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01/10/2020 | FRANCE | N°18DA00748

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 octobre 2020, 18DA00748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Petroval a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1503952 du 15 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la SA Petroval tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt su

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Petroval a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1503952 du 15 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la SA Petroval tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014, dont le dégrèvement avait été prononcé par l'administration en cours d'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 avril 2018, le 24 octobre 2018 et le 15 novembre 2018, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SA Petroval, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012 ;

2°) de prononcer la décharge de la contribution en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme (SA) Petroval, dont le siège est situé à Saint-Romain-de-Colbosc (Seine-Maritime), exerce une activité d'ingénierie dans le secteur de l'industrie du raffinage et de la pétrochimie. Elle a spontanément acquitté, au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés alors prévue à l'article 235 ter ZCA du code général des impôts. Elle a cependant présenté, le 14 septembre 2015, une réclamation tendant à la décharge de cette contribution. L'administration, par une décision du 26 octobre 2015, a rejeté cette réclamation comme tardive en tant qu'elle concernait l'exercice clos en 2012 et comme non fondée en tant qu'elle concernait les exercices clos en 2013 et en 2014. La SA Petroval a alors porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, en lui demandant de prononcer la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014. En cours d'instance, l'administration fiscale a décidé d'accorder à la SA Petroval le dégrèvement de la taxe qu'elle avait acquittée au titre des exercices clos en 2013 et 2014. Elle n'a cependant pas fait de même s'agissant de la taxe acquittée au titre de l'exercice clos en 2012, estimant que la réclamation qui lui avait été présentée était sur ce point tardive et, par suite, irrecevable. Par un jugement du 15 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la SA Petroval tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014, et a rejeté le surplus des conclusions de cette demande. La SA Petroval, qui relève appel de ce jugement, doit ainsi être regardée comme demandant son annulation en tant que, par son article 2, ledit jugement rejette ses conclusions tendant à la décharge de la contribution additionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012.

Sur la recevabilité de la réclamation préalable :

2. Aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / (...) / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / (...) ".

3. Pour rejeter, par le jugement attaqué, les conclusions de la demande de la SA Petroval tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012, le tribunal administratif de Rouen a accueilli la fin de non-recevoir opposée par l'administration en défense et a jugé que la réclamation que la SA Petroval avait présentée à cette fin le 11 septembre 2015 avait été introduite après l'expiration du délai de réclamation fixé par les dispositions précitées de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, applicables dans le cas d'un impôt qui, n'ayant pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement, a été acquitté spontanément par le contribuable. Les premiers juges ont, en effet, estimé que le point de départ du délai de réclamation devait, conformément à ces dispositions, être fixé à la date de versement de l'impôt contesté, laquelle date correspondait à celle de la remise à l'administration du chèque correspondant, qui était daté du 12 décembre 2012. Les premiers juges ont retenu que cette date de remise était nécessairement antérieure au 31 décembre 2012, sans qu'ait d'incidence le fait que ce chèque n'avait été débité sur le compte bancaire de la SA Petroval que le 3 janvier 2013.

