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19/11/2020 | FRANCE | N°18DA02185

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 19 novembre 2020, 18DA02185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lardé a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1601433 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2018, l'EURL Lardé, représentée par Me A..., demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentair...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lardé a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1601433 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2018, l'EURL Lardé, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 ;

- le décret n° 96-119 du 14 février 1996 ;

- le décret n° 2005-1435 du 21 novembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lardé, créée le 27 avril 2005, exerce, depuis le 16 mai de la même année, une activité commerciale d'achat-revente de conteneurs sur le territoire de la commune de Maizicourt (Somme). Elle a déclaré, au titre de l'année 2011, un bénéfice net total de 157 144 euros et placé ce bénéfice, à concurrence d'une somme de 115 239 euros, sous le régime d'exonération prévu, en faveur des entreprises exerçant en zone de revitalisation rurale, par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts. Estimant, à la suite d'un contrôle sur pièces, que la commune de Maizicourt n'était pas comprise dans une zone de revitalisation rurale à la date du début de l'activité de l'EURL Lardé, l'administration a réintégré cette somme dans le bénéfice imposable de cette société. Celle-ci relève appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, en résultant, à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

2. Aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2011, applicable à l'imposition en litige : " I. Les entreprises soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. (...) / Le bénéfice du présent article est réservé aux entreprises qui se créent dans les zones et durant les périodes suivantes, à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans l'une de ces zones : / 1° A compter du 1er janvier 1995 et jusqu'au 31 décembre 2010, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A / (...) / Toutefois, les entreprises qui se sont créées à compter du 1er janvier 2004 jusqu'au 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, et à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans ces zones, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, des sixième et septième ou des huitième et neuvième périodes de douze mois suivant cette période d'exonération. / (...) ".

3. D'une part, il résulte de la lettre même des dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts que le bénéfice de l'exonération et de l'abattement d'impôt sur les sociétés qu'elles instituent au profit des entreprises créées à compter du 1er janvier 2004 et jusqu'au 31 décembre 2010 dans les zones de revitalisation rurale est subordonné à la condition que le territoire de la commune où est fixé leur siège et le lieu d'exercice de leur activité soit situé dans le périmètre d'une telle zone à la date de leur création.

4. D'autre part, les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts renvoient, pour la détermination des zones de revitalisation rurales, à l'article 1465 A du code général des impôts. Ce dernier article, dont le paragraphe I institue un régime d'exonération de taxe professionnelle, puis, à compter de l'année 2010, de cotisation foncière des entreprises, en faveur, sous certaines conditions, des entreprises créées dans les zones de revitalisation rurale, donne en son paragraphe II une définition de ces zones mettant en oeuvre des critères relatifs, d'une part, à la densité de la population et, d'autre part, au déclin de la population active ou à la proportion d'emplois agricoles. Les dispositions du paragraphe III de l'article 1465 A du code général des impôts renvoient à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les conditions d'application du II et, en particulier, les critères et seuils visant à déterminer le périmètre des zones de revitalisation rurale.

5. Pour remettre en cause l'abattement de bénéfice net imposable à l'impôt sur les sociétés dont l'EURL Lardé avait fait application au titre de l'année 2011 sur le fondement des dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts, l'administration s'est fondée sur ce que la commune de Maizicourt, sur le territoire de laquelle cette société exerçait son activité depuis le 16 mai 2005, ne figurait pas sur la liste annexée au décret du 14 février 1996 définissant les zones de revitalisation rurale. L'EURL Lardé soutient, quant à elle, que la commune de Maizicourt était au nombre de celles dont le classement en zones de revitalisation rurale avait été constaté par un arrêté ministériel du 30 décembre 2005, à la suite de la publication, au Journal officiel du 22 novembre 2005, du décret du 21 novembre 2005 pris pour l'application du II de l'article 1465 A du code général des impôts et relatif aux zones de revitalisation rurale, qui a abrogé le décret du 14 février 1996.

