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01/10/2020 | FRANCE | N°18DA01836

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 octobre 2020, 18DA01836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et Mme C... A..., son épouse, ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur ont été assignées au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur d'un montant total de 38 204 euros.

Par un jugement n° 1602940 du 3 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e et un mémoire, enregistrés les 5 septembre 2018 et 5 avril 2019, M. et Mme A..., représentés par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et Mme C... A..., son épouse, ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur ont été assignées au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur d'un montant total de 38 204 euros.

Par un jugement n° 1602940 du 3 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 septembre 2018 et 5 avril 2019, M. et Mme A..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur ont été assignées au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur d'un montant total de 38 204 euros ;

3°) d'ordonner le remboursement des sommes recouvrées, majoré de l'intérêt de retard liquidé au taux mensuel de 0,4 % jusqu'au 1er janvier 2018 et de 0,2 % pour la période postérieure ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- l'arrêté du 9 mai 1995 pris en application de l'article R. 353-16 et de l'article R. 331-10 du code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Binand, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) Pieracor, dont M. B... A... et, son épouse, Mme C... A..., sont les deux associés à parts égales, a acquis, dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement, un bien immobilier constitué d'un appartement de type T2 et de deux emplacements de stationnement, dans le quartier Saint-Aygulf de la commune de Fréjus (Var), et l'a mis en location après son achèvement en septembre 2001. A l'issue du contrôle des déclarations de revenus déposées par la société au titre des années 2009, 2010 et 2011, l'administration a remis en cause l'application de l'avantage fiscal, dit " Loi Besson ", prévu au g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, qui avait été pratiqué, au motif que le loyer pratiqué excédait le montant maximal auquel le bénéfice de cet avantage était conditionné. Elle a, en conséquence, rehaussé les revenus nets fonciers de la SCI et les a imposés entre les mains de M. et Mme A.... Par un jugement du 3 juillet 2018 dont M. et Mme A... relèvent appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui en ont résulté, au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à hauteur d'un montant total de 38 204 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. Dans leurs écritures de première instance, M. et Mme A... soutenaient que l'administration, après avoir mis en recouvrement les suppléments d'imposition mis à leur charge, ne pouvait légalement justifier les impositions en litige par la prise en compte d'une nouvelle valeur de la surface habitable de leur appartement et de ses annexes, substituée à celle dont elle s'était initialement prévalue à tort. Or, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner si le jugement attaqué serait insuffisamment motivé à un autre titre comme ils le soutiennent, les requérants sont fondés à soutenir que le jugement du 3 juillet 2018 du tribunal administratif de Lille est entaché d'une irrégularité et à en demander, en conséquence, l'annulation.

3. Il a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. et Mme A....

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". L'article R. 57-1 du même livre dispose que " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...)°". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, les motifs, sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile.

5. La proposition de rectification du 3 septembre 2012 notifiée à M. et Mme A... comporte, notamment, la désignation de l'impôt et des années redressées, l'indication du motif du redressement, tiré, ainsi qu'il a été dit précédemment, du non-respect de la condition de loyer maximal à laquelle l'avantage fiscal prévu au g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est subordonné, ainsi que l'exposé des conséquences financières emportées sur les revenus fonciers imposables des contribuables. L'administration a indiqué, en outre, de manière détaillée les éléments des calculs qu'elle a mis en oeuvre, reposant à la fois sur la surface habitable figurant dans les baux successifs, et sur la surface communiquée au service du cadastre par la société après la réception du bien, le ratio, établi sur ces mêmes bases, des loyers pratiqués rapportés au m2, ainsi que le loyer maximal autorisé pour bénéficier de ce dispositif fiscal au titre de chacune des années contrôlées. Dans ces conditions, et alors même qu'il n'y était pas fait état des considérations de droit ayant conduit l'administration à assoir son analyse sur la surface du logement arrondie au m2 inférieur, déclarée au service du cadastre, M. et Mme A... étaient, à la lecture de la proposition de rectification, à même de discuter utilement des motifs de ces rehaussements. Dès lors, cette proposition de rectification satisfait aux obligations posées par les dispositions du livre des procédures fiscales citées au point précédent.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : (...) / g) Pour les logements situés en France, acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement entre le 1er janvier 1999 et le 2 avril 2003, et à la demande du contribuable, une déduction au titre de l'amortissement égale à 8 % du prix d'acquisition du logement pour les cinq premières années et à 2,5 % de ce prix pour les quatre années suivantes. La période d'amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. (...) / Le bénéfice de la déduction est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l'engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d'habitation principale à une personne autre qu'un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cet engagement prévoit, en outre, que le loyer et les ressources du locataire appréciées à la date de conclusion du bail ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret. (...) ". Aux termes de l'article 2 terdecies de l'annexe III à ce code, dans sa rédaction applicable : " Pour l'application du troisième alinéa du g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les plafonds de loyer et de ressources du locataire sont les suivants : / (...) La surface à prendre en compte pour l'appréciation du plafond de loyer est la même que celle prévue pour l'application de l'article 2 duodecies ; (...) ". Aux termes de l'article 2 duodecies de l'annexe III audit code : " La surface à prendre en compte pour l'appréciation du plafond de loyer s'entend de la surface habitable au sens de l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation, augmentée de la moitié, dans la limite de 8 mètres carrés par logement, de la surface des annexes mentionnées aux articles R. 353-16 et R. 331-10 du même code ". L'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation dispose : " (...) La surface habitable d'un logement est la surface de plancher construite, après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d'escaliers, gaines, embrasures de portes et de fenêtres ; (...) / Il n'est pas tenu compte de la superficie des combles non aménagés, caves, sous-sols, remises, garages, terrasses, loggias, balcons, séchoirs extérieurs au logement, vérandas, volumes vitrés prévus à l'article R. 111-10, locaux communs et autres dépendances des logements, ni des parties de locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 mètre. " . L'article R. 331-10 du code de la construction et de l'habitation prévoit : " (...) La surface utile à prendre en compte est égale à la surface habitable du logement telle que définie à l'article R. 111-2 du présent code augmentée de la moitié de la surface des annexes dans les conditions fixées par arrêté du ministre du logement. (...) ". Enfin, l'article 1er de l'arrêté du 9 mai 1995 pris en application de cet article dispose : " Pour la définition de la surface utile visée à l'article R. 331-10 et au 2° de l'article R. 353-16 du code de la construction et de l'habitation, les surfaces annexes sont les surfaces réservées à l'usage exclusif de l'occupant du logement et dont la hauteur sous plafond est au moins égale à 1,80 mètre. Elles comprennent les caves, les sous-sols, les remises, les ateliers, les séchoirs extérieurs au logement, les celliers, les resserres, les combles et greniers aménageables, les balcons, les loggias et les vérandas (...) ".

