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08/10/2020 | FRANCE | N°18DA01716

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 18DA01716


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours sur son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 21 octobre 2015 lui réclamant le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant total de 6 635,07 euros, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours administratif préalable exercé contre la décisi

on de rejet de sa demande indemnitaire préalable, d'enjoindre à l'Etat de lui re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours sur son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 21 octobre 2015 lui réclamant le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant total de 6 635,07 euros, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours administratif préalable exercé contre la décision de rejet de sa demande indemnitaire préalable, d'enjoindre à l'Etat de lui restituer les sommes d'ores et déjà prélevées sur sa solde qui s'élèvent à 1 129 euros, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité égale à 6 635,07 euros en réparation de son préjudice financier ou, à tout le moins, de lui accorder une remise gracieuse ou une réduction des sommes réclamées à titre de la régularisation du trop-perçu et, en tout état de cause, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles de toute nature subis dans ses conditions d'existence.

Par un jugement n°1610363 du 5 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite née le 9 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours administratif préalable de Mme C..., a enjoint à la ministre des armées de rembourser à Mme C... la somme de 1 129 euros dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 500 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 août 2018, la ministre des armées demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'établir le montant de la créance détenue à l'égard de Mme C... à la somme de 1 907,57 euros nets.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... B..., présidente-rapporteur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me A... D..., représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... C..., adjudant de l'armée de terre affectée au groupement de soutien de base de défense à Lille depuis le 25 juillet 2014, s'est vu notifier, par courrier du 21 octobre 2015 du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy un trop-perçu de rémunération d'un montant de 6 635,07 euros portant sur la période du 1er octobre 2013 au 31 juillet 2015. Mme C... a contesté cette décision devant le centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy, qui par une décision du 11 janvier 2016, notifiée le 17 mai 2016, a confirmé le montant réclamé. Mme C... a alors saisi le 8 juillet suivant, la commission des recours des militaires d'un recours préalable pour contester ce trop-perçu de rémunération. Une décision implicite de rejet de sa réclamation est née du silence gardé par le ministre de la défense, laquelle s'est substituée à la décision du 11 janvier 2016 du centre expert des ressources humaines et de la solde. Mme C... a, en outre, saisi le 3 juillet 2017 son administration d'une demande indemnitaire préalable en réparation des fautes commises par celle-ci. A la suite de la décision implicite de rejet qui lui a été opposée, elle a contesté ce refus d'indemnisation devant la commission des recours des militaires. Une décision implicite de rejet de sa réclamation est également née du silence gardé par le ministre de la défense. Par un jugement du 5 juin 2018, le tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme C..., a annulé la décision implicite de rejet née le 9 novembre 2016 par laquelle la ministre de la défense a rejeté son recours administratif préalable dirigé contre le trop-perçu de rémunération, a enjoint à l'administration de lui rembourser la somme de 1 129 euros et a condamné l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant de 500 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence en raison de la négligence de l'Etat dans la gestion de son dossier. La ministre des armées doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant seulement que le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite de rejet du 9 novembre 2016 et lui a enjoint de rembourser à Mme C... la somme de 1 129 euros. Mme C..., par la voie de l'appel incident, relève appel du jugement en tant que le tribunal administratif a limité l'indemnisation de ses préjudices à la somme de 500 euros.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Il résulte de l'instruction que le trop-perçu de rémunération réclamé à Mme C... se décline, d'une part, en un trop-versé d'indemnité pour temps d'activités et obligations professionnelles complémentaires , un trop-versé d'indemnité de résidence à l'étranger ainsi que d'indemnité forfaitaire de congés et d'autre part, en un moins versé de cotisations sociales et d'indemnités de charges militaires . La lettre du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy du 11 janvier 2016 contenait un tableau, pour chacune de ces indemnités et pour les cotisations sociales, avec le montant réclamé et la période en litige. Etaient joints, par ailleurs, au courrier des tableaux spécifiques pour chaque indemnité détaillant cette fois, mois par mois, les droits détenus par Mme C... et les sommes effectivement versées. Mme C... a versé elle-même ces pièces à l'appui de sa requête. En cours d'instance devant le tribunal administratif, l'administration a admis la prescription des sommes perçues avant novembre 2013 et a, en conséquence, modifié le montant du trop-perçu pour chaque indemnité et tiré les conséquences du moins versé de cotisations sociales. Nonobstant la lourdeur et la technicité des explications liées aux multiples indemnités en cause, des importants correctifs apportés au montant ainsi réclamé, Mme C... doit néanmoins être regardée comme ayant été mise à même de contrôler la créance que l'administration estime détenir à son égard. Par suite, la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a annulé, pour ce motif, totalement sa décision implicite de rejet du recours préalable de Mme C....

3. Toutefois il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... tant devant le tribunal administratif que devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par Mme C... dirigées contre la décision implicite de rejet du 9 novembre 2016 du ministre de la défense :

En ce qui concerne la motivation de cette décision :

4. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I. - Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10 (...) ". Selon l'article R. 4215-10 de ce code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale (...). / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; ; (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. ". L'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration dispose également : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".

6. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. Les recettes sont liquidées pour leur montant intégral, sans contraction avec les dépenses. / Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ".

7. L'article R. 4125-10 précité du code de la défense prévoit que la décision prise sur recours se substitue à la décision initiale, sans que les termes de cet article ne puissent être lus comme limitant cette substitution aux seuls rejets explicites. Ce recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, a ainsi pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. La décision qui est prise à la suite de ce recours, qu'elle soit expresse ou implicite, se substitue nécessairement à la décision initiale. Par suite, la décision ministérielle intervenue à la suite du recours administratif préalable formé le 8 juillet 2016 par Mme C... contre la décision du 11 janvier 2016 s'est substituée à cette dernière décision. Mme C... ne peut dès lors utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 et de celles de l'article 112 du même décret par les courriers des 21 janvier 2015 et 11 janvier 2016 .

8. Par ailleurs, la décision ministérielle contestée n'entre pas dans le champ des dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012. De plus, étant une décision portant rejet implicite du recours administratif formé par l'intéressée, il appartenait à Mme C... d'en solliciter la communication des motifs comme le prévoit l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, ce qu'elle n'a pas fait. Mme C... ne peut dès lors pas utilement se prévaloir de la méconnaissance ni des dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012, ni de celles de l'article 112 du même décret à l'encontre de la décision de la ministre des armées du 9 novembre 2016.

9. Enfin, Mme C... ne saurait utilement invoquer la prétendue méconnaissance par la décision ministérielle contestée des modalités d'information prévues par une instruction ministérielle n° 101000/DEF/SGA/DRH-MD relative aux droits financiers du personnel militaire et de ses ayants cause, dès lors qu'eu égard à l'objet et la portée de cette instruction, elle ne fixe que des orientations générales.

En qui concerne la prescription biennale :

10. L'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations dans sa rédaction issue de l'article 94 de la loi du 28 décembre 2011 portant loi de finances rectificative pour 2011, dispose que: " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale. Les deux premiers alinéas ne s'appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits prise en application d'une disposition réglementaire ayant fait l'objet d'une annulation contentieuse ou une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font pour cette raison l'objet d'une procédure de recouvrement ".

11. Il résulte de ces dispositions qu'une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Dans les deux hypothèses mentionnées au deuxième alinéa de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, la somme peut être répétée dans le délai de droit commun prévu à l'article 2224 du code civil.

12. L'administration a, pour la première fois, réclamé à Mme C... le paiement de rémunérations et de cotisations sociales indument versées par une lettre du 21 octobre 2015, qui a été notifiée le 4 novembre 2015. La circonstance que la décision du 11 janvier 2016 se soit substituée à celle du 21 octobre 2015 est sans incidence sur la nature interruptive de ce premier courrier du 21 octobre 2015. Dès lors, comme l'admet l'administration, les sommes indûment perçues avant le 1er novembre 2013 sont prescrites. Par suite, Mme C... est seulement fondée à soutenir que la créance est partiellement prescrite en tant qu'elles portent sur des sommes indûment perçues avant le mois de novembre 2013.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance :

S'agissant de l'indemnité pour temps d'activités et obligations professionnelles complémentaires :

13. Il résulte de l'instruction que Mme C... n'avait droit à cette indemnité d'un montant mensuel de 56,67 euros qu'à compter de son affectation effective à Lille au 25 juillet 2014. Si l'administration a initialement réclamé une somme de 113,34 euros pour deux versements effectués à tort en octobre et novembre 2013, Mme C... n'y ayant pas droit puisqu'elle était en poste en Norvège, l'administration admet que seule la somme de 56,67 euros versés en novembre 2013 et non prescrite constitue un trop-perçu. Par suite, la créance est fondée.

S'agissant de l'indemnité de résidence à l'étranger :

14. Il résulte de l'instruction que Mme C... avait droit à cette indemnité jusqu'à la veille de son retour effectif à Lille le 25 juillet 2014, soit sur la période de novembre 2013 au 24 juillet 2014 inclus. Or, il résulte des tableaux produits tant en première instance qu'en appel, que Mme C... a perçu sur cette période un trop-perçu de 1 707,63 euros résultant à la fois d'un versement manuel effectué à tort le 12 février 2015 et du cumul de plusieurs écarts entre ses droits ouverts et les montants effectivement perçus. La différence avec le montant initialement réclamé de 1 810,38 euros résulte de la prescription du versement erroné au mois d'octobre 2013 d'un montant de 102,75 euros. Pour ce mois d'octobre 2013, elle a perçu 3 012,79 euros soit légèrement un peu plus que les droits qui lui ouverts d'un montant de 2 910,04 euros. Par suite, la créance est fondée.

