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code civil ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,
- et les observations de Me G... D..., représentant le département du Nord et de Me F... B..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été victime, le 14 mars 2015, d'un accident de la circulation alors qu'il circulait en motocyclette sur la route départementale n° 135 en direction de Roucourt, perdant le contrôle de son véhicule en raison de la présence sur la chaussée de boue et gravillons. Le département du Nord relève appel du jugement du 10 mai 2019 en tant qu'il l'a condamné à verser la somme de 54 877,12 euros à M. A... et la somme de 17 018,24 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai. Par la voie de l'appel incident, M. A... et la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai demandent la réformation du jugement en tant qu'il n'a que fait partiellement droit à leurs demandes indemnitaires.
Sur la recevabilité des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai tendant à l'augmentation de ses débours :
2. La caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai demande à ce que la somme de 21 272,80 euros demandée en première instance en remboursement des débours exposés pour M. A... soit portée à 50 932,03 euros. Toutefois, les débours dont il est demandé l'indemnisation étaient connus de la caisse en première instance et doivent ainsi être regardés comme une demande nouvelle en appel. Par suite, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie sont irrecevables dans cette mesure.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit de l'entretien normal de l'ouvrage, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.
4. Pour retenir la responsabilité du département du Nord à l'égard de M. A..., les premiers juges ont considéré que le département n'établissait pas l'entretien normal du domaine public routier par la seule production d'un " carnet de patrouille " établi deux jours avant l'accident par les services de la voirie routière. Il résulte toutefois de l'instruction que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges et à ce que soutiennent M. A... et la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai, la seule circonstance que ce carnet de patrouille, sur lesquels sont relevés les obstacles rencontrés, ne fasse état d'aucun obstacle sur le lieu de l'accident deux jours auparavant n'est pas de nature à établir que les services départementaux n'auraient pas vérifié l'état de la route départementale à cet endroit au cours de leur patrouille. En outre, il n'est pas établi que le département du Nord aurait été averti de la présence de cette boue et de gravillons sur la chaussée postérieurement au passage de la patrouille et avant l'accident litigieux. Dans ces conditions, le département du Nord doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de la chaussée.
5. Il résulte de ce qui précède que le département du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a jugé que sa responsabilité était engagée à l'égard de M. A... et l'a indemnisé ainsi que de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai.
6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A..., la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai et la société Eiffage Route Nord-Est devant le tribunal administratif de Lille et devant la cour.
Sur la responsabilité de la société Eiffage Route Nord-Est :
7. D'une part, lorsqu'une victime subit des dommages du fait de l'exécution de travaux publics entrepris pour le compte d'une collectivité publique, elle est en droit de réclamer la réparation de ces dommages soit à la collectivité maître d'ouvrage, soit à l'entrepreneur qui a été chargé des travaux par cette collectivité.
8. D'autre part, dans une telle hypothèse, le maître de l'ouvrage ou l'entrepreneur est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel.
9. Il résulte de l'instruction, et notamment des attestations de cinq témoins, dont un témoin oculaire, et du constat amiable signé avec le propriétaire du véhicule dans lequel la motocyclette de M. A... est venue s'encastrer, que ce dernier a chuté dans un virage, le 14 mars 2015, alors qu'il circulait à motocyclette sur la route départementale n° 135 en direction de Roucourt, en raison de la présence de boue et de gravillons sur la chaussée. Par suite, M. A... doit, contrairement à ce que la société Eiffage Route Nord-Est fait valoir, être regardé comme établissant tant la matérialité de sa chute que le lien de causalité entre la présence de boue et de gravillons sur la route départementale n° 135 et celle-ci.
10. Il résulte de l'instruction, et notamment de deux attestations en date du 25 mars 2015 et du 27 mars 2015 ainsi que du constat amiable et des photographies produites par la société Eiffage Route Nord-Est elle-même, que la boue et les gravillons à l'origine de la chute de M. A... provenaient des travaux qu'elle réalisait à proximité immédiate de cette route, au droit du virage lieu de l'accident. Il est constant que ces travaux, réalisés à la demande de l'association foncière rurale de Cantin, établissement public administratif, ont le caractère de travaux publics. La chute de M. A... est ainsi imputable à des travaux publics exécutés sur un ouvrage public qui n'est pas incorporé à la partie du domaine public aménagé en vue de la circulation et qui ne constitue pas une dépendance nécessaire de la voie. Par suite, M. A... avait la qualité de tiers et non d'usager de l'ouvrage public sur lequel la société Eiffage Route Nord-Est effectuait des travaux publics.