4. Lorsque l'administration oppose au contribuable une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant la juridiction administrative, notamment en raison d'une présentation tardive par le contribuable de sa réclamation préalable, il lui incombe d'établir cette tardiveté en produisant devant le juge de l'impôt tous les éléments de nature à lui permettre d'en justifier. En l'espèce, l'administration a fait valoir devant les premiers juges que le chèque au moyen duquel la SA Petroval avait payé la contribution en litige était daté du 12 décembre 2012, que cette société avait souscrit à la même date une déclaration afférente à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2012 et que ledit chèque était vraisemblablement joint à cette déclaration. L'administration ajoutait que la date limite de paiement de cette contribution était fixée au 15 décembre 2012, que la SA Petroval avait, jusqu'alors, toujours payé en temps utile les impositions mises à sa charge, que le fait que la contribution contestée n'ait pas été assortie de la majoration de 5 % prévue par l'article 1731 du code général des impôts, en cas de paiement tardif et de dépôt d'une déclaration non accompagnée du paiement intégral des droits correspondants, confirmait que le paiement de la contribution additionnelle en cause était intervenu avant le 15 décembre 2012 et que la SA Petroval n'apportait pas la preuve de la remise de son chèque après le 31 décembre 2012. Les éléments ainsi invoqués devant les premiers juges par l'administration, qui, ainsi qu'il a été dit, supporte la charge de la preuve de la tardiveté de la réclamation de la SA Petroval, reposent ainsi sur un faisceau d'indices permettant, tout au plus, de regarder comme vraisemblable le paiement par la SA Petroval de la contribution contestée avant le 15 décembre 2012. Ces éléments, repris en appel par le ministre, ne suffisent cependant pas à donner date certaine à ce paiement, dans une situation dans laquelle la SA Petroval fait d'ailleurs observer que son chèque n'a été débité sur son compte bancaire que le 3 janvier 2013, qui n'est au demeurant qu'une date de valeur, soit dix-neuf jours après cette date. Dans ces conditions, faute de pouvoir déterminer avec exactitude la date à laquelle l'imposition en cause a été payée, et, par suite, la date à compter de laquelle le délai de réclamation ouvert à la SA Petroval a pu commencer à courir, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la réclamation qu'elle avait introduite le 11 septembre 2015 était tardive, en ce qu'elle tendait à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de la SA Petroval tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012.

Sur le bien-fondé de la contribution en litige :

6. Aux termes de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 : " I.- Les sociétés ou organismes français ou étrangers passibles de l'impôt sur les sociétés en France, à l'exclusion de ceux mentionnés au I de l'article L. 214-1 du code monétaire et financier ainsi que de ceux qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie), sont assujettis à une contribution additionnelle à cet impôt au titre des montants qu'ils distribuent au sens des articles 109 à 117 du présent code. / La contribution est égale à 3 % des montants distribués. (...) / III.- La contribution est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. / Elle est payée spontanément lors du premier versement d'acompte d'impôt sur les sociétés suivant le mois de la mise en paiement de la distribution. / Pour l'application du deuxième alinéa du présent III, les sommes réputées distribuées au titre d'un exercice au sens des articles 109 à 117 sont considérées comme mises en paiement à la clôture de cet exercice. ".

7. Par une décision nº 2017-660 QPC du 6 octobre 2017, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions du premier alinéa du paragraphe I de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015. Eu égard à l'autorité qui s'attache à cette décision en vertu de l'article 62 de la Constitution, la déclaration d'inconstitutionnalité qu'elle prononce doit être regardée comme s'appliquant également aux dispositions identiques, dans leur substance et dans leur rédaction, qui figuraient dans les versions antérieures successives du premier alinéa du paragraphe I de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, depuis sa création par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012. Il résulte de l'article 2 du dispositif de cette décision, par renvoi au paragraphe 11 de ses motifs qui en constituent le soutien nécessaire, que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de sa publication et qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

8. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, la SA Petroval peut utilement se prévaloir de la déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par le Conseil constitutionnel par sa décision nº 2017-660 QPC du 6 octobre 2017 pour demander la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012, dont elle avait contesté le bien-fondé par une réclamation dont, comme il a été dit au point 4, l'administration n'a pas établi l'irrecevabilité et qui, dès lors, doit être regardée comme ayant été valablement introduite. Cette contribution ayant été établie sur le fondement des dispositions, citées au point 6, qui doivent, pour les motifs exposés au point précédent, être regardées comme contraires à la Constitution, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la SA Petroval à fin de décharge de la contribution mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2012.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le SA Petroval est fondée à demander la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros au titre des frais de procédure exposés par la SA Petroval et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1503952 du 15 février 2018 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La SA Petroval est déchargée de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012.

Article 3 : L'Etat versera à la SA Petroval la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Petroval et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA00748


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00748
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Réclamations au directeur - Délai.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL FEAT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-01;18da00748 ?
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