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08/10/2020 | FRANCE | N°20DA00244

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 20DA00244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Il demandait également qu'il soit enjoint sous astreinte à ladite autorité administrative de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de

réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1902669 du 17 septembre 2019, le m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Il demandait également qu'il soit enjoint sous astreinte à ladite autorité administrative de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1902669 du 17 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen l'a admis à titre provisoire à l'aide juridictionnelle, a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté du 22 juillet 2019 et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 février 2020 et le 5 juin 2020, M. B..., représenté par Me D... F..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions d'annulation des décisions du 22 juillet 2019 par lesquelles le préfet de l'Eure l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions du 22 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller ;

- et les observations de Me C... substiuant Me F... pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant burkinabé, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an par arrêté du préfet de l'Eure du 22 juillet 2019. Le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen, par un jugement du 17 septembre 2019, a admis M. B... à l'aide juridictionnelle provisoire, a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français ainsi que l'information sur son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour. M. B... relève appel de ce jugement du 17 septembre 2019 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ainsi que celles visant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Eure de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation.

2. Aux termes, d'une part de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 1° L'étranger mineur de dix-huit ans ; ... ". L'article 47 du code civil dispose d'autre part que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

3. En l'espèce M. B... soutient qu'il est né le 31 décembre 2002 à Ouagadougou au Burkina-Faso et est donc mineur, alors que le préfet fait valoir qu'il est né le 25 mai 1993 à Abodo en Côte d'Ivoire. Pour établir sa minorité, l'intéressé, produit, pour la première fois en appel, un passeport burkinabé comportant une photographie, délivré le 5 novembre 2019, soit postérieurement à la décision contestée, par le directeur de la sûreté de l'Etat à Ouagadougou. Il avait produit en première instance, une copie intégrale d'acte de naissance faisant état de la même date de naissance et délivrée à Ouagadougou le 9 août 2018 sur la base d'un jugement supplétif du 7 août 2018, ainsi qu'une carte consulaire et un certificat de nationalité burkinabè, établi sur la base de l'acte de naissance précité. Toutefois, il ressort du fichier Visabio que les empreintes de l'intéressé ont été identifiées comme celles de M. A... B..., né le 25 mai 1993 à Adobo en Côte d'Ivoire, titulaire d'un passeport ivoirien délivré le 13 mars 2016. Il ressort également de l'audition de l'intéressé par les services de la police aux frontières que celui-ci a reconnu que les documents burkinabés ont été obtenus par sa mère à Ouagadougou, alors qu'il était déjà entré dans l'espace Schengen et que des documents de voyage ont été établi pour lui, en Côte d'Ivoire, où il aurait séjourné en 2016, au nom de M. A... B.... Il ressort par ailleurs de l'analyse technique à laquelle a procédé l'analyste en fraude documentaire de la police aux frontières de Rouen que l'extrait d'acte de naissance burkinabé produit par M. B... serait une contrefaçon. Contrairement à ce que soutient l'appelant, cette analyse ne s'est pas bornée à relever l'absence de mention de la légalisation du jugement supplétif mais a relevé des incohérences dans le document ainsi que des anomalies quant à l'apposition du timbre humide. Enfin, le préfet a produit le laissez-passer consulaire délivré par les autorités consulaires ivoiriennes à l'intéressé, le 1er août 2019, soit postérieurement à la décision mais attestant d'une situation antérieure. L'appelant soutient que ce laissez-passer a été obtenu sur la base des éléments qu'il reconnait avoir lui-même fournis pour obtenir un passeport ivoirien, document dont rien n'établit l'absence de force probante. Compte tenu de ces éléments, la production par M. B... d'un passeport burkinabè ne démontre pas sa minorité alors que le préfet de l'Eure avait remis en cause par des éléments probants, les documents ayant permis d'obtenir ce passeport. De même, la circonstance qu'il ait été placé à l'aide sociale à l'enfance par ordonnance du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Rouen du 31 octobre 2019 et que son placement ait été maintenu par le juge des enfants E..., le 19 février 2019, comme les attestations produites par les professionnels de l'aide sociale à l'enfance, ne permettent pas d'établir la minorité de l'appelant. De même, si l'appelant soutient que le tribunal correctionnel s'est déclaré incompétent du fait de la minorité de l'intéressé pour se prononcer sur les faits de détention et usage de faux document et obtention de prestation indue, il ne produit pas le jugement dont il se prévaut et, à le supposer avéré, ce jugement pénal n'est pas de nature à démontrer la minorité de l'intéressé, qui ne peut résulter, ainsi qu'il a été rappelé au point 2, que d'actes d'état-civil authentiques du pays d'origine de l'intéressé. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait qu'aurait commise le préfet de l'Eure en écartant sa minorité, et de la violation des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ne peuvent qu'être écartés. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, base légale des décisions de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et de fixation du pays de destination, soulevé à l'encontre de ces deux décisions, ne peut qu'être écarté.

5. Il résulte de tout ce qui précède que, B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejeté, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me D... F....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.

N°20DA00244 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00244
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : QUEVREMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;20da00244 ?
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