11. La présence de gravillons et de boue sur la route départementale, imputable aux travaux réalisés par la société Eiffage Route Nord-Est et à l'origine directe de la chute de M. A..., tiers par rapport à ces travaux, est de nature à engager la responsabilité sans faute de la société Eiffage Route Nord-Est à son égard. La circonstance, à la supposer établie, que le dommage soit également pour partie imputable au fait de tiers, en l'espèce les engins agricoles circulant sur cette route départementale qui ont pu contribuer à la présence de gravillons et de boue, n'est pas de nature à atténuer la responsabilité encourue par la société qui peut seulement, si elle s'y croit fondée, exercer devant les juridictions compétentes tels recours que de droit contre les tiers responsables du fait qu'elle invoque. Enfin, le département du Nord ayant, ainsi qu'il a été dit, normalement entretenu le domaine public routier, aucune faute ne peut être retenue à son encontre, de sorte que, en tout état de cause, les conclusions d'appel en garantie dirigées contre lui par la société Eiffage Route Nord-Est ne peuvent qu'être rejetées.
Sur la faute de la victime :
12. Il résulte de l'instruction que si M. A... circulait en respectant la limitation de vitesse, il résidait à proximité immédiate du lieu de l'accident dont il avait une parfaite connaissance de la configuration. Par ailleurs, s'il est constant que le panneau installé à proximité du chantier, dans le sens de circulation de M. A..., indiquait seulement un rétrécissement de la chaussée et ne faisait pas état d'un risque de présence de gravillons sur la route, cette signalisation, bien que partiellement inadaptée, devait conduire M. A..., eu égard au devoir de prudence et à l'obligation de maîtrise de son véhicule qui s'imposent à tout conducteur, à faire preuve d'un surcroît de vigilance à l'approche du virage dans lequel les travaux conduits par la société Eiffage Route Nord-Est étaient parfaitement visibles, matérialisés notamment par la présence d'engins de chantier de grande taille. Enfin, il résulte du rapport d'expertise de la motocyclette de M. A..., réalisée par son assureur le 18 mars 2015, soit quatre jours après l'accident, que le pneu de la roue avant présentait un taux d'usure de 50 % et celui de la roue arrière un taux d'usure de 80 %. Dès lors, en ne prenant pas toutes les précautions nécessaires afin de se prémunir du risque de chute et en prenant le risque de circuler avec des pneus présentant un tel taux d'usure, qui entraîne nécessairement une forte perte d'adhérence, M. A... a commis une faute de nature à exonérer partiellement la société Eiffage Route Nord-Est de sa responsabilité. Dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de la part de responsabilité lui incombant en la fixant à 50 % des conséquences dommageables de l'accident du 14 mars 2015.
Sur les préjudices subis par M. A... :
13. Le respect du caractère contradictoire de la procédure d'expertise implique que les parties soient mises à même de discuter devant l'expert des éléments de nature à exercer une influence sur la réponse aux questions posées par la juridiction saisie du litige. Lorsqu'une expertise est entachée d'une méconnaissance de ce principe ou lorsqu'elle a été ordonnée dans le cadre d'un litige distinct, ses éléments peuvent néanmoins, s'ils sont soumis au débat contradictoire en cours d'instance, être régulièrement pris en compte par le juge, soit lorsqu'ils ont le caractère d'éléments de pur fait non contestés par les parties, soit à titre d'éléments d'information dès lors qu'ils sont corroborés par d'autres éléments du dossier. Il résulte de ces principes que la circonstance que la société Eiffage Route Nord-Est n'ait pas été appelée aux missions d'expertise réalisées le 29 septembre 2015 par le docteur Claisse, sollicité par l'assureur de M. A..., et le 31 juillet 2018 par le docteur Dalle, sollicité par M. A..., n'implique pas, par elle-même, que ces rapports, auxquels elle a pu répondre, soient écartés des débats.