S'agissant de l'indemnité forfaitaire de congés :

15. Il résulte de l'instruction que Mme C... avait droit à cette indemnité pour un montant de 374 euros au titre de l'année 2012 et de 300 euros au titre de l'année 2013 alors qu'elle était en poste en Norvège. Elle a perçu, sous forme d'avance, 380 euros au titre de 2012, le 7 mars 2013 et 300 euros, au titre de 2013, le 11 juin 2014. Elle a, de nouveau perçu, par un virement effectué 12 février 2015 cette indemnité pour un montant de 674 euros dans le cadre d'une régularisation d'un montant total de 1 695,83 euros. L'administration est donc fondée à reprendre uniquement l'avance de 300 euros versée le 11 juin 2014, celle de 380 euros versés en mars 2013 étant prescrite.

S'agissant du moins-versé de cotisations sociales :

16. Il résulte de l'instruction que l'administration avait initialement estimé que Mme C... était redevable d'un montant de 3 965,71 euros correspondant à un trop versé de cotisations sociales, la ventilation des cotisations en question lui ayant été détaillée dans un document intitulé " synthèse de calcul des cotisations sociales ". Cette somme procédait d'une compensation avec un trop-perçu de cotisations sociales versées sur la solde d'avril 2013 d'un montant de 4 183,43 euros et un moins versé de cotisations de 217 euros consécutifs au trop versé de rémunération relatifs aux indemnités précitées. Toutefois, ainsi que l'explique l'administration devant la cour, la somme de 4 183,43 euros versée en avril 2013, étant atteinte par la prescription biennale, elle ne peut plus être recouvrée. Après un nouveau calcul des cotisations sociales afférentes au trop-versé d'indemnités ainsi effectué favorable à Mme C..., celle-ci bénéficie d'un moins versé de cotisations sociales d'un montant de 156,28 euros. Le moins versé dont doit bénéficier Mme C... est fondé.

S'agissant de l'indemnité de charges militaires :

17. Il résulte de l'instruction que Mme C... bénéficie d'un moins versé au titre de cette indemnité, ses droits ouverts étant de 155,53 euros alors qu'elle a perçu mensuellement 155,52 euros. Si le montant du moins versé s'est élevé initialement à 46 centimes, ce montant a été ramené à 45 centimes pour un simple problème d'arrondi.

18. Il résulte des points 13 à 17 que la créance de l'administration à l'égard de Mme C... s'établit à la somme de 1 907,57 euros sur la période du 1er novembre 2013 au 31 juillet 2015.

Sur la remise gracieuse :

19. En l'absence de demande de remise gracieuse adressée par Mme C... à l'administration et de décision liant le contentieux sur ce point, Mme C... n'est pas fondée à soulever une erreur manifeste d'appréciation commise par l'administration quant au refus de remise gracieuse.

Sur les conclusions indemnitaires :

20. Le tribunal administratif de Lille a retenu la responsabilité de l'Etat en raison de la négligence fautive de l'administration, qui a exigé en octobre 2015, soit deux ans après certains versements, le remboursement de diverses sommes prétendument indues. Il ne résulte pas de l'instruction, Mme C... n'apportant aucun élément nouveau en appel, que les premiers juges n'auraient pas fait une juste appréciation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence en l'évaluant à la somme de 500 euros. Si elle soutient avoir subi un préjudice financier, notamment en raison des impôts qu'elle a dû régler sur ces sommes indues, elle ne l'établit pas. Dès lors, ses conclusions indemnitaires présentées par la voie de l'appel incident ne peuvent être que rejetées.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé totalement sa décision implicite de rejet du 9 novembre 2016 et lui a enjoint de rembourser la somme déjà acquittée par Mme C... par le biais de prélèvements directs sur sa solde entre août et décembre 2016. La créance dont elle se prévaut à l'encontre de Mme C... doit être fixée à la somme de 1 907,57 euros. La décision implicite du 9 novembre 2016 doit être annulée en seulement tant qu'elle confirme le trop-perçu de rémunération au-delà de cette somme de 1 907,57 euros.

Sur l'injonction :

22. Eu égard aux motifs du présent arrêt qui arrête le montant de la créance à la somme de 1 907,57 euros, l'injonction prononcée par le tribunal administratif à l'article 3 de son jugement tendant à ce que l'administration rembourse la somme de 1 129 euros déjà prélevés sur les soldes de Mme C... entre le mois d'août 2016 et le mois de décembre 2016 doit être annulée.

Sur les frais liés à l'instance :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie principalement perdante, la somme que demande Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision implicite du 9 novembre 2016 du ministre de la défense est annulée en tant seulement qu'elle fixe un trop perçu de rémunération supérieure à la somme de 1 907,57 euros. Le montant de la créance de l'Etat est fixé à la somme de 1 907,57 euros.

Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lille du 5 juin 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Lille du 5 juin 2018 est annulé.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme C... devant le tribunal administratif, ses conclusions d'appel incident ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à Mme E... C....

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01716
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Armées et défense - Personnels militaires et civils de la défense - Questions communes à l'ensemble des personnels militaires - Soldes et avantages divers.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;18da01716 ?
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