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22/10/2020 | FRANCE | N°19DA02309

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 22 octobre 2020, 19DA02309


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 juillet 2019 par lequel la préfète de la Somme a refusé de renouveler son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, ainsi que d'enjoindre à la préfète de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ou " vie privée et fami

liale ".

Par un jugement n°1902617 du 11 septembre 2019, le tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 juillet 2019 par lequel la préfète de la Somme a refusé de renouveler son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, ainsi que d'enjoindre à la préfète de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ou " vie privée et familiale ".

Par un jugement n°1902617 du 11 septembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 17 juillet 2019 et a enjoint à la préfète de la Somme de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2019, la préfète de la Somme demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter les demandes de M. B... devant le tribunal administratif d'Amiens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré en France le 20 février 2013, selon ses déclarations. Il a bénéficié de l'aide sociale à l'enfance à compter du 13 juin 2013, jusqu'au 30 juin 2015. Il a sollicité l'asile, le 26 février 2016, qui lui a été définitivement refusé par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 mai 2019. La préfète de la Somme a alors refusé de renouveler son attestation de demande d'asile par un arrêté du 17 juillet 2019, portant également obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination. Par un jugement du 11 septembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cet arrêté et a enjoint à la préfète de la Somme de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation. La préfète de la Somme relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact.

3. Il ressort, en l'espèce, des pièces du dossier que M. B... a présenté, pour être admis à l'aide sociale à l'enfance par jugement du 13 juin 2013, une fiche d'état-civil établie par un officier d'état-civil de la République démocratique du Congo attestant de sa naissance le 11 octobre 2000. Toutefois, l'ordonnance du juge des tutelles des mineurs du tribunal de grande instance d'Amiens du 9 janvier 2015 a constaté qu'une expertise osseuse avait indiqué que l'âge de M. B... n'était pas compatible avec celui mentionné dans la fiche d'état civil et se situait entre 17 et 18 ans. Cette ordonnance a en conséquence mis fin, à compter du 30 juin 2015, à la précédente mesure confiant la tutelle au département et elle n'a pas été contestée par M. B.... Néanmoins, aucune des pièces produites n'établit de manière précise la date de naissance de l'intéressé, ni en conséquence la date de sa majorité, l'authenticité des documents d'état-civil produits n'étant remise en cause que par les résultats de l'expertise osseuse. Il résulte ainsi de ces éléments que l'intéressé est, en tout état de cause, entré en France alors qu'il était encore mineur, même en prenant en compte l'expertise osseuse et qu'il a ensuite sollicité l'asile dès le 26 février 2016. M. B... ne s'est donc maintenu en situation irrégulière sur le territoire français que depuis la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 mai 2019, notification dont la date n'est, au demeurant, pas établie. Or, durant l'ensemble de cette période, l'intéressé a fait de sérieux efforts d'intégration en suivant une scolarité qui lui a permis d'obtenir le brevet, dès juillet 2015, puis le baccalauréat général en juin 2018, et de s'inscrire, pour 2018-2019, en première année universitaire de langues et cultures étrangères. En outre, aucune pièce du dossier n'établit qu'il ait conservé des liens intenses avec son pays d'origine. Par suite, compte tenu de l'ensemble de ces éléments et de la durée de séjour en France de plus de six ans de M. B..., la préfète de la Somme, qui n'apporte aucun élément nouveau en cause d'appel, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, au motif qu'elle portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaissait ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. C'est également à bon droit que ce jugement a annulé, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la préfète de la Somme doit être rejetée.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 000 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la préfète de la Somme est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la SCP Caron-Daquo-Amouel-Pereira, conseil de M. B... au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A... C... B... et à la SCP Caron-Daquo-Amouel-Pereira.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Somme.

N° 19DA02309 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02309
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-22;19da02309 ?
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