7. Il ressort des motifs de la proposition de rectification du 3 septembre 2012 adressée à M. et Mme A... que, pour retenir que la condition de loyer prévue par les dispositions citées au point précédent, n'était pas respectée en 2009, l'administration a pris en considération la surface habitable du logement détenu par la SCI Pieracor, sans la majorer de la moitié de la surface de la loggia et du balcon, dont il n'est pas contesté qu'ils constituent des annexes au sens et pour l'application de ces mêmes dispositions. En réponse aux observations des contribuables, l'administration a fixé à 54 m2 la surface à prendre en compte, par addition, d'une part, de la surface du logement déclarée au service du cadastre arrondie au m2 inférieur, soit 49 m2, d'autre part, de la moitié de la surface de ces deux annexes, estimée, à partir des plans fournis par les contribuables, à 9,56 m2, qu'elle a arrondie au m2 supérieur, soit 5 m2, ces éléments la conduisant à constater que le loyer de 11,16 euros au m2 pratiqué en 2009 excédait le plafond dont le montant, non contesté, s'élevait à 10 euros au m2 au titre de cette même année. Enfin, par sa décision du 16 février 2016 portant rejet de la réclamation des contribuables, si l'administration a repris la surface de 54 m2, en justifiant explicitement l'arrondi au m2 inférieur par l'application de l'article 324 M de l'annexe III au code général des impôts, elle a fait valoir, également, en se fondant sur l'article 2 duodecies de l'annexe III audit code, sur l'article 2 terdecies de cette même annexe ainsi que sur les dispositions du code de la construction et de l'habitation citées au point 6, que le loyer mensuel de 603 euros hors charges pratiqué en 2009 correspondait, en prenant en compte la surface de 54,31 m2 tirée de la teneur du dernier bail et des plans produits qui faisaient apparaître une surface de 49,53 m2 pour le logement et de 9,56 m2 pour les deux annexes, à un ratio de 11,10 euros au m2, ce ratio étant supérieur au plafond autorisé de 10 euros au m2. Dans ses écritures en défense, l'administration a repris les termes de cette dernière évaluation des surfaces, dont elle a porté le cumul à 54,32 m2.

8. L'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de faire valoir tout moyen nouveau de nature à justifier les impositions en litige ainsi, aux mêmes fins, que de demander qu'une nouvelle base légale, substituée à celle qu'elle avait primitivement retenue, soit donnée à ces impositions, pourvu que cette substitution ne prive le contribuable d'aucune des garanties qui lui sont conférées par la loi. La circonstance que les modalités de détermination des bases sur lesquelles elle entend, pour de nouveaux motifs, justifier les impositions contestées n'a pas été notifiée au contribuable avant la fin des opérations de contrôle ni même avant la mise en recouvrement des impositions, ne prive pas, par elle-même, le contribuable d'une garantie dès lors qu'il lui est loisible de les contester, dans le cadre de la procédure contradictoire devant le juge de l'impôt, qui présente à cet égard des garanties équivalentes à celles issues de la procédure de rectification contradictoire.

9. Il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté par les requérants, qui n'apportent aucune explication quant aux discordances dans la surface du logement mentionnée dans les baux successifs, que, au sens et pour l'application des dispositions citées au point 6, la surface habitable du logement considéré est de 49,53 m2 et que les surfaces de la loggia et du balcon, à prendre en compte pour moitié, sont respectivement de 8,39 m2 et de 1,17 m2. Dès lors, compte tenu de la surface de 54,31 m2 à prendre en considération en vertu des dispositions précitées, sans faire application de l'article 324 M de l'annexe III au code général des impôts relatif à la détermination de la surface pondérée auquel ces dispositions ne renvoient pas, c'est à bon droit que l'administration a estimé, pour rejeter la réclamation dont elle était saisie, que le loyer mensuel de 603 euros hors charges, pratiqué au titre du bail en cours en 2009, excédait le plafond de 10 euros au m2, au respect duquel est subordonné le bénéfice de l'avantage fiscal prévu par les dispositions du g du 1 du 1° de l'article 31 du code général des impôts. La circonstance que l'administration a indiqué, au cours de l'instance, par l'effet d'une erreur d'addition, que la surface à prendre en considération serait de 54,32 m2, ce qui conduit, au demeurant, au même constat, est sans incidence sur la réalité de ce dépassement.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A..., ne sont pas fondés à demander à être déchargés du redressement d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qui leur a été assigné au titre de l'année 2009. Par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme qu'ils demandent sur leur fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 juillet 2018 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande de M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Lille et le surplus des conclusions de leur requête devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et Corinne A... et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA01836


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01836
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CABINET BREUVART SIMON

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-01;18da01836 ?
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