14. Il résulte de l'instruction que la date de consolidation de l'état de santé de M. A... peut être fixée au 1er mars 2018.
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant de l'assistance par tierce personne :
15. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment des deux rapports d'expertise produits, que M. A... aurait eu besoin de l'assistance d'une tierce personne pour les actes de la vie courante avant la date de consolidation de son état de santé ni, en tout état de cause, qu'une telle aide lui aurait été effectivement apportée. Par suite, M. A..., en se bornant à soutenir que son état de santé nécessitait une assistance temporaire par une tierce personne de deux heures par jour, n'apporte aucun élément permettant d'établir la réalité du préjudice subi à ce titre.
S'agissant de la perte de gains professionnels actuels :
16. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'avis d'imposition de l'année 2015, que les revenus annuels moyens de M. A... s'élevaient à 19 095 euros soit 52,31 euros par jour. Les indemnités journalières, versées du 16 mars 2015 au 28 février 2018, se sont élevées à la somme de 37 009,74 euros, soit en moyenne à 34,24 euros par jour, soit une différence de revenus journalière de 18,07 euros, de sorte que, entre la date de l'accident et la date de consolidation, une perte de revenus de 19 533,67 euros est établie. Le préjudice subi au titre de la perte de revenus antérieure à la consolidation s'élève ainsi à la somme totale de 56 543,41 euros. La société Eiffage Route Nord-Est, est redevable, après application du coefficient de 50 %, d'une somme de 28 271,70 euros. En application du principe de priorité de la victime, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 19 533,67 euros, le solde, d'un montant de 8 738,03 euros, étant alloué à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai, dans les conditions définies au point 24.
17. S'agissant de la période postérieure à la consolidation, il résulte de l'instruction que l'état de santé de M. A... résultant de l'accident litigieux a conduit à son licenciement le 27 juin 2018, pour inaptitude totale et définitive à son poste de travail sans possibilité de reclassement au sein de l'entreprise. Les indemnités journalières versées se sont élevées, entre la consolidation et le licenciement, à la somme de 3 367,16 euros, alors que M. A... aurait dû percevoir, sur la même période, un revenu de 5 387 euros. Le préjudice subi s'élève donc à la somme de 2 020,76 euros. Par suite, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 1 010,38 euros après application du taux retenu précédemment.
S'agissant du préjudice matériel :
18. M. A... invoque un préjudice matériel lié à la remise en état de sa motocyclette à hauteur de 1 374,67 euros. Il produit un rapport d'expertise, établi pour le compte de son assureur le 18 mars 2015, faisant état d'un coût de réparation de la motocyclette s'élevant à 2 003,97 euros. Par suite, les premiers juges ont fait une juste appréciation du montant de ce préjudice en l'évaluant, sur le fondement des conclusions de M. A..., et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait déjà été indemnisé de ce chef de préjudice, à la somme de 1 374,67 euros. Il y a par suite lieu de lui allouer à ce titre, après application du taux de 50 %, une somme de 687,34 euros.
S'agissant de la perte de gains professionnels futurs :
19. Il résulte de l'instruction que si, ainsi qu'il a été dit, M. A... a été licencié le 27 juin 2018 pour inaptitude totale et définitive à son poste de travail et a été déclaré inapte par le médecin à occuper tout poste nécessitant le port de charges lourdes et des mouvements répétitifs du membre supérieur droit, l'intéressé n'établit pas être inapte définitivement à toute activité professionnelle, ainsi que le relève notamment le rapport d'expertise en date du 31 juillet 2018. Par suite, M. A... n'est pas fondé à demander le versement d'une somme au titre de ce chef de préjudice.