6. En premier lieu, les dispositions règlementaires dont l'EURL Lardé se prévaut ont été prises pour l'application des dispositions du paragraphe II de l'article 1465 A du code général des impôts qui, dans leur rédaction issue du 2° du paragraphe I de l'article 2 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, prévoyaient une nouvelle définition des zones de revitalisation rurale, désormais entendues comme comprenant " les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, incluses dans un arrondissement ou un canton caractérisé par une très faible densité de population ou par une faible densité de population et satisfaisant à l'un des trois critères socio-économiques suivants : / a. un déclin de la population ; / b. un déclin de la population active ; / c. une forte proportion d'emplois agricoles ". Contrairement à ce que soutient l'EURL Lardé, ces dispositions, qui ne comportaient pas de précisions suffisantes sur les critères et seuils rendant possible leur mise en oeuvre, n'ont pu, en application de l'article 1er du code civil, entrer en vigueur avant celles du décret du 21 novembre 2005.

7. Par ailleurs, aucune disposition de la loi du 23 février 2005 ne prévoit une entrée en vigueur rétroactive des modifications apportées par le 2° du paragraphe I de l'article 2 de cette même loi aux dispositions du II l'article 1465 A du code général des impôts définissant les zones de revitalisation rurales ou des mesures réglementaires nécessaires à leur application. En particulier, les dispositions du 2 du paragraphe IV de l'article 2 de la loi du 23 février 2005, aux termes desquelles, pour bénéficier dès l'année 2005 de l'exonération de taxe professionnelle prévue au paragraphe I de l'article 1465 A du code général des impôts, certaines entreprises " doivent en faire la demande dans un délai de soixante jours suivant la publication de la présente loi ", sont relatives, non aux modalités d'application de la nouvelle définition des zones de revitalisation rurale issue, comme il a été dit, des dispositions du 2° du paragraphe I de l'article 2 de la loi du 23 février 2005, mais aux conditions de mise en oeuvre de l'extension de l'exonération de taxe professionnelle au bénéfice des entreprises procédant dans ces zones, à compter du 1er janvier 2004, à des créations d'activités commerciales ou à des reprises d'activités commerciales ou artisanales, prévue par les dispositions du 1° du paragraphe I de ce même article. Ces dernières dispositions, dissociables de la redéfinition des zones de revitalisation rurales, étaient par ailleurs applicables, avant même l'entrée en vigueur du décret du 21 novembre 2005, dans les zones dont le périmètre avait été défini par le décret susmentionné du 14 février 1996. Ainsi, l'EURL Lardé ne saurait utilement s'en prévaloir pour soutenir que les dispositions de la loi du 23 février 2005 modifiant la définition des zones de revitalisation rurale devaient nécessairement s'appliquer aux opérations de création d'entreprise réalisées dès le début de l'année 2005, que ce soit pour la mise en oeuvre du bénéfice de l'exonération de taxe professionnelle ou pour celle du bénéfice de l'exonération, puis de l'abattement d'impôt sur les sociétés qui est en cause dans le présent litige.

8. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que les dispositions du paragraphe II de l'article 1465 A du code général des impôts qui, dans leur rédaction issue du 2 du paragraphe I de l'article 2 de la loi du 23 février 2005, redéfinissent les zones de revitalisation rurale, n'ont pu entrer en vigueur avant le lendemain de la publication au Journal officiel, le 22 novembre 2005, du décret susmentionné du 21 novembre 2005. La date de cette entrée en vigueur est, par suite, postérieure à celle du début d'activité, le 16 mai 2005, de la société requérante sur le territoire de la commune de Maizicourt. En conséquence, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le bénéfice de l'abattement des bases d'impôt sur les sociétés prévu par les dispositions du paragraphe II de l'article 44 sexies du code général des impôts, auquel l'EURL Lardé avait cru pouvoir prétendre, au motif que cette commune ne figurait pas sur la liste, alors en vigueur, annexée au décret du 14 février 1996, des communes situées dans une zone de revitalisation rurale.

9. En second lieu, l'EURL Lardé ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques à l'encontre d'une imposition établie, ainsi qu'il vient d'être dit, conformément à la loi.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL Lardé n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'imposition en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL Lardé est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Lardé et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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No 18DA02185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA02185
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-01-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Personnes et activités imposables. Exonération de certaines entreprises nouvelles (art. 44 bis et suivants du CGI).


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : KPMG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-11-19;18da02185 ?
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