S'agissant de l'incidence professionnelle :
20. En revanche, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise en date du 31 juillet 2018, que l'accident dont il a été victime a eu un retentissement certain sur son activité professionnelle en raison de l'impossibilité d'exercer à nouveau sa profession de chauffeur-routier. Il est constant que pour M. A..., âgé de quarante ans à la date de consolidation de son état de santé, la nécessité d'une reconversion professionnelle entraîne une dévalorisation sur le marché du travail. Les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 25 000 euros. Par suite, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 12 500 euros après application du taux retenu précédemment.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
S'agissant du déficit fonctionnel temporaire :
21. Il résulte du rapport d'expertise en date du 31 juillet 2018 que M. A... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel à hauteur de 75 % du 14 mars 2015 au 28 mai 2015, puis à hauteur de 50 % du 29 mai 2015 au 19 octobre 2016, puis total du 20 au 25 octobre 2016, puis à hauteur de 75 % du 26 octobre 2016 au 26 novembre 2016, puis à hauteur de 50 % du 27 novembre 2016 au 27 janvier 2017, puis à hauteur de 25 % du 28 janvier 2017 au 18 octobre 2017, enfin, à hauteur de 10 % du 19 octobre 2017 au 1er mars 2018, date de la consolidation de son état de santé. Il y a lieu, dans ces conditions, de confirmer la somme de 5 898,45 euros allouée par les premiers juges à ce titre. Compte tenu du taux retenu précédemment, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 2 949,23 euros.
S'agissant du préjudice esthétique temporaire :
22. M. A... a subi un préjudice esthétique permanent qui a été évalué à 1,5 sur une échelle de 7, en raison d'une cicatrice sous-axillaire droite et une cicatrice latéro-dorsale de quinze centimètres. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 1 335 euros. Compte tenu du taux retenu précédemment, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 667,50 euros.
S'agissant des souffrances endurées :
23. Les douleurs éprouvées par M. A... ont été estimées par le rapport d'expertise du 31 juillet 2018 à 3,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 5 500 euros. Compte tenu du taux retenu précédemment, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 2 750 euros.
S'agissant du déficit fonctionnel permanent :
24. Il ressort du rapport d'expertise du 31 juillet 2018 que M. A... conserve, depuis la consolidation de son état de santé intervenue le 1er mars 2018, un déficit fonctionnel permanent de 6 %. M. A... étant âgé de quarante ans à la date de consolidation de son état de santé, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 6 736 euros. Compte tenu du taux retenu précédemment, il y a lieu d'allouer à M. A... la somme de 3 368 euros.
S'agissant du préjudice d'agrément :
25. M. A... demande une somme de 10 000 euros en indemnisation du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de pratiquer ses activités de moto et de jardinage. Cependant, M. A... n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ce préjudice, qui ne peut par suite être regardé comme établi.
26. Il résulte de ce qui précède que la société Eiffage Route Nord-Est doit être condamnée à verser à M. A... la somme de 43 466,12 euros.
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie :
27. La caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai demande le remboursement des frais afférents aux hospitalisations, frais médicaux et indemnités journalières, pour le montant de 8 738,03 euros évoqué au point 13, s'élevant à la somme de 21 272,80 euros à la suite de l'accident dont M. A... a été victime. Dans ces conditions, et compte tenu du partage de responsabilité défini au point 8, il y a lieu de condamner la société Eiffage Route Nord-Est à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai une somme de 10 636,40 euros. Cette somme portera intérêt à compter du 8 août 2016. La capitalisation des intérêts a été demandée le 20 février 2020. A cette date, il était dû au moins une année d'intérêts. Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts, à compter du 20 février 2020, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :
28. Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) ". Aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour 2020 : " Les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 108 € et à 1 091 € au titre des remboursements effectués au cours de l'année 2020 ".
29. En application de ces dispositions, il y a lieu d'allouer à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Sur l'appel en garantie formé par le département du Nord :
30. En l'absence de condamnation à son encontre, l'appel en garantie du département du Nord est sans objet. Par suite, l'appel en garantie présenté par le département du Nord à l'encontre de la société Eiffage Route Nord-Est doit être rejeté.
Sur les frais liés au litige :
31. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1604228 du 10 mai 2019 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : La société Eiffage Route Nord-Est est condamnée à verser à M. A... une somme de 43 466,12 euros en indemnisation des préjudices consécutifs à l'accident du 14 mars 2015.
Article 3 : La société Eiffage Route Nord-Est est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai une somme de 10 636,40 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 août 2016. Les intérêts échus à la date du 20 février 2020, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : La société Eiffage Route Nord-Est est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
N°19DA01568 2